Menu
Dossiers

Introduction à la série

Les épisodes de la saison 1

Les épisodes de la saison 2

Les épisodes de la saison 3

Les Episodes de la saison 4

A signaler d'emblée que tous ces textes devraient être garantis sans importants spoilers.

  • 4.01- The Brothers
  • Réalisation : Anton Leader
  • Scénario : Dick Nelson
  • Guests stars : Andrew Prine & Robert Lansing
  • Première diffusion 15/09/1965 aux USA - Jamais diffusé en France
  • DVD : VOSTF
  • Note : 6.5/10

Le Pitch : Matt Denning (Robert Lansing), rancher à Medicine Bow et meilleur ami de Ryker, est venu la veille de son exécution libérer son frère d’une prison militaire, étant persuadé de son innocence concernant le meurtre dont il est accusé. Il décide de fuir vers le Canada en compagnie de son frère, en emmenant avec lui son épouse et son jeune fils (Kurt Russell). Ryker qui est chargé de le poursuivre, les rattrape en même temps qu’une troupe de soldats commandée par le Sergent Cohane qui tient absolument à se venger en tuant Matt. En effet sans le vouloir, ce dernier a frappé un peu fort le gardien de prison qui a succombé à ses blessures...

Mon avis : Après une saison 3 très inégale, dans l’ensemble plutôt décousue, qualitativement en deçà des deux premières et qui se terminait par plusieurs fictions très moyennes - dont un dernier épisode qui allait se révéler être par la même occasion le pilote d’une autre série (Laredo) -, la saison 4 semble vouloir redémarrer sur des bases plus sérieuses et plus stables même si au final, après un démarrage remarquable, un petit goût de déception viendra de nouveau un peu nous gâcher les débuts plus que prometteurs de ce récit. Avant tout il faut signaler que le générique est une fois de plus un peu modifié en raison des départs et des arrivées de certains comédiens. Ici, à la place de Roberta Shore nous remarquons une certaine Diane Roter. A la fin de l’épisode, une question reste en suspens puisque nous n’aurons pas eu l’occasion de faire sa connaissance : est-ce une actrice qui a remplacé Roberta dans le rôle de Betsy - puisque nous la trouvons également, comme c’était déjà le cas dans le générique précédent, en joyeuse compagnie de Randy - ou s’agit-il d’un nouveau personnage ? Une rapide recherche dans IMDB et nous voilà fixés : Betsy semble ne plus en avoir pour longtemps au sein de la série - mon petit doigt me dit qu’elle va convoler en justes noces et quitter Shiloh - alors que cette nouvelle arrivante qu'est Jennifer Summers nous accompagnera durant quelques épisodes et uniquement au cours de cette saison. Nous vous en dirons plus dès que nous l’aurons véritablement croisée, soit pas avant le 7ème épisode. Autre particularité de ce nouveau générique, plus qu’une seule image par personnage soit un montage beaucoup moins cut que précédemment, toujours sur l'excellente musique de Percy Faith.

Étonnement, alors que l’on pouvait croire qu’à chaque nouvelle saison les auteurs feraient apparaitre le plus grand nombre des personnages récurrents de la série, seul Ryker sera de la partie pour ouvrir cette 4ème saison, Trampas et le Virginien devant se contenter de deux courtes apparitions alors que tous les autres sont tout simplement aux abonnés absents. Encore plus curieux, pas une seule fois nous nous rendrons au ranch Shiloh, toute la première moitié du récit se déroulant au sein d’une prison militaire puis en extérieurs avant d'aboutir à Medicine Bow mais sans aucun protagoniste de notre connaissance. Dès le début de l'histoire, une évidente constatation : il n’y aura aucune fantaisie dans cet épisode assez sombre et la qualité de l’interprétation sera son point fort. En effet, que ce soit Andrew Prine ou Robert Lansing, tous deux assez fades dans les deux précédents épisodes dans lesquels ils étaient déjà intervenus au sein de la série, ils s’avèrent ici au contraire immédiatement assez remarquables, surtout le second qui interprète Matt, un sympathique fermier ami de Ryker qui décide d’aller délivrer son frère cadet condamné à mort et qui doit être exécuté le lendemain alors qu’il a toujours clamé son innocence pour le crime qu’on lui a imputé. En voulant assommer le gardien de prison avec qui il avait toujours eu de très bonnes relations, Matt le tue. Il est désormais recherché non seulement par son meilleur ami, qui est en même temps l’adjoint du shérif de la région, mais aussi par les soldats qui veulent venger la mort de leur camarade.

Ayant dans l’idée de se réfugier au Canada, Matt a non seulement entrainé son frère avec lui mais également son épouse aimante et passionnée ainsi que son jeune garçon. Le petit groupe va être rattrapé à la fois par les hommes de loi et les militaires ; comme si la situation n’était déjà pas assez tendue, des Indiens sur le sentier de la guerre vont les prendre en embuscade et les bloquer en un espace restreint où beaucoup vont mourir. Toute cette partie rappelle les nombreux westerns militaires des années 50 dans lesquels une escadrille se retrouve piégée derrière une anfractuosité rocheuse, les Indiens faisant le blocus afin de les décimer par la faim et par diverses attaques. Le réalisateur de télévision Anton Leader, qui débute ici un corpus de 14 épisodes pour la série, se tire très bien de cette situation, n’hésitant pas à filmer des séquences assez brutales qui devaient à l’époque trancher au sein des séries télévisées familiales, et à déployer quelques belles idées de mise en scène comme l’arrivée du dernier Indien qui passe au milieu du groupe sans s’inquiéter et sans sembler voir ceux qui l’entourent. Le tout est rondement mené, bien cadencé et bien découpé mais surtout formidablement interprété par Robert Lansing, Clu Gulager, mais aussi Myron Healey dans la peau du Sergent qui n’a qu’une seule idée en tête : abattre le meurtrier de son camarade tué bêtement lors de l’évasion du prisonnier. Rappelons qu’il s’agissait d’un des acteurs fétiches d’Allan Dwan pour ses superbes productions Bogeaus et qu’il qui joua également dans l'excellent et méconnu Fort Osage de Lesley Selander ou encore dans des classiques tels Man Without a Star de King Vidor.

Un coup de théâtre à mi-parcours va faire bifurquer l’épisode vers encore plus de dramatisme et nous ramener à Medicine Bow pour un procès. Je ne vous en dirai pas plus sauf que cette seconde partie a plus de mal à trouver son rythme, un peu trop bavarde et étirée sans apparente autre nécessité que de boucler les 72 minutes traditionnelles. Nous ne nous serons néanmoins jamais ennuyés et aurons pu assister à une déchirante scène d’amour entre Jan Shepard et Robert Lansing, cependant un poil gâchée par un éclairage peu gratifiant pour la comédienne. Quant au jeune Kurt Russell - oui, le futur acteur fétiche de John Carpenter -, contrairement à son précédent rôle bien plus conséquent dans l’épisode A Father for Toby avec Rory Calhoun qui interprétait son père, il est cette fois bien trop sous-utilisé et c’est bien dommage. Même si un peu plus faible dans sa seconde partie, un démarrage tout à fait honorable pour cette quatrième saison, un joli épisode sur la bienveillance, le pardon, l’amour fraternel et l’amitié.

************************************************************************************************

  • 4.02- Day of the Scorpion
  • Réalisation : Robert Butler
  • Scénario : Don Ingalls
  • Guests Stars : Sean McClory & John Anderson
  • Première diffusion 22/09/1965 aux USA - Jamais diffusé en France
  • DVD : VOSTF
  • Note : 7.5/10

Le Pitch : Les ranchers de Medicine Bow sont inquiets et craignent le déclenchement d’un conflit sanglant ; en effet, l’Australien Adam Tercell vient d’arriver sur les lieux avec ses immenses troupeaux de moutons qui dépérissaient sur leur continent d’origine, victimes de la sécheresse. Les éleveurs auraient souhaité négocier pour lui attribuer une parcelle de terre limitée afin que les ovins ne détruisent pas les Open Ranges mais le nouveau venu ne veut rien savoir, s’estimant dans la légalité en faisant paître ses bêtes n’importe où. La guerre aurait peut-être pu être évitée si le Virginien n’avait pas accidentellement tué le fils d'Adam...

Mon avis : J’écrivais pas plus tard qu'à l’occasion de mon avis sur l’épisode précédent qu’après une saison 3 très inégale, dans l’ensemble plutôt décousue, qualitativement en deçà des deux premières et qui se terminait par plusieurs fictions très moyennes, la saison 4 semblait vouloir redémarrer sur des bases plus sérieuses et plus stables. Cela semble se confirmer avec ce superbe épisode qui évoque une confrontation entre éleveurs d’ovins et de bovins et qui a beaucoup de points communs avec le troisième et magnifique épisode de la série, Throw a Long Rope, réalisé par Ted Post, et qui mettait déjà en scène l’excellent comédien qu’est John Anderson dans le rôle d’un impitoyable cattle baron qui "semblait être en manque d’actions sanglantes depuis la fin des guerres indiennes". Dans Day of the Scorpion, écrit et réalisé par des hommes ayant exclusivement travaillé pour la télévision, il se retrouve à nouveau dans la peau d’un gros propriétaire ; celui-ci vient d'acheter beaucoup de terres autour de Medicine Bow. En Australie, où il possède d’immenses troupeaux de moutons, les conditions climatiques sont devenues tellement extrêmes avec notamment l’arrivée d’une cruelle sécheresse qu’elles ne permettaient plus que les bêtes puissent se nourrir correctement et survivre. Avant d’arriver dans le Wyoming avec ses moutons, il avait envoyé ses deux enfants, son régisseur et quelques-uns de ses hommes pour "préparer le terrain", sachant très bien que les ranchers américains n'apprécient que très modérément les "bêtes à laine".

Son fils (John Locke, déjà au générique de l’épisode avec Robert Redford, The Evil That Men do) est une petite frappe qui va attiser la haine des éleveurs. Il va se battre vigoureusement avec le Virginien lors d’une séquence de combat à poings nus très teigneuse et qui montre d'emblée les honnêtes qualités de réalisateur de Robert Butler. A force de jeter de l'huile sur le feu, le jeune homme va payer le prix fort puisqu’il sera tué accidentellement peu après. C’est ce drame qui va provoquer la colère du patriarche australien qui n’aura de cesse de vouloir faire pendre le criminel, soit l'intendant de Shiloh himself. Voyant que légalement il n’arrivera à rien vu les circonstances de la tragédie, le vieil homme aigri se jettera alors à corps perdu dans cette guerre des terres en espérant laisser pour mort le meurtrier de son fils. On pourrait croire à la lecture de ces lignes que le manichéisme est de la partie, que l'inévitable confrontation va opposer méchants australiens contre gentils américains... Mais il n’en est heureusement rien, l’auteur du scénario est parvenu à écrire une intrigue d’une belle densité et à peindre toute une galerie de personnages avec richesse et nuances, sans caricature, le protagoniste interprété par John Anderson n’étant pas spécialement haïssable malgré son exécrable caractère, son avidité, son égoïsme et son intransigeance (il s’agit du scorpion - synonyme de méchanceté - du titre de l’épisode). Il faut souligner aussi la présence d’un personnage féminin assez passionnant, celui de la fille de ce gros éleveur de moutons ; une jeune femme qui ne s’en laisse pas compter, très moderne, prête à renier et à se dresser contre sa famille qui jusque-là ne lui avait jamais fait de cadeau pour passer dans le camp adverse. Il faut dire qu’elle est tombée sous le charme du Virginien, ceci explique aussi cela.

La prestation de Maura McGiveney est d’ailleurs assez remarquable, nous faisant regretter que l’actrice n’ait pas eu une carrière plus prestigieuse et qu’elle soit morte aussi jeune, d’une cirrhose du foie à seulement 51 ans. Nous nous devons également de noter l’excellente interprétation de Jonh McLiam dans le rôle du régisseur australien assez attachant, obligé d’obéir à son patron tout en reconnaissant ses torts. Quant au scénariste Don Ingalls, il fut déjà l’auteur de deux très bons épisodes de la série, Smile of a Dragon dans la saison 2, ainsi que plus tôt encore Duel at Shiloh, le remake du film de King Vidor, L’Homme qui n’a pas d’étoile (Man Without a Star), une trame dont il s'était servi avec efficacité pour narrer l’arrivée au ranch Shiloh de l’un des protagonistes principaux de la série, à savoir le troisième larron du trio d'amis faisant partie de la troupe de cowboys du domaine du Juge Garth aux côtés de Trampas et du Virginien, le jeune Steve (qui a entretemps et depuis peu quitté la série). Pour en revenir à l’interprétation, des protagonistes récurrents cette fois, à signaler quelques simples apparitions de la plupart d'entre eux mais également un James Drury qui est au contraire à nouveau sur le devant de la scène et a encore pris un peu plus d’aplomb. Sinon pour le plaisir des oreilles, on trouve deux chansons traditionnelles vite entêtantes interprétées par le comédien Sean McClory - que l’on a vu dans un grand nombre de classiques, des Contrebandiers de Moonfleet à L’Homme tranquille en passant par Mary Poppins ou Les Gens de Dublin - dans le rôle de l’un des hommes de main au sein des éleveurs de moutons.

Cet épisode d’une belle densité s’avère d’une puissance dramatique efficace et ne connaît pas de baisses d’intensité ni de rythme. Il est également l’occasion d’intéressants questionnements sur la justice, la loi et la loyauté, ainsi que d’une approche documentaire assez captivante à propos des rivalités qui ont opposé éleveurs de moutons et de vaches, un sujet finalement assez peu abordé au cinéma si ce n’est par Tex Avery (Drag-a-long Droopy) ou au sein de comédies westerniennes plus (La Vallée de la poudre) ou moins (Montana) réussies. Ceux qui auraient eu l’idée de découvrir la série par l'intermédiaire de ce Day of the Scorpion devraient avoir un bel aperçu de ses principales qualités avec néanmoins - hormis les interludes musicaux sus-cités - un manque total d’humour et de fantaisie qui le distingue de la plupart des autres épisodes - même parmi les plus sombres - ainsi qu’un budget qui semble un peu plus conséquent que la moyenne, témoin l’absence de stock-shots et au contraire une figuration assez nombreuse en ce qui concerne les moutons. Enfin, un magnifique plan d’ensemble en une impressionnante plongée vient clore ce très bel épisode.

************************************************************************************************

  • 4.03- A Little Learning
  • Réalisation : Don Richardson
  • Scénario : Harry Kronman
  • Guests Stars : Dub Taylor, Albert Salmi & Bruce Dern
  • Première diffusion 29/09/1965 aux USA - Jamais diffusé en France
  • DVD : VOSTF
  • Note : 7/10

Le Pitch : Pour bonne conduite, Bert Kramer (Bruce Dern) est libéré de prison plus tôt que prévu. Il n’a qu’une idée en tête en quittant le pénitencier : retrouver Martha, la fille qu’il a rencontrée alors qu’elle était Saloon Gal et avait qui il s’était marié. Elle est désormais institutrice à Medicine Bow et, en raison de sa beauté, tous les hommes tournent autour d'elle. La jalousie de Bert va provoquer des drames d’autant que la jolie maitresse d’école semble avoir pris sous son aile un cowboy du ranch Shiloh, Rafe Simmons (Albert Salmi), qui n’a en fait aucune mauvaise idée en tête, souhaitant seulement apprendre à lire, lui qui n’a jamais effectué de scolarité...

Mon avis : Avec ce troisième épisode, la saison 4 du Virginien se poursuit en restant à un niveau toujours élevé, A Little Learning bénéficiant non seulement d’un scénario très bien écrit par Harry Kronman - déjà auteur du magistral sixième épisode de la saison 2, It Takes a Big Man, avec Lloyd Nolan et un Chris Robinson particulièrement mémorable - mais également d’une interprétation sans failles non seulement de Clu Gulager et James Drury mais surtout des quatre principaux "invités" : Bruce Dern pour sa troisième et dernière participation à la série, n’ayant tenu avec une efficacité évidente que des rôles de teigneuse petite frappe violente et cruelle ; Albert Salmi toujours d’une étonnante justesse, ne tombant jamais dans les pièges du cabotinage outrancier alors que ses personnages le lui prédestinaient (voir déjà Brother Thaddeus), et s’en sortant ici encore remarquablement bien dans la peau de cet analphabète qui quitte le métier de cowboy dans le but de passer son temps à se cultiver ou tout du moins apprendre à lire ; Harry Townes, suant par tous ses pores et riant grossièrement tout du long, absolument parfait pour incarner ici la méchanceté gratuite et la bêtise humaine ; enfin la très charmante Susan Oliver et ses yeux bleus électriques dont les talents dramatiques ne sont pas à minimiser face à son évidente beauté, que l’on regrette d’ailleurs qu’elle n’ait pas eu une plus longue carrière - on se souvient surtout d’elle pour deux de ses prestations dans la série Les Envahisseurs.

L’épisode débute par la sortie de prison du mercenaire Bert Kramer six mois avant d’avoir fini de purger sa peine ; on apprend qu’il a été délivré pour bonne conduite mais le comportement de cet homme est en totale contradiction avec cet état de fait annoncé. En effet, en quittant les lieux, il nargue tous ses geôliers ainsi que le directeur du pénitencier, leur faisant comprendre qu’il les a bien roulés et que sa bonté était feinte. Bruce Dern étant alors très doué pour camper les mauvais garçons en les rendant très inquiétants, le spectateur est immédiatement mal à l’aise, comprenant très bien que cet homme va continuer à faire du mal. Nous sommes alors d’emblée anxieux lorsque nous apprenons qu’il a décidé de partir à la recherche de sa "bien aimée", une fille de saloon qu’il a épousée - cette dernière avait accepté sa proposition avant tout pour échapper à sa vile condition. Il s’est vite avéré que l’époux était brutal et elle a profité de son emprisonnement pour "fuir" dans une autre contrée, où elle est devenue institutrice en prenant un autre nom afin de plus difficilement être retrouvée. Malgré cela, Kramer apprend vite où elle a atterri et il se rend donc à Medicine Bow où se trouve un ex-complice à lui, non moins que l’adjoint du shérif, Ryker tout simplement, dont on nous rappelle à l'occasion qu'il n'a pas toujours été du bon côté de la loi.

Les séquences suivantes nous amènent donc dans la petite ville aux alentours de laquelle est situé le ranch Shiloh, et où nous faisons connaissance avec cette douce et charmante blonde ainsi qu’avec tous les hommes qui tournent autour. Alors que bal qui doit bientôt avoir lieu a multiplié les potentiels cavaliers susceptibles de l’accompagner, aucun d’entre eux ne connaît le secret qu’elle ne souhaite pas dévoiler, à savoir son état civil de femme mariée. Parmi eux, bien évidemment Trampas et le Virginien ; ce dernier, lors d’une séquence assez succulente, enverra à la dernière minute son cowboy travailler loin de là pour l’éloigner et lui faire rater la soirée, espérant le remplacer aux bras de la belle. Cette dernière est courtisée par bien d’autres concitoyens, dont le barbier qui vient même demander sa main accompagné de son père ; une scène assez inconfortable qui dévoile la bêtise de ce duo, néanmoins sans commune mesure avec celles qui suivront, le petit fils d’à peine 12 ans semblant prendre la même voie à cause de l’éducation qu’il a dû recevoir de ces deux idiots qui par leur méchanceté gratuite, leur étroitesse d’esprit, leurs moqueries continuelles et leur crétinerie congénitale vont provoquer des tragédies. Ils vont en effet vicieusement inoculer l'idée dans le cerveau malade de Kramer - ne supportant déjà pas que sa femme demande le divorce - que l’adorable Rafe a entamé une romance avec l’institutrice, ce qui est totalement faux, le jeune homme illettré se rendant souvent chez elle pour apprendre à lire afin de déchiffrer le journal intime de sa mère décédée. Au passage, une très belle thématique abordée que celle de l’éducation comme principal moyen au développement de l’intelligence et à l’avancée des idées.

Don Richardson, réalisateur de télévision qui avait déjà signé le premier épisode de la saison 3 - soit celui introduisant Ryker dans la série - fait de l'honnête travail tout autant avec sa caméra qu’en tant que directeur d’acteurs. On regrettera une dernière séquence qui coupe un peu cet élan de progressisme : la maitresse d’école, après s’être extasiée à propos de la sublime déclaration d’amour de la mère de Rafe à son époux, jette le journal au feu après avoir appris qu’il ne s’agissait pas de son mari mais de son amant, conspuant alors un peu vite un adultère dont elle ne sait quasiment rien. Un épisode qui trace également le portrait de la bêtise humaine dans toute sa "splendeur" et qui, constamment d'actualité, fait un peu froid dans le dos. L'ensemble manque peut-être d’un peu d’ampleur et d’émotion mais il n’en est pas moins remarquablement bien construit et interprété. Une saison 4 qui s’annonce pour l’instant sous les meilleures augures ; croisons les doigts pour que cela se poursuive ainsi !

************************************************************************************************

  • 4.04- The Claim
  • Réalisation : Bernard L. Kowalski
  • Scénario : Shirl Hendryx
  • Guest Star : William Shatner & Strother Martin
  • Première diffusion 06/10/1965 aux USA - Jamais diffusé en France
  • DVD : VOSTF
  • Note : 2/10

Le Pitch : Trampas ne supporte plus le rythme imposé par le Virginien. Pour que ses journées se déroulent plus agréablement, il propose à Luke (William Shatner), un vieil ami qu’il vient de retrouver, de venir travailler à ses côtés. Le régisseur a accepté de l'embaucher mais se rend vite compte de son manque de sérieux et lui demande de partir d’autant qu’il risque d’entrainer ses hommes sur la mauvaise pente. Et c’est effectivement ce qui se passe : Trampas décide de le suivre à Deadwood avec dans l’idée plaisirs à gogo et argent facile. Quand un prospecteur (Strother Martin) leur parle d’un filon d’or aux alentours, ils demandent à s’associer à lui...

Mon avis : Il n’aura hélas pas fallu longtemps pour déchanter ! Après trois fictions sérieuses et de haute tenue, la saison 4 nous propose d’un coup l’un des épisodes qui pourrait aisément concourir pour remporter la palme du plus mauvais de la série. Et la faute en incombe à beaucoup, que ce soit au scénariste Shirl Hendryx dont ce sera heureusement la seule participation au Virginien, idem pour le réalisateur Bernard L. Kowalski - signataire de nombreux nanars pour le cinéma dont par exemple L’Attaque des sangsues géantes - et enfin William Shatner qui, peu avant d’endosser l’uniforme du Capitaine Kirk pour la série Star Trek, s’avérait ici un abominable cabotin, gâchant la plupart des séquences où il intervient ; le gros problème est que, étant quasiment présent du début à la fin, il est assez aisé d'imaginer le résultat. L’épisode débutait pourtant d’une manière extrêmement intéressante puisqu’il décrivait le métier de cow-boy sous un jour pas très glorieux, fatigant et absolument pas gratifiant ; Trampas en traçait un portrait assez désespérant, le Virginien se révélait une fois de plus peu avenant et tout à fait intraitable, ne laissant pas souffler ses hommes une seule seconde. Pour une série familiale dont l’un des buts principaux était de faire rêver les spectateurs avec ce vieil Ouest américain, autant dire que l’idée était assez gonflée d’autant que voir le personnage-titre se comporter aussi durement n’est jamais très agréable pour ses aficionados. D’ailleurs, James Drury est le seul comédien qui tire son épingle du jeu dans cet épisode calamiteux. Nous ne le verrons malheureusement que dans les séquences encadrant l’ensemble de cette fiction, donc seulement à deux ou trois reprises au début et à la fin.

Doug McClure subit en revanche la mauvaise influence de William Shatner, les deux comédiens ne faisant quasiment que rire fort et bêtement tout au long de cette histoire au cours de laquelle il ne se passe d’ailleurs quasiment rien. Dommage car quelques autres pistes s’avéraient fort intéressantes, comme le fait d’aborder une fois encore le thème des terres indiennes bafouées par les hommes blancs à la recherche de filons d'or alors même que l'armée leur interdisait d'y pénétrer tout en faisant semblant de ne rien voir, ou encore la situation tout aussi peu enviable que celle des cow-boys que celles des prospecteurs qui pour la plupart ne trouvèrent pas la moindre once de métal et qui restèrent démunis toute leur vie. A la question de Trampas au cuistot lui demandant pourquoi il se satisfait d’une telle situation peu favorable, l’ancien chercheur d’or - devenu mauvais cuisinier par défaut - lui répond à peu de choses près qu’il est heureux car il gagne quelques dollars au jeu de temps à autre et qu'il est toujours en vie ; une vie pour le moins miséreuse où faute de mieux il ne reste qu'à se contenter de peu. Encore une fois, ce côté très dépressif des à-côtés de l’intrigue était plutôt paradoxalement jubilatoire, ou plutôt culotté ; mais narrativement parlant, il n’y a rien à se mettre sous la dent, seulement des blagues et des conversations sans intérêt - et surtout très mal interprétées - avec William Shatner qui tente d’entrainer Trampas sur la mauvaise voie.

Après avoir découvert un filon, la fièvre de l’or va s’emparer du personnage joué par Shatner, et le danger qu’il fait désormais peser sur ses camarades va être renforcé par l’arrivée dans les parages d’un bandit qui aimerait bien s’emparer du butin ainsi que par des Indiens qui ne souhaitent pas que les Blancs restent sur leurs terres, d’autant plus en colère qu’un des leurs vient d’être abattu bêtement. On pourrait croire que l'ensemble allait enfin se mettre à bouger, peine perdue ! La rencontre des deux hommes avec le vieux prospecteur interprété par Strother Martin n'aura donc guère fait évoluer les choses, ce dernier comédien semblant d'ailleurs être resté assez en retrait. Cet acteur aura été l’un des grands seconds rôles des années 50/60, tournant avec quasiment tous les grands réalisateurs de westerns ou de films de guerre de l’époque, que ce soit Robert Aldrich (Attaque), John Ford (Les Cavaliers, L'Homme qui tua Liberty Valance), Andrew V. McLaglen (Les Prairies de l'honneur, Le Grand McLintock !), Henry Hathaway (Les 4 fils de Katie Elder, 100 dollars pour un shérif), George Roy Hill (Butch, Cassidy et le Kid), Sam Peckinpah (La Horde sauvage, Un nommé Cable Hogue) et j’en passe... Dommage que ses deux comparses, trop occupés à se mettre en avant, l’aient en quelque sorte empêché de faire montre de son talent. Son personnage de prospecteur old timer totalement démuni avait pourtant au départ tout pour être intéressant ; il aura juste été très mal exploité par les auteurs médiocres de ce mélange de pantalonnade pas drôle et de suspense sans aucune tension.

Malgré notre sympathie pour le personnage de Trampas et pour son interprète Doug McClure, il faut bien se rendre à l'évidence que - à de rares exceptions près - la plupart des épisodes les moins bons auront été ceux où il se retrouve seul parmi les protagonistes récurrents de la série. C’est donc à nouveau le cas ici, le scénariste pas plus que le réalisateur n’arrangeant les choses, tout au contraire, les deux se révèlent aussi peu inspirés l’un que l’autre, nous livrant une fiction aussi inintéressante que bavarde et décousue. Durant cet épisode calamiteux qui tourne à vide sur quasiment toute sa durée, nous aurons cependant eu l’occasion de glaner quelques instants de plaisir au tout début, lors notamment des altercations entre Trampas et le Virginien, ou encore lors de leurs retrouvailles dans le final au cours duquel l’intendant accepte de faire comme si rien ne s’était passé et de réembaucher son homme de main. Heureusement pour les fans de la série ! Vite, passons au suivant sans plus nous attarder sur ce faux pas...

************************************************************************************************

  • 4.05- The Awakening
  • Réalisation : Leon Benson
  • Scénario : Robert J. Crean
  • Guest Star : Glenn Corbett
  • Première diffusion 13/10/1965 aux USA - Jamais diffusé en France
  • DVD : VOSTF
  • Note : 7.5/10

Le Pitch : Au cours d'une balade à cheval, Betsy rencontre David (Glenn Corbett), un vagabond peu affable. Elle l’invite néanmoins à se rendre au ranch si jamais il avait quelque besoin de quoi que ce soit. Pendant ce temps-là, la révolte gronde à la mine, les ouvriers ne voulant pas redescendre travailler tant que les lieux ne seront pas sécurisés. En tant que shérif, Ryker doit se montrer impartial mais il est cependant en accord avec les mineurs ; il va demander au juge Garth de l’aider à régler cette rivalité qui risque de se transformer en conflit sanglant. Mais c’est David qui va se révéler être le meilleur médiateur, Betsy va alors tomber sous son charme...

Mon avis : Je ne sais pas si c’est le cas pour tout le monde mais pour ma part, si je décide de visionner une série en intégralité, je vais encore plus vite passer à l’épisode suivant si le précédent a été un calvaire ; on espère toujours ainsi conjurer le sort, ne pas en rester sur un échec ni un mauvais souvenir en croisant les doigts très fort pour ne pas que cela se renouvelle. Et lorsque c’est le cas, on retrouve immédiatement le sourire et l’on se met à croire de nouveau en la série. C’est donc bien ce qui s’est passé après le calamiteux The Claim, plombé non seulement par un scénario et une réalisation ineptes mais surtout par un William Shatner ô combien pénible ! The Awakening s’avère au contraire superbe, tout aussi intéressant que grandement poignant puisqu’il s’agit de l’épisode qui, après Steve, marque le départ d'un deuxième personnage récurrent de la série, l’attachante Betsy. On peut dire qu’avec cette fiction les auteurs ont fait un magnifique cadeau tout autant aux spectateurs qu’à la comédienne Roberta Shore ; un épisode "romantico-politique" d’une douceur, d’une tendresse et d’une portée sociale assez inattendues, d’autant plus réjouissant pour les aficionados qu’il convoque et réunit tous les autres protagonistes récurrents de la série - ce qui n’était pas arrivé depuis bien longtemps - y compris donc Lee J. Cobb qui nous avait beaucoup manqué ces derniers temps. Pour ceux qui ne supportent pas les spoilers, je signale qu’une fois n’est pas coutume je vais être amené ici à dévoiler les grandes lignes et les surprises de l’intrigue.

D’un côté, nous avons donc droit à l’histoire d’amour qui se développe entre la jeune fille du juge et un mystérieux ex-pasteur se cherchant une raison de vivre et qui va décider de la prendre pour femme ; de l’autre, nous découvrons une intrigue à caractère social, abordée avec la grève mise en place par des mineurs qui refusent d’aller travailler dans des conditions de sécurité trop frêles et précaires. Dès la première séquence, on sent que la qualité va être au rendez-vous : le thème musical plutôt guilleret est néanmoins très lyrique et vite entêtant alors que les plans en contre-plongée sur le vagabond, que Betsy découvre alors qu’il essaie d’attraper des poissons à la main, sont esthétiquement superbes. Même si l’on se doute qu’une romance va se mettre en place entre les deux, les auteurs ont eu l’intelligence de ne pas les avoir fait immédiatement tomber amoureux l'un de l'autre. Tout "beau gosse" qu’il est, le personnage de David est d’emblée peu disert mais également a priori peu affable, et l’on peut dire que le premier échange entre les deux futurs époux est aussi distancié que froid. Betsy n’arrive pas plus à savoir que le spectateur ce qu’il en est de cet homme sans cheval, aux bottes trouées, et qui ne veut pas dire ni d’où il vient ni où il va. L’histoire d’amour se développera tout en douceur et en prenant son temps, Betsy allant commencer à ressentir plus que de l’amitié pour cet homme seulement à partir du moment où elle va lui découvrir des trésors d’humanité et de courage. En effet, alors que certains mineurs sont retournés au travail afin de ne pas perdre tout leur salaire, le meneur des grévistes s’est fait prendre sous l’éboulement de la mine. Passant par là, l’ancien pasteur n’hésite pas une seconde et, alors que tous les autres n’osent pas aller participer au sauvetage au vu du danger encore encouru, notre homme fonce dans la galerie sans se poser de questions et dégage le blessé de son piège même si ce dernier n’en réchappera pas.

Les deux intrigues s’imbriquent alors et jusqu'à la fin d’une manière totalement fluide, et nous allons désormais assister simultanément à l’attachement qui s’opère entre Betsy et David ainsi qu’à l’évolution du conflit qui recommence entre travailleurs et régisseurs, les patrons faisant même venir une nouvelle équipe afin de remplacer les grévistes. Le juge ne parvenant pas à faire évoluer les choses assez vite malgré son empathie pour les mineurs, Ryker n’ayant guère plus de possibilité malgré son indignation et le fait lui aussi d’avoir choisi le même camp ("Un bon dirigeant devrait soutenir ses ouvriers"), au vu de la bravoure de David, les grévistes - avec à leur tête l’épouse de celui qui a succombé à l’éboulement de la galerie - vont lui demander de les soutenir et d’être leur médiateur. Son passé dramatique lui ayant fait fréquenter ce milieu des mineurs, il va mener à bien cette mission en évitant le plus possible la violence et en finissant même par aboutir à un compromis. Un compromis à propos duquel nous resterons dans le secret - sans que cela ne soit gênant -, les auteurs n’ayant pas eu le temps de s’appesantir plus longuement sur la fin de ce conflit social puisqu'il leur restait à peine dix minutes pour boucler la séquence que tous les "aficionados midinettes" de la série attendaient : le mariage et les adieux de Betsy à Shiloh avant qu’elle se rende dans l’Est, à Philadelphie. Nous assisterons ainsi à une dernière et très belle chevauchée de Betsy avec Randy, à une très jolie chanson interprétée par Randy - Wanderin' Wonderin' - que le comédien a lui-même composé, aux derniers instants que passe la jeune femme avec le Virginien et Trampas qui ne manquent pas une nouvelle occasion de la charrier avec gentillesse, et enfin aux ultimes échanges entre le père et sa fille, Lee J.Cobb et Roberta Shore parvenant facilement à nous faire monter les larmes aux yeux d'autant que c’est le juge lui-même qui marie sa fille.

De beaux effets de lumière, des cadrages intéressants, une musique enthousiaste, une caméra très mobile... L’épisode est non seulement intelligemment écrit par un Robert J. Crean qui apprécie la nuance et sait captiver son auditoire sans trop en faire, mais également parfaitement bien réalisé par Leon Benson, déjà auteur de l’épisode Farewell to Honesty à l’occasion duquel il s’avérait déjà habile notamment dans son utilisation inspirée des gros plans et du hors-champ, ce qui est à nouveau vrai ici. Une romance convaincante et émouvante au sein d’un épisode "jouissivement" progressiste et revendicatif... on en redemande, surtout lorsque c’est interprété de cette manière. Outre les acteurs habituels, Glenn Corbett faisant très bonne impression dans un rôle admirable d’homme mystérieux mais bon et intègre, parfaitement bien entouré de comédiens habitués du western tels Jack Lambert, Ford Rainey ou John Doucette. "Merci de m'avoir appris à accepter de l'aide" : une belle réplique finale pour un épisode de grande qualité et d’une belle dignité. Juste après son “I don’t need Shiloh anymore”, Roberta Shore se maria aussi dans la vie civile et quitta son métier de comédienne.

************************************************************************************************

  • 4.06- Ring of Silence
  • Réalisation : Don Richardson
  • Scénario : Barry Oringer
  • Guest Star : Earl Holliman, Royal Dano & Joyce Van Patten
  • Première diffusion 27/10/1965 aux USA - Jamais diffusé en France
  • DVD : VOSTF
  • Note : 7/10

Le Pitch : Retournant à Medicine Bow par diligence, Ryker est accompagné dans son voyage par quatre autres passagers. Attaqués par un groupe de Mexicains, ils se réfugient dans une cabane isolée vite encerclée. Cherchant à savoir les raisons de ce blocus, Ryker tente une sortie et se rend compte que le chef des assiégeants n’est autre qu’une de ses connaissances, un vieil homme qui ne cherche qu’à ce qu’on lui livre l’un des voyageurs ayant pris place à bord de la diligence, un sale type du nom de Wiley (Earl Holliman) qui aurait violé et tué une fille de leur village. Mais peut-on laisser le criminel aux mains d’hommes prêts à l’exécuter ?

Mon avis : Le malheureux quatrième épisode est désormais bien loin. Après l’excellent The Awakening, la série nous offre une nouvelle fiction de grande qualité avec ce troisième épisode signé Don Richardson après qu’il a déjà mis en scène celui qui nous faisait découvrir Ryker ainsi que le tout récent A Little Learning au cours duquel Bruce Dern, dans le rôle d’un mauvais garçon détestable, cherchait à retrouver son épouse qui avait profité de son incarcération pour le fuir. Ce réalisateur, qui a exclusivement travaillé pour la télévision, nous livre à nouveau ici de l'honnête ouvrage tout autant avec sa caméra qu’en tant que directeur d’acteurs. Ce sera malheureusement son avant-dernière participation à la série. Ring of Silence débute à la manière de Stagecoach (La Chevauchée Fantastique) : une diligence s’apprête à partir pour un long voyage et les scénaristes nous font découvrir un à un les différents passagers avec parmi eux - fortement caractérisés tout comme dans le classique de John Ford - une prostituée semblant s’être fait chasser de la ville, un ivrogne, un homme de loi - en l’occurrence Ryker - ainsi qu’un homme d’affaires assez louche. Le cinquième élément est un jeune homme peu aimable par qui le drame va arriver ; un rôle interprété par Earl Holliman, comédien que tout le monde connait au moins de visage puisqu’il fut entre autres le cuisinier qui prend une cuite avec le Robby le robot dans le génial Planète interdite (Forbidden Planet) de Fred M. McWilcox, l’un des 4 fils de Katie Elder de Henry Hathaway ou encore le mauvais rejeton d’Anthony Quinn dans l'excellent et mésestimé Dernier Train de Gun Hill (Last Train from Gun Hill) de John Sturges.

Ajoutez à ces cinq voyageurs le conducteur de diligence (Edward Binns) ainsi que son "garde du corps" (un Sanchez Dominguez moyennement convaincant) et nous voilà partis pour un bon quart d’heure de présentation néanmoins jamais ennuyeuse, car un suspense s'est immédiatement mis en place puisque dès que la voiture se met en route, le réalisateur termine la séquence par le plan d’un inquiétant Mexicain s’apprêtant à aller prévenir un tiers que l’homme qu’ils cherchent et veulent appréhender est à son bord. Une course-poursuite s’engage donc d’emblée, le personnage recherché est donc de celui joué par Earl Holliman dont on apprendra qu’il a violé et tué la fille du chef d’un village. Celui-ci s’est mis en tête de le poursuivre, de l’attraper et de se venger ; c’est pour cette raison que d’entrée de jeu la diligence sera suivie à distance par un groupe imposant et menaçant. Comme dans beaucoup de westerns de cinéma, les plans sur les conducteurs ainsi que ceux de l'intérieur de la diligence ont été filmés en studio, les multiples transparences utilisées pour les paysages traversés faisant aujourd’hui bien vieillottes et s’avérant casser un peu la crédibilité et l'efficacité de l’ensemble. On oubliera cependant tout cela assez vite dès que le conducteur décidera alors d’aller se réfugier dans une cabane de relais abandonné pour affronter les poursuivants en prenant ainsi le moins de risques possibles, moins en tout cas qu'en continuant leur route trop à découvert.

Seulement, ils seront vite assiégés et l’épisode bifurquera alors vers un western à huis clos non dénué de tension du type de l’excellent Rawhide (L’Attaque de la malle-poste) de Henry Hathaway ou, mieux encore, du méconnu et superbe Relais de l’Or Maudit (Hangman’s Knot) avec Randolph Scott, seul film de Roy Huggins en tant que réalisateur. Voilà nos passagers réunis dans un lieu étriqué où ils vont devoir subir un blocus et soutenir un siège ; à partir du moment où ils vont savoir que la seule manière de sauver leur vie est de se débarrasser de l’un d’entre eux, les tensions vont s’exacerber et une passionnante réflexion va s’engager quant à la justice - au sens du devoir - et à la loyauté, les différents points de vue venant se confronter dans un débat certes classique et "déjà vu" mais toujours intéressant. On a donc déjà connu ce genre de situations y compris au sein même de la série ; il n’empêche que lorsque l'ensemble est écrit et interprété de la sorte, cela reste toujours captivant et en l’occurrence d’une belle et grande dignité. Ryker ne veut en aucun cas livrer cet homme à la vindicte populaire des Mexicains malgré le fait qu’il ait été ami avec le chef du village qui le lui demande. Il veut au contraire le ramener en ville afin qu’il y soit jugé dans les règles. "Il est facile de risquer sa vie pour une personne que l'on aime, il est plus difficile de défendre quelqu'un que l'on déteste" sera en gros le leitmotiv de notre héros afin de ne pas retomber dans le piège ni de la loi de Lynch ni de la justice expéditive, désormais pour lui bel et bien abolies et contre lesquelles il continue à se battre. Les deux camps restant sur leurs positions, des drames vont avoir lieu sans que Ryker ne perde pour autant ni son courage ni sa détermination.

Intrigue intelligente, réalisation carrée et excellente interprétation d’ensemble avec, outre Earl Holliman et un Clu Gulager toujours en grande forme, Royal Dano en alcoolique, Joyce Van Patten en femme de petite vertu ou encore John Hoyt en homme d’affaires véreux. On trouvera également quelques séquences mettant parallèlement en scène Trampas et le Virginien, permettant au spectateur de souffler un peu sans que cela ne soit gratuit puisque les deux hommes vont se retrouver mêler in extremis à cette intrigue tendue après s’être inquiétés de la disparition de la diligence. A signaler enfin, comme dans le précédent épisode, une bonne partition signée cette fois Sidney Fine. Cinq bons épisodes sur six, la quatrième saison part sur des bases solides !

************************************************************************************************

  • 4.07- Jennifer
  • Réalisation : Don Richardson
  • Scénario : Theodore Apstein
  • Guest Star : James MacArthur
  • Première diffusion 03/11/1965 aux USA - Jamais diffusé en France
  • DVD : VOSTF
  • Note : 7/10

Le Pitch : Le Juge Garth vient de perdre sa sœur et son beau-frère, tous deux anéantis dans un accident, laissant derrière eux leur fille Jennifer. Même si pour des raisons familiales il n’a jamais revu sa nièce depuis la naissance de cette dernière, il a néanmoins décidé de la recueillir à Shiloh, à la grande joie des cowboys à qui une présence féminine faisait défaut depuis le départ de Betsy. Jennifer est arrivée à Medicine Bow en compagnie de Johnny Bradford (James MacArthur) avec qui elle a fait le voyage en diligence depuis Tylerville, bourgade de laquelle le jeune homme s’est enfui après avoir tué un homme inquiétant qui le poursuivait...

Mon avis : Quatrième et dernier épisode signé Don Richardson, Jennifer nous fait regretter que cet homme n’ait plus jamais officié par la suite, car comme Don McDougall il s’est révélé être l’un des tous meilleurs réalisateurs de la série. Comme son titre semble le faire penser, ce septième épisode de la saison va donc introduire dans la série un nouveau protagoniste qui ne va finalement rester qu’assez peu de temps puisque dès la saison suivante, cette jeune femme alors âgée d’une vingtaine d’années et interprétée par la charmante Diane Roter ne sera déjà plus au générique du Virginien. Jennifer est la nièce du juge Garth ; il ne l’avait vue qu’une seule fois à sa naissance, ayant toujours refusé de côtoyer le mari de sa sœur. Après la mort accidentelle des parents de sa nièce, le propriétaire du ranch Shiloh décide de la faire venir habiter avec lui, même s’il craint qu’elle lui reproche de ne jamais être allé leur rendre visite à Boston. Et c’est effectivement ce qui va se passer, un des principaux éléments de l’intrigue reposant sur les tentatives du vieux juge pour amadouer et apprivoiser l’orpheline qui n’a toujours pas digéré que son oncle pense du mal de son père qu’elle aimait tant. Le jeu parfois maladroit et inexpérimenté de l’actrice Diane Roter convient parfaitement à son personnage un peu perdu, les séquences pleines de tension qui la réunissent à Lee J. Cobb se révélant tout à fait crédibles et finalement assez touchantes. En effet, on compatit avec le vieux juge qui se voit ainsi rejeté alors qu’il aimerait fortement qu’ils deviennent complices... D’autant plus que sa fille Betsy vient de le quitter pour suivre son époux et qu'il se retrouve esseulé sans présence féminine à ses côtés.

Mais l’épisode débutait par une toute autre piste en mettant en scène un certain Johnny Bradford, interprété par le futur Danno de Hawaï police d’Etat - autrement dit le jeune adjoint de Steve McGarrett -, le comédien James MacArthur. Et il s'agit donc d'une longue séquence de course poursuite qui ouvre cette fiction, Johnny se voyant d'emblée pourchassé par un homme inquiétant de sa connaissance qui se révélera être un bounty hunter (ou chasseur de primes). A signaler que le comédien qui tient ce petit rôle néanmoins marquant est le cascadeur et futur réalisateur Hal Needham. Se réfugiant dans une vieille grange, Johnny finira par abattre son poursuivant avant - sans rien dire à personne de ce qui vient de se dérouler - de sauter dans la diligence où se trouve déjà Jennifer. Les deux jeunes gens vont faire connaissance et se prendre d’amitié l’un pour l’autre, l’orpheline trouvant une oreille attentive en la personne de cet homme prévenant qui a été très tôt lui aussi privé de parents. Arrivés à Medicine Bow, leurs routes se séparent. Pourtant, alors qu’elle visite les terres du ranch avec le Virginien, elle le retrouve alors qu’il a pris place dans une cabane abandonnée. Demandant au régisseur de l’embaucher, ce dernier refuse prétextant que son équipe est au complet ; en revanche, le juge lui demande de faire une exception dans le but de plaire à sa nièce récalcitrante. Et voilà le fuyard meurtrier du début se mettant à travailler aux côtés de Trampas, Randy et les autres. Toute cette première partie est excellente, sans aucune volonté dramatique - à l'exception bien évidemment de la séquence d'ouverture décrite ci-avant -, dans l'ensemble au contraire plutôt documentaire sur le travail des cowboys, abordant des problèmes d'ordres familiaux mais la majeure partie du temps sur un ton bon enfant malgré les troubles qui existent entre la nièce et l'oncle.

De son côté, Ryker apprend en même temps le crime qui a été perpétré dans la ville voisine ainsi que l’arrivée de cet étranger par la diligence en provenance de cette même bourgade ; il fait donc très vite le rapprochement mais tente d’avoir des preuves plus tangibles avant d’agir. Après enquête, il va comprendre ce à quoi les spectateurs ont assisté dans la première séquence, à savoir que le sympathique Johnny pourrait être un homme violent recherché pour meurtre. Ce dernier, acculé et apeuré, va prendre en otage Jennifer. Ce final, quoique très efficace grâce entre autre à l’interprétation de James MacArthur, n’en est pas moins un peu décevant en regard de ce qui a précédé, les scénaristes ayant bien du mal à insuffler beaucoup de tension par le fait de ne pas avoir rendu leur protagoniste principal plus inquiétant auparavant. Mais je ne vous en dirai pas plus au risque de tout dévoiler et me faire taper sur les doigts pour cause de trop grand nombre de spoilers. Sachez néanmoins que malgré un dernier quart un peu en deçà, l’ensemble se maintient à un très bon niveau tout du long, que Randy entonne une chanson un peu moins enthousiasmante qu’habituellement et que le grand compositeur Hans J. Salter - dont le plus beau travail pourrait être la sublime bande originale du non moins génial Les Affameurs (Bend of the River) d'Anthony Mann - participe pour la première et unique fois à la série sans que le résultat ne soit particulièrement marquant.

On se souviendra longtemps de la première apparition de l’actrice Diane Roter divinement habillée et dont nous regrettons déjà qu’elle doive repartir avant la fin de la saison, on retiendra de très belles prestations de Lee J. Cobb, Clu Gulager et James Drury, et l'on restera attendri devant la dernière séquence montrant bien évidemment le retour en grâce de l’oncle auprès de sa nièce longtemps rétive. Le plan de leurs mains qui se rejoignent entérine la très belle sensibilité de l’ensemble. Avec le Virginien, Trampas et Randy, on évoquera également - peut-être pour la dernière fois - le départ de Betsy que tout le monde semble regretter. Un épisode bien équilibré entre action, humour, romance et "drames" familiaux. On en redemande !

************************************************************************************************

  • 4.08- Nobility of Kings
  • Réalisation : Paul Stanley
  • Scénario : Richard Fielder
  • Guest Star : Charles Bronson
  • Première diffusion 10/11/1965 aux USA - Jamais diffusé en France
  • DVD : VOSTF
  • Note : 7/10

Le Pitch : Ben Justin (Charles Bronson), son fils et sa seconde épouse viennent de s’installer proche des terres de Garth. Le passé du chef de famille l’a fait devenir très méfiant et plutôt misanthrope ; il ne veut plus de l’aide de quiconque et souhaite désormais réussir à s’en sortir seul en tant qu’éleveur. Son caractère ombrageux ne va pas l’aider à se faire des amis parmi les ranchers alentour qui, après avoir essayé de lui expliquer leur mode de fonctionnement, vont renoncer devant tant de défiance. Justin va même finir par se mettre à dos sa femme et son fils lorsqu’il apprendra qu’ils vont régulièrement rendre visite à leurs voisins de Shiloh...

Mon avis : Hormis un malencontreux faux pas déjà vite oublié, le premier tiers de cette saison 4 semble vouloir se poursuivre avec toujours le même niveau d’exigence, témoin cet épisode au ton assez dramatique mettant en avant un fermier récemment arrivé avec sa famille sur les terres alentour de Shiloh et qui souhaite se lancer dans l’élevage à sa manière et sans aucune aide extérieure. Sauf que les ranchers de la région ont des règles bien précises afin que les relations de voisinage se passent pour le mieux et qu’ils aimeraient bien qu’elles soient également respectées par ce nouvel arrivant. Mais ce dernier n’en fait qu’à sa tête et continue par exemple à marquer les veaux qui viennent à se promener sur sa propriét,é alors qu’il est interdit de le faire avant la fin de l’hiver afin que chacun des éleveurs ait le temps de "retrouver ses petits". Une petite notation documentaire assez typique de la série et qui intéressera probablement les amateurs de western qui n’auront finalement pas souvent eu l'occasion d'en rencontrer au sein des films de cinéma, ces derniers n'ayant pas forcément le temps de s’arrêter sur ce genre de détails qui pourraient paraitre futiles. Quoi qu’il en soit et pour en revenir au principal protagoniste de cette histoire, le caractère ombrageux voire hargneux de Ben va lui causer des soucis puisque les cowboys et les gros éleveurs ne sont pas du genre à se laisser faire, en l’occurrence ici le personnage interprété par l’excellent George Kennedy qui ne perd pas une occasion pour le pousser à bout, ce qui se terminera par un combat à poings nus sec et très teigneux, efficacement mis en scène par un Paul Stanley qui s’avère très professionnel.

Ben est campé par un acteur qui commençait doucement mais sûrement à avoir son groupe de fidèles grâce principalement à John Sturges (Les Sept Mercenaires ; La Grande Évasion), et qui venait de se voir attribuer par Vincente Minnelli un très beau rôle dans son superbe et méconnu Le Chevalier des Sables (The Sandpiper). A savoir Charles Bronson, qui aura surtout son heure de gloire la décennie suivante avant d’être tout aussi rapidement vilipendé par une grande majorité de la critique à partir du moment où il aura incarné Paul Kersey, le personnage principal très peu politiquement correct de Death Wish (Un justicier dans la ville) de Michael Winner. En fin de compte, il aurait surement fallu être au départ plus nuancé de part et d'autre, Bronson n'étant pas forcément un immense comédien mais néanmoins un acteur charismatique tout à fait honorable, témoin, pour ne prendre qu'un seul exemple parmi d'autres, sa prestation étonnante dans Les Collines de la terreur (Chato’s Land) du même Winner. Dans cet épisode du Virginien, il prouve avoir dramatiquement parlant plusieurs cordes à son arc, tout autant crédible lorsqu’il se fait inquiétant que lorsqu’il retrouve son sang-froid, son calme, et qu’une part d’humanité semble vouloir prendre le dessus. Ben a été autrefois échaudé à plusieurs reprises dans ses affaires faute à un collaborateur peu scrupuleux. Depuis, persuadé d’avoir été jusque-là un pitoyable raté, il est devenu amer, violent, têtu et taciturne. Il est désormais effrayé par l’échec et veut coûte que coûte se prouver qu’il est capable d’acquérir richesse et respect seul et sans l’aide de quiconque, ce qu’il compare à la noblesse des rois (d'où le titre de l'épisode, Nobility of Kings). Mais il se méfie de tout le monde, y compris de son entourage le plus proche, à savoir son fils Will qu’il ne souhaite pas voir travailler lui non plus à ses côtés.

Ce jeune homme d’une vingtaine d’années est plutôt bien interprété par Robert Random alors que sa belle-mère, Mary, est campée par une Lois Nettleton assez émouvante, elle qui n’était pourtant guère convaincante l’année précédente dans A l'ouest du Montana (Mail Order Bride) de Burt Kennedy. Ayant dans l’idée d’apporter de l’aide à Ben malgré le fait qu’il leur ait bien fait comprendre qu’il n’en avait pas besoin, l’épouse et son fils adoptif vont souvent se rendre à Shiloh à l’invitation de Garth et du Virginien. En effet, ces derniers souhaitent leur faire cadeau d’un cheval et de leçons d’équitation afin que Ben puisse enfin être correctement secondé. Lorsque ce dernier apprendra ces secrètes escapades, il sera non seulement très en colère mais fera montre en plus d’une grande jalousie, accusant sa femme de l’avoir trompé avec le régisseur après avoir remarqué leur bonne entente. Tout cela aurait pu tourner à la plus grave des tragédies, d’autant plus que la fièvre aphteuse qui s'abat sur le troupeau de Ben va s’ajouter à tout le reste déjà guère reluisant... Sauf que les auteurs auront eu la bonne idée de ne pas tomber dans ce travers mélodramatique, l’épisode se clôturant au contraire sur un happy-end d’une grande et belle dignité. Même les fortes têtes comme celle interprétée par George Kennedy finissent par se remettre en cause et trouver un terrain d’entente avec lui. Si l’épisode aura parfois semblé un peu trop bavard, grâce surtout à la qualité de l’interprétation - Bronson parvient à rendre son personnage complexe et nuancé - et de l’écriture, il n’en aura pas moins démontré une belle humanité, aura brossé un intéressant portrait psychologique et nous aura offert l’un des plus beaux finals depuis le début de la série, démontrant qu’une fin heureuse n’est pas nécessairement plaquée pour faire plaisir aux téléspectateurs mais peut également s’avérer non seulement légitime mais porter un message plus qu’honorable, ici l’acceptation de l’entraide aboutissant à du meilleur pour tout un chacun.

Aucun trait de génie, aucune idée surprenante mais un ensemble carré et drôlement efficace avec plusieurs points d’orgue comme la séquence de la réunion des ranchers ou encore celle très sobre de l’abattage du troupeau. A signaler également de belles prestations de Lee J. Cobb et James Drury, le Virginien se révélant un peu moins déterminé et au contraire un peu plus souple qu’à l’accoutumée, le juge toujours aussi bon médiateur. A noter aussi une musique signée non moins que par Bernard Herrmann, immédiatement reconnaissable dès les premières secondes puisqu’il réutilise ici d’emblée les trois premières notes du thème principal de The Trouble with Harry. A savoir enfin qu’en 1971, probablement pour capitaliser sur la notoriété de Bronson, Universal a remonté deux épisodes de la série, celui-ci ainsi que Duel At Shiloh, pour en faire un long métrage sorti sous le titre Le Solitaire de l’Ouest (The Bull of the West) ; il fut évidemment très peu apprécié et l’on peut deviner pourquoi tellement les deux épisodes n’ont pas grand-chose à voir entre eux et qu'il semblait dès le départ impossible de les rassembler pour aboutir à un résultat convaincant.

************************************************************************************************

  • 4.09- Show me a Hero
  • Réalisation : Leon Benson
  • Scénario : Frank Chase
  • Guest Star : Richard Beymer
  • Première diffusion 17/11/1965 aux USA - Jamais diffusé en France
  • DVD : VOSTF
  • Note : 8.5/10

Le Pitch : En venant à la rescousse de Colter (Richard Beymer), un homme dont les chevaux se sont emballés, Trampas blesse sa monture. Il est forcé de rester quelques jours à Eagle Rock, bourgade fantôme que l’homme à qui il vient de sauver la vie a ressuscitée lorsqu’il a appris que le chemin de fer ne devrait pas tarder à passer en ces lieux. Il a amené avec lui une cinquantaine de compatriotes qui commencent à s’impatienter, ne voyant rien venir et ayant du mal à subsister. Les ennuis pourraient prendre fin grâce à un homme d’affaires ayant dans l’idée d’y installer une maison de jeux mais qui en fait souhaite prendre le contrôle de la ville...

Mon avis : Le 9ème épisode ce cette 4ème saison du Virginien vient confirmer ce qu’il m’était déjà arrivé d’affirmer à quelques reprises - sans nécessairement penser que cela allait être vrai après que la série a pris son rythme de croisière -, à savoir que ses meilleurs épisodes pouvaient sans problèmes se vanter de rivaliser avec les plus grands westerns de l’époque. Et d’ailleurs Show Me a Hero est une fiction remarquable à tous les niveaux, captivante, intelligente, formidablement bien écrite, interprétée et réalisée, Frank Chase et Leon Benson prouvant à nouveau qu’ils faisaient partie des recrues les plus fiables de la série aux postes de scénariste et réalisateur. L’extrême compétence de Frank Chase, c'est déjà au moins la qualité d'écriture assurée, un ensemble parfaitement bien géré et sans digressions disgracieuses qui fait que la lassitude ne nous gagne jamais. L'auteur n’en était pas à son coup d’essai au sein de la série puisqu’il avait auparavant déjà signé au cours de la saison initiale le superbe et touchant If You have Tears avec Dana Wynters, dans la deuxième saison le très bon épisode avec Robert Redford, The Evil That Men Do, mais surtout très récemment Another’s Footsteps de R.G. Springsteen avec John Agar, fiction d'une formidable densité, d'une étonnante richesse thématique et émotionnelle, ainsi que d'une intensité qui en faisait non seulement déjà un sommet de la série mais du western tout court.

Il en va donc de même pour celui qui nous préoccupe ici avec Leon Benson aux manettes derrière la caméra, précédemment réalisateur de l’épisode Farewell to Honesty à l’occasion duquel il s’avérait déjà habile notamment dans son utilisation inspirée des gros plans et du hors-champ - ce qui se révèle à nouveau vrai ici -, ainsi que du très beau The Awakening qui narrait avec beaucoup de sensibilité le mariage et le départ de Betsy. Show Me a Hero se déroule loin de Shiloh et ne met en scène parmi les personnages récurrents que le seul Trampas ; l’épisode possède du reste beaucoup de points communs avec un autre sommet de la série, le 13ème de la saison 2, Siege, qui nous montrait déjà Trampas seul aux prises avec des Comancheros ayant fait main basse sur une ville éloignée de Medicine Bow. Ici, cette thématique assez classique dans le domaine du western de la mainmise d’une bourgade par des hommes d’affaires véreux et sans scrupules est abordée d’un point de vue plutôt original. En effet, le patelin dont il est question était encore voici quelques mois une Ghost Town que viennent ressusciter une cinquantaine de "colons" venus de l’Est après avoir entendu dire que la ligne de chemin de fer n’allait pas tarder à passer en ces lieux ; on pense bien sûr a posteriori au célèbre Il était une fois dans l’Ouest de Sergio Leone. La première séquence nous met directement face aux agissements brutaux de ces dangereux malfrats qui ne reculent devant aucune violence ni aucune malversation pour arriver à leurs fins, à savoir faire régner la terreur sur les villes qu’ils "prennent en main". Une sécheresse qui surprend d’emblée grâce surtout à l’interprétation d’une redoutable efficacité de l’inquiétant Lee Patterson dans le rôle de l’homme de main du businessman, celui chargé d’aller intimider et menacer les habitants des bourgades choisies pour prochainement tomber sous leur coupe.

Puis, toujours en prégénérique, nous en venons directement à la scène qui voit Trampas sauver la vie de celui qui dirige la nouvelle édification de la ville fantôme, le Tony de West Side Story qui était déjà excellent dans le rôle d’un jeune garçon au sang un peu chaud dans You Take the High Road dans la saison 3, et qui se révèle ici tout à fait exceptionnel, totalement crédible dans la peau de Coulter, cet homme qui croit dur comme fer pouvoir redonner vie à une ville abandonnée et en faire un havre de bonheur et de paix, allant tout mettre en œuvre pour y parvenir sans heurts. Lors de cette séquence initiale au cours de laquelle nous le découvrons pour la première fois, Trampas galope à vive allure pour rattraper sa carriole dont les chevaux se sont emballés ; étonnement et pour notre plus grand plaisir, elle ne recourt à aucune transparence ni stock-shots, les comédiens paraissant avoir eux-mêmes accompli leurs cascades ; les travellings et les panoramiques ainsi que la fluidité du montage aboutissent à une scène d’une énergie que l’on n’attendait pas au sein d’une série télévisée aux modestes moyens. On peut en remercier non seulement les acteurs mais surtout Leon Benson qui s’avèrera constamment tout aussi passionné par ce qu’il mettra en scène, tout cela amenant à une confrontation finale attendue mais qui ne manque pas de puissance dramatique. Le tout sans manichéisme, beaucoup d’habitants ayant mis du temps à se décider à combattre les malfrats, y compris Trampas d’ailleurs, qui finira néanmoins par accepter une étoile d’adjoint après que le shérif a réussi à le convaincre. Il faut dire, à sa décharge, que celui contre qui il doit lutter est un vieil ami du temps où ils étaient tous les deux du mauvais côté de la loi et que sa loyauté lui dit de ne pas intervenir... jusqu’à un certain point... les actions entreprises (incendie des maisons) et les violences commises à l’encontre des braves citoyens (Coulter malmené avec brutalité en pleine rue) devenant inadmissibles et insupportables.

Un épisode qui restera probablement comme l’un des sommets de la série, de plus soutenu par une très belle réussite musicale du célèbre comparse d’Alfred Hitchcock, Bernard Herrmann, ainsi que par un casting quasiment parfait, outre tous ceux déjà cités plus haut, la charmante Sherry Jackson (l’épouse de Coulter), Douglas Fowley (le shérif vieillissant mais toujours d’une formidable droiture), Mort Mills (le maréchal-ferrant) ou encore Leonard "Spock" Nimoy (l’avocat). On retiendra donc avant tout une mise en scène carrée, des protagonistes possédant une véritable épaisseur psychologique, tous nuancés et richement dépeints, ainsi enfin qu'une histoire qui met sur le devant de la scène l’entraide, la détermination et le devoir de s’accrocher à ses convictions sans fléchir et surtout sans accepter de compromissions. Il aura été difficile pour certains citoyens apeurés de se décider à lutter contre des hommes qui auraient pu leur permettre de se remettre à flot, mais la survie de leurs rêves et le garant de leurs bonnes consciences devaient en passer par le conflit. Show Me a Hero est une fiction se prenant totalement au sérieux - sans néanmoins être trop solennelle - qui s’avère en définitive d'une grande dignité et tout simplement superbe !

************************************************************************************************

  • 4.10- Beyond the Border
  • Réalisation : Don McDougall
  • Scénario : Martha Wilkerson
  • Guest Star : Thomas Gomez & Joan Staley
  • Première diffusion 24/11/1965 aux USA - Jamais diffusé en France
  • DVD : VOSTF
  • Note : 6.5/10

Le Pitch : Trampas et le Virginien ont pris le train direction le Mexique. Ils doivent y acheter et ramener six chevaux Palominos pour le juge Garth. Arrivé à un village au bord de la frontière, le régisseur de Shiloh tombe malade et, ayant missionné Trampas pour aller seul s’occuper des chevaux, il est obligé de rester et se faire soigner dans une auberge isolée où l’unique autre client est une Saloon Gal esseulée, Maggie. Seulement, cet endroit est le lieu où doit se retrouver une bande de malfaiteurs dont le chef n’est autre que le fiancé de la jeune femme. L’aubergiste s’inquiète alors de l’arrêt forcé du Virginien dans son établissement...

Mon avis : Beyond the Border marque le retour de notre réalisateur chouchou pour cette série, à savoir Don McDougall, qui n’avait pas encore montré le bout de son nez au sein de cette quatrième saison. Il s’agit de son 17ème épisode sur 42 qu’il mettra en scène au total ; et, sans cependant atteindre des sommets, c’est une réussite assez originale qu’il nous octroie à nouveau à cette occasion. Une réussite qui tient avant tout à la qualité de l’écriture, le scénario s’avérant assez intelligent pour court-circuiter toutes nos attentes, pour emmener l’histoire là où on ne l’attendait pas et enfin pour faire perdre tous nos paris quant à la résolution de l’intrigue. C’est pour cette raison que, une fois n’est pas coutume, je déconseillerais à ceux que les spoilers agacent de poursuivre la lecture de ce texte. Beyond the Border débute à Shiloh alors que seuls Trampas et le Virginien se trouvent sur place, tous les autres semblant vaquer à des occupations bien loin de là. Le régisseur discute avec Trampas, qui se vante de travailler comme une bête et de ne pas avoir une seconde à lui. Alors qu’il lui demande conseil pour savoir lequel des cowboys pourrait l’accompagner au Mexique chercher des chevaux pour leur patron, en priorité quelqu’un n’ayant pas grand-chose à faire à cette époque de l’année, Trampas lui rétorque qu’il vient de trouver son homme en sa personne. Le Virginien lui fait part de l’incohérence de ces derniers propos qui sont en totale contradiction et Trampas de lui rétorquer que, le connaissant parfaitement, il sait très bien qu’il se trouve devant le plus fieffé des menteurs et des roublards. Sur quoi les deux amis partent "bras dessus bras dessous" et se retrouvent dans un train qui se rend de l’autre côté de la frontière, à quelques jours de voyage de là.

Un avant-propos assez cocasse et qui montre qu’un 'héros' peut aussi être extrêmement fourbe tout en restant très sympathique. Les séquences dans le train montrent l’impatience de nos deux hommes qui supportent assez mal le voyage, et nous font entrevoir que le Virginien n’est pas au sommet de sa forme. En témoigne aussi leur premier arrêt après que le train les a conduit non loin de la frontière mexicaine : alors qu’ils font une pause pour boire un coup dans un saloon de la région, Trampas, qui a voulu séduire une fille qui se trouvait là, se voit menacer par un groupe d’hommes lui demandant avec virulence de s’éloigner d’elle. Notre cowboy s’exécute sans que son patron n’ait levé le petit doigt, ce qui n’est pas dans les habitudes de ce dernier, toujours prêt au contraire à aller jouer les médiateurs et prenant toujours la défense de ses hommes. L’étape suivante est une auberge qui pourrait rappeler un peu le saloon de Vienna dans Johnny Guitar par le fait de sembler vide et un peu factice (la faute en incombant pour ce deuxième élément à des décors un peu "cheap", cependant joliment photographiés par le grand Ray Rennahan). Seuls le patron et son employé barman sont là pour les accueillir, l'unique autre cliente présente étant la même jeune femme précédemment rencontrée par Trampas et qui lui avait valu d’être un peu malmené. Il s’agit en fait de la petite amie d’un chef de bande assez inquiétant qui nous avait été présenté quelques minutes auparavant. On comprend vite que si l’établissement est vide, c’est parce qu’il doit servir de refuge aux malfaiteurs de retour d'un mauvais coup. Le gérant est donc très inquiet lorsqu’il voit débarquer deux inconnus, surtout qu’il n’a pas envie qu’ils tournent autour de la maitresse du gangster, d’autant que ce dernier semble extrêmement jaloux. Même s’il leur dit qu’il ne peut pas les héberger, le voici coincé lorsque le Virginien, très malade, s’effondre à terre.

A partir de ce moment-là, Trampas disparait de l’intrigue puisque le régisseur le charge d’aller négocier seul l’achat des chevaux au Mexique pendant qu’il restera sur place quelques jours en convalescence. Et c’est une romance qui se met en place puisque la femme présente s’occupant activement du malade, les deux finissent par éprouver des sentiments l’un pour l’autre, au grand dam des hôteliers qui constatent cet amour naissant. Tout le reste, je le garderai secret, mais sachez que le final est très surprenant, bougrement inattendu et donc très réjouissant ; je ne parle pas du fait que le Virginien reparte à nouveau bredouille à Medicine Bow, ayant une fois de plus perdu l’occasion de trouver une épouse qui lui aurait parfaitement bien convenu. Le personnage de Maggie s’avérait d'ailleurs magnifique, bien aidé en cela par la prestation admirable d’une comédienne bien trop méconnue, aussi charmante que talentueuse, la belle Joan Staley. Malgré une carrière assez courte, les cinéphiles avaient déjà pu la croiser dans Les Nerfs à Vif (Cape Fear) de Jack Lee Thompson ou Piège à Minuit (Midnight Lace) de David Miller ; les westernophiles la retrouveront l’année suivante, toujours aussi irrésistible, dans le sympathique La Parole est au colt (Gunpoint) d'Earl Bellamy aux côtés d'Audie Murphy. Parmi les autres comédiens de cet épisode, un très bon Michael Forest qui avait déjà joué deux fois sous la direction de McDougall dans cette même série, très convaincant en bandit absolument pas caricatural, ainsi que Joe Mantell dans le rôle du barman polonais rêvant de travailler à San Francisco, ou encore Thomas Gomez, l’un des acteurs mexicains les plus prolifiques du cinéma hollywoodien durant les années 40 à 60, de Capitaine de Castille de Henry King à Trapèze de Carol Reed en passant par Key Largo de John Huston, Force of Evil d' Abraham Polonsky... et tant d'autres.

Pourquoi alors une note pas plus élevée pour cet épisode ? Car son rythme est tellement indolent, son intrigue tellement confinée et ses ressorts dramatiques tellement minces que tout cela nous parait aussi anodin qu’incongru. C’est en y repensant et en se rendant compte qu’il reste entêtant que la réussite nous paraît de mise et que la romance contrariée nous touche encore plus. Nous devons cette jolie histoire à une femme, Martha Wilkerson, une féministe avant l’heure puisque c’est d’elle que viendra ensuite l’idée d’introduire un agent féminin pour U.N.C.L.E. (la série les Agents très spéciaux), ce qui aboutira à The Girl from U.N.C.L.E. Bien écrit, assez surprenant et au final très attachant même si pas spécialement captivant, cette fiction sur la rédemption par l’amour devrait plaire encore plus lors d’une deuxième vision.

************************************************************************************************

  • 4.11- The Dream of Stavros Karas
  • Réalisation : Richard Benedict
  • Scénario : A.I. Bezzerides
  • Guest Star : Michael Constantine
  • Première diffusion 01/12/1965 aux USA - Jamais diffusé en France
  • DVD : VOSTF
  • Note : 6/10

Le Pitch : Karas est un fermier devenu récemment veuf ; il a  toujours deux jeunes enfants à charge. Ayant besoin d’une aide féminine pour tenir sa maison, il attend une épouse qui doit venir de son pays d’origine. Quelle n’est pas sa surprise lorsqu’il constate la jeunesse de la nouvelle arrivante, ce qui ne manque pas de le gêner ! Dans le même temps, il entre en conflit avec ses voisins les plus proches qui ne veulent pas lui faire profiter du cours d’eau qui passe sur leur propriété et dont il aurait bien besoin pour irriguer ses figuiers ; le fait que le fils de cette famille peu aimable ait des vues sur la jeune mariée ne va pas faciliter les choses...

Mon avis : C’est le scénariste de La Maison dans l'ombre (On Dangerous Ground) de Nicholas Ray, Track of the Cat de William Wellman ou encore En quatrième vitesse (Kiss Me Deadly) de Robert Aldrich qui officie sur le 11ème épisode de cette 4ème saison. Et c’est effectivement au niveau de l’écriture que The Dream of Stavros Karas s’en sort le mieux, un casting en revanche assez moyen empêchant cette fiction de se hisser au-dessus de la mêlée. C’est d’autant plus dommage que Richard Benedict s’en tirait plutôt bien derrière la caméra, autrement mieux que lors de sa première contribution à la série qui n’était autre que le très mauvais A Slight Case of Charity, le 21ème épisode de la saison précédente avec pourtant Warren Oates parmi les invités. Le résultat s’avère ici dans l’ensemble cependant très honorable, grâce aussi à la guest star Michael Constantine qui réussit une prestation pleinement convaincante dans un rôle pourtant difficile de prime abord - son personnage aurait pu très facilement s’avérer péniblement larmoyant. Stavros Karas est donc un émigrant grec arrivé depuis quelque temps dans la région ; il est devenu fermier spécialisé dans la culture du figuier, voisin du ranch Shiloh et bon ami du juge Garth. Ayant récemment perdu son épouse, il reste avec deux enfants sur les bras et a beaucoup de mal à assurer non seulement leur éducation mais aussi la tenue de sa maison. Il demande donc à un compatriote resté au pays de lui "envoyer" une femme qui serait d’accord pour le prendre pour époux, faisant dans son courrier miroiter à sa future compagne une vie plutôt assez aisée et tranquille dans la ferme du Wyoming dans laquelle il s’est installé.

Ce jour-là, Stavros se rend à la gare pour accueillir la femme destinée à l’épouser, Eleni ; quelle n’est pas sa surprise lorsqu’il se rend compte de son très jeune âge ! Il avait au départ seulement dans l’idée la venue d’une "aide-ménagère" au sein de son foyer mais ne souhaitait pas nécessairement une femme avec qui il aurait eu des relations intimes. Le charme évident de la jeune femme lui fait alors reconsidérer tout cela mais il est dans le même temps assez gêné : doit-il lui imposer le mariage avec un pauvre et vieil homme comme lui ? La moitié de l’intrigue va tourner autour de ce questionnement et ce problème de conscience. La situation va s’aggraver par le fait qu’un jeune homme tourne autour de la promise de Stavros et que Jennifer, la nièce du Juge Garth avec qui nous avons fait récemment connaissance, conseille à Eleni de ne pas épouser le fermier auquel cas elle ne serait probablement pas heureuse. A côté de ce postulat romantique et romanesque s’en greffe un autre, plus pragmatique, consistant pour notre fermier à essayer de convaincre son voisin de laisser couler son eau sur son terrain afin que ses figuiers puissent être irrigués, seule ressource qui lui permettrait de pouvoir nourrir et faire survivre sa famille. Pas de chance, celui qui courtise la séduisante Eleni est justement le fils de ce voisin acariâtre et foncièrement égoïste qui ne veut rien entendre à un quelconque partage de ses biens, même si cette source lui est somme toute inutile et finit par se déverser dans un cours d’eau qui appartient à tout le monde. Un drame va avoir lieu qui pourrait coûter la vie au pourtant paisible immigrant, comme le lui annonce Ryker qui ne sait plus trop comment gérer ce conflit qui aurait pu se résoudre facilement avec de la bonne volonté...

Deux pistes dramatiques toutes deux aussi bien construites et entremêlées mais qui ne conduisent cependant pas à une puissance ou à une tension grâce auxquelles nous aurions pu être grandement captivés de bout en bout par l'histoire. Faute donc principalement à un casting assez mineur : Louise Sorel, malgré son charme, ne parvient pas vraiment à nous séduire - encore moins lorsqu'elle se met à la guitare - alors que d’un autre côté les bad guys sont interprétés par John Anthony Hayes et Russ Conway avec bien trop de fadeur pour réellement nous inquiéter. Quand à Diane Roter, si la maladresse de son jeu convenait parfaitement à l’épisode dans lequel on la présentait en tant que nièce du juge, elle l’handicape ici un peu, on commence déjà à sentir ses limites en tant que comédienne et à se dire qu’elle aura bien du mal à nous faire oublier Roberta Shore. Heureusement nous pouvons nous reposer sur les prestations au contraire très convaincantes de Lee J. Cobb et Clu Gulager, Le Virginien et Trampas étant dans cette fiction aux abonnés absents. Autrement, le tout se regarde sans déplaisir et les auteurs nous concoctent quelques séquences assez émouvantes voire même plutôt correctement réalisées lorsqu’il s’agit de bifurquer vers le suspense ou l’action, notamment au moment d'aborder le conflit qui oppose les deux voisins et la décision par Stavros d’aller coûte que coûte détourner l’eau afin qu’elle passe au milieu de son verger.

Certes mineur, The Dream of Stavros Karas se révèle pourtant loin d’être désagréable, joliment réalisé par un Richard Benedict qui se fend de compositions et cadrages aussi beaux qu’originaux, très bien écrit aussi, mais qui manque de rigueur dans la direction d’acteurs, de puissance dramatique et de tension. La conclusion et les petits messages plein de bons sentiments laissés ici et là sont assez progressistes et par ce fait plutôt appréciables, mettant en avant l’entraide, la fraternité, l’éducation et ne remettant pas en cause une forte différence d’âge au sein d’un couple. Un épisode familial rondement mené qui repose avant tout sur les épaules d'un très bon Michael Constantine qui évite tout cabotinage.

************************************************************************************************

  • 4.12- The Laramie Road
  • Réalisation : Charles S. Dubin
  • Scénario : Halsted Welles
  • Guest Star : Harold J. Stone & Leslie Nielsen
  • Première diffusion 08/12/1965 aux USA - Jamais diffusé en France
  • DVD : VOSTF
  • Note : 7.5/10

Le Pitch : Alors qu’elle se trouve seule avec son jeune fils, une mère de famille est tuée par deux vagabonds qui rodaient aux alentours à la recherche de nourriture. Le garçon avait pu fuir quelques minutes avant le drame, mandé d’aller prévenir son père, le barman de Medicine Bow (Harold J. Stone). Ryker arrête les deux meurtriers qui nient les faits. Ne souhaitant surtout pas que les criminels puissent être relâchés faute de preuves ou par laxisme, les habitants veulent en venir au lynchage. Ryker, troublé par sa conscience, va avoir fort à faire pour empêcher que la loi et la justice soient bafouées d’autant plus qu’une autre tragédie va suivre...

Mon avis : C’est la première contribution à la série du réalisateur de télévision Charles S. Dubin qui reviendra par la suite signer sept autres épisodes. Il s’agit également de la première et unique collaboration au Virginien du scénariste Halsted Welles, qui a lui aussi beaucoup œuvré pour la petite lucarne mais qui aura néanmoins marqué de son empreinte le septième art par l’intermédiaire de deux films que les westernophiles portent en très haute estime, tous deux réalisés par l’immense Delmer Daves : le mélodrame westernien atypique La Colline des potences (The Hanging Tree) avec Gary Cooper et Maria Schell ainsi et surtout que ce chef-d’œuvre décidément indémodable qu’est 3.10 pour Yuma avec Glenn Ford et Van Heflin. L’un des points communs entre les deux était une belle sensibilité et une grande délicatesse dans la description de leurs histoires d’amour, aussi brève soit-elle pour le second. Il en va de même dans The Laramie Road, les relations et les rapports entre Clu Gulager et la sublimement belle Margaret Blye - que l’on verra dans le domaine du western au cinéma dans Hombre de Martin Ritt mais aussi dans l’amusant et mésestimé L’Or des pistoleros (Waterhole #3) de William A. Graham - faisant partie des éléments qui contribuent à sa grande réussite. Dommage d’ailleurs que la romance entre le shérif et la saloon gal ne se poursuive pas dans les épisodes à venir, la comédienne n'ayant participé qu'à celui-ci.

Puisque nous en sommes à parler des différents participants, signalons aussi au sein du casting les excellents seconds rôles que sont Harold J. Stone (Le Collier de Fer de R.G. Springsteen, Duel dans la boue de Richard Fleischer, Le Faux coupable d’Alfred Hitchcock), Claude Akins (Rio Bravo de Howard Hawks, Les Maraudeurs attaquent de Samuel Fuller, Comanche Station de Budd Boetticher) ainsi et surtout ici qu’un mémorable Leslie Nielsen. Un épisode qui démarrait donc sous de très bons augures, ce qui va se vérifier au visionnage, alors qu'il fait perdre au passage à la série l’un de ses personnages récurrents. Celui-ci va succomber à la violence des deux vagabonds, dont justement celui interprété par un très inquiétant Leslie Nielsen qui prouvait bien avant la franchise des inénarables Naked Gun (Y-a-t-i-l un flic... ?) qu’il pouvait être tout aussi convaincant en salaud intégral qu’en policier gaffeur. Ce récit va aborder une fois de plus le thème peut-être le plus usité du western et donc lancer une énième mais toujours captivante réflexion sur la loi et la justice, comme le faisait d’emblée la série dès son pilote avec immédiatement une attaque assez virulente contre la vengeance et le lynchage, le Virginien lui-même étant dès la première minute écœuré par ses concitoyens qui se jetaient tête en avant dans cette pratique "hors-la-loi" et d’un autre âge. The Laramie Road est peut-être encore plus puissant et culotté car les deux hommes que la population veut lyncher - de peur qu’ils soient relaxés par une justice laxiste ou par manque de preuves - sont deux véritables ordures dont nous avons pu assister aux ignobles méfaits ; car si les protagonistes de cette fiction n’ont aucune preuve quant à la culpabilité des deux vagabonds, nous spectateurs avons été témoins non seulement de leurs crimes odieux mais de leur méchanceté viscérale et sadique.

L’épisode débute par le crime crapuleux d'une aimable mère de famille ; hors champ bien évidemment, mais la tension qui a précédé était telle que nous avons presque eu l’impression d’y assister. Aussi bien dans l’écriture que dans la réalisation et surtout dans l’interprétation de Leslie Nielsen et Berkeley Harris, inquiétants au possible - un sentiment renforcé par leurs accoutrements excentriques et incongrus avec chapeaux melons et ombrelles - il s'agit d'une séquence pré-générique qui marque les esprits tellement elle s’avère bien plus noire que ce à quoi l’on pouvait s’attendre en visionnant une série de cette époque. Le reste sera tout aussi sombre, l’intrigue étant principalement basée sur les problèmes de conscience de Ryker quant à la manière de faire appliquer la loi et quant à l’éthique qu’il faut avoir pour exercer la fonction de shérif. Clu Gulager se voit offrir là l’un de ses rôles les plus difficiles depuis le début et il s’en sort une fois encore avec panache. Ayant été autrefois tenté de prendre un "mauvais chemin", Ryker ne se sent pas apte à assurer son métier d’homme de loi et ne sait pas s’il serait capable de tenir la foule à l’écart de sa prison, voire même de tirer sur ses amis pour protéger des crapules qui finiront néanmoins probablement sur l’échafaud. Un autre élément - voulu ou non - accroit le malaise, la noirceur et le réalisme de l’ensemble : tous les personnages transpirent à grosses gouttes d’un bout à l’autre de l’épisode, ce dernier semblant avoir été tourné durant des journées de forte canicule. Par leur sueur et leurs visages crasseux, on sent ainsi mieux la tension qui habite tous les personnages, la plupart étant prêts à franchir des degrés dans la violence totalement injustifiables sur le plan moral. Le juge Garth et le Virginien auront beau proposer leur aide à Ryker pour faire régner l’ordre, ce dernier décidera in fine d’assumer seul ses décisions afin de se faire respecter dans sa fonction, se frottant sans personne à ses côtés à ses concitoyens parmi lesquels de grands amis qui en début d’épisode fêtaient son anniversaire avec chaleur et bonhomie (jolie séquence de billard au passage) : "If there's no law and order in this town tonight there never will be." Non seulement il réussira, à force d’admirable droiture, à contrôler la foule déchainée mais il apaisera également sa conscience, pouvant alors épingler avec conviction son insigne de shérif puisqu’il le sera devenu par la force des choses.

Grand épisode d’une belle dignité et d’un progressisme certain par sa plaidoirie de la justice contre le lynchage, de la loi qui se doit de protéger aussi bien les coupables que les innocents pour le bon respect de la démocratie. Nous aurons néanmoins noté quelques curieux oublis au sein de l’écriture, comme la disparition totale après le premier quart d’heure du petit garçon qui a perdu sa mère en tout début. De très grandes prestations de Leslie Nielsen, odieux à souhait, et de Clu Gulager à fond dans son personnage torturé ; et enfin un beau visage marquant de Margaret Blye. Épisode d’une grande noirceur, qui démontre une fois encore que Le Virginien était bien plus qu’une banale série dite "familiale" même si cela n’aurait rien eu de rédhibitoire en ce qui me concerne.

************************************************************************************************

  • 4.13- The Horse Fighter
  • Réalisation : Anton Leader
  • Scénario : Richard Fielder
  • Guest Star : Harry Guardino
  • Première diffusion 15/12/1965 aux USA - Jamais diffusé en France
  • DVD : VOSTF
  • Note : 6/10

Le Pitch : Le Virginien et ses hommes n’ayant pas assez de temps pour dresser les derniers étalons capturés, ils ne refusent pas l’aide que Sam Willock (Harry Guardino) leur propose. Connu pour être l’un des meilleurs dompteurs de la région, ce vieil homme n’ayant jamais réussi à réaliser ses rêves faute de moyens prépare en fait avec deux malfrats peu recommandables un mauvais coup, le vol de la paie des cowboys de Shiloh. En attendant, et pour se faire accepter dans la place, Sam travaille d’arrache-pied en prenant Randy sous son aile ; ce dernier se prend d’admiration pour son aîné, ce qui va lui valoir quelques ennuis...

Mon avis : The Horse Fighter est le deuxième épisode réalisé par Anton Leader, le même homme qui avait déjà ouvert cette 4ème saison avec The Brothers. Le scénariste n’était encore lui aussi intervenu qu’une seule fois au sein de la série en signant l’épisode avec Charles Bronson, Nobility of Kings. La réunion de ces deux artistes aboutit à un épisode agréable mais qui est néanmoins loin d’atteindre des sommets, faute principalement à des longueurs et répétitions ainsi qu’à une guest star peu mise en valeur par le maquilleur et qui a légèrement tendance à en faire un peu trop dans son rôle de vieil old timer dompteur de chevaux sauvages. Non pas que Harry Guardino - La Gloire et la peur (Pork Chop Hill) de Lewis Milestone, Police sur la ville (Madigan) et Dirty Harry de Don Siegel, Le Toboggan de la mort (Rollercoaster) de James Goldstone - soit un mauvais comédien mais sa prestation manque ici un peu de sobriété. Son personnage, Sal Willock - "born to run wild and free" -, nous le rencontrons dès la première scène, assis dans un saloon en compagnie de deux hommes antipathiques et que l’on nous présente d’emblée comme des malfrats qui préparent un coup. Il s’agira pour l’un d’entre eux de s’infiltrer dans le ranch Shiloh et d’attendre le bon moment pour prévenir ses acolytes de venir voler la paye des cowboys une fois celle-ci arrivée sur place.

Comme c’est souvent le cas au sein de la série, le choix des auteurs a été de ne pas tabler sur un twist final révélant la véritable personnalité du personnage principal du récit. En effet, une fois encore il n’y a expressément aucune surprise pour le spectateur qui est à nouveau encore bien en avance sur les protagonistes de l’intrigue ; on sait donc dès la première séquence que Sam Willock ne vient pas apporter son aide au Virginien dans un but désintéressé. Cela ne nous empêchera pas de lui trouver des côtés positifs et des aspects attachants car l’on sent qu’il en est arrivé à cette extrémité par aigreur et dépit, son travail acharné des années durant ne lui ayant apporté aucun salaire décent pour pouvoir vivre son rêve - avoir son propre ranch et ses propres bêtes à dompter - et une tragédie familiale l’a rendu encore plus désappointé d'autant qu'il s'en estime coupable. Ceci étant dit, son caractère soupe-au-lait et son entêtement n’en font pas un personnage spécialement aimable, d'autant qu'on le voit entraîner avec lui notre si sympathique Randy qui, admiratif de cet homme qui l’a pris sous sa coupe et finissant presque par l’idolâtrer - au point d’envisager partir créer son ranch avec lui -, va en arriver aux mains avec son patron lors d’une séquence assez vigoureuse de combat à poings nus. Avant que le récit se concentre principalement sur le coup préparé par nos trois bandits, une majeure partie de l’intrigue va tourner autour de cette relation père/fils qui se noue entre le dresseur d’animaux et notre tout jeune cow-boy, qui apprend par la même occasion des méthodes inédites de domptage ; et d'un point de vue documentaire cela demeure assez intéressant.

De nombreuses séquences vont donc s'appesantir sur les étalons sauvages en train de se faire domestiquer par nos deux compères. Cependant ces derniers n’écoutent et ne suivent pas les consignes de leur régisseur en prenant des risques inconsidérés, des conflits vont naître de cette situation avec notamment la bagarre évoquée ci-dessus. Néanmoins le Virginien se révèle étonnement plutôt conciliant dans l’ensemble, acceptant même de réembaucher l’homme qu’il vient de licencier pour faire plaisir à Randy. Il faut dire que l'intendant a connu Sam durant sa jeunesse et que c’était alors lui qui était en admiration devant cet homme capable de dresser les bêtes les plus récalcitrantes ; on ne démonte pas ses idoles aussi facilement même si ce dernier n'est pas dupe de ce qu'il est devenu, se décrivant ainsi : "Worthless, lying, cheating horse fighter at the end of his rope" ! Le postulat était vraiment captivant surtout psychologiquement parlant ; dommage alors que l’ensemble s'avère aussi répétitif à travers ces séquences de dressage évoquées et que l’écriture du personnage interprété par Harry Guardino n’ait pas été plus subtile. Après de longs moments passés au ranch Shiloh au cours desquels le faible talent dramatique de Diane Rotter se sera confirmé - ce qui est d’autant plus triste qu’elle nous avait fait bonne impression à ses débuts dans la série -, l’intrigue continue dans d'autres lieux à partir de la poursuite finale par les hommes de Shiloh - accompagnés par Ryker - des trois bandits ayant réussi leur coup. Tout ceci est assez bien réalisé, les anfractuosités du paysage sont plutôt bien utilisées et le final s’avère sec même si un peu trop abrupt. On restera donc un peu sur notre faim, surtout au vu d’une proposition initiale qui laissait à augurer bien mieux.

Le visionnage aura néanmoins été plutôt plaisant, le réalisateur semblant beaucoup aimer les chevaux et les filmant avec une belle efficacité jusqu’au très joli plan final - qui pourrait néanmoins provenir d’un film Universal de l’époque -, le scénariste parvenant à ne jamais nous ennuyer, Randy Boone et James Drury étant dans de très bons jours, le premier entonnant même avec talent la célèbre chanson Worried Man Blues. A signaler enfin un duo assez inquiétant et qui permet à la tension de ne pas retomber lors des trop rares apparitions des comédiens qui l'interprète : Kelly Thordsen - cette même année dans La Parole est au colt (Gunpoint d'Earl Bellamy aux côtés de Audie Murphy - et Don Dubbins - remarquable dès son premier rôle dans La Loi de la Prairie (Tribute to a Bad Man) de Robert Wise. Un épisode pas inoubliable mais loin non plus d’être honteux d’autant que le Virginien se révèle à nouveau assez progressiste, disant à Randy de ne pas juger un homme uniquement sur ses mauvaises actions qui, dans le cours d’une vie, peuvent ne représenter qu’une infime partie de tout ce qu’il a accompli.

************************************************************************************************

  • 4.14- Letter of the Law
  • Réalisation : Charles S. Dubin
  • Scénario : Donn Mullally
  • Guest Star : James Best & Simon Oakland
  • Première diffusion 22/12/1965 aux USA - Jamais diffusé en France
  • DVD : VOSTF
  • Note : 4/10

Le Pitch : Curt Wesley (James Best) a autrefois été accusé d’un vol ferroviaire et a écopé suite à cela de plusieurs années de prison. Malgré encore quelques doutes en suspension et l’argent dérobé toujours volatilisé, la justice, grâce à l’insistance de Garth, le libère sur parole. Le voici ainsi de retour auprès de sa charmante épouse. Mais Charles Sanders (Simon Oakland), le détective des chemins de fer qui continue à croire en sa culpabilité, le surveille de près, attendant la moindre erreur de sa part pour le faire emprisonner à nouveau. Lorsque Curt se voit accuser d’un second vol, Ryker va mener l’enquête de son côté...

Mon avis : Au générique, Charles S. Dubin, réalisateur du superbe The Laramie Road peu de temps avant, et surtout Donn Mullally, scénariste qui ne signera que six épisodes du Virginien mais qui avait prouvé son immense talent et sa remarquable sûreté d’écriture durant les deux premières saisons avec le magnifique Impasse (avec Eddie Albert), le curieux et réjouissant The Money Cage (avec Steve Forrest), le mémorable Siege (avec Philip Carey) - à ce jour toujours l’un des plus grands épisodes de la série - et enfin The Invaders (avec Ed Begley) dont le scénario était un modèle d’intelligence et de rigueur. Tout cela pour dire que malgré des auteurs doués et des comédiens qui n’ont presque rien à se reprocher (James Best a pourtant assez de mal à me convaincre), Letter of the Law se révèle une sacrée douche froide faute principalement à une histoire invraisemblable, tirée par les cheveux, mélodramatique, larmoyante et au final peu captivante. Le postulat de départ était pourtant intrigant, même si d’emblée assez peu crédible, plus proche d’une intrigue de film noir que d’un récit westernien. Le juge et sa nièce doutant de la culpabilité de Curt, un jeune homme condamné pour un vol ferroviaire, se rendent chez le gouverneur pour le convaincre du manque de preuves qui a abouti à un verdict de deux ans d’emprisonnement.

Comme par hasard, alors que le Virginien s’en retourne à Shiloh par le train, il assiste à un cambriolage par un homme qui va être tué lors de la poursuite qui s’ensuit et qui, tiraillé par sa conscience, va confesser en mourant être le coupable du vol dont était accusé le prisonnier dont on parle juste avant. Même si le butin n’a jamais été retrouvé, le gouverneur est obligé de convenir que de laisser Curt enfermé plus longtemps ne serait pas très juste ; il le libère donc sur parole. Curt rentre donc chez lui aux environs de Medicine Bow rejoindre son épouse qui est évidemment aux anges d’avoir retrouvé son mari bien plus tôt que prévu. Tout pourrait aller pour le mieux si un détective des chemins de fer ne venait pas s’en mêler en harcelant le couple ; effectivement, il continue à croire dur comme fer à la culpabilité de Curt, tout comme son bras droit dont on apprendra plus tard qu’il est secrètement amoureux de la femme de l’homme qu’il dit être coupable (tiens, tiens, ça pourrait bien l’arranger !). Les deux hommes vont alors tout mettre en œuvre pour lui faire commettre une erreur qui leur permettrait de l’emprisonner à nouveau... et de pouvoir éventuellement mettre la main sur le butin volatilisé et sur la femme esseulée. Ils vont aller jusqu'à organiser une mise en scène qui ferait penser que Curt est à nouveau à l’origine d’un cambriolage qui vient de se dérouler à bord d’un train ; en effet, on retrouve son manteau sur les lieux du méfait !

Je pense que vous avez déjà compris, à la lecture de cette description du scénario, pourquoi je parlais d’emblée d’une histoire invraisemblable et tirée par les cheveux. Cela aurait pu très bien passer sauf que la suspension d’incrédulité ne fonctionne pas vraiment, les auteurs se prenant bien trop au sérieux, ce qui est en totale contradiction avec ces ficelles vraiment trop grosses mises en avant et qui ont pour résultat de ne pas parvenir à nous intéresser plus avant à ce qui se déroule sous nos yeux. Dommage car James Drury tout comme Clu Gulager font ce qu’ils peuvent et plutôt bien, ainsi que les guest stars et notamment Simon Okaland et James Best, tous deux bien connus des cinéphiles. Le premier joue par exemple le policier qui se fait chahuter tout au long de West Side Story de Robert Wise ou encore le médecin qui explique la personnalité de Norman Bates à la fin de Psychose d'Alfred Hitchcock, le second est entre autres l’un des amis du Billy le Kid interprété par Paul Newman dans Le Gaucher (The Left Handed Gun) d’Arthur Penn. Bref, malgré beaucoup de talent au sein des participants à cet épisode, qu’ils soient techniciens ou artistes, on décroche assez vite et le suspense mis en place à du mal à nous faire reprendre pied dans le récit. Pour la petite histoire des protagonistes de la série, au cours de cet épisode on apprendra que Ryker - qui sera celui qui résoudra toute l'affaire - n’était âgé que de deux ans lorsque son père mourut. Quoi qu'il en soit, malgré toute la bonne volonté du monde, le spectateur n’en aura alors plus que faire d’autant qu’un élément psychologique un peu lourdingue viendra s’ajouter pour gâter encore plus le tout : il s'avère que l’obsession et l’acharnement du détective proviendraient d’un fait marquant durant sa prime jeunesse. L’explication de cette sorte de démence est quasiment grand-guignolesque, comme j’ai pu le lire par ailleurs.

Trop d’excès et d’invraisemblances font que Letter of the Law est plus fatigant que réellement passionnant. Dommage au vu de ce qui avait été mis en place, des hommes talentueux qui y ont participé et des quelques paysages très bien utilisés. Nous n'aurons même pas eu pour nous consoler le charme d'une actrice, une longue présence de Lee J. Cobb, une petite pointe d'humour, quelque fantaisie que ce soit... Pas même la traditionnelle chanson accompagnée à la guitare par Randy... que cependant certains ne regretteront pas. Pas honteux mais très peu mémorable.

************************************************************************************************

  • 4.15- Blaze of Glory
  • Réalisation : Alexander Singer
  • Scénario : John & Ward Hawkins
  • Guest Star : Leif Erickson & Joan Freeman
  • Première diffusion 29/12/1965 aux USA - Jamais diffusé en France
  • DVD : VOSTF
  • Note : 7.5/10

Le Pitch : Bill King (Leif Erickson), l’ancien shérif de Medicine Bow ayant permis à la petite ville de trouver la paix, vit désormais seul dans son ranch avec sa fille Judy (Joan Freeman) dont Trampas est fou amoureux. Ne pouvant plus acquitter ses traites, Bill est sur le point se faire saisir sa petite propriété par la banque. Il va être sauvé par Sam Coates (Michael Sarrazin) qui lui offre un petit sac d’or soit disant pour le récompenser de l’avoir remis en liberté alors qu’il était encore mineur. Mais on comprend bien vite non seulement que son geste est loin d’être philanthropique mais également que la somme donnée provient de l’attaque d’un convoi...

Mon avis : Ce qu’il y a de vraiment satisfaisant et réconfortant avec cette série est qu’un épisode raté est rarement suivi d’un deuxième. Et souvent même au contraire, il s’ensuit immédiatement une grande réussite qui vient vite effacer la déception précédente. C’est donc une fois de plus le cas avec, faisant suite à l’invraisemblable et peu convaincant Letter of the Law, ce superbe Blaze of Glory. Le réalisateur de cette fiction mémorable a principalement travaillé pour la petite lucarne et a fini sa carrière en tournant des épisodes de la plupart des différentes séries de la franchise Star Trek. Quant au duo de scénaristes, John et Ward Hawkins, ils en sont à leur cinquième participation au Virginien ; le meilleur (The Small Parade) côtoyant le pire (The Fatal Journey), leur travail sur Blaze of Glory rejoint donc allègrement la première catégorie. La principale originalité de cet épisode presque crépusculaire provient d'un ton mélancolique qui perdure du début à la fin, le postulat de départ l'expliquant facilement. Le protagoniste principal de l’histoire est un shérif à la retraite qui a autrefois beaucoup œuvré pour sa ville ; c’est même lui qui a apporté le calme et la paix à Medicine Bow. Pourtant il se voit sur le point d’être expulsé de sa modeste ferme pour un simple problème financier, du fait de ne plus avoir assez de moyens pour payer ses traites à la banque. Le spectateur ressent une profonde tristesse en constatant qu’un homme qui a tant fait pour sa bourgade soit désormais traité avec autant d'indécence maintenant qu’il est devenu un citoyen lambda. Le fait que le génial Leif Erickson interprète cet homme de loi retraité et vieillissant renforce la puissance émotionnelle de la situation.

Le comédien dont le visage est extrêmement connu - même si le nom reste certainement obscur pour la plupart des spectateurs - avait déjà joué deux fois dans la série ; on se souvient surtout de son Oncle Charley dans Return a Stranger, un homme foncièrement bon et haut en couleurs de la même génération que Garth. Ici son personnage est beaucoup plus sobre et il s’en tire remarquablement bien, extrêmement touchant. Il ne comprend pas plus que nous, spectateurs, comment les financiers peuvent en être arrivés à avoir oublié tout ce qu’il avait fait et donné pour leur ville alors qu’il en était le shérif. Il se trouve complètement décontenancé quand il comprend que, malgré son passé - on ne peut plus respectueux -, on est prêt à le chasser pour cause de dettes qu’il n’arrive plus à payer. Cette situation est d’autant plus triste qu’il est désormais veuf et qu’il vit avec sa fille toute aussi douce et humaine que lui. Cette dernière est interprétée par une habituée de la série elle aussi, déjà au générique de trois précédents épisodes, la charmante et talentueuse Joan Freeman. La jeune femme est courtisée par un Trampas qui a rarement été aussi amoureux, sauf que malheureusement pour lui il s’agit d’un amour non partagé, Judy l’appréciant énormément mais n’ayant pas l’intention de faire sa vie avec lui, d’autant plus qu’elle ne souhaite pas rester vivre dans le coin mais rêve d’habiter dans une grande ville. Un homme de loi vieillissant dont tout le monde semble avoir oublié les bienfaits, un cowboy transi d’amour pour une femme qui ne l’est pas... on comprend mieux ce ton de mélancolie annoncée d’emblée.

Tout ceci va être entremêlé de situations bien plus dramatiques : le vol d’une cargaison d’or vient de se produire et il se pourrait que des méfaits semblables se renouvellent puisque des transports du précieux métal ont lieu régulièrement tous les mois, partant de la mine pour être acheminé jusqu’à la ville. Des malfrats se trouvent donc sur place et le spectateur sait dès le début qui ils sont puisque le chef de bande se présente à l’ex-shérif en mettant d'emblée sa conscience mal à l’aise, lui faisant comprendre que tout ceci est de sa faute pour l’avoir relâché alors qu’il était mineur en croyant à son innocence, alors qu’il avait bel et bien commis les délits qu’on lui imputait (l’agression d’une personne âgée) et qu’il a ensuite continué à prendre un mauvais chemin. De plus, pour compliquer le tout, cette fripouille lui offre l’un des sacs volés afin qu’il puisse régler ses dettes à la banque et ainsi ne pas être spolié de son domaine. Bill se sent obligé d’accepter pour garder son ranch, pour que sa fille ne se retrouve pas elle aussi à la rue et surtout pour qu’elle ne soit pas inquiétée par ce psychopathe qui menace de s’en prendre à elle. Ce jeune homme extrêmement malsain - puisqu’il tourne aussi autour de Judy - est interprété avec talent et efficacité par Michael Sarrazin dont on se rappelle surtout sa prestation dans On achève bien les chevaux (They Shoot Horses, Don't They ?) de Sydney Pollack ou encore dans son rôle du fils illégitime de Henry Fonda dans Le Clan des irréductibles (Sometimes a Great Notion) de Paul Newman. Dans cet épisode du Virginien, il fait froid dans le dos tout comme ses deux acolytes (les inquiétants Rayford Barnes et Hal Bokar). Quant au convoyeur attaqué, il s’agit du bien plus célèbre Karl Swenson qui rien que dans le domaine du western tourna avec un nombre impressionnant de grands noms comme Delmer Daves, Jack Arnold, Henry Hathaway, Don Siegel, Sam Peckinpah, John Sturges...

Casting de premier ordre, scénario aussi attachant que tendu, mise en scène carrée - si l’on excepte quelques malencontreux cadrages faisant apercevoir en arrière-plan des arroseurs automatiques -, séquence finale touchante - mais qui ressemble énormément à une dizaine d’autres déjà rencontrées au cours du Virginien - , belle partition musicale pour un épisode qui peut facilement entrer dans le top 10 de la série. A noter cependant que seul Trampas joue un rôle de relative importance dans cet épisode dans lequel tous les autres "réguliers" ne font que de courtes apparitions, et qu’étonnement aucun de nos héros habituels sera sur place à temps pour régler l’affaire qui se terminera en efficace mais tragique règlement de comptes, finissant de faire de cet épisode un sommet assez mémorable de la série.

************************************************************************************************

  • 4.16- Nobody Said Hello
  • Réalisation : Alf Kjellin
  • Scénario : Herb Meadow
  • Guest Star : James Whitmore & Virginia Grey
  • Première diffusion 15/09/1965 aux USA - Jamais diffusé en France
  • DVD : VOSTF
  • Note : 4/10

Le Pitch : Lorsqu’il apprend que le Capitaine Pritikin (James Whitmore) de l’ex-armée confédérée vient de finir de purger sa peine de prison et qu’il vient se réinstaller à Medicine Bow, Ansil perd les pédales et va pour le provoquer en duel, ayant perdu un bras par sa faute alors qu’il était emprisonné dans l’établissement que cet officier dirigeait avec une poigne de fer durant la guerre civile. Sauf que c’est Pritikin qui l’abat. Les habitants souhaitent que sa famille et lui quittent la région mais Garth, qui l’avait alors sauvé de la pendaison, essaie à nouveau de le défendre d’autant plus que sa nièce Jennifer est amoureuse du fils du Capitaine...

Mon avis : Ce milieu de saison 4 s’avère une véritable montagne russe qualitative, faisant se succéder formidables réussites et gros ratages, ou tout du moins épisodes peu captivants. On comprendra donc qu’après le splendide Blaze of Glory, Nobody Said Hello puisse encore une fois grandement décevoir, d'autant plus qu’à nouveau le postulat de départ était intéressant, traçant le portrait d’un criminel de guerre qui, à sa sortie de prison, revient vivre auprès de son épouse et de son fils sans s’être remis en question quant aux atrocités qu’il a commises durant la Guerre de Sécession, continuant à débiter sans sourciller des énormités dignes d’un dignitaire nazi et se vantant des tortures qu’il infligeait à ses prisonniers. Le personnage était d’emblée monstrueux, il n’y avait donc nul besoin d’exagération supplémentaire dans l’écriture et pourtant le scénariste tombe à pieds joints dans le piège, manquant de la plus élémentaire des nuances pour le dépeindre, le rendant au final plus grotesque qu’inquiétant, le jeu sans finesse de James Whitmore n’arrangeant pas les choses, tout au contraire. Dommage car Herb Meadow a écrit quelques sympathiques scénarios pour le cinéma - Stranger on Horseback de Jacques Tourneur, The Redhead from Wyoming de Lee Sholem - et que le comédien James Whitmore nous a souvent fait jubiler aussi bien dans des genres sérieux que dans la pure comédie voire même musicale : impossible d’oublier son jubilatoire duo avec Keenan Wynn dans le génial Kiss Me Kate de George Sidney.

La première séquence pré-générique nous fait penser que la série va retrouver un peu de fantaisie après plusieurs épisodes très sombres. On voit ainsi nos cowboys en pleine nature se faire "tirer le portrait" par un ex-soldat nordiste devenu photographe, joué par Peter Whitney qui en est à sa troisième participation à la série - et qui ne lui porte pas particulièrement chance (on aurait aussi voulu oublier le médiocre A Bride for Lars par exemple). Et il s’agit effectivement d’une scène pleine de fraicheur et de bonne humeur. Puis notre ex-Unioniste qui a perdu un bras lors de la Guerre de Sécession apprend que son tortionnaire qui en est la cause, le capitaine Pritikin, vient d’être libéré de la prison de Leavenworth et qu’il revient vivre à Medicine Bow auprès de son épouse et de son fils. Cet homme affable se met alors à boire et à devenir haineux ; ivre de vengeance, il part attendre Pritikin à sa descente du train et le provoque avec véhémence ; pas de chance, tout cela lui retombe dessus et il finit pas moins que par se faire abattre, son adversaire prétextant alors la légitime défense ; ce qui s'avère bien réel, le juge Garth allant appuyer ce fait. La défense de Pritikin en cour martiale alors qu’il était jugé pour crimes de guerre avait en quelque sorte lancé Garth, l’accusé lui en faisant désormais grief, disant que son cas lui avait apporté la notoriété ainsi que la richesse et qu’il souhaiterait maintenant en être un peu "rémunéré" ("everything you are, Judge Garth, started with me") . Un incroyable culot alors que le juge avait réussi à lui éviter la potence !

Malgré ce manque indécent de reconnaissance, Garth ne sait néanmoins pas trop sur quel pied danser et freine un peu la demande de ses concitoyens de chasser la famille sans plus attendre ; en effet, l’aimable épouse de ce monstre vient de tomber malade, le fils de ce couple est amoureux de sa nièce Jennifer et en plus il vient de le faire embaucher à Shiloh, ne supportant pas que ce jeune homme qui n'a rien à se reprocher soit rejeté de toutes parts à cause du passé de son père. Même si l'on aurait pu penser à la lecture de ce résumé que Garth tiendrait un rôle d'importance dans cette histoire, l’épisode va plus principalement reposer sur les épaules de James Whitmore et de son personnage d’une monstruosité absolue, les autres invités se révélant sacrifiés par le scénariste, que ce soit Virginia Grey qui joue l’épouse ou Steve Carlson qui interprète le fils. Diane Roter n’arrive décidément pas à nous convaincre. Quant à Lee J. Cobb il n’a pas vraiment eu de chance : quelle tristesse qu’il doive quitter la série sur un épisode aussi moyen ! A aucun moment on n’évoquera le départ de Garth qui sera a priori explicité plus tard au cours de la saison, mais cependant il n’apparaitra ensuite plus jamais. Espérons que ses successeurs soient aussi talentueux que ce très grand comédien qui nous aura accompagnés durant presque quatre saisons complètes et grâce à qui certains épisodes ont acquis une dimension supplémentaire. Les dernières minutes de l’épisode relèvent un peu le niveau, que ce soit la mort de Pritikin - ne m’accusez pas de spoiler car dans n’importe quelle fiction de l’époque un homme aussi odieux n’aurait pas tenu le coup jusqu’au bout non plus ; et d’ailleurs le juge l’avait prédit en disant que les serpents comme lui trouvent la mort en se mordant la queue - ou encore le touchant départ de son fils qui remercie Jennifer de lui avoir fait se sentir meilleur et se juger mieux ("Thanks for liking me and wanting me to like myself better").

Quelques autres petites occasions de se réjouir au sein d’une fiction un peu outrancière : deux chansons par Randy Boone dont une dont il fut le compositeur, Frog Dog Polliwog Song ; une efficace et vertigineuse séquence de suspense en haut d’un échafaudage ; une scène intéressante au cours de laquelle Trampas refuse de porter l'étoile d'adjoint quand Ryker lui demande de protéger Pritikin, estimant qu’il ne pourrait pas mener à bien cette mission, se sentant incapable de défendre une telle hyène. Il y avait un sacré potentiel de départ malheureusement gâché par un manque de nuances à tous les niveaux, aussi bien dans l’écriture que dans l’interprétation. Le prochain épisode devrait relever le niveau si la scie continue à avoir des dents régulières.

************************************************************************************************

  • 4.17- Men with Guns
  • Réalisation : Leon Benson
  • Scénario : Halsted Welles
  • Guest Star : Telly Savalas & Brenda Scott
  • Première diffusion 12/01/1966 aux USA - Jamais diffusé en France
  • DVD : VOSTF
  • Note : 7/10

Le Pitch : Trampas et Randy se rendent dans la petite ville de New Hope pour acheter des chevaux au Colonel Bliss (Telly Savalas). Sur leur route, ils croisent deux femmes qui enterrent l’époux de l’une d’entre elles ; celui-ci vient de succomber à une blessure par balles causée par les hommes du shérif. Ces derniers, à la demande de Bliss, le propriétaire des terres qui souhaite désormais les récupérer, exproprient un à un et sans scrupules tous les fermiers de cette communauté d’émigrants pacifistes. Trampas tombe amoureux de la fille du chef de la congrégation (Brenda Scott) et essaie de motiver ces hommes non-violents à se défendre par les armes...

Mon avis : L’épisode précédent n’était pas très bon, le suivant le sera donc : c’est un peu le constat et le leitmotiv de ce milieu de saison 4 en dents de scie. Mais comme les réussites se révèlent souvent remarquables, les ratages sont vite oubliés. Même si la série a atteint des sommets bien plus élevés, Men with Guns est excellent et aborde une nouvelle fois un thème qui a toujours abouti à des épisodes d’une remarquable tension, à savoir celui de la mainmise d’une petite ville par de riches propriétaires ou des businessmen véreux et sans scrupules avec sous leurs bottes les hommes de loi et les juristes qui leurs obéissent sans broncher. Leon Benson - dont Men With Guns sera malheureusement le dernier épisode qu’il réalisera - était d’ailleurs déjà aux manettes du superbe Show Me a Hero avec un formidable Richard Beymer en principale guest star. Ces deux épisodes possèdent donc aussi beaucoup de points communs avec un autre sommet de la série, le 13ème de la saison 2, Siege, qui nous montrait déjà Trampas seul aux prises avec des Comancheros ayant fait main basse sur une ville éloignée de Medicine Bow. Comme dans les épisodes précédents qu’il réalisa (dont celui émouvant qui narrait le mariage de Betsy avant son départ définitif de la série), Leon Benson fait preuve d’une grande habileté notamment dans son utilisation inspirée des extérieurs, des gros plans et du hors-champ, ainsi que d’une efficacité certaine lorsqu’il s’agit de filmer des séquences mouvementées.

Des protagonistes récurrents de la série, nous ne verrons ici que Trampas et Randy, partis tous deux acheter des chevaux à un certain Colonel Bliss dont ils ne se doutent pas qu’il s’agit d’un tyran ayant pris la ville de New Hope sous sa coupe. Quatre ans en arrière, il a accepté de louer ses terres à toute une communauté d’émigrants pacifistes venus s’installer ; ces derniers ont travaillé d’arrache-pied pour arriver à subvenir à leurs besoins et ont en quelque sorte construit et développé la ville. Désormais, voulant tout récupérer en apprenant que les prix du foncier se sont envolés, le colonel les fait expulser un à un par le shérif qui n’hésite pas à tirer quitte à tuer s’ils ne veulent pas déguerpir. Le shérif arrive toujours à cheval avec ses cinq hommes qui forment une sorte de "horde sauvage". D’ailleurs ,le réalisateur Leon Benson les filme ainsi : une bande inquiétante rien que par leur manière de chevaucher et de se présenter devant les habitants qui ne savent pas comment réagir puisque leur religion leur interdit en quelque sorte d’avoir recours à la violence. Ce n’est pas que la tragédie finale donnera raison aux pacifistes, car s’ils s’étaient laissés faire ils seraient tous morts ou en fuite, mais les auteurs ne seront pas non plus tombés dans le piège de la justification de l’autodéfense. Témoin ce dernier échange entre Trampas et le chef de la communauté qui les fait tomber d’accord sur un espoir dans un proche avenir de ne plus jamais avoir à en passer par les armes mais uniquement par la diplomatie et l’intelligence. Une conclusion tout à fait digne d’une série qui s’est toujours voulue progressiste.

Pour en revenir à notre récit écrit par Halsted Welles (3.10 pour Yuma), Trampas et Randy arrivent à New Hope au moment où l’un des habitants s’est fait abattre suite à son refus d’obtempérer lorsque les hommes de loi étaient venus pour le faire quitter de force les lieux. Trampas étant tombé immédiatement amoureux de la charmante fille du patriarche et leader de la communauté - il n'est pas très difficile de le comprendre -, il va tenter de faire entendre raison aux citoyens en leur proposant de les aider à se défendre. Le talent et la beauté de Brenda Scott (déjà mémorable dans l’épisode Dark Destiny de la saison 2) aide à ce que cette romance soit totalement crédible et émouvante, les séquences la réunissant avec Doug McClure s’avérant vraiment superbes, d’une belle sensibilité et d’une grande délicatesse. Les fermiers de New Hope doivent donc lutter contre un despote totalement imprévisible et à vrai dire un peu fou, capable d’un côté de sacrifier 200 mineurs, de l’autre de pleurer à l’évocation de son épouse défunte. Habillé en dandy, affublé d’une barbichette assez croquignolette, Telly Savalas interprète avec jubilation ce personnage haut en couleurs certes parfois caricatural mais aussi de temps en temps assez attachant comme lors de cette séquence au cours de laquelle Bliss - qui n’a de colonel que l’appellation, en fait ex-barbier ayant fait fortune grâce à l’exploitation de mines d’argent - espionne les habitants de la ville en discourant sur leur situation, comme s’il découvrait le mal qu’il avait pu leur faire sans nécessairement s’en rendre compte. Un homme tout aussi cruel qu'émotif qui permet au futur Kojak de s’en donner à cœur joie, de tour à tour nous amuser, nous faire frissonner d’effroi par son rire de dément puis même nous émouvoir sur la fin.

La violence finalement choisie par les concitoyens pour se défendre face à une justice dévoyée aura un prix, coutera la vie de quelques-uns dans les deux camps lors d’une séquence finale très puissante qui voit même Trampas laisser couler de sincères larmes. Excellente interprétation d’ensemble y compris les comédiens jouant les notables soudoyés par cet excentrique tyran d’opérette ou encore le fils de Bliss (Buck Taylor), sans oublier Robert F. Simon dans la peau du chef de la communauté qui prône la non-violence quitte à se faire tuer sans riposter. On aimerait bien que la série se poursuive en restant au moins à un tel niveau de qualité ; croisons les doigts pour que le soufflé ne retombe pas déjà dès l’épisode suivant.

************************************************************************************************

  • 4.18- Long Ride to Wind River
  • Réalisation : Paul Henreid
  • Scénario : Sy Salkowitz
  • Guest Star : John Cassavetes
  • Première diffusion 19/01/1966 aux USA
  • DVD : VOSTF
  • Note : 3/10

Le Pitch : En rentrant chez lui, Benjy trouve son épouse en train d’être molesté par un certain Hobey ; devant le Virginien qui l’empêche alors de faire une bêtise, il jure de le tuer. Le lendemain l'agresseur est retrouvé mort et bien évidemment Benjy est accusé du meurtre malgré le fait de clamer son innocence. Il est même condamné à mort, le Virginien ayant dû témoigner de la phrase de menace que son ami avait prononcée la veille de l’assassinat. Le régisseur souhaite néanmoins tout mettre en œuvre pour lui sauver la tête ; pour se faire il doit trouver un certain McIntosh (John Cassavetes), trappeur que Benjy a vu chez Hobey le matin même…

Mon avis : Vraiment très déstabilisant ce deuxième tiers de saison 4 : une fois sur deux il faut se remettre en condition pour vouloir poursuivre tellement l’épisode précédent aura été moyen voire mauvais. Rarement pour l’instant la série n’aura été aussi inégale, faisant alterner sommets et abimes avec une étonnante et malheureuse régularité. Vous aurez ainsi vite compris que l’épisode avec Telly Savalas ayant été une belle surprise, celui-ci avec John Cassavetes en Guest star s’avère au contraire plutôt calamiteux, la faute en incombant principalement, outre à un scénario alambiqué, à la direction d’acteurs de Paul Henreid, plus connu d’ailleurs comme comédien que comme réalisateur puisqu’il fût l’un des grands acteurs de l’écurie Warner durant les années 40, à l’affiche de certains mélodrames de Irving Rapper aux côtés de Bette Davis (Now, Voyager) mais surtout connu pour avoir interprété Victor Laszlo, le mari de Ingrid Bergman dans le chef d’œuvre de Michael Curtiz, Casablanca. Pour en revenir à cette absence de direction d'acteurs, on s'en rend compte dès le début, surpris que nous sommes du jeu de Clu Gulager bien plus (trop) expansif qu’à l’accoutumée malgré son temps de présence très limité dans cet épisode. Puis ceci se confirmera avec les autres dont, parmi les comédiens récurrents, James Drury absolument pas convaincant au cours des séquences où il se met à délirer faute à la fatigue et à la chaleur. Heureusement, hormis lors de ces scènes, il reste ce qu'il y a de mieux dans cet épisode, son talent permettant de ne pas trouver cette fiction encore plus catastrophique qu'elle ne l'est.

Il en va de même concernant les différentes Guests Stars, John Cassavetes en premier lieu ; il est légitime de se demander comment on a pu avoir cette idée incongrue et saugrenue de l’affubler d’un tel postiche de barbe ainsi que de costumes aussi risibles pour en faire au final un des trappeurs de montagnes les moins crédibles qui soit d’autant qu’il est en plus censé représenter un patriarche alors que l’acteur n’avait que 35 ans. Dramatiquement parlant, il n’est guère plus concluant, son personnage qui se voudrait haut en couleurs finissant vite par nous désintéresser totalement, tout comme l’intrigue d’ailleurs qui part dans tous les sens, cette fiction étant aussi peu captivante dans ses moments mouvementées que lors des scènes dialoguées, bavardes et relativement peu intéressantes. Mais avant de rentrer rapidement dans le vif de l’histoire, signalons encore Dub Taylor qui cabotine à outrance et qui en devient rapidement pénible ; un acteur pourtant talentueux et au visage facilement reconnaissable dont on ne compte plus les apparitions dans de nombreux films de Delmer Daves, Andrew V. McLaglen ou Sam Peckinpah. Quant à Pilar Seurat, son interprétation d’une jeune indienne frôle le ridicule. Il faut dire à la défense des comédiens que les différents protagonistes ne sont pas gâtés par un scénario à coté de la plaque. Bref d’une part si le nom du scénariste Sy Salkowitz est aussi peu connu c’est pour une bonne raison, de l’autre Paul Henreid aurait mieux fait de rester devant la caméra : sa réalisation ne vaut guère mieux que sa direction d'acteurs, n’arrivant jamais à nous captiver par de quelconques idées de mise en scène malgré une histoire qui avait du potentiel.

En effet, elle commençait une nouvelle fois par une critique très peu voilée de la peine de mort puisque le spectateur est quasiment certain de l’innocence du condamné surtout après que ce dernier ait tenu un discours qui respirait une grande sincérité : "A man spends his whole life thinking about how to live right. When he gets in trouble, he keeps telling himself, 'be truthful and be honest, they can't hang you for something you didn't do.' But they're gonna!" ; le scénario mettait encore en avant le progressisme des auteurs puisque le Virginien refuse catégoriquement que son ami se fasse vengeance après qu’il ait surpris son épouse agressée par un sale type : "We've got a sheriff for things like this, Benjy." Mais le scénario est non seulement invraisemblable mais aussi inutilement tarabiscoté, semblant également étiré mécaniquement dans le seul but de pouvoir atteindre les 72 minutes réglementaires. Et du coup, alors que l’intrigue était partie sur la tentative pour le Virginien de trouver le véritable coupable d’un meurtre afin d’éviter la pendaison d’un ami, elle bifurque à mi-parcours vers le plus pur 'serialesque' : la fuite du Virginien qui avait été fait prisonnier par l’homme qu’il recherchait qu’il prend alors à son tour en otage, le retour à Medicine Bow de nos deux hommes avec multiples embûches sur leur chemin dont la traversée d’un désert, leur enlèvement par des indiens, une romance du Virginien avec une squaw… Bref, toutes les situations sont convoquées, beaucoup de poncifs aussi et pas mal de séquences ridicules notamment au cours du séjour dans le camp indien, le pire étant celles au cours desquelles le régisseur de Shiloh et la jeune indienne essaient de communiquer par l’intermédiaire de dessins sur le sable.

Un milieu de saison faisant souffler d'un épisode à l'autre le chaud et le froid, le téléspectateur étant sans cesse inquiet de pouvoir tomber deux fois de suite sur d’aussi mauvais épisodes. Faites que ces maudites montagnes russes s’arrêtent au plus vite au risque de nous perdre ! En attendant nous retiendrons quand même pour cette histoire un début prometteur qui bifurque malheureusement ensuite vers une intrigue inutilement complexe, languissante, mal écrite et à vrai dire un peu idiote dans a progression. Il s'agit du seul épisode de ce deuxième tiers de saison diffusé en France à la télévision et donc le seul à avoir été doublé : on se demande bien pourquoi tellement il y avait beaucoup mieux à importer parmi les épisodes 'alentours' ?
 

************************************************************************************************

  • 4.19- Chaff in the Wind
  • Réalisation : Herman Hoffman
  • Scénario : Joy Dexter
  • Guest Star : Tony Bill & Ed Begley
  • Première diffusion 26/01/1966 aux USA - Jamais diffusé en France
  • DVD : VOSTF
  • Note : 7/10

Le PitchAprès avoir été chassés de Laramie pour escroqueries, Micah Ellis (Ed Begley), son fils Clipper (Tony Bill) et sa fille Becky (Linda Lawson) atterrissent à Shiloh après qu'une roue de leur chariot se soit brisée. Randy et Jennifer font le forcing auprès du Virginien afin qu'ils puissent rester travailler et être hébergés au ranch ; le régisseur finit par accepter malgré le fait de ne pas être très confiant. Il se trouve cependant que les deux hommes travaillent avec efficacité, qu'ils s'intègrent parfaitement à l'équipe et que Betty s'entend bien avec Jennifer ; sauf que l'arrivée du frère de Micah à Medicine Bow va faire mal tourner les choses...

Mon avis : Qualitativement parlant, avec une régularité métronomique la saison 4 continue d'alterner les hauts et les bas sans presque jamais stagner dans la moyenne ; ce qui veut évidemment dire qu'après Long Ride to Wind River, l'épisode assez catastrophique avec John Cassavetes en Guest Star, Chaff in the Wind s'avère au contraire être une très bonne cuvée. Sans être forcément palpitante, l'histoire de cet épisode se révèle écrite avec nuances et intelligence, ses protagonistes richement dépeints et surtout leurs interprètes très talentueux. Elle narre le récit d'une famille de canailles assez pauvre qui va de ville en ville pour essayer de survivre en escroquant les habitants des bourgades dans lesquelles elle fait une halte : le père et l'oncle sont des voleurs et filous, le fils triche aux cartes alors que la fille, grâce à son charme, arrive toujours à se faire embaucher en tant que Saloon Gal. Lorsque l'intrigue débute, ils sont chassés de Laramie où ils ont provoqué une bagarre mais l'oncle reste en prison ; les trois autres se dirigent vers de nouvelles contrées. Une roue de leur chariot s'étant brisée pas loin de Shiloh, Randy et Jennifer qui étaient sur place lors de l'incident les conduisent au ranch et harcèlent le Virginien pour que ce dernier accepte de les garder un peu ; le père et le fils pourraient travailler en tant que cow-boy alors Becky tiendrait compagnie à la nièce du Juge Garth se sentant un peu seule parmi tous ces 'mâles'. Malgré une confiance un peu limitée en ces nouveaux arrivants, le régisseur finit par accepter.

Il sera quelques temps plus tard le premier à avouer qu'il avait tort de les mésestimer, les deux hommes accomplissant leurs tâches avec entrain et efficacité alors que la jeune femme semble bien s'entendre avec Jennifer. Il aura compris entre temps que les membres de cette famille n'ont pas toujours été d'une parfaite honnêteté mais leurs explications – la vie ne les a jamais vraiment gâtés - et leur franchise les lui rendent encore plus sympathiques d'autant que depuis le début de la série il a toujours prôné le fait de devoir toujours accorder une seconde chance, le nombre d'épisodes contant ses différentes tentatives pour faire revenir de jeunes voyous dans le droit chemin s'avérant assez conséquent sans que les auteurs se soient sentis obligés d'en passer par un pénible moralisme. C'est encore le cas concernant cette fiction écrite et réalisée par deux hommes ayant exclusivement travaillé pour la télévision, Chaff in the Wind étant leur seule participation à la série. La fin sera d'une belle dignité sans qu'elle ne fasse trop donneuse de leçons même si une tragédie aura failli sanctionner le mauvais coup préparé. Outre un bon travail d'ensemble du réalisateur et du scénariste, la réussite repose avant tout sur les épaules des trois comédiens invités qui s'ils étaient tombés dans un cabotinage outrancier auraient au contraire rendu l'épisode très facilement pénible. Le patriarche, c'est Ed Begley, l'un des Twelve Angry Men de Sidney Lumet, déjà génial en personnage haïssable dans The Invaders, très grand épisode de la saison 2. Il trouve encore ici le parfait équilibre alors qu'il aurait été très facile pour lui de déraper dans l'exagération. 

Le rôle du fils joueur de poker est tenu par le jeune et frêle Tony Bill dont on se souviendra surtout pour son interprétation au milieu d'un prestigieux casting dans le très bon film d'espionnage de John Sturges, Destination: Zebra, station polaire (Ice Station Zebra) ; lui aussi s'avère à la fois très juste mais jamais trop effacé pour autant, tout comme sa sœur interprétée par la ravissante Linda Lawson qui sera plus tard la missionnaire métis dans le très sympathique La Fureur des Apaches de William Witney.. Des personnages pas évidents à jouer dans la sobriété et à rendre attachants puisque escrocs, fainéants et pas spécialement bienveillants au départ - ils se définissent eux même comme du chiendent -, pourtant appelés à se remettre en question et à évoluer vers du positif ; James Drury leur donne la réplique avec sa détermination habituelle ainsi que son impassible aplomb coutumier, alors que Randy Boone nous gratifie à nouveau de deux de ses compositions, 'Wouldn't You Know' ainsi que 'Wanderin' Wonderin' qui, pour ceux qui y seraient réfractaires, ne durent guère plus d'une minute chacune. Quant au quatrième membre du quatuor qui sera resté en prison durant une bonne moitié de l'épisode, Lonny Chapman l'incarne lui aussi avec talent ; dans le domaine du western, on le retrouvera entre autres à l'affiche de cette N-ième version autour du fameux règlement de comptes à OK Corral, le passionnant Sept secondes en enfer (Hour of the Gun) réalisé lui aussi par John Sturges.

Un épisode assez doux, plutôt bavard mais au ton toujours juste, des auteurs compréhensifs et attachés à leurs personnages qu'ils ne jugent jamais avec sévérité – pas même l'oncle qui semble un peu plus aigri mais faute à une vie peu reluisante -, des interprètes remarquables au service d'une histoire pas spécialement mouvementée mais néanmoins sacrément agréable. Nous regretterons juste une mise en scène pas toujours inspirée, une Diane Roter décidément bien limitée dramatiquement parlant, des décors parfois tout juste passables (celui du pique-nique avec son herbe vert pomme) et quelques deux ou trois autres fautes de goûts sans grandes conséquences. Pour le reste, on croise à nouveau les doigts pour que la suite nous apporte autant de plaisir.

************************************************************************************************

  • 4.20- The Inchworm's got no Wings at all
  • Réalisation : Paul Stanley
  • Scénario : Herman Miller
  • Guest Star : Anthony Caruso, Lou Antonio & Angela Clarke
  • Première diffusion 02/02/1966 aux USA - Jamais diffusé en France
  • DVD : VOSTF
  • Note : 7/10

Le PitchNiles travaille à Shiloh depuis peu ; il vient de s'installer dans le voisinage avec ses parents et Marcy, sa sœur de 17 ans handicapée mentale ; alors qu'elle jouait auprès d'un point d'eau, la jeune fille est témoin de l'assassinat d'un homme blessé. Le meurtrier était le complice de ce dernier lors de l'attaque de la banque de Medicine Bow. Personne ne connaissant son identité, il se fait embaucher dans l'équipe du Virginien le temps que l'affaire se tasse. Marcy, prise en charge par Jennifer qui souhaite aider à son éducation, se rend avec sa nouvelle amie à un bal ; la jeune retardée tombe nez à nez avec le tueur ; elle le reconnaît et en est effrayée...

Mon avis : La malédiction de la montagne russe qualitative de ce deuxième tiers de saison semble enfin avoir pris fin puisque cet épisode réalisé par Paul Stanley (le même homme qui avait précédemment signé l'attachant Nobility of Kings avec Charles Bronson en Guest Star) est une deuxième belle réussite consécutive après Chaff in the Wind qui avait pour principale vedette l'excellent Ed Begley. The Inchworm's got no Wings at all pouvait facilement tomber dans les pièges larmoyants des fictions ayant pour thème principal le handicap mental, sauf que les auteurs s'en tirent remarquablement bien grâce avant tout à l'interprétation toute en nuances de Stacey Gregg qui parvient à rendre son personnage touchant et rarement exaspérant. Marcy est une jeune fille de 17 ans "un peu lente" comme la décrivent ses parents et son frère pour cacher son retard mental. A l'époque où se déroule cette histoire, il était honteux d'avoir un enfant attardé d'autant plus que l'on pensait que c'était héréditaire ; la famille avait louvoyé de ville en ville, déménageant à de nombreuses reprises pour échapper aux moqueries à chaque fois que leur secret avait été découvert. Si le père semble ne pas s'en offusquer et reste très attaché à sa fille, la mère ne supporte plus la situation et dit même franchement qu'il serait plus facile pour tous si elle pouvait être morte. Quant au frère, s'il a jusqu'à présent tout fait pour que sa sœur soit heureuse, il en a un peu marre lui aussi en estimant jusque là lui avoir sacrifié sa jeunesse ; il aimerait désormais la placer en institution pour pouvoir enfin trouver 'la liberté' et vivre sa propre vie.

Si l'épisode est aussi réussi, on le doit donc avant tout à l'excellence des comédiens qui tiennent les rôles des quatre membres de la famille : dans celui du père d'une gentillesse et d'une patience remarquable mais ne sachant désormais plus que faire, Anthony Caruso dont le nom ne vous dira peut-être rien mais dont le visage vous est obligatoirement connu, ayant joué dans plusieurs centaines de films ou épisodes de série TV et notamment surtout utilisé par Allan Dwan dans le domaine du western ; dans celui de la mère que l'état de sa fille gêne, dont elle a honte et qui ne pense qu'à la cacher, Angela Clarke qui s'en sort avec les honneurs, son rôle n'étant pas évident puisque son personnage est au départ assez déplaisant ; dans celui de Marcy, Stacey Gregg dont nous avons déjà dit un mot dans le paragraphe précédent et qui parvient à trouver le ton juste pour nous rendre touchant son personnage ; et enfin Lou Antonio, lui aussi très convaincant dans le rôle de son frère qui a beau l'aimer plus que tout mais qui commence à fatiguer au point d'être désormais prêt à l'abandonner à son sort pour aller voler de ses propres ailes, un protagoniste d'égale importance à celui de Marcy au sein du scénario de Herman Miller. La qualité de l'interprétation et de la direction d'acteurs font que l'ensemble ne sombre jamais dans la mièvrerie malgré aussi la seconde partie du générique qui aurait pu le faire craindre, se déroulant pour la première fois sur une chanson écrite et interprétée par Randy Boone, The Inchworm's Song, soit à peu de choses près le titre de l'épisode. La belle voix grave du chanteur et la beauté entêtante de la mélodie font qu'après le premier moment de surprise, l'émotion est de mise.

Quant aux figures récurrentes de la série, elles ne sont pas oubliées pour autant, Diane Roter nous faisant même la surprise de se révéler pour une fois assez probante lorsque Jennifer décide avec la même ténacité que le Virginien de s'occuper de l'éducation de la jeune handicapée ; Randy est surtout là pour gratter les cordes de sa guitare et entonner à plusieurs reprises la très jolie chanson-titre ; quant à James Drury, il s'avère égal à lui-même. Paul Stanley nous prouve à nouveau après Nobility of Kings qu'il est un réalisateur assez efficace et qu'il sait utiliser les beaux décors naturels mis à sa disposition (il me semble ne pas encore avoir vu les lieux où se déroule l'intrigue lorsque celle-ci ne nous envoie pas à Shiloh). Parallèlement à cette histoire de famille gênée aux entournures par un des ses membres handicapé, nous avons également à faire au récit d'un hold-up ayant mal tourné et ses conséquences puisqu'il a occasionné un mort sur place et blessé l'un des deux braqueurs. Le deuxième bandit ne pouvant pas risquer d'être retrouvé à cause de son acolyte en mauvaise posture, préfère l'abattre pour mieux se fondre dans la foule et ne pas être retrouvé de si tôt. Malheureusement pour lui, il y aura un témoin de cet assassinat qui ne sera autre que la jeune 'folle'. Sans savoir qu'il a été vu lors de l'accomplissement de son acte haïssable, il décide de se faire embaucher à Shiloh jusqu'à ce que l'affaire ait été classée et de récupérer l'argent caché beaucoup plus tard, lorsque les recherches auront cessé. Les deux histoires vont donc s'imbriquer, l'épisode proposera ainsi également quelques bonnes séquences de chasse à l'homme et de traque - superbes plans des hommes du posse fouillant les collines alentours, déployés sur plusieurs niveaux - et de suspense (la scène du bal ou encore le final cependant un peu grossier et vite expédié). 

Le Happy End sera en revanche assez émouvant, les parents s'étant remis en question et acceptant désormais leur fille malgré son retard, affirmant qu'ils l'aimeront dorénavant comme n'importe quel autre enfant, qu'ils seront heureux du peu qu'elle pourra acquérir et qu'ils seront patients pour tout le reste. Un épisode bien écrit et bien interprété, plein de bons sentiments mais d'une belle dignité. A signaler aussi un inquiétant Henri Brodie dans la peau du malfrat à la cicatrice lui barrant le visage ainsi que quelques belles idées comme celle des lanternes chinoise achetées pour le bal ; des détails certes anodins mais qui participent du réalisme de la série. On attaque maintenant le troisième tiers de la saison qui espérons le sera moins inégal. 

************************************************************************************************

  • 4.21- Morgan Starr
  • Réalisation : Anton Leader
  • Scénario : Herman Miller & Barry Oringer
  • Guest Star : John Dehner & Peggy Castle
  • Première diffusion 09/02/1966 aux USA
  • DVD : VOSTF - VF
  • Note : 6/10

Le Pitch : Le Juge Garth est désormais gouverneur du Wyoming ; il a demandé à son ami Morgan Starr (John Dehner) de reprendre les rênes de Shiloh mais tous les cowboys du ranch sont attristés qu’il n’ait pas proposé sa place au Virginien. Le régisseur vient chercher son nouveau patron à la gare et se rend compte immédiatement qu’il s’agit d’un homme dur et déterminé, peu porté sur le dialogue contrairement à son prédécesseur. Quoiqu’il en soit, fidèle à Garth, il décide de lui faire confiance et de continuer à travailler pour son remplaçant alors que tous ses hommes pensaient que par susceptibilité il allait quitter la place…

Mon avis : Lee J. Cobb avait fait sa dernière apparition dans la série dès le 6ème épisode de cette saison, le juge Garth ayant été nommé gouverneur du Wyoming et ayant dû déménager à Cheyenne. Entre temps, c’est le Virginien qui avait assuré l’intérim. Aujourd’hui, Garth a choisi un remplaçant en la personne de Morgan Starr, un homme qui avait combattu contre lui durant la Guerre de Sécession mais qui plus tard était devenu son ami, tous deux ayant dû lutter côte à côté contre la famine, la faim, le froid et autres éléments pour devenir ranchers. Tous les cowboys de Shiloh sont non seulement dépités mais surpris que le Virginien n’ait pas été définitivement désigné pour prendre la place de Garth, les deux hommes s’étant toujours entendus à merveille. Ils font des paris quant au départ du Virginien, pensant tous qu’il sera déçu de ne s’être pas vu proposé la place ; ils pensent même que s’il part, beaucoup feront de même. Nous verrons au final qu’ils s’étaient pas mal trompés mais laissons un peu la surprise d’autant que tout le monde sait très bien que malgré – ou plutôt à cause de - son immense loyauté pour le juge Garth, il n’en sera rien, auquel cas contraire il n’y aurait plus eu de série. L’un des axes principal de l’intrigue qui nous concerne ici repose justement sur une réflexion à propos de la direction des affaires, le ‘management’ et les responsabilités qui incombent à un propriétaire terrien et à un régisseur. L’on comprendra que l’épisode s’avère ainsi un peu bavard mais les discussions à ce propos restent constamment intéressantes, notamment le laïus du Virginien sur la liberté.

L’autre principal thématique du récit s’appuie sur la différence de caractère et de tempérament entre Garth et Morgan Starr. Alors que le premier était un modèle de progressisme, à l’écoute de ses employés et parvenant facilement à se mettre à leur hauteur, il n’en va pas de même du repreneur qui par sa froideur et son apparent dédain ne met personne dans sa poche, tout le monde au contraire se méfiant d’emblée d'un dirigeant si peu aimable. Lorsque le Virginien vient le chercher à la gare, son nouveau patron le considère presque comme son valet, ne lui adressant la parole que pour lui demander de porter ses bagages. Ce protagoniste allant rester dans la série durant quatre épisodes, on se doute bien que ce n’est pas aussi simple et que son comportement n'est pas dû au hasard. Et effectivement nous apprendrons que cet homme autoritaire n’a pas eu la vie facile surtout par le fait d’avoir perdu sa femme et sa fille de 19 ans ; de plus, s’il n’a effectivement pas les mêmes idées ni manières de penser que son prédécesseur, celles-ci ne seront pas forcément mauvaises malgré le fait qu'elles aient semblé au départ surprenantes, d’autant qu’il les assume totalement ("It's my job to make decisions and live with the consequences"), témoin la décision qu’il prend envers et contre tous lorsqu’il s’agit de lutter contre une invasion imminente de crickets. Alors que ses voisins ont dans l'idée d’aller sans plus tarder mettre à l’abri leurs troupeaux dans le désert, il décide au contraire de ne pas déplacer ses bêtes et de combattre les insectes meurtriers en mettant en place un barrage de feu qui devrait les détruire. Il s’agira alors du troisième élément de cette histoire avec aussi les idées de vengeance d’un des cowboys de Shiloh qui tient Morgan Starr pour responsable de la mort de son fils lors d’un précédent convoi. Tout cela amènera à des rivalités destinées à tenir le spectateur en haleine jusqu’au bout.

Mais si la réalisation de Anton Leader - dont c’est le troisième épisode d’un corpus qui en comptera 14 – ainsi que le script à quatre mains de Herman Miller & Barry Oringer - deux auteurs ayant chacun déjà signés auparavant un bon épisode de la série – sont tout à fait honorables, l’ensemble manque cependant un peu d’originalité, d’émotion, de tension et de puissance dramatique malgré une séquence de lutte par le feu contre les insectes – un peu longue et trop peu spectaculaire faute de moyens – ainsi que l'intégration d’un nouveau protagoniste à Shiloh qui avait tout pour captiver notamment au travers les conflits qu’il allait générer face à des hommes toujours fidèles de cœur au juge Garth. Et ce n’est pas la faute de l’excellent John Dehner, remarquable comédien de seconds rôles que l’on a croisé dans moult westerns durant les années 50 et 60, souvent sous la direction de réalisateurs de série B comme Ray Nazarro, Harmon Jones ou Lesley Selander mais également sous la houlette de Anthony Mann (L’homme de l’Ouest), Robert Aldrich (Bronco Apache) ou encore Arthur Penn (inoubliable Pat Garrett dans Le Gaucher). Prendre la suite de Lee J. Cobb n’était pas chose facile ; avec un rôle aussi ingrat, il s’en sort plutôt bien et parvient in fine à nous rendre son personnage impopulaire si ce n’est sympathique mais néanmoins plutôt attachant. Nous assisterons à de très bonnes séquences de confrontation entre lui et James Drury ainsi qu’avec Diane Roter qui depuis deux épisodes semble avoir pris un peu confiance en son jeu même si elle est encore loin de nous convaincre totalement.

Parmi les autres protagonistes récurrents de la série, peu de temps de présence pour chacun mais un prologue assez savoureux réunissant Randy Boone, Clu Gulager et LQ Jones, dépités de savoir que le Virginien n’a pas été choisi pour devenir le nouveau patron du ranch Shiloh, ne comprenant pas son manque de réactions. Sinon, même s’il n’est pas mentionné au générique ni sur IMDB, il va de soi que la plupart des très bons thèmes musicaux sont signés par le grand Bernard Herrmann tellement son style est immédiatement reconnaissable : plusieurs sont d’ailleurs réutilisés de l’épisode où il apparaissait bel et bien noir sur blanc au générique final. Le Virginien aura failli prendre la décision de quitter Shiloh... mais au final il aura changé d’avis, son nouveau boss s'avérant ne pas être un si mauvais bougre que cela… mais ce n’est une surprise pour personne et tant mieux pour nous spectateurs ! Le Virginien : "The Judge never does anything without reason. Whatever you may think of Morgan Starr, he's the Judge's choice, and that's good enough for me. Whatever I might think of him personally I'll ride along with him till he gives me reason not to". Jennifer : "The Judge asked him to stay on. The Virginian would fight the devil himself if the Judge asked him to" ; deux exemples qui démontrent outre la qualité des dialogues, la preuve de la loyauté sans failles du Virginien pour son ancien patron.

************************************************************************************************

  • 4.22- Harvest of Strangers
  • Réalisation : Paul Stanley
  • Scénario : Leon Tokatyan
  • Guest Star : John Denher & John Anderson
  • Première diffusion 16/02/1966 aux USA
  • DVD : VOSTF - VF
  • Note : 9/10

Le Pitch : Ryker doit quitter Medicine Bow quelques jours ; comme par hasard c’est le moment choisi par un groupe de canadiens français et d’indiens Crees dirigé par Chilton (John Anderson) pour s’installer un certain temps en ville. Les habitants voyant l’arrivée de ces étrangers d’un mauvais œil et la paranoïa s’emparant de la bourgade malgré la promesse de ces ‘métis’ de ne pas avoir l’intention de provoquer de troubles, la tension va monter jusqu’à provoquer violence et tragédies. Morgan Starr, le nouveau patron de Shiloh, ainsi que son régisseur le Virginien, vont tenter de faire de la médiation… sans grands résultats.

Mon avis : Après un deuxième tiers de saison mi-figue mi-raisin voici que la série nous offre l’un de ses plus grands épisodes, voire même le plus grand ; en tout cas le plus étonnant et le plus sombre depuis ses débuts. Nous en profiterons pour ceux qui voudraient découvrir la série par balayer à nouveau ce qu’elle a produit jusqu'ici de meilleur en en citant les sommets : Throw a Long Rope de Ted Post, Impasse de Maurice Geraghty ou The Judgment de Earl Bellamy dans la saison 1 ; It Takes a Big Man de Bernard McEveety, Siege de Don McDougall ou Another's Footsteps de R.G. Springsteen dans la saison 2 ; puis plus récemment Show me a Hero de Leon Benson ; mais Harvest of Strangers leur damne encore le pion, tout du moins pour ma part car sur imdb il est l’un des épisodes les plus mal noté ; à croire que l’ambition, le progressisme et le culot ne paient pas auprès des admirateurs de la série, et c’est bien dommage ! Mais qui sont ces métis comme se nomment eux-mêmes les membres du groupe qui arrive ce jour à Medicine Bow et qui semble terroriser tous les habitants qui ne veulent pas que la tranquillité de leur bourgade vole en éclats faute à des étrangers. Il faut dire que douze personnes puissamment armées qui viennent s’installer quelques jours en ville sans dire dans quel but avaient de quoi inquiéter les citoyens ; de là à susciter une telle paranoïa qui va virer à la folie furieuse, il n’y avait qu’un pas. Pour information, que ceux qui ne veulent pas se gâcher d’éventuelles surprises évitent de lire cet avis dans lequel je me suis senti obligé de spoiler tout du moins dans le dernier paragraphe !

Pour en revenir aux métis de ce récit, un tout petit peu d'histoire pour en apprendre davantage : ce sont des canadiens au sang mêlé français et indiens Crees qui vivaient sur la baie d’Hudson depuis longtemps mais qui dès 1867 se font fait déposséder de leurs terres par la confédération canadienne du gouverneur William McDougall, ce dernier devant alors faire face à une rébellion légitime due à l'opposition des colons encore majoritairement francophones qui n’avaient pas été consultés quant à l’annexion de ce qui deviendra la province de Manitoba, étant depuis ce jour considérés "plus mal que des chiens". Les Métis, sous la conduite de Riel, s’organisent pour reconquérir leurs territoires, les terres qui leur ont été confisquées ainsi que leurs droits. C’est ainsi qu'un petit groupe de ce 'peuple' arrive à Medicine Bow pour y recevoir une somme conséquente destinée à combattre ceux qui les ont spolié de leurs biens et accueillir celui qui a été désigné comme leur chef. Sauf qu'ils ne veulent pas ébruiter le but de leur visite, les espions canadiens étant déjà à leur recherche. Ces métis sont bruyants et remuants, parlent forts et boivent beaucoup mais, comme ils l’affirment haut et fort, ils ne sont pas là pour semer le désordre. La méfiance de la plupart des habitants pour des étrangers - qui plus est à moitié indiens - n’est pas ébranlée par leurs paroles qui se veulent pourtant rassurantes et ils vont trouver toutes les excuses pour les faire partir quitte à en passer par la violence. Le leader des citoyens excédés est interprété avec grand talent par Val Avery et son visage grêlé, comédien que l’on a souvent croisé dans le western, notamment dans le superbe Dernier train de Gun Hill de John Sturges ; celle par qui le drame va arriver est campée par une Barbara Turner qui aura parfaitement réussi à se faire haïr.

L’épisode va ainsi questionner le puritanisme, la xénophobie et le racisme qui régnaient à l’époque ; une femme va attiser le feu, faisant croire à son entourage avoir failli être violée : une femme mystérieuse qui ne semble pas très nette dans sa tête, une sorte de nymphomane sexuellement frustrée, attisant d’abord les hommes qu’elle croise avant de se refuser au dernier moment. Le comportement un peu exubérant de ces canadiens qui aiment faire la fête va vite les cataloguer et plus personne ne fera attention aux efforts de modération et de médiation du nouveau patron de Shiloh, Morgan Starr. Alors que nous avions été échaudés par son caractère lors du précédent épisode, espérant presque qu’il ne reste pas longtemps à son poste tellement il s’était avéré être bien moins humain que Garth - Harvest of Strangers revient d’ailleurs sur ce fait en tout début, ses hommes ne l’appréciant guère faute à sa façon dictatoriale de diriger le ranch : "la discipline passe avant tout" - il se montre ici sous un tout autre angle, notamment à propos des étrangers, outré à son tour par le comportement de ses concitoyens, prenant fait et cause pour les métis avant même de s’apercevoir que leur chef était un grand ami à lui : "Je sens fort bien que je ne fais pas encore partie de cette ville, mais après ce que j’ai entendu je n’ai pas envie d’en faire partie". C’est le seul avec le Virginien et une prostituée (superbe Jan Shepard, l’institutrice de l’épisode The Brothers) qui vient prendre la défense de ces nouveaux venus et qui n’en démordra pas jusqu’à la fin quitte à se retrouver presque seul contre tous. Et du coup, nous nous désolons de savoir qu’il ne fera pas de vieux os au sein de la série, beaucoup plus attachant et émouvant que lors de l'épisode précédent où nous faisions alors seulement sa connaissance.

Une fiction d’une profonde noirceur et d’une grande dignité, une tragédie pleine de bruit de de fureur, certains protagonistes se voyant même - certes accidentellement - obligés de tuer leur meilleur ami : nous n’oublierons pas de sitôt la mort de John Anderson – comédien une troisième fabuleux au sein de la série, nous délivrant ici un magnifique message de fraternité et de tolérance – ainsi que les larmes de détresse et de chagrin de John Dehner et Jan Shepard alors que retentit un poignant chant funéraire indien sur la petite ville dont la rue principale a été vidée de ses habitants, ces derniers s’étant tous rendus à un autre endroit pour brûler vif les étrangers aux abois. Ici Paul Stanley (le même homme qui avait précédemment mis en scène le plaisant Nobility of Kings avec Charles Bronson en Guest Star ainsi que le très attachant épisode sur le handicap mental, The Inchworm's got no Wings at all) signe une splendide mise en scène, l’utilisation des gros plans amenant des séquences d’une force peu commune, tout comme ses plans caméra à l’épaule sur les visages de la foule en délire venue assister au ‘spectacle’ de la tuerie des étrangers. Alors que le drame se termine, le Virginien dit à son patron qu’il reste sur place jusqu’à ce que l’incendie ait pris fin sur quoi Morgan Starr lui réplique que les flammes ne seront certainement pas éteintes avant une bonne cinquantaine d’années. Un épisode qui n’a rien à envier aux meilleurs westerns des années 60, sorte de parfait mélange entre une variation sur le Silver Lode d’Allan Dwan (pour montrer l’intolérance, la bêtise, la couardise et la peur irraisonnée de la populace qui font devenir ses membres des monstres sanguinaires) et les meilleurs discours progressistes pro-indiens. A signaler enfin des relations extrêmement émouvantes - et surtout sacrément culottées au sein d’une série familiale des 60's - qui se nouent entre le vieux chef des métis et la Saloon Gal. Aussi puissant, tendu et gonflé qu’émouvant, un remarquable petit chef d’œuvre du genre.

************************************************************************************************

  • 4.23- Ride a Cock-Horse to Laramie Cross
  • Réalisation : Anton Leader
  • Scénario : Clair Huffaker
  • Guest Star : Nita Talbot
  • Première diffusion 23/02/1966 aux USA
  • DVD : VOSTF - VF
  • Note : 5.5/10

Le Pitch : Alors qu’il retourne à Shiloh, Trampas assiste au meurtre d’un vieil homme qui n’avait pas voulu révéler la cachette des enfants qu’il avait ‘enlevé’ au despotique 'El Supremo’, un chef de bandits mexicains ; ce dernier avait quelques temps auparavant tué le père des enfants pour trahison et dans le même temps banni leur maman ; c’est à sa rencontre que les enfants et leur oncle se rendaient, la mère s’étant réfugiée à Laramie. Trampas retrouvant les enfants avant les hommes de main de El Supremo, il décide de les conduire à destination avec l’aide d’une femme aux manières un peu rustres (Nita Talbot) rencontrée sur sa route…

Mon avis : C’est le scénariste Clay Huffaker, très prolifique dans le domaine westernien durant les années 60 - Les Sept chemins du couchant et Les Cavaliers de l’enfer avec Audie Murphy, Les Rôdeurs de la plaine de Don Siegel avec Elvis Presley, Les Comancheros de Michael Curtiz avec John Wayne, Rio Conchos de Gordon Douglas... - qui est pour la deuxième et dernière fois à l’écriture d’un épisode du Virginien après The Hero qui avait pour Guest Star l’excellent Steve Forrest et qui narrait une machination assez tordue pour arriver à faire chanter le juge Garth. Après le remarquable mais sombre Harvest of Strangers, on en revient à un ton plus léger et à une histoire mouvementée certes sympathique mais sans surprises et qui surtout pour cette raison a du mal à nous captiver plus que ça malgré ses nombreux rebondissements ; il s’agit d’un sorte de Buddy Movie avec Trampas et une femme un peu rustre qui se sont donnés pour mission de convoyer deux jeunes enfants jusqu’à leur mère, le petit groupe étant poursuivi à la fois par les hommes de main du grand-père dictatorial qui souhaite récupérer ses petits-enfants ainsi que par une bande d’indiens faméliques sur le sentier de la guerre. Ces deux petits – un bébé et un enfant de 5 ans – ont été ‘enlevés’ par leur oncle qui voulait les tirer des griffes de leur grand-père, un tyran mexicain qui avait auparavant assassiné le père pour trahison et banni la mère. Les deux bambins se retrouvant seuls après l’assassinat de leur oncle, Trampas les retrouve avant les bandits, se sent dans l’obligation de les prendre sous son aile et décide d’être leur chevalier servant.

Alors bien évidemment au vu du pitch, le récit est une sorte de mélange entre course poursuite et voyage semé d’embûches, un aspect survival cocasse découlant du fait que Trampas doive s’occuper d’abord seul de deux jeunes enfants dont un bébé qui ne parle ni ne marche encore. Contrairement à ce que nous aurions pu penser et au vu des travers dans lesquels sont tombés certains épisodes précédents, le talent de Clair Huffaker est tel que l’écriture ne sombre jamais ni dans la gaudriole ni au contraire dans la mièvrerie et que l’humour reste plutôt léger et bon enfant grâce surtout aussi au naturel tout à fait étonnant du jeune Clint Howard que les seniors connaissent surtout pour avoir été le craquant Mark Wedloe dans la série Mon Ami Ben (Gentle Giant) diffusée régulièrement dans les années 70, l’histoire d’une amitié entre un ours et un jeune garçon. Dans cet épisode, il est parfait dans le rôle de ce gamin de cinq ans débrouillard comme pas deux - y compris pour recharger un fusil - et qui se fait surnommer avec la tenue adéquate 'General Manuel Garcia Lopez de Maximilian Vargas' ! L’irruption de Nita Talbot dans le cours de l’intrigue ne modifie en rien le ton de l’épisode même si le comique de situation sera ensuite plus spécifiquement basé sur les gentilles rivalités entre Trampas et la jeune femme aux manières masculines qui s’invite à faire partie du voyage. Il s’agit d’une sorte de vagabonde dont on ne connaitra jamais vraiment l’histoire mais qui sera d’une aide bénéfique au groupe, sauvant par exemple la vie de Trampas alors qu’il se trouvera seul face à de dangereux indiens. Et à nouveau, même si la comédienne ne possède pas un talent extraordinaire et même si son personnage ne restera guère mémorable, la direction d’acteurs fait qu’elle n’en fait pas des tonnes et parvient à ne pas rendre Melinda trop pénible.

Au cours de cette fiction, on se sera amusé d’être témoin du minable talent de conteur de Trampas lorsqu’il s’agira de faire s’endormir les enfants - sa version de 'Boucle d'or et les trois ours' vaut son pesant de cacahuètes - ou à l’inverse de ses idées ‘pas très catholiques’ pour faire sombrer le bébé dans les bras de Morphée afin de lui éviter de crier à un moment tout à fait inopportun, en l'occurrence lors du passage à proximité de leur campement d’indiens qui cherchent à les abattre. On trouvera également cocasse la manière qu’utilisera ce même Trampas pour provoquer un affrontement et faire s’entretuer ses deux groupes d’ennemis, l’ensemble des indiens et vils chasseurs de primes finissants par passer de vie à trépas sans que ça ne gêne personne. Car effectivement il ne faut pas prendre cet épisode très au sérieux ; mais c’est là aussi que réside sa limite, le suspense qui s’invite parfois ne nous effrayant guère, les auteurs n’ayant pas nécessairement misé sur une forte tension dramatique, les ‘méchants’ de l'histoire ne nous paraissant pas bien inquiétants. Mais le travail qu’accomplissent Anton Leader à la réalisation et Clair Huffaker à l’écriture s’avère tout du long délassant à défaut d’être puissant et inoubliable, aucune thématique précise n’étant abordée, seul le divertissement étant ici mis en avant. Mais voir Trampas se transformer en baby-sitter n’aura pas été déplaisant.

Un épisode qui se déroule loin de Shiloh et qui ne met en scène qu’un des protagonistes récurrents de la série, à savoir le toujours sympathique Trampas que Doug McClure continue d’interpréter avec sa bonhomie habituelle. De beaux paysages traversés, de l’efficacité lors des séquences mouvementées, une plaisante bande musicale, des comédiens qui font très bien le boulot… nous sommes très loin des sommets de la série mais Ride a Cock-Horse to Laramie Cross nous aura néanmoins permis de passer un agréable moment. Les enfants entre les bonnes mains de Melinda qui les conduit à Laramie et après un début de romance avec la jeune femme qui a fini par abandonner ses manières hommasses, Trampas peut désormais repartir pour Medicine Bow le cœur tranquille. A signaler pour ceux qui préfèrent la version française à la version originale que parait-il Doug McClure a été doublé par un autre comédien que celui qui avait officié jusqu’ici.

************************************************************************************************

  • 4.24- One Spring like long ago
  • Réalisation : Herman Hoffman
  • Scénario : Robert Sabaroff
  • Guest Star : Warren Oates, Eduard Franz & Martine Bartlett
  • Première diffusion 02/03/1966 aux USA
  • DVD : VOSTF - VF
  • Note : 7/10

Le Pitch : Morgan et Randy arrivent dans une réserve indienne où ils sont venus vendre 3000 têtes de bétail. L’agent aux affaires indiennes ne leur en achète finalement que 500, estimant que ce sera suffisant pour les indiens dont il a la charge. Cet homme malveillant a sous ses ordres un chasseur de primes (Warren Oates) qui ramène justement un membre de la tribu Oglala qui s’était échappé. Ce dernier a vu un immense troupeau de bisons et en informe ses congénères qui jubilent, présage de liberté pour leur peuple. Echappant à la vigilance des gardes, un vieux chef et son fils s’enfuient de la réserve pour voir ce miracle de leurs propres yeux…

Mon avis : Ce troisième tiers de saison semble vouloir amorcer un virage très adulte absolument passionnant ; non pas qu'elle ne l'ait pas prouvé déjà auparavant mais en ce début de l'année 1966 la série Le Virginien se fait peut-être encore plus ambitieuse que jamais. Après le remarquable Harvest of Strangers, les auteurs prennent à nouveau pas mal de risques de se couper de leur public familial habituel avec cet épisode mature et expressément peu distractif prenant fait et causes pour les indiens, un peu à la manière du superbe western de Richard Brooks, La Dernière chasse (The Last Hunt) avec Robert Taylor et Stewart Granger. One Spring Like Long ago est une fiction réalisée par Herman Hoffman dans laquelle l’on retrouve les qualités de l’épisode qu’il signa précédemment, Chaff in the Wind avec Ed Begley et Linda Lawson : soit un récit sombre mais assez doux, plutôt bavard mais au ton toujours juste, des auteurs compréhensifs et attachés à leurs personnages qu'ils ne jugent jamais avec sévérité - hormis bien évidemment l’agent aux affaires indiennes et le chasseur de primes qui ne méritent strictement aucune indulgence -, des interprètes remarquables au service d'une histoire pas spécialement mouvementée mais néanmoins sacrément captivante à condition d’accepter un scénario assez austère et qui se laisse tout le loisir de prendre son temps, ce qui est une décision fort appréciable des auteurs à une époque où il faut toujours que tout aille vite pour ne pas faire se décrocher l'attention des spectateurs.

Le prégénérique se déroule sans aucune paroles, un blanc semblant poursuivre un indien au sein de magnifiques paysages du Dakota du Sud, le plan les réunissant au final - chacun des deux venant d’un côté et de l’autre de l’écran pour se rejoindre sous un arbre décharné au milieu de l’image - s’avérant vraiment splendide. Nous ne savons toujours pas qui sont ces deux hommes et pourquoi ils se poursuivaient mais nous aurons été témoins que l’Indien a pu assister avec une joie non dissimulée à l’arrivée d’un troupeau de bisons ; suite à ça - et nous le comprendrons juste après - il pourra se laisser ramener à la réserve sans se plaindre, impatient au contraire d’annoncer la bonne nouvelle à ses compatriotes, ce retour des 'buffalos' présageant selon leurs croyances la reconquête de la liberté pour leur peuple. Puis nous découvrons Morgan Starr et Randy qui arrivent dans cette réserve indienne pour y vendre des bêtes. Le dialogue entre les deux hommes nous confirme la bonne impression que nous avait précédemment fait le remplaçant du juge Garth à la tête du ranch Shiloh depuis Harvest of Strangers, un patron certes pas très coulant mais pétri d’une profonde humanité. A la remarque étonnée de Randy quant aux regards vides des indiens, Morgan lui rétorque "que leur reste-t-il à regarder ?" avant de poursuivre par d’autres réflexions désabusées sur leur sort, le génocide des bisons et de leur peuple. A plusieurs reprises on reviendra avec beaucoup de lucidité et d’intelligence sur cette tragédie historique sans néanmoins que les auteurs s’appesantissent uniquement sur cette thématique malgré sa formidable densité. Les deux hommes de Shiloh s’étant fait voler leurs chevaux par deux indiens qui s’évadent de la réserve pour aller voir ce miracle annoncé de l’arrivée des bisons, ils partent à leur recherche pour récupérer leurs montures mais sans haine ni agressivité, étant au contraire de tout cœur avec eux quant à leur quête : "une selle que j'avais depuis 20 ans. Mais je leur souhaite bonne chance" dira Morgan. En route, ils s’arrêtent quelque temps et se font héberger chez une jeune veuve qui fait toujours son deuil de son époux et de ses deux enfants.

Une halte d’une délicatesse qui a aussi dû un peu déstabiliser les fans de la première heure de la série, le scénariste Robert Sabaroff ne les ménageant pas en ne tenant pas compte de leur envie de léger divertissement ; certains se demanderont l’intérêt de cette ‘pause’ mais la douceur de la comédienne Martine Bartlett - qui a travaillé principalement pour la télévision mais que l’on a aussi pu voir dans quelques films dont La Fièvre dans le sang de Elia Kazan - est telle que l’on ne regrette pas que cette bulle de sérénité ait eu lieu. Parmi les autres interprètes, Eduard Franz est plutôt convaincant dans le rôle du chef indien ; il faut dire qu’il est habitué de ce genre de personnages (La Lance brisée de Edward Dmytryk ; Plume blanche de Robert D. Webb ; La Rivière de nos amours de André De Toth…) et que dans un soucis de plus grand réalisme les auteurs ont décidé de ne le faire parler qu’en langage indien (assez rare dans une série de l’époque). Au sein de ce casting très intéressant on trouve également dans la peau du chasseur de primes l’excellent Warren Oates – un des acteurs fétiches de Sam Peckinpah, notamment le tueur à gages de son Apportez moi la tête d’Alfredo Garcia - qui sait ici parfaitement bien se faire détester, au moins tout autant que Garry Walberg dans le rôle de l’agent aux affaires indiennes qui ne comprend pas pourquoi Morgan Starr cherche à se faire "le champion de ces bons à riens" en parlant des indiens dont il est en charge. Clive Clerk dans le rôle de Tonka, le fils du vieil indien qui a été élevé chez les jésuites, est un peu moins convaincant par le fait que son grimage ne soit pas des plus subtils mais il aura quelques bonnes répliques à son actif comme lorsqu’il dit à Morgan Starr "vous êtes un homme chanceux, vous avez des droits." Quant à John War Eagle qui interprète l’indien de la séquence initiale, il a quasiment tenu le rôle de tous les grands chefs indiens au cinéma et à la télévision dans le courant des années 50.

Un épisode crépusculaire sur le génocide indien, grave et extrêmement mélancolique, d’une profonde tristesse et d’une grande dignité qui ne pouvait que se terminer dans la tragédie ; [Attention spoilers] en effet les indiens ayant des coutumes auxquelles ils ne veulent pas déroger et préférant mourir que d’être déshonoré, le vieux chef préfèrera combattre le jeune Randy pour venger la mort accidentelle de son fils tout en sachant très bien qu’il n’aura pas le dessus ; et d’ailleurs notre jeune héros se voit dans l’obligation de tuer le vieil homme pour sauver sa vie. Le récit aborde aussi le travail de deuil, la haine incompréhensible entre les hommes, l’honneur, les coutumes et l’obéissance aux ainés. C’est dense, parfois un peu empesé mais au final c’est l’émotion qui l’emporte ! Quelques touches d’humour n’auront cependant pas manqué, histoire de faire parfois retomber la tension comme lors de cette séquence assez cocasse chez l’épicier où Morgan Starr se fait roublard pour obtenir ce qu’il veut. Ambitieux, parfois un peu guindé et voulant peut-être courir trop de lièvres à la fois mais néanmoins une fort belle réussite qui fait honneur à la série.

************************************************************************************************

  • 4.25- The Return of Golden Tom
  • Réalisation : Anton Leader
  • Scénario : Andy Lewis
  • Guest Star : Victor Jory
  • Première diffusion 09/03/1966 aux USA
  • DVD : VOSTF - VF
  • Note : 5/10

Le Pitch : Medicine Bow se prépare avec excitation à accueillir Tom Brant (Victor Jory) qui est le personnage central du tableau présent dans le saloon et qui a immortalisé un sanglant règlement de comptes s'y étant déroulé. Après 35 années d'emprisonnement le bandit est attendu non sans curiosités par les citoyens et un journaliste un peu mythomane ; mais quelle n'est pas leur surprise lorsqu'ils constatent qu'il est désormais devenu un vieillard presque sénile. Si ce dernier est revenu sur les lieux des ‘exploits’ qui l'ont conduit en prison, c'est pour aller visiter sa fille qu'il n'a en fait jamais vu, ayant quitté son épouse à l’époque de sa grossesse…

Mon avis : La série poursuit sur sa lancée de ces premières semaines de l’année 1966, à savoir qu'elle perpétue une période adulte très sérieuse et sans la moindre fantaisie, sauf que cette fois ci, après de remarquables réussites dont l'étonnant et puissant Harvest of Strangers, l’épisode écrit par Joel Rogosin et Andy Lewis se révèle être un semi ratage, pas inintéressant mais vite répétitif et au final guère passionnant : on ne peut pas gagner à tous les coups ! Il faut dire que Tony Leader n’est pas le plus doué des réalisateurs de la série et qu’il n’a pas le talent nécessaire pour rehausser le niveau d’une histoire qui se traine et peine à captiver le spectateur. Tout partait pourtant plutôt bien, les habitants de Medicine Bow attendant avec une impatience non dissimulée le retour dans leur bourgade d’un bandit ayant écopé de pas moins de 35 années de prison et dont le méfait qui l’y avait conduit avait été immortalisé dans une peinture qui trône toujours fièrement au centre du saloon, "le plus important règlements de comptes s'étant déroulé dans la petite ville". Les citoyens sont galvanisés par un journaliste du Missouri qui n’en est pas à une exagération près et qui s’en vante, estimant que parfois son métier peut l’entrainer à embellir la légende afin de capter l’attention de ses lecteurs : "truth doesn't sell newspapers ; I’ve been sent a thousand miles to perpetuate a lie." On voit d’emblée qu’une fois encore les auteurs de la série fustigent un peu la lâcheté et la curiosité malsaine des habitants des petites villes de l’Ouest de l’époque ainsi que la malhonnêteté de certains reporters qui se font une réputation aussi bien par la sur-dramatisation des évènements que par l'intermédiaire de mensonges éhontés ; un portrait somme toute assez noir de l'Ouest de cette fin du 19ème siècle !

Alors que le fameux hors-la-loi n’est plus désormais qu’un vieillard brisé, fourbu et au bout du rouleau qui montre des signes de sénilité, le journaliste (très bon Linden Chiles) va néanmoins attiser les convoitises en dévoilant à ses lecteurs que lors de son dernier coup qui s’est fini par la fusillade peinte sur le tableau, Tom Brant aurait caché un copieux magot qui n’a encore jamais été retrouvé. Bien évidemment que tous les malfrats alentours ainsi que les descendants des complices du vieil homme vont se précipiter en ville en espérant récupérer une partie du butin qui leur reviendrait. Certains parmi ces derniers vont également vouloir se venger, l’un d’entre eux (le comédien Kelly Thorndsen) estimant le vieil homme coupable de l’assassinat de son père. De plus, l'ex outlaw a laissé en ville un bébé qu’il n’a jamais vu et qui maintenant est une femme mariée ; il a décidé de la rencontrer. Mais cette dernière refuse catégoriquement qu'il mette les pieds chez elle, ne lui ayant toujours pas pardonné avoir abandonné femme et enfant, et ayant dû supporter toute sa vie la fâcheuse réputation de son père faisant d'elle une "fille de hors-la-loi" incapable par la même d’élever à son tour correctement sa progéniture. Elle sera même très dure à l'encontre de son père lorsqu’elle lui lancera en pleine face qu’elle aimerait bien qu’il se fasse descendre en pleine rue et qu’elle pourrait ensuite aller cracher sur son cadavre !

Tout ceci aurait pu aboutir à un épisode tendu et poignant, ce qui n’est malheureusement pas vraiment le cas même si l’ensemble se laisse regarder non sans plaisir, notamment grâce à Victor Jory –déjà excellent dans l’épisode Dark Challenge dans la saison 3 - qui nous octroie une jolie performance dans le rôle de cette vieille légende de l’Ouest, là où on aurait pu s’attendre à un abominable cabotinage, son maquillage peu subtil de vieil homme sénile n’étant pas là pour l’aider. Cet habitué des rôles de Bad Guy dans divers westerns - celui de La Caverne des hors-la-loi (Cave of the Outlaws) de William Castle, un de ceux parmi les très mauvais garçons dans Bad Men of Missouri de Ray Enright, une imitation de l'effrayant Quantrell dans Les Chevaliers du Texas (South of St Louis) du même réalisateur… - s’en tire avec les honneurs et forme d’ailleurs avec sa compagne à la ville comme à l’écran, la douce Jean Innes, un couple vraiment touchant. Un homme élevé au rang de légende pour de mauvaises raisons, un butin jamais retrouvé et que tout le monde veut s’approprier, la fille du bandit dont les relations avec ce dernier vont se transformer du jour au lendemain à partir du moment où elle comprend que son père pourrait être riche, le tout jeune fils de cette dernière qui ne peut être soigné faute d’argent (étonnement, on ne verra jamais ce jeune garçon à l’écran), l’idée de vengeance du fils d’un ancien complice, l’arrivée en ville de nombreux Gunmen venus ici appâtés par l’or… Il y avait de quoi accoucher d’une fiction pleine de bruit et de fureur ; les auteurs ont préféré faire tout en douceur malgré un teigneux combat à poings nus mais nous délivrent un épisode bien trop bavard et sans grande tension dramatique.

Chose assez curieuse, aucun des protagonistes récurrents de la série n’a été convoqué à l’exception de Ryker durant à peine une dizaine de minutes ; l’on sait depuis le début que chaque épisode peut aisément se regarder indépendamment des autres – ce qui n’est pas forcément une mauvaise chose en soi - mais en l’occurrence celui-ci est presque entièrement décorellé du reste tellement les éléments constitutifs de la série sont quasi tous absents ; et c’est quand même bien dommage ! Quant au twist final, il demeure bien décevant lui aussi ! Bref, un épisode un peu lassant et répétitif, pas vraiment mémorable faute à une mayonnaise qui a du mal à prendre mais néanmoins et malgré tous ses défauts, plutôt honorable grâce à de bonnes intentions ainsi qu'à une interprétation d’ensemble tout à fait satisfaisante. Il serait néanmoins souhaitable que les auteurs nous offrent à nouveau une pause plus légère avec le retour en force des personnages auxquels nous nous sommes attachés. The Return of Golden Tom nous aura néanmoins offert une séquence délicieuse et assez cocasse, celle au cours de laquelle Tom Brant est invité à jouer au poker et qu’il étonne tout le monde par son génie des cartes. Pas honteux mais très moyen !

************************************************************************************************

  • 4.26- The Wolves up Front, the Jackals behind
  • Réalisation : Paul Stanley
  • Scénario : Herman Miller
  • Guest Star : Jay C. Flippen, James Farentino & Donnelly Rhodes
  • Première diffusion 23/03/1966 aux USA
  • DVD : VOSTF - VF
  • Note : 7.5/10

Le Pitch : Dans le Montana pour y acheter une jument, Randy fait une halte à Prindiville où vit son ami d’enfance avec qui ils ont toujours eu le rêve de monter leur propre élevage. Mais ce dernier n’est plus motivé à autre chose qu’à s’extasier amoureusement devant la fille de Colby, le plus gros rancher de la région, la ravissante Dulcie. Randy se fait embaucher quelques jours par le père de la jeune fille espérant servir d’entremetteur pour son camarade ; sauf qu’il tombe sous le charme de Dulcie. La famille Colby va se voir bouleversée par le retour après 15 ans d’absence du fils prodigue (James Farentino), malfrat dont la tête est mise à prix…

Mon avis : Malgré nos souhaits, la fantaisie et la légèreté ne sont toujours pas de retour en cette fin de quatrième saison, mais lorsque l’on tombe sur des épisodes de cette qualité, nous n’allons tout de même pas faire la fine bouche ni le regretter. Et en effet Paul Stanley confirme à cette occasion être vraiment l’autre réalisateur incontournable de la série avec Don McDougall, leurs noms au générique aboutissant quasi systématiquement à des fictions télévisées inhabituelles et remarquablement adultes. C’est donc encore le cas de ce The Wolves up Front, the Jackals behind, ce titre étant repris d’une phrase dite par le personnage de hors-la-loi superbement interprété par James Farentino lorsqu’il explique sa vie de bête traquée, ses poursuivants acharnés se révélant n’avoir pas plus de scrupules que lui ; certes nous n’allons pas non plus nous apitoyer sur son sort, Frank Colby étant bel et bien une redoutable crapule violente et meurtrière ; mais là où Herman Miller marque un premier point, c’est que malgré la difficulté du défi, il parvient néanmoins à nous rendre attachant ce protagoniste pourtant très peu recommandable. Pour en revenir tout d’abord sur Paul Stanley, c’était le même homme qui avait précédemment mis en scène le plaisant Nobility of Kings avec Charles Bronson, le très attachant épisode sur le handicap mental, The Inchworm's got no Wings at all, mais surtout aussi le sommet récent de la série qu’était Harvest of Strangers avec John Anderson en Guest Star d’un épisode absolument exceptionnel sur l’intolérance et le racisme.

Ici, il nous offre à nouveau une splendide réalisation, sa formidable utilisation des gros plans amenant des séquences d’une force peu commune, tout comme ses plans caméra à l’épaule, l’originalité de ses cadrages, de ses effets de montage et de ses plans d’ensemble en plongées verticales. C’est donc déjà d’une part une grande satisfaction niveau technique ; quant au scénario par l’auteur qui avait déjà signé ceux de Morgan Starr et The Inchworm's got no Wings at all, c’est également une des très grandes réussites de la série. L’épisode est en gros divisé en deux parties, la première narrant la romance qui nait entre Randy et la fille d’un important rancher du Montana alors que le cowboy de Shiloh était resté dans les parages espérant servir d’entremetteur/marieur pour son meilleur ami, la seconde s’appesantissant plus gravement sur les tensions familiales qui se font jour au retour de l’enfant prodigue, un dangereux hors-la-loi qui revient au sein de sa famille espérant s’y cacher. Les deux parties pourtant assez différentes de ton s’avèrent au niveau de l’écriture tout aussi soignées l’une que l’autre. Le récit démarre par l’arrivée de Randy, guitare à l’épaule, dans une petite ville du Montana où il doit acheter une jument. Il en profite pour aller visiter Georgie, son ami d’enfance, qui est joué par Michael J. Pollard, surtout connu des cinéphiles pour avoir été l’un des amis de Bonnie and Clyde dans le film d’Arthur Penn. Georgie est un garçon au physique ingrat et par ce fait devenu très timide ; il s’était toujours dit qu’avec Randy ils mettraient un jour en place leur propre élevage, tous deux passionnés de chevaux ; Randy en profitant pour le relancer lors de leurs retrouvailles, Georgie lui explique qu’il n’a actuellement pas la tête à ça, trop préoccupé par la fille du plus gros éleveur de la région dont il est éperdument tombé amoureux mais qu’il n’ose aborder.

Avec son bon cœur habituel et poussé par Georgie qui l’incite fortement à aller se rendre compte de la beauté de celle qui lui fait passer des nuits blanches, Randy décide de travailler temporairement dans le ranch où elle vit en espérant pouvoir arriver à faire comprendre à la jeune femme qu’elle ne trouvera jamais meilleur partie que son doux et gentil camarade. Sauf que la blonde et ravissante Dulcie - craquante Peggy Lipton, surtout connu pour avoir été Lucie Barnes dans la série The Mod Squad, ainsi que, pour l'anecdote, avoir été l’épouse de Quincy Jones - tombe amoureuse de Randy qui n’est pas non plus sans lui trouver du charme. Quoiqu’il en soit, d’une remarquable loyauté, il va tout faire pour que Georgie puisse rencontrer Dulcie et pour encourager leurs relations… sans résultats… elle ne lui accorde aucun intérêt. Randy et Lucie vont alors tomber dans les bras l’un de l’autre, Georgie n’en tenant pas rigueur à son ami malgré l’inconfort de la situation, le scénariste peignant à cette occasion de superbes et touchants liens d’amitié entre les deux jeunes hommes. Dans le même temps on voit arriver en ville un inquiétant étranger qui se dirige en premier lieu chez le croque mort à qui il commande une pierre tombale pour un futur cadavre, un certain Colby. Qui est-il venu tuer ? De ce que l’on connait, ça pourrait être soit le rancher - interprété avec talent par Jay C. Flippen dont on ne compte plus les participations à grand nombre de chefs d’œuvres du western dont la série Anthony Mann/James Stewart, et qui à l’époque avait déjà perdu l’usage de ses jambes - soit sa fille Dulcie ou encore son fils Ben qui ne semble pas à l'aise, assez mal dans sa peau et ne sachant pas très bien se situer au sein de sa famille. L’on comprend peu de temps après que cet homme ténébreux et menaçant est leur frère parti depuis 15 ans dans une vie de meurtres et de rapines. Sa tête est aujourd’hui mise à prix et il a décidé de se terrer quelques temps dans le giron familial histoire aussi de se faire oublier.

Sauf que personne n’est ravi de le voir reparaitre, que des secrets et des non-dits vont refaire surface, que les tensions vont s’accroitre et des conflits se déclencher ; l’écriture est tellement subtile, le jeu des comédiens tellement convaincant – surtout Jay C. Flippen et plus encore James Farentino qui auront d’ailleurs ensemble une séquence mémorable ; un peu moins Donnelly Rhodes dans la peau du frère ‘mal aimé’ – que l’épisode reste captivant de bout en bout. Randy Boone aura été le seul protagoniste récurrent de la série à officier dans cet épisode ; il n’aura pas démérité aux côtés des talentueuses Guest Star et sa tendre romance avec Peggy Lipton restera marquée dans la mémoire des admirateurs de la série. Un mélange de mélodrame familiale, de récit d’amitié et de triangle amoureux qui aboutit à un des grands épisodes du Virginien.

************************************************************************************************

  • 4.27- That Saunders Woman
  • Réalisation : William Hale
  • Scénario : Don Brinkley
  • Guest Star : Sheree North
  • Première diffusion 30/03/1966 aux USA - Jamais diffusé en France
  • DVD : VOSTF
  • Note : 7/10

Le Pitch : Della Saunders arrive à Medicine Bow où elle s’installe comme modiste. Bientôt des rumeurs courent comme quoi la jeune femme aurait de mauvaises mœurs et sortirait juste de cellule après 12 ans d’emprisonnement pour meurtre. Les commérages et le puritanisme ambiant font que les citoyens souhaitent voir Della quitter les lieux sans plus attendre, sans même écouter ses arguments ni son histoire. Dans le même temps un escroc du nom de Sam Jenkins vient d’avoir une altercation avec le Virginien ; non seulement Sam harcelait Della mais il semblerait également qu’il ait expressément vendu des bêtes malades à Shiloh…

Mon avis : Une femme nouvellement arrivée dans une petite ville de l’Ouest et mal acceptée par ses concitoyens qui ne cherchent pas à savoir si les ragots colportés à son sujet sont vrais ou faux, la beauté de la ‘victime’ attisant les jalousies, le puritanisme ambiant mettant de l’huile sur le feu : un thème pas vraiment original mais qui peut donner l’occasion pour de bons scénaristes d’accoucher d’un message de tolérance toujours bienvenu à condition de ne pas verser dans le larmoyant ni dans le trop moralisateur ; et c’est en l’occurrence ici le cas, le duo Don Brinkley à l’écriture, William Hale à la réalisation parvenant aisément à nous faire oublier leur précédente et calamiteuse collaboration sur la série, Two Men Name Laredo, l’un des plus mauvais épisodes de la saison 3 qui avait pour invité vedette le fadasse Fabian. Le principal mérite de cette réussite revient néanmoins à la talentueuse mais méconnue Sheree North qui nous avait déjà fait grand effet lors de sa précédente participation à la série aux côtés de John Agar dans Another’s Footsteps, un chef d’œuvre de la deuxième saison. Une comédienne que l’on verra dans de nombreux très bons films des années 60 et 70, notamment sous la direction de Don Siegel, dans les excellents Madigan et Tuez Charley Varrick par exemple. L’actrice avait été mise en avant par la 20th Century Fox qui avait essayé de la lancer au début de la décennie 60 en tant que remplaçante de Marilyn Monroe ; dommage que cette tentative n’ait pas fonctionné car il s’agissait d’une femme aussi belle que compétente dans le registre dramatique.

Le travail de Don Brinkley est très carré, le scénariste parvenant à lier avec une grande fluidité deux postulats de départ très différents au sein d’une intrigue parfaitement bien agencée. Outre le fil dramatique qui aborde la difficile intégration d’une étrangère à Medicine Bow et tous les racontars qui se développent autour de sa réputation soit disant sulfureuse, il est également question d’une action en justice que souhaite engager le Virginien à l’encontre d’un homme qui aurait vendu à Shiloh pour 8000 dollars de bétail malade. On ne peut pas trouver deux sujets aussi distincts et pourtant tout s’imbrique à merveille d’autant que vient s’y ajouter une romance très touchante. Jugez plutôt, en espérant que j’aurais été le plus clair possible ! A son arrivée à Medicine Bow, Della est harcelée avec un peu trop d’insistance par Sam, un homme qui vient de faire le voyage en diligence à ses côtés. Le Virginien intervient non seulement pour venir en aide à cette femme ravissante mais également parce qu’il y a de fortes chances pour que Sam ne soit autre que l’escroc qui lui aurait vendu des vaches malades. Le régisseur va trouver John, son ami avocat, afin qu’il s’occupe de ce litige juridique et assigne Sam à comparaitre. Il s’avère d’ailleurs assez vite que Sam est bel et bien un aigrefin sauf qu’il est en cheville avec Alfred, un bienfaiteur de la ville dont la réputation d’intégrité n’est plus à faire. Sans que son temps de présence soit important, c’est en fait lui qui va être le pivot central de tous les écheveaux de ce récit. En effet, il connait les secrets de Della – son inculpation de 12 ans pour meurtre, le fait qu’elle ait été défendue à l'époque par John qui était en même temps amoureuse d’elle et qui est aujourd’hui le bailleur de son atelier de modiste ainsi que l’avocat de Medicine Bow -, ce qui fait qu’il va la faire chanter et lui demander d’aller convaincre l’avocat de ne pas porter son associé devant la justice et de carrément laisser tomber et enterrer l’affaire.

Il m’est impossible d’en dire bien plus sans révéler les autres retournements de situations les plus intéressants et les plus émouvants de l’histoire. Tout ceci - et d’autres surprises encore – s’imbrique à merveille et pourtant ce n’était pas gagné d’avance. Outre le scénariste, félicitons la plupart des comédiens car Sheree North est ici formidablement bien accompagnée, ses partenaires s’en tirant remarquablement bien pour la plupart. Citons Douglas Henderson dans le rôle de l’escroc alcoolique, Stephen Roberts dans celui de son libidineux acolyte, businessman absolument haïssable et pourtant grandement respecté par la population de Medicine Bow qui une fois encore en prend pour son grade au travers cet épisode ; en effet, quasiment seul le Virginien refuse de juger la nouvelle arrivante, ne souhaitant se prononcer ni sur son passé ni sur son comportement : "Well, number one, I don't know what things she does ; number two, it's not up to me to approve or disapprove." Même Jennifer, très influençable, aura été d’abord aux côté des commères avant de retourner sa veste, convaincue par les arguments de tempérance et de tolérance du régisseur. Pour poursuivre avec ce casting de grande qualité, nous nous souviendrons de Tol Avery dans la peau de l’avocat de l’accusation, "père la vertu" qui déclame ses plaidoiries un peu à la Malraux ; l’acteur en fait des tonnes mais il est très drôle, un peu comme dans le jubilatoire L’aventurier du Texas (Buchanan Rides Alone) de Budd Boetticher où il interprétait l’un des trois frères qui tenaient la ville sous leur coupe. Sans oublier Stuart Anderson dans la peau du gérant d’hôtel Billy Conklin, un personnage totalement abject capable dans la même minute d’être vulgairement insistant auprès de la femme qu’il demandera peu de temps après à ce qu’elle soit lynchée. Quant enfin à Liam Sullivan, il est excellent dans le rôle de l'avocat et sa romance avec Sheree North grandement émouvante.

La réalisation de William Hale est assez transparente mais toute au service de son scénario, peu comparable avec celles d’un Don McDougall ou Paul Stanley qui seraient peut-être parvenus à faire un sommet de cet épisode. Un travail cependant tout à fait honorable, preuve étant une des séquences de procès les mieux écrites et les mieux menées depuis le début de la série. On regrettera d’autant plus une fin abrupte et pour tout dire un peu idiote qui gâche un peu l’ensemble. En oubliant ce final un peu désastreux, un épisode qui fustige avec intelligence la pruderie et l’intolérance de l’époque. On remarquera enfin que James Drury commence à prendre de l’embonpoint et que pour le perdre il va falloir peut-être qu’il se mette un peu plus à travailler au lieu de s'occuper des belles donzelles et de faire trimer ses hommes !

************************************************************************************************

  • 4.28- No Drums, no Trumpets
  • Réalisation : Arthur H. Nadel
  • Scénario : Arthur H. Nadel & Robert Sabaroff
  • Guest Star : Julie Adams & Leslie Nielsen
  • Première diffusion 06/04/1966 aux USA
  • DVD : VOSTF - VF
  • Note : 6.5/10

Le Pitch : Le Mexique et les USA doivent signer un traité commercial de grande importance. Morgan Starr fait partie de l’organisation de cette rencontre qui doit avoir lieu dans un petit village mexicain, un sénateur américain et un gouverneur mexicain devant s’y rendre. Pour évaluer la sécurité sur place, Morgan et Trampas y partent en éclaireur. Le nouveau patron de Shiloh va découvrir un complot qui se trame pour assassiner les deux plénipotentiaires, le chef des conspirateurs n’étant autre qu’un ancien Marshall de sa connaissance (Leslie Nielsen). Des fuites ayant eu lieu, Starr est fait prisonnier par les dangereux bandits…

Mon avis : Les amateurs de la série n’appréciant que moyennement le personnage de Morgan Starr interprété par John Dehner, ce sera malheureusement ici sa dernière apparition. Et c’est vraiment regrettable car même si le juge Garth de Lee J. Cobb fut inoubliable, le tempérament et le caractère entier de son remplaçant ont amené un ton différent à la série durant quelques épisodes, une dureté non dénuée d’humanité ainsi qu’une gravité limite déprimante qui faisaient assurément s'éloigner une certaine fantaisie qui nous aura un peu manqué mais qui auront néanmoins permis d’accoucher de quelques mémorables sommets de la série comme notamment et surtout Harvest of Strangers dans lequel Morgan Starr partageait la vedette avec Randy à qui il inculqua une belle leçon de tolérance. No Drums, no Trumpets est certes loin d’égaler ce dernier mais John Dehner et son personnage n’ont rien à y voir, se révélant au contraire une nouvelle fois admirables. L’épisode s’avère d’ailleurs plus qu’honorable, bénéficiant peut-être des dialogues les plus brillants depuis le début de la série, des répliques que n’aurait par exemple pas renié un Joseph Mankiewicz, histoire de vous faire appréhender le niveau ; peut-être justement même trop brillantes, l’efficacité de l’intrigue en pâtissant, le scénariste s’étant consacré plus attentivement aux dialogues qu’à la gestion de son histoire remplie à ras bord de divers problèmes de conscience et dilemmes moraux : peut-on sacrifier une poignée d'hommes pour en sauver une centaine ? Doit-on trahir le père de ses enfants si l’on sait qu’il va commettre un massacre ? Peut-il y avoir des excuses et circonstances atténuantes pour des actes criminels ?

Un récit avant tout axé sur la préparation d’un attentat contre deux émissaires, l’un américain, l’autre mexicain, qui doivent se rencontrer pour signer un important accord commercial ; complot mis en place pour faire échouer ce traité et discréditer les deux gouvernements, ce qui les entrainerait dans une guerre souhaité par la tête pensante de ce crime. La signature doit avoir lieu dans un petit village mexicain à priori assez calme. Les deux représentants ne souhaitant pas envoyer une délégation militaire pour les protéger, estimant que cela irait à l’encontre de leur mission visant à une sorte de paix, Starr se propose néanmoins de partir en éclaireur vérifier que la sécurité sera bien au rendez-vous. Il se rend donc sur place avec Trampas ‘prendre la température’ et va découvrir un complot dirigé par un ex-Marshall de sa connaissance qui était à l’époque réputé pour sa droiture. Il est désormais le chef de ce groupe de ‘terroristes’ se faisant passer pour des Tuniques Bleues, prêts à massacrer des dizaines d’hommes à la mitrailleuse pour arriver à leurs fins. Alors que Trampas retourne à son point de départ prévenir les deux négociateurs que tout est calme et qu’ils peuvent entamer leur voyage vers le Mexique - le cowboy de Shiloh a quitté Morgan Starr avant que celui-ci ne découvre le pot aux roses -, son patron est fait prisonnier dans une église, pris en otage avec le prêtre ainsi qu’une tenancière de bar enceinte d’un des bandits. Un huis-clos va alors débuter qui perdurera jusqu’à la dernière image, Morgan Starr allant tout tenter pour faire échouer l’attentat : essayer de convaincre l’homme d’église de faire prévenir les villageois de leur délicate situation, de persuader la patronne de bar de contrer son amant qui fait partie du groupe de bandits ou encore d’exhorter le chef de bande à faire machine arrière, tentant de le raisonner en lui faisant prendre conscience de sa folie d’autant que sa vie n’avait été jusque là que rectitude et honorabilité.

Ce dernier - superbe Leslie Nielsen qui prouvait à nouveau après sa mémorable prestation dans l'excellent épisode The Laramie Road qu’il était aussi convaincant en étant sérieux qu’en jouant les crétins jubilatoires (l’inspecteur Drebin de la franchise des Y-a-t-il un flic... des ZAZ) – est passé de l’autre bord pour une immense rancœur accumulée, le jour où il s’est vraiment rendu compte que les concitoyens de la ville où il était shérif depuis une vingtaine d’années ne l’avaient jamais remercié pour les innombrables services qu’il leurs avait rendu et qu’ils ne le soutenaient pas face au maire corrompu qui faisait la pluie et le beau temps dans la petite cité de Cimarron où il officiait. Désormais il est devenu foncièrement cynique et avoue sans se démonter que ses raisons pour fomenter l’attentat ne sont absolument pas motivées par de quelconques convictions mais uniquement par l’appât du gain. Ses acolytes sont trois hommes dont un psychopathe amoureux de ses armes et notamment de la mitrailleuse qu’il transporte dans un cercueil ; dans ce rôle, Rex Holman arrive à être sacrément inquiétant alors que Eric Braeden - comédien assez connu à la télévision, 'casté' ici sous le nom de Hans Gudegast – interprète le bandit qui a mis enceinte la propriétaire du saloon jouée par la toujours ravissante Julie Adams, actrice bien connue et adulée par de nombreux aficionados de la série B des années 50 et du western, la comédienne dont tomba amoureuse L’Etrange Créature du Lac Noir de Jack Arnold mais également aux génériques de plusieurs chefs d’œuvre du genre et notamment Les Affameurs (Bend of the River) de Anthony Mann, surtout inoubliable dans Le Traitre du Texas (Horizons West) de Budd Boetticher et plus encore dans le mésestimé Victime du Destin (The Lawless Breed) de Raoul Walsh. On notera aussi un très bon Eduardo Ciannelli dans le rôle du prêtre.

Robert Sabarrof en tant que scénariste avait précédemment écrit One Spring Like Long Ago qui mettait en scène le duo Morgan Starr et Randy. Il réitère dans le sérieux le plus total et entérine une fin de saison dépressive et extrêmement sombre qui laisse néanmoins échapper de temps à autres quelques bouffées d’humour et de fantaisie comme par exemple ici au début où l’on revient avec amusement sur la réputation d’homme à femmes de Trampas. Dans l’ensemble on regrettera une solennité et de longues discussions psychologiques parfois un peu plombantes, un revirement final abrupt et totalement improbable ainsi que niveau technique pas mal de faux raccords, mais l’impression aura été globalement très positive et en tout cas d’une grande dignité avec comme thématique principale les responsabilités quant à ses propres choix : "men choose their own guilt."

************************************************************************************************

  • 4.29- A Bald-Faced Boy
  • Réalisation : Earl Bellamy
  • Scénario : Jack Curtis
  • Guest Star : Andrew Duggan, Royal Dano & Andrew prine
  • Première diffusion 13/04/1966 aux USA
  • DVD : VOSTF - VF
  • Note : 4/10

Le Pitch : Quelle surprise pour Randy de voir arriver à Medicine Bow certains membres de sa famille dont son frère Brett et son oncle Dell ! Plus que pour lui rendre visite, ils sont en fait venus pour le protéger de James Claiborne, un homme qui vient de passer six années en prison suite à un témoignage de Randy en sa défaveur. Claiborne vient effectivement lui aussi d’atterrir dans cette petite ville du Wyoming et ce serait pour châtier le jeune cow-boy de Shiloh contrairement à ce qu’il affirme aux autorités un peu soucieuses. Mais son réel désir de vengeance est un peu mis à mal par le fait que sa fille tombe amoureuse de celui qu’il voulait tuer…

Mon avis : Et c’est maintenant que l’on se mord les doigts et que l’on regrette amèrement la disparition du personnage de Morgan Starr interprété avec talent par John Dehner, protagoniste qui avait entrainé durant quelques temps la série dans des abîmes de noirceur ; nous en étions même à regretter le manque de fantaisie des épisodes où il tenait le rôle principal tellement ils étaient sombres. Si c’était pour nous amener à rencontrer les membres un peu beaufs de la famille de Randy censés nous faire sourire avec notamment un Royal Dano ridiculement grimé en oncle alcoolique, nous nous serions aisément passé de ce retour à un petit peu plus de 'légèreté' ; et pourtant le scénario est loin d’être gai, la vendetta en étant la thématique principale. Autrefois, alors que Randy habitait encore au sein de sa famille, il a témoigné lors d’un procès qui mettait en cause un certain James Claiborne, les familles Benton et Clairbone ayant été de tous temps en conflits sans que personne ne se souvienne de la raison première du déclenchement de cette rivalité ancestrale ; on connait bien cette situation kafkaïenne au travers surtout de nombreux films français se déroulant au sein de la paysannerie et notamment par exemple le sublime Jeux interdits de René Clément. Mais ne nous éloignons pas trop et revenons-en à notre western !

Suite à cette déposition, Claiborne s’est vu condamné à six ans d’emprisonnement. Il semble compréhensible qu’à sa sortie il veuille se venger d’autant plus quand l'inimitié entre les deux familles dure depuis une éternité. Il semble tout aussi logique que les membres de la famille adverse tentent d’empêcher la vengeance qui se prépare quitte à tuer Claiborne avant qu’il ne se manifeste de quelque manière que ce soit. Une logique de 'Wild Wild West' bien entendu ! Les voilà donc tous réunis à Medicine Bow. Randy ne veut pas d’histoires d’autant qu’il est tombé sous le charme de la fille de celui qui a dans l’idée de le tuer. Mais, poussé par son frère et son oncle, il va devenir méfiant d’autant que certains faits étranges se produisent qui manquent de le tuer (la roue d’un chariot qui se détache, une tombe trouvée et qui porte son nom, des chardons mis sous sa selle pour faire ruer son cheval lorsqu’il le montera…) S’estimant assez adulte pour se défendre tout seul il va se trouver confronté à tout le monde, se liguant aussi bien contre sa famille un peu trop haineuse que contre Ryker à qui il ne fait plus confiance ainsi enfin que contre le Virginien qu’il estime ne pas devoir se mêler à ses affaires. Rarement Randy aura été aussi cabochard et il faut malheureusement se rendre à l’évidence que le comédien Randy Bonne tellement sympathique lorsqu’il jouait au gentil naïf plein de bonne volonté est bien moins convaincant lorsqu’il tente de se montrer plus dur. Ses meilleures séquences sont d’ailleurs celles romantiques qu’il partage avec la charmante Karen Jensen même si le personnage de Gloria ne s’avère finalement pas très attachant, les auteurs de la série nous ayant pourtant habitués par ailleurs à dépeindre de remarquables portraits de femme ; et ce n'est pas le cas ici.

La faute du semi-ratage que se révèle être cet épisode en incombe principalement au scénariste Jack Curtis qui ne parvient pas à rendre son histoire captivante malgré les nombreux points de tension ainsi qu’au réalisateur Earl Bellamy qui fut vraiment très inégal au sein de la série, ses revers s’avérant cependant bien plus nombreux que ses réussites, ce A Bald-Faced Boy faisant malencontreusement partie des premiers. L’épisode marque la dernière apparition de Randy dans la série, celui-ci allant probablement s’installer dans la vallée des cèdres, l’endroit que le Virginien lui a conseillé après que son jeune employé lui ait annoncé son intention de le quitter, de voler de ses propres ailes et de s’établir dans sa propre ferme. Son dernier épisode aurait dû être le superbe The Wolves in Front, the Jackals Behind ; c’aurait été une bien plus belle sortie pour notre Randy Benton qui en profite néanmoins ici pour nous entonner une dernière fois deux chansons dont une de sa composition, ‘That's Where It's At’. Parmi les autres comédiens du casting, si Royal Dano n’est pas à son avantage, pas plus que Karen Jensen ou Andrew Prine, il faut en revanche saluer la performance d’Andrew Duggan dans le rôle de l'homme mûr qui cherche à se venger de Randy ; un acteur qui était déjà excellent dans deux grands westerns de Budd Boetticher, Decision at Sundown (Le Vengeur agit au crépuscule) dans lequel il jouait le shérif de la petite ville, ainsi que Westbound (Le Courrier de l’or) où il tenait le rôle de l’associé de Randolph Scott. On peut dire que grâce à lui, cet épisode du Virginien arrive à se suivre sans trop d'ennui.

L’épisode n’est néanmoins pas totalement raté, certaines séquences s’avérant très amusantes, notamment celle qui voit la seule apparition de Trampas au tout début où on le voit pérorer à propos de son talent dans le maniement des armes, disant avec un bel applomb qu’il avait autrefois "a long rifle once that could knock down a prairie dog two miles away." La réponse de Randy qui lui fait comprendre son exagération est un beau moment de drôlerie. D’autres tentatives humoristiques sont bien moins réussies, témoin ce personnage de cuisinier chinois plus pénible et ridicule que réellement amusant. Alternant romance et désir de vengeance, cet avant dernier épisode la saison 4, sans être honteux, peine néanmoins à convaincre sur les deux tableaux. Espérons que celui qui la clôturera rattrapera un peu le coup !

************************************************************************************************

  • 4.30- The Mark of a Man
  • Réalisation : Anton Leader
  • Scénario : Harold Swanton
  • Guest Star : Harold J. Stone & Barry Primus
  • Première diffusion 20/04/1966 aux USA
  • DVD : VOSTF - VF
  • Note : 6.5/10

Le Pitch :  Johnny est sur le point de dévaster Medicine Bow après qu'il ait perdu son emploi. En voulant arrêter le jeune homme, le Virginien le blesse mais le prend vite en pitié après avoir appris qu'il n'avait jamais eu de chances au cours de sa vie. Il l’accueille même à Shiloh le temps qu'il se rétablisse. En plus de ne plus avoir de travail, son histoire d'amour avec la charmante Susan est sur le point de capoter, le riche père de cette dernière n'acceptant pas l'idée d'avoir un gendre pauvre. Ayant beaucoup d’influence sur les habitants de la ville, c'est d'ailleurs lui qui a fait licencier Johnny ; ce dernier trouve du réconfort auprès d'un commerçant juif...

Mon avis : Dommage que le réalisateur choisi pour clore cette quatrième saison soit Anton Leader, pas le plus doué de la série : il ne possède pas le talent nécessaire pour magnifier cette belle histoire et nous livre un épisode certes très honorable grâce avant tout au scénario et surtout à une remarquable interprétation d’ensemble, mais ne parvenant pas à se hisser loin s’en faut aux alentours des sommets du Virginien, ce qu'un Paul Stanley ou un Don McDougall auraient éventuellement réussi à faire. La première demi-heure a même sacrément du mal à nous captiver déjà à cause de l’utilisation assez calamiteuse de la nuit américaine, les premières séquences censées se dérouler de nuit laissant passer un grand soleil et quelques ombres portées n’importe comment à chaque coins de plans. Le peu d’attention apportée aux éclairages est certes l'une des tares des séries télévisées de l’époque mais certains s’appliquent néanmoins à faire en sorte que le réalisme l’emporte ; ce n’est malheureusement pas le cas en ce début d’épisode et il en sera d’ailleurs de même pour le final. Le scénario se révélant finalement vite attachant tout autant que ses personnages principaux, nous oublions cependant vite cette médiocrité de la mise en scène pour nous laisser emporter par l’histoire de ce jeune looser malchanceux à qui l’on a toujours mis des bâtons dans les roues y compris dans ses histoires d'amour.

Johnny, c’est Barry Primus, excellent comédien que l’on retrouvera souvent au cinéma dans les années 70 : ce fut lui par exemple le cinéaste ami de Faye Dunaway dans Portrait d’une enfant déchue (Puzzle of a Downfall Child) de Jerry Schatzberg ; on le croisa aussi dans Boxcar Bertha et New York New York de Martin Scorsese ou encore dans l’excellent The Rose de Mark Rydell. Dans The Mark of a Man, il interprète un jeune ‘rebel without a cause’ amoureux de la fille d’un notable de Medicine Bow ; ce dernier le persécute, essayant de lui faire quitter la ville car ne souhaitant surtout pas avoir pour gendre un ‘pauvre voyou’. Son épouse est beaucoup plus compréhensive et essaie de le raisonner en vain. Irene Tedrow dans ce rôle aura l’occasion de nous démontrer tout son talent lors d’une séquence très émouvante, sorte de leçon de tolérance d’une belle élégance, élément faisant partie de la marque de fabrique de la série dans ses meilleurs moments, loin de tout pesant moralisme : ici la vieille dame absout les erreurs de jeunesse, pas d’accord avec son mari lorsqu’il traite Johnny de ‘trash’ : "a boy cuts off and a man begins when he understands his responsibilities and takes them upon his shoulders without whimpering or whining or any thought of running out." Quant au père, il est interprété par un tout aussi crédible John McLiam dans un rôle assez ingrat mais qui par son talent parviendra à faire croire au revirement de dernière minute de son personnage ‘aveuglé par sa stupidité’, faisant se terminer cette saison sur une note d’espoir et d'optimisme avec une belle dignité.

Au tout début de l’épisode, Johnny est donc mis à la porte par son patron suite à la demande du père sa fiancée dont nous parlions juste avant ; en colère, il est sur le point de mettre la ville à sac lorsqu’il en est empêché par le Virginien qui accidentellement le blesse sérieusement à la tête. Regrettant ce geste et l’ayant pris en pitié en découvrant l’histoire de sa vie, il le fait venir à Shiloh où il est soigné par Jennifer qui, grande amie de Susan, les aide à se rencontrer en cachette. Ce sera la dernière apparition dans la série de Diane Roter et avouons qu’elle ne nous manquera pas forcément malgré son entrée en matière plutôt mémorable dans l’épisode Jennifer justement, le seul où elle fit effet. Johnny trouve également du réconfort auprès du commerçant dont il avait vandalisé la boutique et auprès de qui il vient s’excuser, un juif très affable, ex-rabbin, avec qui il va nouer une amitié. Il faut dire qu’il est difficile de ne pas se prendre d’empathie pour ce personnage qui aurait facilement pu tomber dans les clichés les plus éculés mais que le talent de Harold J. Stone parvient à rendre extrêmement sympathique ; même la séquence où il narre les persécutions de son peuple ou encore la scène finale qui auraient facilement pu sombrer dans la mièvrerie s’avèrent extrêmement touchantes en grande partie grâce à son interprétation toute en bonhomie et finesse. Le comédien était déjà très bien en barman dans l’un des grands épisodes de la série, The Laramie Road ; il évite encore ici avec une grande classe tous les écueils d’un tel volubile personnage. Notons encore la présence de la charmante Brooke Bundy dans le rôle de la blonde Susan et faisons aussi porter la semi-réussite de cet épisode sur les épaules de Harold Swanton, l’auteur du magistral scénario de Throw a Long Rope réalisé par Ted Post, magnifique troisième épisode de la série au cours duquel Jack Warden, sur le point d’être lynché pour vol de bétail par l’un des gros ranchers de la région, se voyait rallié par le Virginien qui, envers et contre tous, allait décider de se battre à ses côtés malgré l’extrême danger que cela allait représenter.

Une saison qui se sera certes révélée très inégale, alternant même en son milieu avec une régularité de métronome bons et mauvais épisodes, mais qui restera mémorable pour nous avoir offert quelques-uns des plus grands chefs d’œuvre de la série et nous avoir fait côtoyer des abimes de noirceur lorsque John Dehner s’était invité le temps de quelques épisodes en remplacement de Lee J. Cobb pour diriger le ranch Shiloh. Dommage qu’il ait été peu apprécié par les fans et qu’il ait du vite rendre son tablier. Pour ma part, je ne l’oublierais pas de sitôt. Quoiqu’il en soit cette saison se clôt par une belle leçon de tolérance contre les préjugés d'un homme et d'une foule qui le suit bêtement, un épisode qui mélange romance et tension avec une certaine efficacité dramatique.

A suivre...

Lien vers le test du coffret DVD saison 4 vol.1

Lien vers le test du coffret DVD saison 4 vol.2

Lien vers le test du coffret DVD saison 4 vol.3

Par Erick Maurel - le 21 septembre 2018