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Dossiers

Introduction à la série

Les épisodes de la saison 1

Les Episodes de la saison 2

A signaler d'emblée que tous ces textes devraient être garantis sans importants spoilers.

  • 2.01- Ride a Dark Trail
  • Réalisation : John Peyser
  • Scénario : Arthur Browne Jr. & E.M. Parsons
  • Guest Star : Royal Dano
  • Première diffusion 18/09/1963 aux USA - Jamais diffusé en France
  • DVD : VOSTF
  • Note : 7/10

Le pitch : Alors que le Virginien est confronté à un jeune homme prêt à commettre un meurtre pour venger la mort de son père, il lui raconte l’histoire de Trampas qui fut avant d’être embauché au ranch Shiloh dans une situation similaire à la sienne, prêt à tirer sur le juge Garth qu’il estimait responsable de la balle fatale reçue par son père. Flash-back qui voit Trampas, élevé par un père joueur, menant une vie dissolue, gagnant de l’argent par ses seules escroqueries au jeu. Mis en prison, son père vient demander à ce qu’on le libère, promettant désormais de mener avec lui une vie rangée en tant qu’éleveurs de chevaux...

Mon avis : Après une première saison remarquablement homogène et d’une très belle tenue d’ensemble, pouvant largement rivaliser avec ce qui se faisait de mieux dans le domaine du western au cinéma durant les années 60, la deuxième débute par une sorte de pilote puisqu’en flash-back l’épisode centré sur Trampas narre son arrivée au ranch Shiloh, revenant un peu aux racines du roman d’Owen Winster en faisant de ce personnage un mauvais garçon qui par son comportement frivole et égoïste mettra en danger la vie de ses proches et amis. Durant la saison précédente, au sein du deuxième épisode, Woman from White Wing, nous avions appris comment le juge Garth était arrivé à Medicine Bow et comment il était devenu le plus grand propriétaire de la région, tout cela à travers son propre récit ; et Duel at Shiloh - 15ème épisode et remake de L’Homme qui n’a pas d’étoile de King Vidor - revenait grâce à un retour arrière sur la venue de Steve. Les souvenirs des débuts de Trampas étant convoqués ici, restera peut-être dans le futur à savoir comment le Virginien en est arrivé à devenir le régisseur de Shiloh même si ce thème a déjà rapidement été évoqué dans Vengeance Is the Spur sans que cela n’en soit le sujet principal. Pour en revenir à ce commencement de la saison 2, l’histoire de Trampas nous est contée par son ami et supérieur - le Virginien en personne - alors que ce dernier se trouve en très fâcheuse posture dans une grange, tenu en joue et pris en otage par un jeune homme prêt à appuyer sur la gâchette pour pouvoir s’enfuir du lieu confiné où on l’a acculé.

Notre héros s’est retrouvé dans cette situation difficile sans vraiment le vouloir mais décide d’en profiter pour empêcher cet homme fou de rage et ivre de vengeance de commettre un acte qu’il regretterait toute sa vie, tuer celui qu’il estime être responsable de la mort de son père. Pour lui faire retrouver son calme et ses esprits, il décide de lui raconter ce qui était advenu à Trampas alors qu’il s’était trouvé dans un cas de figure similaire, prêt à tirer par vengeance sur son futur patron, le juge Garth. Une histoire qui trace le portrait d’un Trampas égoïste, puéril, bagarreur, escroc, menteur et fainéant (« Suckers and mules, that's what work's for, and mule's got enough sense to turn his tail on it »), qui nous fait mieux comprendre a postériori les quelques réactions inattendues qu’il aura eues à certaines reprises durant la saison précédente. Ride a Dark Trail est certes un épisode presque idéal pour débuter cette nouvelle saison mais s’avère néanmoins un peu trop classique et en deçà de ce que nous aurions pu espérer, surtout au vu de la note dithyrambique attribuée sur le site imdb. Faute surtout à une écriture sans grande originalité et qui manque à la fois de rigueur et de fluidité, le tout allant bien trop vite pour que nous ayons le temps de bien nous attacher aux personnages ou simplement d’apprécier chaque séquence. On sera également surpris voire même un peu gêné par le long et teigneux combat à poings nus entre le père et le fils qui - rien que pour les liens de parenté entre les participants - aurait dû être tendu mais finit par ressembler bien plus à l’une de ces séquences de bagarres homériques que l’on pouvait trouver dans certains westerns avec John Wayne. En revanche, on remarquera avec plaisir que, contrairement à celles des deux épisodes précédents, ces séquences d’action sont à nouveau très bien chorégraphiées, montées et réalisées et même assez impressionnantes de brutalité pour un film de télévision.

Si le scénario laisse un peu à désirer et que le réalisateur teste des mouvements de caméra assez cinématographiques mais pas forcément tous convaincants, la principale qualité de cet épisode est son interprétation et notamment celle de Doug McClure qui nous surprend à nouveau par ses talents dramatiques, nous rendant simultanément son personnage attachant et agaçant, parvenant même à nous faire venir des frissons d'émotion à la toute fin. On se rappellera surtout ses tricheries aux cartes et aux dés, mais également ses relations orageuses avec son père - pour l’anecdote, Sonny Tufts avait auparavant incarné Steve dans l'adaptation cinématographique de The Virginian signé Stuart Gilmore en 1946, Le Traître du Far West - puis celles qui se tissent avec le juge ainsi que les premiers contacts assez houleux qu’il aura avec le Virginien. Encore une fois, on se rend compte ici de la grandeur d’âme du juge Garth qui, contrairement au régisseur qui est assez réticent, donne plusieurs chances à Trampas. Garth a certes des problèmes de conscience pour avoir tué le père du jeune homme - même si c’était en état de légitime défense -, mais ses décisions ne sont pas toutes prises en fonction de ses remords mais également puisqu'il est naturellement bon, psychologue et tolérant. Pour l’aider financièrement et le sortir de sa vie chaotique, Garth décide dans un premier temps de racheter le cheptel familial de Trampas, même s'il ne lui rapportera pas un sou car destiné à être décimé pour cause de maladie - due pourtant au fait que Trampas se soit mal occupé du troupeau -, de lui octroyer un emploi dans son ranch et de le garder malgré toutes ses "bêtises" y compris celle d’avoir laissé seul son coéquipier - excellent Royal Dano dans un rôle lui aussi compatissant et d’une belle dignité - aux prises avec des loups affamés. On s’arrêtera deux secondes sur toutes les séquences mettant en scène ces canidés qui entérinent le fait que l’épisode aurait mérité un réalisateur un peu plus chevronné et un budget un peu plus conséquent même s’il semblerait que les producteurs aient injecté un peu plus d’argent pour cette deuxième saison.

Contrairement à Doug McClure et Lee J. Cobb qui ont le temps de s’en donner ici à cœur joie, James Drury est un peu en retrait. Sson interprétation n’en est pas moins marquante, le Virginien se révélant encore plus froid, monolithique et peu loquace que précédemment, quasiment un antihéros, ce qui est assez courageux de la part des auteurs pour leur rôle-titre. Superbement joué, Ride a Dark Trail se regarde avec plaisir et sans ennui mais aurait probablement gagné à être étalé sur deux épisodes car ici un peu trop elliptique pour arriver à maintenir une bonne tension tout du long. « It's a long way to Shiloh. You riding with me ? » est la dernière phrase de cet épisode prononcée par le Virginien à Trampas : le début d’une belle et longue amitié grâce à laquelle nous nous préparons à vivre de beaux moments durant les huit saisons restantes. Un récit d'apprentissage et de vengeance un peu trop classique mais plutôt bien mené à défaut d’être mémorable.

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  • 2.02 - To Make This Place Remember
  • Réalisation : Robert Ellis Miller
  • Scénario : Harold Swanton
  • Guest Star : John Dehner & Joan Blondell
  • Première diffusion 25/09/1963 aux USA - Jamais diffusé en France
  • DVD : VOSTF
  • Note : 5.5/10

Le pitch : Henry Garth s’est rendu dans la petite ville de Rapahoe où a été lynché un jeune homme dont il s’était autrefois occupé en lui donnant une éducation puis un emploi dans son ranch. La mère de John (Joan Blondell), une ex-entraineuse de saloon, lui avait par télégramme demandé son aide afin que la mémoire de son fils ne reste pas souillée, étant intimement convaincue qu’il était innocent du crime qu’on lui avait imputé et pour lequel il a été exécuté par ses concitoyens. Ces derniers voient d’un mauvais œil la présence du juge, qui a décidé d’octroyer au défunt un procès en bonne et due forme...

Mon avis : N’ayant pas eu l’occasion d’en toucher un mot au cours de mon avis sur Ride a Dark Trail - l’épisode précédent qui inaugurait cette deuxième saison -, je reviens deux secondes sur un petit changement qui s'est opéré entre les deux saisons : une nouvelle orchestration du superbe générique de début signé Percy Faith, désormais un peu plus sec, faisant ainsi perdre au célèbre morceau un peu de son allant, de son lyrisme et de son ampleur. Les modifications sont certes minimes et se situent surtout dans les toutes premières mesures, mais il me semble toujours dommageable de transformer de tels éléments qui touchaient en leur état initial à la perfection. Cela étant dit, les images de nos trois protagonistes principaux chevauchant côte à côte sont en revanche toujours les mêmes. Après cette minime "remontrance déceptive", revenons à ce deuxième épisode, intéressant et progressiste mais néanmoins un peu décevant lui aussi, d’autant plus qu’il est écrit par Harold Swanton, l’auteur du magistral scénario d’un des sommets de la série jusqu’à cette date, Throw a Long Rope réalisé par Ted Post, l’épisode au cours duquel Jack Warden, sur le point d’être lynché pour vol de bétail par l’un des gros ranchers de la région, se voyait rallié par le Virginien qui, envers et contre tous - y compris son patron, Henry Garth - allait décider de se battre à ses côtés malgré l’extrême danger que cela allait représenter.

To Make This Place Remember recase à nouveau l’ignominie que représente la justice expéditive ainsi que la condamnation sans appel du lynchage parmi ses thématiques principales, le juge Garth ayant été appelé à la rescousse par une prostituée qui a décidé de blanchir la mémoire de son fils John qui vient d’être pendu pour l’assassinat d’une jeune fille, alors qu’il avait jusqu’à ses derniers instants clamé haut et fort son innocence. Plus que la mère, Garth connaissait très bien le jeune homme pour l’avoir aidé dans son adolescence, en lui apportant éducation et travail au sein même du ranch Shiloh. Déjà à l’époque, John avait été un peu mis à l’écart à cause de son origine sociale, de son statut de fils illégitime et de la profession de sa mère. Aujourd’hui il suscitait encore plus de haine et de jalousie du fait que, malgré ses "tares" de naissance, il était devenu un homme brillant et cultivé, ayant de plus réussi dans les affaires au point de devenir un homme riche, bien plus aisé que ses concitoyens. On comprend d’emblée que John est une victime et que les membres de la "milice citoyenne" mise en place avaient décidé de le punir et de l’exécuter pour avoir surtout eu du mal à digérer sa réussite sociale et financière ; c’était donc un bouc émissaire parfait et un coupable idéal pour pouvoir "remettre les choses en ordre". On devine immédiatement que l’épisode de Robert Ellis Miller va consister à pointer du doigt la bigoterie, la dangereuse vertu, l’aspect envieux et l’intolérance des habitants de cette petite ville par l’intermédiaire du juge Garth qui veut à tout prix prouver que malgré la mystification de certains procès - faute à tout un tas de raisons parmi lesquelles les a priori et le puritanisme de certains jurys -, ils vaudront toujours mieux que la justice expéditive. Les auteurs avaient débuté la série par ce genre de réflexions, et ce dès le premier épisode dans lequel le Virginien en personne refusait d’assister à une pendaison.

Durant ce procès d’un homme à titre posthume - une idée originale, et qui l’est d’autant plus que c'est la salle de classe qui se transforme en tribunal -, Garth va donc faire en sorte de mettre les concitoyens du pendu face à leurs responsabilités, s'évertuer à leur faire reconnaitre leurs fautes et leur faire prendre conscience de l’énorme erreur qui a découlé de leurs jugements hâtifs ; il fait ressortir par la même occasion quelques vérités peu reluisantes et comprendre que des drames peuvent être causés par un trop grand puritanisme, un avortement caché suite à des liaisons à répétition ayant participé à la tragédie. C’est d’autant plus intéressant que parmi ces lyncheurs se trouve l’un des plus chers amis de Garth, un homme de loi lui aussi qui était connu pour ses grands et honorables principes auxquels il se targuait de ne jamais devoir déroger. Cet homme qui sera le procureur - et donc l'adversaire de Garth durant cet ersatz de procès - est interprété par un très bon John Dehner, qui avait été le mémorable bad guy dans l’épisode Echo from Another Day et qui remplacera le juge Garth à Shiloh à partir de la fin de la saison 4. Sans la présence de Trampas, Steve ou du Virginien, ni d'aucun autre des protagonistes habituels de la série, cet épisode de procès ne contient aucune scène d'action et se voit porté à bout de bras par un excellent Lee J. Cobb, mais il fait néanmoins pale figure si on le compare avec le mémorable The Judgment réalisé par Earl Bellamy avec un inoubliable Clu Gulager. Dommage aussi que l’important et attachant personnage féminin de l'ancienne saloon gal, interprété par Joan Blondell, ait été un peu sacrifié.

Quelles sont justement les principales faiblesses de cet épisode ? Outre le manque de surprises, la prévisibilité du dénouement, quelques facilités dans l'écriture, des flash-back qui paraissent plaqués et qu’il aurait peut-être été préférable de faire raconter par les témoins au procès, la faute en incombe principalement au réalisateur Robert Ellis Miller dont la direction d’acteurs laisse un peu à désirer, n’ayant pas réussi à canaliser certains seconds rôles dont les interprétations s’avèrent parfois assez outrées. Dommage car autrement, comme déjà dans le 22ème épisode de la saison 1, Vengeance Is the Spur, il parvient à mettre en place quelques beaux effets de montage et de mise en scène. En revanche, Ellis Miller ne semble pas avoir fait assez attention à quelques détails qui peuvent être rédhibitoires pour certains, à savoir ces scènes censées se dérouler la nuit mais qui sont tournées en plein jour et en plein soleil sans même addition de filtres, ce qui est le cas alors que les habitants de Rapahoe partent à la recherche de la jeune fille disparue et qu’ils retrouvent son cadavre ; il est minuit à ce moment-là mais nous pourrions penser qu’il est midi. Un manque d’attention de la part de la production qui ajoute à la relative déception que nous procure le visionnage de cet épisode "procédurier" et bavard pourtant assez audacieux pour l’époque, très progressiste, à la morale très digne et qui se laisse donc malgré tout regarder avec plaisir grâce à de puissantes joutes oratoires qui nous octroient d’intéressantes réflexions sur la loi et deux conceptions différentes de la justice.

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  • 2.03 - No Tears for Savannah
  • Réalisation : Don McDougall
  • Scénario : Carey Wilbur & William R. Cox
  • Guest Star : Gena Rowlands, Everett Sloane & Stephen McNally
  • Première diffusion 02/10/1963 aux USA - 12/08/1983 en France
  • DVD : VOSTF et VF
  • Note : 7.5/10

Le pitch : Le Virginien se rend à Santa Rita afin de récupérer le montant d’un chèque sans provisions signé par un certain Gordon Madden suite à une vente de bétail. Tous les habitants semblent inquiets de savoir que cet étranger cherche l’auteur de cette escroquerie, qui n’est autre que le fils du magnat local (Everett Sloane). Le régisseur de Shiloh retrouve à cette occasion Savannah (Gena Rowlands), son ex-fiancée devenue patronne de saloon. Le lendemain, cette dernière est accusée du meurtre de Gordon. Sur le départ après avoir mené à bien sa mission, le Virginien décide de rester pour lui venir en aide...

Mon avis : Après deux épisodes relativement décevants au regard de mes attentes - mais néanmoins loin d'être honteux, notamment le premier -, il ne m'aura finalement pas fallu patienter longtemps avant de tomber à nouveau sur une fiction mémorable qui entérine mon avis selon lequel certains épisodes du Virginien peuvent se targuer de rivaliser avec le meilleur de la production westernienne cinématographique des années 60. Et comme c’était déjà le cas pour la première saison avec le superbe Throw a Long Rope de Ted Post, c’est à nouveau le troisième épisode qui me fait recommencer à me répandre en dithyrambes sur cette série épatante. Nous voilà dans le sud-ouest des USA, loin de Medicine Bow. Le Virginien arrive à Santa Rita où il demande à rencontrer un certain Gordon W. Madden, qui lui aurait donné un chèque sans provisions lors d’un achat de bétail. Notre héros s'est rendu dans cette petite bourgade uniquement dans le but de récupérer la coquette somme de 4 000 dollars qui lui est due, mais bizarrement tous les habitants de la petite ville s’inquiètent lorsqu’ils entendent le nom de l’homme que le contremaitre du ranch Shiloh veut rencontrer. Et en effet, on apprend assez rapidement qu’il s’agit du fils du tyran local, ce dernier étant un rancher millionnaire qui tient toute la ville sous sa coupe et a tous les notables dans sa poche, du shérif au juge.

Quoi qu’il en soit, pas du tout intimidé ni par le statut ni par la réputation de cet homme qui semble faire trembler ses concitoyens - interprété par Everett Sloane, que tout le monde connait au moins de visage et qui a tourné avec beaucoup des plus grands réalisateurs du cinéma hollywoodien, d'Orson Welles à Vincente Minnelli en passant par Robert Aldrich et tant d'autres -, le Virginien se rend chez lui pour se faire remettre l’argent qui lui est dû, quitte à le menacer d’attenter aux jours de son rejeton s’il ne se fait pas rembourser. On l’a déjà vu durant la première saison, James Drury n’est jamais aussi bon que lorsqu’il joue à l’homme déterminé, autoritaire, et qui n’a pas froid aux yeux ; par son sérieux et sa voix grave, il en impose sacrément malgré sa stature loin d’être charismatique et même au contraire assez malingre. Nous assistons donc à des premières séquences assez jubilatoires grâce au caractère du protagoniste principal qui ne s’en laisse pas compter, pas même par le barman qui a tenté de lui servir un whisky coupé à l’eau. C’est également au sein de cette première scène au saloon que l’on fait la connaissance de Savannah, la tenancière de l’établissement qui sept ans auparavant vivait une liaison amoureuse passionnée avec le Virginien. Une romance qui semble s’être terminée abruptement, les deux amants s’étant "loupés". Tout d’abord rejeté, le Virginien va avoir la surprise de retrouver Savannah dans sa chambre avec le dîner préparé pour évoquer le passé et essayer de comprendre l'échec de leur histoire d'amour.

Il est dit que le Virginien sera toujours malheureux en amour ; et pour cause, s’il trouvait chaussure à son pied il souhaiterait probablement changer de vie et la série devrait ainsi se passer de l'un de ses principaux héros, le métier de régisseur s'accommodant assez mal d'une vie de famille. De ce fait, les épisodes qui reposent sur une histoire d’amour le concernant sont presque tous teintés de tristesse et de mélancolie. Et c’est une fois encore le cas avec ce superbe No Tears for Savannah dont plusieurs séquences - dont également la dernière image - s'avèrent poignantes. Si James Drury a déjà eu l’occasion d’être confronté à de superbes comédiennes - certaines connues, d’autre moins mais tout aussi douées -, Gena Rowlands, ici aussi belle que talentueuse, pourrait bien être l’une des plus mémorables, le couple qu’ils forment tous deux s’avérant sacrément émouvant d’autant que l’amour qui les liait semble n’être plus partagé. Mais je pourrais difficilement vous en dire plus sous peine de déflorer des éléments parmi les plus beaux de cette histoire d’amour contrariée rien de moins que par une condamnation à mort de la jeune femme. Le Virginien va se démener comme un beau diable pour venir en aide à son ancienne maîtresse, d’autant qu’il ne veut pas croire une seule seconde en sa culpabilité. Il va dans un premier temps faire se déplacer son patron afin qu’il soit son avocat - réaction assez drôle de ce dernier lorsqu’il découvre que ce n’est pas son homme de main qu’il aura à défendre - avant de se transformer en hors-la-loi faute à un jury et à des juges entièrement acquis au despote local - le père de la victime - et qui non seulement condamnent la femme à la pendaison mais avancent la date de l’exécution pour empêcher Garth d’aller chercher de l’aide auprès des plus hautes instances et obtenir ainsi la révision du procès. Un procès à propos duquel les auteurs se sont ici plus longuement appesantis sur la forme que sur le fond, ce qui se révèle non seulement très original mais assez passionnant. Suite au captivant procès, à une séquence à l’hôtel faisant entrapercevoir au spectateur ce qui s’est réellement passé lors de la tragédie -- c'est une constante au cours de la série que de donner une petite avance au spectateur sur les personnages - et à la romance qui continue malgré le fait que la jeune femme soit emprisonnée, l’épisode se termine par une course-poursuite au milieu du désert puis sur une séquence très puissante, donnant à cette fiction l’opportunité de plaire aussi bien aux amateurs de films de procès, de mystères, qu'aux midinettes et aux férus d’action.

Un épisode dense, touchant, intelligent et très complet qui vaut autant pour la rigueur de sa mise en scène que par la beauté de son écriture à propos de laquelle nous pourrons juste regretter l’aspect un peu "taillé à la hache" dans la description du dictateur local qui n’a pas grand-chose d’humain, plus que par la mort de son fils, anéanti et dépité par le fait de ne plus avoir de descendance destinée à faire perdurer sa lignée. Outre Gena Rowlands et Everett Sloane, la troisième guest star n’est autre que Stephen McNally que les amateurs de westerns ont déjà vu des dizaines de fois endosser la tenue de shérif et qui fut surtout le personnage principal du "cultissime" Apache Drums (Quand les tambours s’arrêteront) de Hugo Fregonese. Parmi les seconds rôles, tous très bons, on retiendra surtout Vaughn Taylor dans la peau du juge "acheté" sur lequel on continue à faire pression et qui en concevra un gros problème de conscience. A signaler également un nouveau thème musical romantique qui n’a rien à envier à celui de la saison précédente. Ecrit et réalisé par des auteurs qui n’ont quasiment œuvré que pour la télévision, No Tears for Savannah est un petit bonheur de quasiment chaque instant ; on lui pardonnera donc quelques faux raccords, quelques traits trop appuyés dans la peinture de certains seconds rôles et une résolution trop vite expédiée. Don McDougall à la réalisation et Carey Wilbur au scénario, nous allons les côtoyer souvent puisqu'ils seront à nouveau au générique 11 fois pour le second et non moins que 42 fois pour le premier ! Après une telle entrée en matière, on compte sur ces deux hommes pour ne pas trop nous décevoir par la suite !

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  • 2.04 - A Killer in Town
  • Réalisation : John English
  • Scénario : Bob & Wanda Duncan
  • Guest Star : Broderick Crawford
  • Première diffusion 09/10/1963 aux USA - Jamais diffusé en France
  • DVD : VOSTF
  • Note : 7/10

Le pitchEn aidant un certain McDowell à réparer une roue en plein orage, Trampas assiste à sa mort écrasé par son chariot. George Wolfe (Broderick Crawford), un chasseur de primes arrivé à Medidine Bow à la recherche d’un meurtrier dont l’identité devait lui être révélée par McDowell, soupçonne alors Trampas d’avoir assassiné son "indicateur" afin que ce dernier ne dévoile pas son nom. Mais faute de preuves, Wolfe va devoir enquêter auprès des habitants de la petite ville et de ceux du Ranch Shiloh. Parallèlement à cette investigation, beaucoup de citoyens tombent malades, victimes de la fièvre typhoïde...

Mon avis : Après une année de tournage, à travers ce quatrième épisode de la saison 2 les auteurs et producteurs semblent avoir voulu revenir aux fondamentaux, se ressourcer en convoquant de nombreux éléments présents au tout début de la série en même temps que retrouver un peu de fantaisie après trois épisodes consécutifs très sombres. Non pas que A Killer in Town fasse dans la gaieté et dans la légèreté puisqu’il rappelle lointainement Une Balle signée X (No Name on the Bullett) de Jack Arnold au cours duquel Audie Murphy, un bounty hunter mystérieux et peu loquace, arrivait dans une petite bourgade pour y chercher un meurtrier non identifié et où sa venue faisait souffler un vent de paranoïa sur tous les habitants qui paraissaient avoir tous quelque chose à se reprocher. Mais contrairement aux scénaristes du film de Jack Arnold, les auteurs de l’épisode ne poussent pas la tension au maximum et se laissent au contraire des trous d'air et des ouvertures lumineuses afin de ne pas le faire sombrer dans la tragédie plombante ou le mélodrame. Avec les éléments dramatiques au menu, il était pourtant très facile de tomber dans le panneau ; c’était sans compter sur le talent du couple de scénaristes Bob et Wanda Duncan déjà à l’origine du plus bel épisode arrivé à cette date, le magnifique et puissant The Judgment avec Clu Gulager.

Une grosse différence avec No Name on the Bullett et qui rend cette fiction bien moins tendue et inquiétante, le suspense moins prenant, est qu’aucun des citoyens de Medicine Bow ne parait paniqué par la venue du chasseur de primes, tous semblant avoir parfaitement bonne conscience. Un seul homme est inquiété par Wolfe et il s’agit de Trampas qui décidément se retrouve une nouvelle fois en fâcheuse posture, son passé de mauvais garçon ne l’aidant pas à se faire entendre lorsqu’il clame son innocence pour l’un des meurtres qu’on lui impute, celui de l’homme qui devait dévoiler l’identité du criminel recherché par le bounty hunter. Évidemment que les spectateurs savent qu’il n’en est rien puisqu’ils ont été témoins de la scène lors de la superbe séquence nocturne pré-générique, très bien photographiée mais également intéressante par le fait de nous faire assister à une situation certes banale mais rarement vue au sein du western, le changement d’une roue de chariot en plein orage. Quant au crime pour lequel l’assassin est recherché pour une récompense de 5 000 $, on vient à douter quelques temps de l'innocence de Trampas en raison de son passé relaté dans l’épisode qui ouvrait cette deuxième saison, de son propre questionnement suite à une déplaisante situation dans laquelle il s’est fourvoyé malgré lui juste avant d’arriver à Shiloh - et qu'il narre au Virginien - ainsi que de ses vives réactions lorsqu’il se trouve a face à Wolfe. Ce dernier est certes très méfiant et peu aimable, mais le caractère soupe-au-lait de Trampas n’aide pas ce dernier à se disculper et à ce qu’on lui fasse confiance. Sans rien en dire de plus, le scénario est tellement bien écrit et ingénieux que je mets au défi quiconque de trouver l’identité du véritable homme qui se trouve sur l’affiche "Wanted" rangée dans un coffret fort qui ne peut pas être ouvert avant le retour du banquier ; nous ne l’apprendrons que 15 minutes avant la fin de l'épisode.

Les auteurs sont tellement doués qu’ils arrivent même parallèlement à caser une sous-intrigue d’épidémie de fièvre typhoïde sans jamais qu'elle ne paraisse servir à combler un trou mais qui au contraire s’imbrique parfaitement bien avec l’histoire principale pour finir par la rejoindre, s’avérant finalement très importante et non secondaire. Une fois encore, je vous laisse la surprise de la découverte. Sachez juste que le scénario s’avère d’une remarquable fluidité, ce qui paradoxalement en ferait presque le principal défaut de l’épisode qui manque un peu d’accrocs. Mais sinon, quels étaient les éléments pris à la source de la série que nous évoquions au début de ce texte ? Après plusieurs intrigues qui se sont déroulées loin de Medicine Bow, nous y revenons et retrouvons la petite bourgade, le ranch Shiloh avec la maison du juge, le dortoir des cow-boys et même la cabane en forêt de White Wing où se déroulait une partie du deuxième épisode de la série qui portait d’ailleurs son nom. On se retrouve aussi en terrain connu par le fait de trouver réunis - ce qui n’était pas arrivé depuis longtemps - tous les principaux protagonistes de la série, y compris Betsy ainsi que les seconds rôles comme celui du shérif interprété par Ross Elliott ou le rancher Wingate par Roy Engel. On revient sur la vantardise rigolarde de Steve, son amitié avec Trampas qui les conduisent à se lancer dans des défis enfantins comme des courses de chevaux, le caractère rabat-joie et moralisateur d’un Virginien qui détient néanmoins le bon sens, la fraicheur de Betsy que courtisent nos trois cow-boys et qui n’est pas dénuée d’humour (l’écharpe qu’elle tricote et dont elle a peur qu’elle se transforme en couverture si on l’immobilise encore longtemps suite à sa maladie) ou enfin la sagesse et le progressisme du juge Garth qui ne valide pas le métier de chasseur de primes mais se fait néanmoins renvoyé dans les cordes lorsque Wolfe lui rétorque en gros que s’il ne souhaite plus que le métier de bounty hunter existe il faut voter des lois pour interdire les primes.

Il n'y a pas grand-chose à redire de la mise en scène du réalisateur britannique John English qui avait déjà signé l’épisode avec Ida Lupino - A Distant Fury - et qui fut le principal collaborateur de William Witney à la Republic alors qu'ils tournaient tous deux les célèbres serials que furent Zorro's Fighting Legion et Dreams of Fu Manchu : elle s’avère très solide, non dénuée de petites fulgurances - notamment lors de la séquence initiale déjà décrite plus avant - tout comme l’astucieux et rigoureux scénario ainsi que l’interprétation d’ensemble. Outre les habituels comédiens de la série, le casting intègre aussi l’excellent Broderick Crawford - dont le personnage de chasseur de primes aurait néanmoins mérité d’être enrichi - ou encore un très convaincant Arch Johnson dans la peau du docteur qui non seulement lutte pour vaincre l’épidémie de typhoïde mais part également à la recherche de la source de l’infection en compagnie de nos héros. Un épisode polar-western très plaisant et d’une remarquable fluidité d’écriture qui manque néanmoins de puissance et de tension. Mais quel plaisir - même si cela reste avant tout un épisode Trampas - de retrouver enfin réunis tous les habitants de Shiloh et de se voir octroyer un final assez poignant qui démontre que les bons sentiments (la mansuétude, le pardon...) ne font pas forcément les mauvaises fins. Mêlant habilement deux intrigues qui semblent au départ n’avoir rien à voir entre elles, un épisode extrêmement habile et très solide à défaut de faire partie des sommets de la série !

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  • 2.05 - The Evil That Man Do
  • Réalisation : Stuart Heisler
  • Scénario : Frank Chase
  • Guest Star : Robert Redford & L.Q. Jones
  • Première diffusion 16/10/1963 aux USA - 24/08/1983 en France
  • DVD : VOSTF
  • Note : 7/10

Le pitch : Le Virginien arrête le bagnard Matthew Cordell (Robert Redford) alors qu’il était sur le point de s’échapper dans les rues de Medicine Bow. Lorsqu’il apprend qu’il est emprisonné depuis l’âge de 15 ans après n’avoir connu que l’orphelinat, il est ému et demande au juge Garth de faire en sorte de lui faire accorder une liberté conditionnelle afin qu’il puisse avoir sa chance de connaitre une vie "normale". Le voici embauché au ranch Shiloh durant une année, ce qui n’est pas pour déplaire à Betsy qui tombe amoureuse de lui malgré son caractère taciturne...

Mon avis : A 27 ans, Robert Redford avait certes déjà beaucoup tourné pour la télévision dans des séries d’ailleurs devenues cultes (Perry MasonAlfred Hitchcock présenteLa Quatrième dimensionLes Incorruptibles...) mais il lui faudra attendre encore deux ans avant que ses yeux bleus perçants viennent crever les écrans de cinéma avec notamment Daisy Clover de Robert Mulligan et surtout La Poursuite impitoyable (The Chase) d'Arthur Penn où il interprétait un jeune prisonnier en fuite. Également bien avant Brubaker, dans l’épisode du Virginien qui nous concerne, il tenait donc déjà le rôle d’un bagnard qui avait tenté de se faire la malle après que le chariot qui le transportait sur son lieu de travail s'est renversé. Il n’allait pas aller bien loin puisque le Virginien, qui était sur place et avait assisté à cet incident, l’avait poursuivi dans les rues de la ville et immédiatement appréhendé afin qu’il ne mette pas en danger ses concitoyens. Mais en apprenant la tragique histoire de celui qu’il venait d’arrêter, le contremaitre du ranch Shiloh l'avait pris en pitié. En effet, on lui expliqua que ce hors-la-loi n’avait jamais connu la liberté puisque élevé à l’orphelinat jusqu’à l’âge de 15 ans avant de passer directement en prison où il était resté jusqu’à ce jour pour avoir tué l'un de ses camarades qui avait cassé la seule chose qu’il ait jamais possédé, un petit soldat de plomb.

[Changement de paragraphe et changement de temps grammatical pour en revenir à un présent plus vivant]
Torturé par ce parcours dramatique, n’ayant même plus la tête à partager les distractions de ses compagnons de chambre, le Virginien insiste auprès de son patron pour qu'il aille en tant que juriste essayer d’aller demander la liberté conditionnelle pour ce jeune homme qui l'a profondément touché. Le juge Garth, qui comme chacun le sait est un homme très tolérant et très progressiste, qui ne cautionne pas les rudes conditions de vie dans les prisons de son Etat, accepte et réussit à "délivrer" le nommé Matthew Cordell après avoir assisté aux traitements inhumains subis dans ces lieux comme la punition du four, une "boîte" en tôle enfouie dans le sol en plein soleil dans laquelle les geôliers punissent les plus récalcitrants en les y enfermant ; on en verra une "variante" célèbre et verticale dans Le Pont de la rivière Kwaï par exemple. Et le voici qui ramène le délinquant à Shiloh où celui-ci doit rester une année entière sans faire de vagues avant de pouvoir retrouver une entière liberté. Tout comme le juge, le Virginien est ravi de pouvoir donner une chance à ce jeune homme qui n’a jamais connu ne serait-ce qu’une journée de "vie normale". Ce ne sera pourtant pas facile pour l’ex-bagnard qui a du mal à se faire aux rapports humains, estimant qu’il ne doit accepter aucune aide ni aucun service (auquel cas contraire il serait forcé de les rendre), qu’il n’a pas à sortir en ville pour échapper aux diverses tentations qui se présenteraient à lui, qu’il n’a pas à être aimable ni courtois... Au grand dam de son entourage, il décide donc de refuser quelque socialisation que ce soit et de poursuivre une vie d’isolement et d’individualisme, ce sur quoi le Virginien le tance assez vertement en lui conseillant de changer son fusil d’épaule s’il compte arriver à se réintégrer sans heurts à la vie civile à la fin de sa liberté conditionnelle. Puisque l'on parle de lui, profitons-en pour en remettre une couche tellement le jeu de James Drury me parait mésestimé : je trouve au contraire une fois encore le comédien absolument parfait dans le rôle du Virginien et qu'il n’a absolument pas à rougir de la présence d’un excellent Robert Redford à ses côtés.

Le réalisateur de cet épisode, Stuart Heisler, est assez connu et plutôt apprécié des amateurs de série B pour avoir notamment signé le très bon Storm Warning avec Ronald Reagan qui fustigeait les activités du Ku-Klux-Klan. Dans le domaine du western, il aura réalisé le divertissant Le Grand Bill (Along Came Jones) avec Gary Cooper et Loretta Young, une des rares incursions réussies de la comédie parodique légère dans le genre. Puis, toujours avec Gary Cooper, ce fut Dallas, ville frontière (Dallas) qui à partir du moment où le sérieux prenait le pas sur l’humour devenait inintéressant, d’autant plus que Heisler n’arrivait jamais à faire décoller ni à donner du souffle à sa mise en scène bien terne. A croire que dans le genre, le cinéaste ne s’épanouissait que dans l’humour ; ce que le "on ne peut plus sérieux" Collines brûlantes tendait à nous confirmer : même si le film compte de très nombreux admirateurs, il m’avait paru laborieux de bout en bout ! En revanche, cet épisode du Virginien, qui se révèle être son avant-dernier travail en tant que réalisateur, pourrait bien être ce que Stuart Heisler a le mieux réussi dans le western. Une mise en scène rude, carrée et extrêmement efficace - les rares coups de poings sont teigneux à souhait -, qui paradoxalement nous octroie également des scènes intimistes entre Lee J. Cobb et Roberta Shore qui font partie de ce qui a été filmé de plus tendre depuis le début de la série. Il faut dire que le scénariste Frank Chase n’en est pas à son coup d’essai au sein de la série puisqu’il avait auparavant signé le touchant If You have Tears. Stuart Heisler et Frank Chase nous proposent donc ici un bon paquet d’excellentes séquences, qu’elles soient légères - la préparation de la fête d’anniversaire de Steve - ou romantiques - notamment tout ce qui tourne autour de la première désillusion amoureuse de Betsy, qui trouve décidément en Roberta Shore une interprète vraiment attachante (il s’agissait d’ailleurs de son épisode préféré) -, qu’elles abordent des thématiques toujours autant d’actualité comme la réinsertion des délinquants ou les réformes pénitentiaires, ou bien qu’elles soient mouvementées et correspondent ici aux  accès de violence brutaux de Robert Redford. 

Il est également toujours aussi agréable de voir que les auteurs ne mettent pas forcément une auréole à leur héros, le Virginien s’avérant à nouveau assez austère, moyennement sensible - il n’essaie pas de sauver le cheval blessé de Betsy - et pas forcément toujours aimable notamment lorsqu’il avoue à Cordell qu’il a eu de la chance d’avoir été soutenu par le juge après son coup de sang - il manque de peu de tuer un cow-boy excellemment bien interprété par L.Q. Jones, un comédien qui faisait d’ailleurs partie de la fratrie monstrueuse aux côtés de James Drury dans le chef d’œuvre de Sam PeckinpahCoups de feu dans la Sierra - auquel cas contraire, bien moins indulgent que son patron, il l’aurait déjà renvoyé au pénitencier. Vous aurez compris que l’interprétation est de très haut niveau dans ce bon épisode juste un peu trop prévisible, parfois saboté par le médiocre David Buttolph à la musique - pas forcément un mauvais mélodiste mais un effroyable orchestrateur - et très décevant dans ses dix dernières minutes assez peu convaincantes, d’autant que contrairement à tout ce qui a précédé elles ont été tournées dans des décors de studio moyennement crédibles. Ceci étant dit, il s’agit d’un touchant drame psychologique, plein de bons sentiments et teinté de romance mais qui n’en est pas mièvre pour autant, au contraire très digne et très noble à l’image des réactions compréhensives de Betsy face à l’amour non partagé qu’elle éprouve pour le beau délinquant à qui personne jusqu’à présent n’avait donné la chance de pouvoir vivre librement. Pas complètement satisfaisant mais cependant sacrément plaisant !

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  • 2.06 - It Takes a Big Man
  • Réalisation : Bernard McEveety
  • Scénario : Harry Kronman
  • Guest Star : Lloyd Nolan
  • Première diffusion 23/10/1963 aux USA - Jamais diffusé en France
  • DVD : VOSTF
  • Note : 8/10

Le pitch : Pour lui acheter des poulets, le juge Garth rend visite à Wade (Lloyd Nolan), un de ses meilleurs amis qu’il n’a pourtant pas revu depuis des années. Ce dernier est ravi de leurs retrouvailles mais demande un service à Garth : qu’il embauche quelques mois son ainé Hank (Chris Robinson), un jeune homme instable et violent avec qui il a beaucoup de mal et dont il n’arrive pas à gérer le caractère fielleux et les emportements violents. Garth se sent dans l’obligation d’accepter ; ce qui va très mal se passer et même provoquer un drame du fait que Hank ait pris Trampas en grippe...

Mon avis : Juste après le fort honorable The Evil That Man do avec Robert Redford en guest star, ce deuxième épisode signé Bernard McEveety - après le curieux The Mountain of the Sun et ses trois nonnes parties aider une tribu d’Indiens belliqueux - aborde à nouveau le thème de la tentative d'éducation d’un jeune homme instable et violent même s'il ne s'agit pas cette fois de réinsertion, le garçon n'ayant pas été un quelconque prisonnier. Sauf que le ton est beaucoup plus tragique et que cette fiction acquiert une dimension supplémentaire grâce à la perfection de son script, de sa réalisation et de sa direction d’acteurs qui en font jusqu'à présent l’un des sommets de la série, un épisode mémorable. Mea Culpa tout d’abord en ce qui concerne Bernard McEveety, que j’avais assaisonné un peu violemment lors de mon avis sur son épisode précédent, écrivant que la relative faiblesse de l’ensemble pesait surtout sur les épaules du réalisateur qui fera néanmoins encore beaucoup moins bien dans le cinéma avec par exemple le minable Marqué au fer rouge (Ride Beyond Vengeance) avec Chuck Connors, un western tout à fait pitoyable. Je ne reviens évidemment pas sur ces dires mais je relativise désormais au regard de son travail remarquable et de la réalisation sans failles de cet épisode. Comme quoi tout est possible et avec un bon scénario un tâcheron peut se motiver, se sentir plus concerné et se révéler bien meilleur qu’à son habitude ! Dans cet épisode, le juge Garth accepte, en l’embauchant comme homme de main de son ranch, de prendre en charge pour un temps l’éducation du fils de son meilleur ami que ce dernier n’arrive pas à maitriser tellement il est indiscipliné et foncièrement méchant. Ne parvenant néanmoins pas plus à s’intégrer à Shiloh, ce dernier va provoquer la colère de tous les cowboys et se heurter à Trampas qu’il ne va cesser de provoquer... jusqu’au drame !

Non seulement Bernard McEveety dirige ses acteurs à la perfection mais ses choix de mise en scène s’avèrent tous impeccables, parvenant à créer, faire monter et maintenir une tension palpable de bout en bout par la manière qu’il a également de placer ou cadrer ses comédiens (aidé en cela par les choix de montage), utilisant tout cela à très bon escient, avec solidité et sans aucune emphase. Revenons d’abord à sa direction d’acteurs grâce à laquelle il réussit un petit miracle : rendre attachant l’un des personnages les plus haïssables de la série, celui d'un jeune homme odieux et haineux joué par le méconnu Chris Robinson qui au vu de sa prestation dans cet épisode du Virginien aurait mérité une carrière plus glorieuse que d’être obligé d’en arriver à squatter des soap comme Hôpital Central ou Amour, gloire et beauté. Ici, aidé par une écriture magistrale de Harry Kronman, le comédien parvient en un joli tour de force à nous faire ressentir de l'empathie pour son personnage méprisant, raciste et violent. La première fois qu’il apparait à l’écran, il est en train d’injurier et de violenter un Indien avec un air de psychopathe qui fait froid dans le dos ; il s’agit d’ailleurs de la première fois que la série aborde le sujet du racisme même si c'est ici en filigrane. Plus tard, au ranch Shiloh, il se comportera en rustre avec une vieille Indienne à qui il demande de bouger pour qu’il puisse passer au lieu de la contourner. Pour l’anecdote, ce fait irrespectueux a lieu au cours d’une séquence où la vieille squaw et Betsy sont en train - en extérieurs - de fabriquer du savon : il s'agit encore d'un de ces éléments originaux qui font de la série une petite mine concernant des situations rarement vues au sein d’un western. En parlant d’extérieurs, à signaler que cet épisode n’utilise quasiment aucun décor de studio notamment par le fait de ne jamais se dérouler de nuit, ce qui aide à le rendre encore plus réaliste et satisfaisant. Quoi qu’il en soit, pour en revenir à Hank, même s’il est détestable a priori, il va se révéler relativement attachant du fait qu'il soit suicidaire, se révélant au fur et à mesure de l'intrigue plus riche et passionnant que de prime abord, évoluant au fil de ses rencontres et des révélations sur son passé.

Vous aurez deviné que pour que nous ayons pu concevoir de la compassion pour ce violent écorché vif, il aura fallu que ce dernier ait eu un secret à dissimuler qui l’ait rendu aussi sournois, provocateur et somme toute totalement ingérable. Et effectivement, nous l’apprendrons dans le courant de l’épisode lorsqu’il se confiera au juge qui ne souhaite pas le garder au ranch où il se comporte trop mal. Hank en veut à la Terre entière par le fait que son père lui ait caché la vérité sur sa naissance et sur la véritable identité de sa mère ; depuis qu'il a découvert ce qu'il en est réellement, Hank pense que son père a toujours eu honte de lui et le fait payer à tout son entourage. Même si cela ne fera aucun doute pour la plupart d’entre vous quant à ce que cache ce secret, je ne me vois pas en dévoiler davantage afin de ne pas être critiqué de spoiler intempestivement. Je vous laisse donc le découvrir ou vous le faire confirmer. Sachez juste que le scénario pourrait s’apparenter à une tragédie grecque avec des relations familiales larvées, des frères totalement dissemblables, un drame suivi d’une vengeance, les responsabilités reposant plus ou moins sur le père qui a beaucoup à se faire reprocher, plus par omission que par action. Ce protagoniste de patriarche dépassé, et qui aura causé le malheur de ses deux rejetons du fait de ne pas leur avoir assez parlé, est campé par un très bon Lloyd Nolan - un comédien prolifique qui tournera jusqu’à la fin de sa vie et notamment dans Hannah et ses sœurs de Woody Allen - alors que le fils cadet est joué par un tout jeune Ryan O’Neal - Love Story, Barry Lyndon - qui tire lui aussi assez bien son épingle du jeu dans la peau de ce personnage introverti qui va vouloir in fine chercher à se faire remarquer par son père, les deux frères ayant toujours cru qu’ils étaient délaissés l'un au profit de l’autre.

Si les trois guest stars s’avèrent tous remarquables, il en va de même ici de Doug McClure mais surtout de Lee J. Cobb qui donne ici une interprétation encore plus imposante qu’auparavant notamment lors des séquences qui l’opposent à Lloyd Nolan, leurs deux personnages permettant la description d'une belle amitié aux violents soubresauts. Roberta Shore est toujours aussi attachante ; quant à James Drury, il ne fera qu’une seule apparition lors d’un des rares moments légers de l’épisode au cours duquel il tacle gentiment Trampas (des scènes qui permettent de respirer et de décompresser un peu). Dans ce superbe épisode, qui bénéficie également d’un beau travail sur la photographie, même David Buttolph à la musique parvient à rester plus sobre qu’à son habitude. Une magistrale réussite qui ne manque pas de souffle dramatique, et qui se clôt par un final tendu et poignant au cours duquel la plupart des protagonistes doivent faire face aux conséquences de leurs actes passés et à venir ! Aussi puissant que touchant.

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  • 2.07 - Brother Thaddeus
  • Réalisation : John English
  • Scénario : William Fay
  • Guest Star : Albert Salmi
  • Première diffusion 30/10/1963 aux USA - 16/08/1983 en France
  • DVD : VOSTF et VF
  • Note : 7/10

Le pitch : Ex-bandit, Willy (Albert Salmi) est entré en religion, devenant Brother Thaddeus. Il est envoyé à Medicine Bow afin de soutenir le religieux en place dont la santé décline. Ce dernier devant partir en mission, le moine novice se voit dans l’obligation de s’occuper de la paroisse et de l’éducation des enfants. Lorsque d'anciens complices viennent cambrioler un train, on l’accuse de faire partie du coup d’autant qu’il avait laissé de mauvais souvenirs aux habitants. Trampas, qui ne croit pas en sa culpabilité, va faire en sorte de retrouver la bande d’escrocs dont fait partie Floss (Kathie Browne), une femme qu’il a aimée...

Mon avis : D’après tout ce que j’ai eu l’occasion d’en lire ici et là, il semblerait que Brother Thaddeus soit un épisode globalement et malheureusement assez peu apprécié, souvent décrit comme une pénible farce ou une pantalonnade assez balourde alors qu’à mon avis il n’en est rien. L’humour est certes présent mais l’épisode ne peut pas vraiment s’apparenter à une comédie puisque le drame - la vie de l'un des membres du gang ne tient qu'à un fil - et la violence - l'attaque d'un train menaçant la vie de quelques enfants, une femme agressée avec vigueur... - ne sont d'ailleurs jamais très loin ; s'invitent également une romance très mélancolique ainsi que, brièvement, le thème de la vente de chevaux à l'armée. Malgré sa médiocre réputation, je pense donc qu’il s’agit au contraire d’un cru absolument délicieux, une fiction dans l'ensemble évidemment légère et sans véritable tension mais bénéficiant néanmoins d’un scénario aux petits oignons et d’une interprétation plus qu’honorable. Hormis Doug McClure, les autres protagonistes réguliers ne font que de brèves apparitions - voire même, comme le Virginien, ne montrent pas le bout de leur nez -, l’ensemble de l’épisode reposant avant tout sur les épaules de ses invités. Albert Salmi ne tombe jamais dans les pièges du cabotinage outrancier alors que son personnage le lui prédestinait, Kathy Browne se révèle aussi talentueuse que charmante dans la peau de la saloon gal et les méconnus Joe Maross et Christopher Dark ne déméritent pas, le premier dans le rôle du détestable chef de gang et amant violent de la chanteuse, le second dans celui du complice secrètement amoureux de la maîtresse de son patron, un personnage d’ailleurs grandement attachant par sa maladresse et sa timidité.

Willy, ancien bandit assez minable, a décidé d’entrer en religion, sincèrement attiré par la foi. Il a autrefois laissé de très mauvais souvenirs aux habitants de Medicine Bow, ayant saccagé une partie de la ville un soir de forte cuite, étant également réputé pour être le seul à avoir réussi à s’évader de sa prison "inviolable". Autant dire qu’il ne serait pas le bienvenue si on venait à le rencontrer dans les parages ; mais pas de chance, ses supérieurs l’envoient en mission aux environs de cette petite bourgade, sur les terres mêmes du ranch Shiloh où se trouve la paroisse tenue par un moine en mauvaise santé et qui ne doit pas tarder à quitter les lieux. Venu pour lui porter soutien, Brother Thaddeus se retrouve du jour au lendemain à devoir s’occuper de l’apprentissage aux enfants des rudiments en mathématiques et en français, lui qui est très lucide quant à son inculture, son manque total d’éducation et sa faible intelligence. N’ayant pas le choix, il décidera d’apprendre les leçons la veille du jour auquel il devra les dispenser à ses jeunes élèves ; ce qui n’ira pas sans quelques cocasseries, certains enfants s’avérant bien plus au fait que leur professeur en ce qui concerne la grammaire et la conjugaison. Mais une fois encore, alors qu'il aurait été très facile de sombrer dans la caricature, rien de lourdaud ni de laborieux nous est proposé mais au contraire une belle subtilité dans les situations et le jeu d’Albert Salmi que je m’étonne d’avoir lu qu’il était grimaçant et pénible ; comme quoi le cabotinage est une notion elle aussi - comme de nombreuses autres dans le domaine artistique - totalement subjective. La deuxième évasion "miraculeuse" de la prison constitue à ce propos un bon exemple des pièges que le comédien évite tout du long, le résultat se révélant gentiment amusant et non pachydermique.

Quelques autres séquences sont assez réjouissantes de drôlerie comme les retrouvailles de Willy et Steve, les sursauts de ce dernier à chaque fois que le moine s’approche trop près de lui (il se souvient trop bien de leur dernière rencontre au cours de laquelle il s’était fait envoyer valdinguer à travers le saloon par l’ex-bandit ivre) ou encore celle au cours de laquelle Betsy est surprise par son père en train de fredonner une chanson plutôt leste avec une étonnante ardeur et alors qu’elle se croyait seule. Cet épisode signé par le britannique John English, qui avait déjà réalisé celui avec Ida Lupino - A Distant Fury - ainsi que le très bon et récent A Killer in Town avec Broderick Crawford, comporte également l’une des plus belles scènes romantiques vues jusqu’à présent au sein la série, celle très touchante au cours de laquelle Trampas raccompagne la nouvelle saloon gal jusqu’à son hôtel. S'étant autrefois déjà entiché d’elle sans qu’il ne se soit rien passé, Trampas, toujours aussi amoureux, retente sa chance sans que cela n’aboutisse plus que précédemment, la jolie Floss le décourageant en lui faisant comprendre qu’elle n’est pas faite pour lui : une scène d’une douceur, d’une tendresse et d’une mélancolie qui en font l’une des plus mémorables non seulement de l’épisode mais de la série toute entière, d'autant qu'elle est de plus très joliment éclairée et formidablement interprétée par la ravissante Kathie Browne. Christopher Dark n'est pas en reste et l’on éprouve une profonde empathie à son égard lorsque lui aussi est gentiment évincée par la charmante jeune femme qui par ailleurs est tombée sous la coupe d’un amant jaloux et violent ; la gifle que ce dernier lui assène alors qu’elle tente de se révolter nous fait bien comprendre qu’il ne s’agit pas nécessairement d’un épisode aussi léger que nous aurions pu le croire d'emblée.

Les amateurs d’action n’auront pas été oubliés non plus puisque cette intrigue se termine par une longue fusillade autour d’un relais de diligence surplombé d'un vertigineux aplomb rocheux ; une séquence très efficace et plutôt musclée qui devrait combler ceux qui aiment le mouvement. Comme pour A Killer in Town, la réalisation de John English s’avère très solide et non dénuée de petites fulgurances, tout comme l'interprétation d'ensemble et l'astucieux scénario à première vue pas nécessairement rigoureux - du fait de parfois passer d'un personnage à l’autre avec une délicieuse indolence - mais au final remarquablement bien écrit. A signaler également parmi les points positifs une bonne humeur souvent bienvenue, une entêtante chanson parfaitement bien interprétée par Kathie Browne, de très beaux paysages, de jolies plongées du haut du clocher, des cadres légèrement penchés assez curieux mais qui font leur effet déstabilisant, de jolies nuits américaines, des dialogues assez savoureux, un David Buttolph assez inspiré à la musique... Pas un sommet de la série mais un épisode néanmoins délicieux, attachant, souvent attendrissant sans pour autant tomber dans la mièvrerie et bien plus subtil qu’il semblait devoir être de prime abord.

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  • 2.08 - A Portrait of Marie Valonne
  • Réalisation : Earl Bellamy
  • Scénario : Dean Riesner
  • Guest Star : Skip Homeier
  • Première diffusion 06/11/1963 aux USA - 20/03/1966 en France
  • DVD : VOSTF et VF
  • Note : 6/10

Le pitch : Le Virginien est venu avec Steve à la Nouvelle Orléans pour y vendre un troupeau. A cette occasion il rencontre Marie Valonne (Madlyn Rhue), une évanescente jeune femme de la haute société dont il tombe amoureux. Après un premier diner en tête à tête, elle disparait mystérieusement et demeure introuvable. Le Virginien se rend demander de l’aide au Sergent Bohannon (Skip Homeier) qui semble avoir plus important à s’occuper et notamment le meurtre d’un important politicien. Le régisseur du ranch Shiloh décide alors de mener lui-même l’enquête, au cours de laquelle il va découvrir le passé tumultueux de la disparue...

Mon avis : Troisième épisode réalisé par Earl Bellamy, A Portrait of Marie Valonne pourra très logiquement décevoir ceux qui se souviennent des deux précédents, à savoir le délicieux The Big Deal avec Ricardo Montalban et surtout The Judgment avec Clu Gulager qui peut être considéré comme l'un des indéniables sommets de la série. Même si cet épisode "mélodramatico-romantico-policier" s’avère bien en deçà, la mise en scène reste très agréable, le réalisateur ayant également signé dans le courant de cette même décennie quelques bons westerns pour le grand écran dont La Parole est au colt (Gunpoint) avec Audie Murphy ou Sans foi ni loi (Incident at Phantom Hill) avec Robert Fuller et Dan Duryea. Après deux épisodes où il ne faisait au mieux qu’une brève apparition, James Drury revient ici au premier plan, à nouveau "amoureux malheureux", cette fois d’une femme rencontrée une nuit à la Nouvelle Orléans où il s’était rendu avec Steve pour y vendre du bétail. Un petit dépaysement pour les habitués de la série que ce déplacement de l’intrigue dans le Sud urbain des États-Unis ma foi plutôt bien reconstitué malgré les faibles moyens alloués, les quelques rues et décors de studio arrivant à nous rendre assez crédible ce changement de lieu et de climat.

La vente du troupeau s’étant bien déroulée, les deux hommes du ranch Shiloh, les poches pleines de billets, se font immédiatement agresser dans l’encoignure d’une rue étroite par des voleurs qui n’y vont pas de main morte avec coups vigoureux et teigneux assénés, le réalisateur et les cascadeurs se révélant en l’occurrence chevronnés et efficaces. Les larrons sont mis en fuite par un agent de police interprété par l’un des meilleurs seconds rôles de western au cinéma, Skip Homeier, que l’on avait plus souvent l’habitude de croiser dans la peau d’acariâtres bad guys que du bon côté de la loi, inoubliable par exemple chez Boetticher, que ce soit dans The Tall T (L’Homme de l’Arizona) ou Comanche Station. Sous la défroque de ce détective qui semble ne pas avoir envie de se sentir concerné par les ennuis de ces étrangers du Wyoming, pas plus que par la disparition mystérieuse de la jeune femme dont était tombé amoureux le Virginien, Homeier est parfait, sa confrontation "musclée" avec James Drury faisant parfois des étincelles. On comprendra par la suite le manque de motivation de ce personnage de policier à vouloir prendre en main cette enquête lorsque l’on se rendra compte que la thématique principale de l’épisode est la corruption, l’auteur décrivant en quelque sorte la naissance d’une certaine mafia avec ces hommes de loi achetés par des notables véreux ; ceux qui auraient eu envie de faire évoluer cette situation inextricable se font remettre à leur place par leurs supérieurs, finissant par se persuader qu’il faut composer avec cette dégénérescence morale, du moment que l’on puisse encore s’occuper de sauver la vie de certaines gens.

C’est le cas du protagoniste rêche et gentiment insurgé interprété par Skip Homeier, qui lutte comme il peut contre toutes les compromissions tout en sachant qu’il ne pourra jamais faire vaciller les politiciens et les juristes corrompus. Concernant ces derniers, on a affaire à de très bonnes prestations de la part de Peter Mark Richman et de Ken Lynch, ce dernier haïssable à souhait lorsqu’on le voit s’accaparer la maîtresse de son homme de main sous les yeux de ce dernier qui ne peut rien faire sous peine de se faire tuer. De cette situation découlera tout l’embrouillamini de cette trouble intrigue policière, que nous ne divulguerons évidemment pas plus d’autant qu’elle nous est dévoilée par flash-back interposés lorsque le Virginien vient enquêter sur le passé de Marie Valonne, la mystérieuse jeune femme qui lui a tourné la tête lors d’une excellente première partie à l’ambiance délicate et éthérée. Des retours en arrière moyennement convaincants dans leur intégration au sein de l’histoire et qui sont à l’origine de la faiblesse d’ensemble d’un épisode malgré tout loin d’être déplaisant, abordant non seulement la gangrène politicienne mais également la soumission d’une femme à plusieurs hommes qui se la repassent, le portrait de cette femme malchanceuse, convoitée et tombée sous la coupe de "mafieux" s’avérant finalement assez touchant. Si la police émet des réticences à la rechercher, c’est peut-être parce qu’elle a reçu des ordres de personnalités haut placées très influentes et que cette disparue ferait bien mieux de rester introuvable. Je vous laisse imaginer ce qui a bien pu lui arriver ; dommage que Madlyn Rhue manque un peu du charisme qui aurait permis de rendre ce personnage au passé peu reluisant plus émouvant et de nous attacher plus avant à l’enquête du Virginien.

Cet épisode un peu hors contexte westernien - ce qui n’est pas forcément désagréable - aurait mérité plus de rigueur dans son écriture et une construction un peu plus linéaire ; le scénariste s’avèrera plus habile lorsqu’il travaillera dans les années 70 pour Don Siegel et Clint Eastwood. On prendra cependant un grand plaisir à constater les atermoiements risibles de Steve à trouver New Orleans ennuyeuse à mourir, à suivre le parcours tragique d’une femme attachante mais happée par le milieu criminel, à écouter, lors d’un voyage romantique en buggy, le Virginien s’épancher sur son avenir qu’il rêve au sein de son propre ranch avec femme et enfants ("Well, it's in Wyoming country. A river runs through there, called The Sweetwater. It snows some in the winter, but in the spring the whole valley comes up green. A man can get a couple of sections pretty cheap. Start a herd, even a family maybe...") Lors de cette très jolie séquence, on commencera un peu à regretter Percy Faith et ses belles mélodies écrites notamment pour les thèmes musicaux romantiques de la première saison, autrement plus entêtants et mélancoliques que ceux - pour l’instant - de cette deuxième. Un épisode pas totalement réussi faute surtout à un scénario un peu faible et à une interprétation inégale, mais qui a le mérite de partir sur des sentiers un peu différents et inhabituels, pas loin du film de gangsters. Pour l’anecdote, ce scénario fera l'objet d'un remake cinq ans après pour un épisode de L’Homme de fer.

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  • 2.09 - Run Quiet
  • Réalisation : Herschel Daugherty
  • Scénario : Norman Katkov & Ed Adamson
  • Guest Star : Clu Gulager & L.Q. Jones
  • Première diffusion 13/11/1963 aux USA - Jamais diffusé en France
  • DVD : VOSTF
  • Note : 7/10

Le pitch : Jud (Clu Gulager), un jeune sourd-muet clochardisé, arrive tout dépenaillé à Medicine Bow. Molesté par deux cow-boys, il est pris en pitié par Steve qui décide de l’emmener à Shiloh et de le faire embaucher par le Virginien le temps qu’il gagne assez d’argent pour repartir sur de bonnes bases. Mais cet homme au tempérament violent va lui causer des ennuis, surtout lorsqu’on le surprend sur les lieux d’un crime qui vient d’avoir lieu sur la personne d’un joueur professionnel contre qui il vient de perdre. Principal suspect, il fuit la prison et trouve refuge chez une femme seule...

Mon avisRun Quiet est en très peu de temps d’intervalle le troisième épisode de cette deuxième saison à être construit sur un modèle assez similaire, celui d’un récit d’apprentissage qui se transforme en tragédie à partir du moment où le jeune homme violent en "réinsertion" est accusé de meurtre alors même que le spectateur connait parfaitement son innocence pour avoir été témoin des faits, ayant une fois de plus un temps d'avance sur les protagonistes. Il y eut The Evil That Men do, le cinquième épisode avec Robert Redford en bagnard orphelin, puis immédiatement après le superbe It Takes A Big Man avec un étonnant Chris Robinson dans le rôle d’un délinquant véhément et haineux. L'épisode dont il est question ici, réalisé par Herschel Daugherty - déjà signataire de l’original The Man From the Sea avec un excellent Tom Tryon dans le rôle d’un marin tombant amoureux d’une jumelle assez trouble -, raconte l’histoire de Jud, un sourd-muet rejeté par tout le monde sauf par ceux qui, le considérant comme un idiot, décident de profiter de son handicap pour l'exploiter. Justement, alors qu’il avait été embauché pour aider à un travail de manutention, il a été lâché par ses employeurs une fois sa tâche effectuée sans bien évidemment recevoir quelconque salaire en retour. C’est suite à cette injustice que de bon matin, alors qu'ils allaient prendre ensemble leur petit déjeuner - encore un de ces détails du quotidien qui font tout le charme de la série -, Steve et le shérif le voient arriver pieds nus, sale et dépenaillé dans les rues de Medicine Bow.

D’après ce que les citoyens comprennent, Jud aurait suivi jusqu’ici les hommes qui lui devaient de l’argent ; en les retrouvant, il se fait rejeter à nouveau mais réagit avec violence. Heureusement le shérif l’arrête avant qu’il n’aille trop loin comme ce fut déjà le cas quelques années auparavant, ce qui causa son emprisonnement. Steve, qui s'attache immédiatement à ce paria chez qui il perçoit intelligence et bonté, décide de le prendre sous son aile et de le conduire à Shiloh afin de le faire embaucher par le régisseur du ranch. Comme à son habitude, le Virginien, toujours aussi sèchement pragmatique, a quelques réticences à prendre un étranger à son service sans le connaitre ; ce tempérament continue de constituer l’une des originalités de la série en faisant de son personnage-titre un homme peu facile de prime abord. Devant l’insistance de Steve, il accepte néanmoins mais sans grand enthousiasme. Nous assistons alors à la partie "apprentissage" au cours de laquelle les cow-boys tentent d’amadouer cette nouvelle recrue qui n’a pas un grand sens de l’humour et s’avère assez soupe-au-lait. Les auteurs en profitent pour donner à leur histoire un aspect documentaire plaisant sur le travail des cow-boys, à lui insuffler pas mal d’humour - le débourrage du soi-disant étalon sauvage, les différentes blagues pour dérider le muet -, de l'émotion notamment au travers l'amitié grandissante entre Steve et Jud et enfin un ton parfois bon enfant loin d'être désagréable, grâce notamment au duo L.Q. Jones et Slim Pickens qui interprètent tous deux des cow-boys de Shiloh, le premier ayant déjà fait partie du 5ème épisode de cette saison et allant pour notre plus grand plaisir revenir à plus de vingt reprises dans ce rôle de Belden.

Une fois mis à l’aise, Jud s’intègre parfaitement bien à l’équipe, perd son tempérament violent et montre de sacrés talents aux cartes au point de vider les poches de ses acolytes de Shiloh ; une bonne ambiance familiale s’est installée. Mais, alors qu’il se rend en ville et qu’il prend place à une table de jeu, un joueur professionnel le prévient avec un grand fair-play qu’il sera difficile à battre et qu’il est toujours temps de se retirer. Alors que l’on se serait attendu à ce que le sourd-muet remporte à nouveau la mise comme dans la plupart des westerns assez légers, la crédibilité semble être à nouveau la priorité des auteurs qui le font perdre. S’ensuit une tragédie qui conduit le héros de cet épisode en prison, suspecté de meurtre, puis vers une seconde partie encore un peu différente au cours de laquelle, après son amitié avec Steve - Gary Clarke n’a peut-être encore jamais été meilleur, il faut dire que son personnage a acquis en l'occurrence encore un peu d’épaisseur -, il est pris en charge par une jeune femme seule qui, après des malheurs sentimentaux et la perte de ses illusions, est devenu acariâtre. Elle va cependant s’adoucir au contact de cet homme recherché par la police. Si certains trouveront l’épisode un peu mièvre et moralisateur, d’autres seront ravis de tomber à nouveau sur une histoire assez progressiste, proposant, plutôt que de les rejeter ou de les prendre en pitié, d’offrir des opportunités et une deuxième chance aux hommes malchanceux devenus violents par la force des choses, l’intégration à un groupe désireux de les aider et l’apprentissage de la vie en collectivité faisant tomber leurs mauvais penchants avérés.

Comme Robert Reford dans The Evil That Men do, Clu Gulager porte l’épisode sur ses épaules et comme un Léonardo DiCaprio alors inconnu à l’époque nous faisait penser qu’il devait être un véritable handicapé mental en le découvrant dans Gilbert Grape, Gulager, sans trop en faire, sans caricaturer mais au contraire toujours extrêmement juste, s’avère formidablement plausible en sourd-muet. Après nous avoir au cours de la série octroyé la plus grande interprétation de bad guy dans le superbe The Judgment, il se révèle ici de nouveau formidable dans un rôle à total contre-emploi. Du coup, je ne cache pas ma curiosité et mon impatience de le voir ensuite revenir régulièrement et durant quatre saisons dans la peau du shérif Emmet Ryker. A ses côtés Gail Kobe - sorte de Gena Rowlands au visage plus dur - s’en tire très bien, tout comme Stacy Harris en élégant joueur professionnel qui aura malheureusement un temps de présence très limité. On regrettera un scénario de bonne facture mais prévisible et sans grandes surprises, une fin un peu trop vite emballée ainsi qu’une musique parfois envahissante surtout durant les séquences mouvementées - d’ailleurs très bien mises en scène et notamment la fusillade finale en extérieurs - mais l’ensemble soigné, pétri d’humanité et au rythme soutenu se révèle tout à fait honorable, voire même très agréable, le happy-end nous mettant en joie tout comme la réjouissante complémentarité entre Clu Gulager et Gary Clarke. Très sympathique !

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  • 2.10 - Stopover in Western Town
  • Réalisation : Richard L. Bare
  • Scénario : Carey Wilber
  • Guest Star : Dick York
  • Première diffusion 27/11/1963 aux USA - 19/03/1967 en France
  • DVD : VOSTF et VF
  • Note : 7/10

Le pitch : Alors que la jeune Caroline Witman (Joan Freeman) revient à New York après un séjour à San Francisco, le train qui la conduit est immobilisé suite à un pont éboulé. Elle va devoir faire un "intermède" de quelques jours dans cette "exotique petite ville de l’Ouest" qu’est Medicine Bow. Tombée sous le charme du Virginien et souhaitant le faire tomber dans ses bras malgré les réticences de ce dernier, elle va faire en sorte de le rendre jaloux en séduisant Jefferson Tolliver (Dick York) arrivé par le même train et ex-meilleur ami du régisseur de Shiloh. Mais ce qu’elle estime être un jeu de séduction va aboutir à une tragédie...

Mon avis : Souvenez-vous de l’étonnant West de Douglas Heyes avec Steve Cochran, Claude Akins et Leo Gordon, le dixième épisode de la série qui débutait d’une manière allègre et joviale, le sérieux s’infiltrait subrepticement et par petites doses jusqu’à une conclusion se déclinant sur un ton de tragédie funèbre assez bouleversant. Il en va de même pour ce dixième épisode de la saison 2, un divertissement a priori léger mais dont l’inconséquence du principal protagoniste féminin causera des drames mortels et un dénouement abrupt en forme de couperet implacable et désespéré, assez sidérant pour une série télé dite "familiale". Lors de son voyage retour à New York, après avoir fait la connaissance d’un homme pittoresque - il a été mis dans le train totalement ivre par quatre saloon gals avec qui il semble avoir passé la nuit - la jeune Caroline est obligée de faire une pause à Medicine Bow suite à l’éboulement d’un pont sur la voie de chemin de fer - sympathique séquence qui voit James Drury démontrer ses belles qualités de cavalier en enlevant la jeune fille de terre et l’installant sur l’avant de son cheval qu’il lance au grand galop. Caroline va profiter de cet intermède (stopover) pour étudier les usages "rustres et barbares" de ces hommes de l’Ouest et s’en amuser un peu en faisant tourner quelques têtes. Au grand dam de sa tante qui la chaperonne à la demande du père de la jeune fille qui désapprouvait ses mœurs un peu dissolues, ne supportait plus ses amis et qui l’avait envoyée voyager à l’autre bout du pays pour leur "repos" à tous les deux. Pas malveillante mais totalement irréfléchie, cette capricieuse et charmante "petite fille riche" va rendre fou amoureux un cow-boy sans le sou, le meilleur ami du Virginien, qui autrefois avait travaillé sous ses ordres à Shiloh et qui va s’engager dans la voie de la criminalité pour éblouir cette femme frivole.

Ayant des vues sur le régisseur du domaine - le Virginien donc - et constatant que ce dernier l’a bien cernée et qu'il ne s'en laissera pas conter ("I'm not as much a greenhorn as you think I am") au point de s’en méfier et de s’en détourner, elle décide néanmoins de l’attirer en essayant de le rendre jaloux et pour ce faire d’encourager les avances et de jeter son dévolu sur le personnage interprété par le Darrin (Jean-Pierre) de Ma sorcière bien-aimée, Dick York, tout à fait convaincant dans ce rôle d’un homme étourdi et indolent, qui va préférer, plutôt que de travailler pour un faible salaire, suivre une mauvaise voie. En effet, il a dans l’idée - et il est de plus en plus déterminé - de gagner l’amour de la riche jeune femme, ce qu’il ne pourra faire sans argent puisque - sans y croire une seule seconde et uniquement pour s'amuser - elle lui a mis en tête de l’épouser à condition qu’il ait lui aussi une bonne situation financière. Témoin du dépeçage illégal d’un bœuf volé par un homme sans le sou qui n’a trouvé que ce moyen de revendre la viande pour survivre, il commence à déraisonner en souhaitant l’imiter à une plus grande échelle. A propos de ce pauvre bougre joué par Ed Peck dont le visage prématurément vieilli reflète toute la misère du monde, jamais peut-être encore auparavant un western n’avait réussi à dépeindre la difficulté du métier de cowboy et à nous faire comprendre leur faible niveau de vie. A sa première apparition, on le voit aller demander du travail à Shiloh, le contremaitre lui expliquant que son équipe est au complet mais que s’il veut cependant au moins se restaurer il est le bienvenu et peut se joindre à eux ; une séquence poignante et d’une profonde humanité qui nous fait mettre le doigt à cette occasion sur le fait que le chômage était déjà un fléau de l’époque.

Le réalisateur Richard L. Bare n’accomplit pas vraiment de miracles au niveau de la mise en scène mais a eu en revanche la chance d'être très bien secondé comme c’était déjà le cas pour les deux précédents épisodes qu’il signa, le superbe If You Have Tears avec Dana Wynters ainsi que le plus qu’honorable Run Away Home avec Karl Swenson. Les extérieurs sont bien choisis, l'ensemble est très joliment photographié, le scénario et les dialogues volent assez haut et enfin nous sommes en présence d’un casting de grande qualité, Dick York se faisant même voler la vedette par une fougueuse Joan Freeman qui dévore l’écran - bien meilleure que dans le précédent épisode dans lequel elle avait joué, The Devil’s Children - ainsi que par Warren Oates, comédien fétiche de Sam Peckinpah et qui jouait déjà avec James Drury dans le sublime Coups de feu dans la Sierra, tous deux interprétant des membres de la terrible fratrie des Hammond. Caroline est une sorte de post-Scarlett O’Hara dans ses manières et son caractère ; l’actrice a parfaitement bien compris son personnage qu’elle arrive à rendre aussi agaçant qu’attachant. On pressent que toutes ses tentatives de séduction pour s’amuser’ ("It's the danger that makes the animal exciting") vont se solder par un drame, mais on comprend aussi que la jeune femme n’est pas foncièrement vénale et n’imagine pas que l’on puisse commettre de vils actes par amour. Comme le Virginien le lui fait remarquer, c’est une enfant gâtée totalement inconséquente ("reckless and headstrong without a thought of consequences"), ce qu’elle prend très mal en le traitant de rustre et d’arrogant. Voilà des relations entre les deux protagonistes aussi tendues que captivantes comme on peut l'imaginer au vu de ces quelques extraits de dialogues. C’est par le fait de vouloir lui donner une leçon que Caroline va enclencher un irrémédiable enchainement de situations aboutissant à une double tragédie... Mais je vous laisse le soin de découvrir tout cela.

En plus de l’intrigue romanesque qui tourne autour des "manipulations amoureuses" de la fille émancipée issue d'une bonne famille de l’Est et qui sert de base au scénario, les auteurs abordent à nouveau la thématique du lynchage, les éleveurs étant excédés par des vols de bétail et voulant entrer en action pour "faire des exemples". La séquence de l’arrestation nocturne des voleurs fait étonnement penser à celle du célèbre The Ox-Bow Incident (L’Etrange incident) de William Wellman sans qu'au final on n'en arrive à de telles extrémités : le shérif et le Virginien arrivent à temps pour éviter les pendaisons qu’ils exècrent plus que tout, ayant déjà été témoins quelques années plus tôt des massacres occasionnés par de telles décisions. Alors que ces actes odieux sont empêchés de justesse, il n'en sera pas de même de l'inévitable tragédie due à la frivolité de la charmante jeune femme. Sa repentance de dernière minute n’y fera rien : ses agissements ont entraîné des hommes sur une pente savonneuse et le drame aura bien eu lieu ! Cet épisode, au départ nonchalant - à l’image de sa construction qui semble assez lâche -, flirtant tout d'abord avec la comédie savoureuse autant que futile, bascule dans la tragédie la plus sombre et nous rend la série encore plus précieuse d’autant que les tueurs / voleurs sont loin d’être haïssables, puisque ce sont de simples hommes aux abois. Cela manque d’une mise en scène un peu rigoureuse mais sinon c’est du tout bon !

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  • 2.11 - The Fatal Journey
  • Réalisation : Bernard McEveety
  • Scénario : John Hawkins
  • Guest Star : Robert Lansing
  • Première diffusion 14/12/1963 aux USA - Jamais diffusé en France
  • DVD : VOSTF
  • Note : 4/10

Le pitch : Alors qu’il s’apprête à épouser Molly, la journaliste de Medicine Bow, le Virginien apprend par Steve qu’elle vient de se faire tuer lors d'une fusillade en guise de représailles par des outlaws sévissant dans la région et qui n'ont pas supporté son éditorial demandant au Président d'envoyer du renfort en troupes pour se débarrasser d'eux. Le Virginien part avec les hommes du shérif à la recherche de la bande de meurtriers dirigée par un ex-colonel de l'armée (Robert Lansing). Lorsque le groupe, bredouille, fait demi-tour, le Virginien décide de poursuivre seul, bien décidé à venger sa bien-aimée...

Mon avis : Il fallait bien que cela arrive à un moment ou un autre ; et ce n’est pas de gaieté de cœur d’avouer m’être ennuyé et avoir trouvé raté ce onzième épisode de la saison 2, plus encore que Riff-Raff qui bénéficiait au moins d’une première demi-heure plutôt amusante. Le point de départ de The Fatal Journey était pourtant alléchant puisqu’il allait conter l’assassinat de la pétillante Molly, dont l’interprète Pippa Scott avait certes quitté la série au milieu de la première saison mais dont aucune explication ne nous avait été jusqu’à présent fournie quant à l'absence de son personnage depuis tout ce temps, alors qu'il avait pourtant été l’objet de toutes les attentions au début de la série, Steve, Trampas et le Virginien n’étant pas insensibles à son charme. A tel point que l’on apprend au début de cet épisode que le contremaitre du ranch Shiloh est sur le point de convoler avec elle en justes noces, le juge ayant même engagé des dépenses pour la construction sur la colline face au ranch d’une maison pour le futur couple. Tout ce préambule est excellent y compris les notations - déjà présentes dans l’épisode précédent - sur le chômage qui frappe selon les habitants de Medicine Bow à peu près ¾ des nouveaux arrivants dans la région. L’éditorial de Molly, qui fustige les agissements des bandes organisées de la région et qui demande au gouvernement du soutien en hommes et en argent pour aider à les éradiquer, est à nouveau le point de départ de discussions assez intéressantes sur la loi et la justice.

Puis, après encore quelques saynètes dans l’ensemble plutôt légères - par exemple celle au cours de laquelle Steve tente de résoudre un casse-tête que le Virginien dénoue en deux temps trois mouvements -, on est témoin de l’entrée en ville de quatre inquiétants cavaliers qui, arrivés devant la devanture du journal, se mettent à cribler de balles cette dernière. La silhouette de la journaliste s’étant détachée quelques secondes auparavant en contre-jour, les spectateurs se doutent alors d’emblée qu’elle a été victime de cette fusillade. Effectivement, Steve, qui a entendu les coups de feu puis les débris de verre et qui s’est rendu immédiatement sur place en courant voir ce qui s’était passé, ressort des locaux bouleversé et annonce sans tarder la mort de la jeune journaliste. Peu après, il doit communiquer la triste nouvelle à son ami et boss ; apprenant le décès de Molly, le visage du régisseur de Shiloh se referme et il se dirige sans attendre vers le dortoir où il fait son paquetage, bien décidé à partir venger la femme qui allait devenir son épouse. S’ensuivent des recommandations du juge qui comprend le chagrin de son homme de main mais lui demande quand même de respecter la loi et ne pas se lancer dans une vendetta personnelle. Lorsqu’il retrouvera les coupables, le Virginien refusera d’ailleurs de tuer les criminels de sang-froid, ce qui le conduira à être découvert mais qui nous confortera dans le caractère non-violent et progressiste de la série. Il se fait alors passer pour un récent évadé afin de sauver sa peau et rester infiltré au sein du gang. Son dilemme va alors être de continuer à penser à se venger ou à empêcher le coup très meurtrier que les bandits sont sur le point de mettre en branle, la première solution - les représailles - allant probablement mettre la vie de beaucoup d'innocents en danger. Tout le suspense va reposer sur cette alternative et sur le fait que les hors-la-loi sont sur le point de découvrir sa véritable identité ainsi que celle d’un autre infiltré, un shérif, ce dernier point se révélant d'ailleurs assez invraisemblable.

Hormis cette situation assez peu crédible qui nous fait nous étonner d’un tel manque de rigueur dans le scénario - ce qui n’était pas vraiment une constante de la série -, le reste ne permet pas d’oublier ces défauts d’écriture dans un script qui compte aussi de longues séquences de bavardages intempestifs et inintéressants ainsi qu’une brochette de bad guys aux caractères et aux tempéraments sans aucunes nuances. Le reste concerne donc surtout une interprétation très moyenne y compris celle du comédien que je m’efforce de porter au pinacle depuis le début de cette anthologie, à savoir James Drury. Étonnement, il a rarement été aussi peu convaincant qu’ici alors qu’il doit exprimer de la tristesse et de la colère froide, lui que l’on a connu pourtant charismatique, sec et puissamment déterminé à de très nombreuses reprises. Dans cet épisode, on a l’impression qu’il ne s’est pas spécialement senti concerné par l’histoire qui semble surtout avoir été imposée pour se débarrasser une fois pour toutes de Molly dont certains spectateurs se souvenaient et qui devaient se demander ce qu'elle était devenue. Le jeu ici bien trop intériorisé de l'acteur principal de la série rejaillit sur tous ses partenaires et notamment les comédiens interprétant les différents outlaws, soit grandement fades (Robert Lansing) soit totalement ridicules (Steve Inhat). Avant que l'ont soit gênés par tous ces éléments scénaristiques et d’interprétation, le manque de budget nous avait déjà fait tiquer lors des séquences décrivant la recherche des bandits par les hommes de loi au sein des terres désertiques : les mêmes montagnes et concrétions rocheuses se faisaient jour à chaque plan, le réalisateur n’ayant pas même pensé à changer l’angle de sa caméra pour donner le change ; l’impression de surplace peu "authentique" devient assez gênante pour le spectateur. Bernard McEveety avait été beaucoup plus inspiré pour son précédent et superbe épisode, It Takes a Big Man.

Malgré quelques bonnes idées - le chef de gang est un ancien colonel de l’armée qui utilise ses connaissances pour réussir ses coups - et quelques touchantes preuves d’amitié de la part de Steve et de Garth, l’ensemble manque non seulement de rigueur et d’ampleur mais, plus décevant encore, d’émotion et de tension. Il faut dire qu’une fois que l’on est arrivé à mi-parcours dans le repaire des bandits au sein des Badlands, on n’en sort plus, le rythme devient anémié et les séquences finales d’action ont bien du mal à nous sortir de notre torpeur du fait de se révéler assez banales. Niveau émotion, que tout ce qui concerne Molly se soit déroulé hors-champ - puisque l’actrice n’a pas été conviée par les producteurs - a du mal à nous rendre sa mort bouleversante. Reste que malgré le fait qu'il m'ait paru raté, cet épisode n’est pas du tout honteux, bénéficiant notamment de quelques notations sociales et historiques assez intéressantes dans sa première partie ainsi que d’une jolie photographie et enfin de la reprise de certains beaux thèmes musicaux de la première saison. The Fatal Journey trouvera certainement de l’écho auprès de westerners purs et durs mais en décevra probablement beaucoup d’autres sans que le résultat soit déshonorant pour autant. La preuve, l’ultime séquence et la dernière réplique du juge ("No, I'm just glad you're back") nous font espérer que la série repartira sur de bons rails.

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  • 2.12 - A Time Remembered
  • Réalisation : William Witney
  • Scénario : Peter Germano
  • Guest Star : Yvonne De Carlo
  • Première diffusion 11/12/1963 aux USA - 09/07/1967 en France
  • DVD : VOSTF et VF
  • Note : 6/10

Le pitch : Medicine Bow est en liesse : tous les habitants semblent s’être rendus à la gare accueillir à sa descente du train une célèbre chanteuse d’opéra, Elena (Yvonne de Carlo). Ce soir-là, même Trampas et Steve se mettent sur leur 31 pour assister à son récital. Ils sont accompagnés de Betty et du juge Garth qui reconnait en la cantatrice l’un de ses amours de jeunesse. Se renoue alors une romance entre eux deux et Garth est sur le point de demander sa main à Elena. Mais ce soir-là, alors qu’il quitte l’hôtel de la chanteuse, un coup de feu retentit ; on trouve Elena effrayée, une arme à la main, un cadavre à ses pieds...

Mon avis : A Time Remembered marque la troisième incursion au sein de la série du célèbre réalisateur de serial William Witney qui avait déjà signé The Devil’s Children et Say Goodbye at All That, deux épisodes qui à vrai dire ne faisaient déjà pas forcément partie des plus mémorables. Il en va de même pour ce néanmoins encore distrayant A Time Remembered qui confirme à cette date un milieu de saison qui patine un peu sans néanmoins - rassurez-vous- encore tomber trop bas, loin de là ! Ici, pas de Virginien, à peine quelques apparitions de Trampas, Steve et Betty, mais un Juge Garth présent dans quasiment toutes les scènes. Lee J. Cobb nous prouve à nouveau ses immenses talents de comédien, d’autant plus qu’il change un peu de registre pour cet épisode qui le montre retomber en pâmoison devant une femme qu’il a autrefois aimée. Jamais encore depuis le début de la série nous n’avions encore eu l’occasion de le voir aussi souvent sourire voire même rire aux éclats, ce qui n’est pas désagréable d’autant que cela ne semble jamais forcé mais au contraire très naturel. Il faut dire que le couple qu’il forme avec Yvonne de Carlo fonctionne à la perfection. Pour ceux qui ne la connaitraient pas, rappelons que la très jolie comédienne, égérie de la Universal, fut probablement l’une de celles qui joua dans le plus grand nombre de westerns durant les années 40 et 50, et parfois non des moindres comme par exemple le méconnu mais puissant et bouleversant Tomahawk de George Sherman où elle avait pour partenaire Van Heflin. Elle fut également aux côtés de Maureen O’Hara et John Wayne dans le plaisant McLintock! d’Andrew V. McLaglen.

Qu’un des personnages principaux de la série retrouve un amour de jeunesse dont il s’éprend à nouveau mais qui se retrouve impliqué dans un crime à mi-parcours de l’épisode, voilà qui nous dit quelque chose ! Ce canevas dramatique avait effectivement déjà été utilisé pas plus tard qu’en ce début de deuxième saison dans No Tears for Savannah avec une inoubliable Gena Rowlands en patronne de saloon amoureuse du Virginien, l'un des plus beaux épisodes de la série jusqu'à ce jour. Cette nouvelle variation débutait également de la plus délicieuse des manières mais n’allait pas tenir toutes ses promesses sur la durée, toute la partie procédurale n’allant pas s’avérer très captivante. La première demie heure se déroule d’une façon très nonchalante, contant les retrouvailles amoureuses du juge Garth avec cette chanteuse d’opéra qui paraît avoir elle aussi très bien mené sa barque. On s’étonne d’emblée des relations qu’elle entretient avec son assistante - une Melinda Plowman peu convaincante -, des regards peu aimables et des sous-entendus qui nous font penser que nous avons affaire à deux escrocs qui ne s’entendent guère. Mais on l’oublie assez vite puisque nous n'avons d'yeux que pour l'histoire d'amour entre Lee J. Cobb et la toujours très belle Yvonne de Carlo. On se laisse mener avec un certain ravissement dans la visite des terres et du ranch Shiloh, on s’amuse de voir Trampas et Steve se mettre sur leur 31 pour aller écouter le récital d’opéra et s’en délecter au vu de leurs sourires niaisement extatiques, on apprécie de revoir l'avenante et charmante Roberta Shore un peu plus longuement que dans les épisodes précédents et de constater la touchante complicité qui continue de l'unir avec les deux cow-boys...

Bref, nous sommes sous le charme de cette attendrissante et savoureuse entrée en matière qui se termine par un mariage annoncé. C'est d'autant plus adorable qu’en plus de l’excellente interprétation délivrée par notre couple de célèbres comédiens, les dialogues sont parfois spirituels, les décors riches et les paysages très joliment photographiés. Puis arrive le meurtre d’un étranger par la séduisante chanteuse, et paradoxalement on commence à trouver le temps un peu plus long. Ne trouvant aucun avocat pour défendre cette femme présumée coupable d'assassinat avec préméditation - alors qu’elle clame haut et fort son innocence, disant qu’elle ne connaissait pas cet homme et qu'elle a seulement voulu se défendre d’une attitude agressive à son égard -, c’est le juge Garth qui va devoir s’en charger. L’idée était intéressante et susceptible de rendre l’intrigue encore plus passionnante ; mais que ce soit l’enquête un peu laborieuse, le procès ennuyeux et le plaidoyer de Lee J. Cobb faisant un peu "déjà-vu", le fait que le scénario soit moyennement bien écrit rend l’ensemble logiquement bien moins captivant malgré les nombreux retournements de situation, les témoins de dernière minute, l’apparition de zones d’ombres inattendues ainsi que les mensonges, duperies et mystères dévoilés. Je ne vous en dis néanmoins pas plus afin de ne pas gâcher le plaisir que vous pourriez prendre à essayer d’enquêter par vous-mêmes et éventuellement débrouiller cet embrouillamini - en spoilant un petit peu - "romantico-arnaquo-familial" un peu tarabiscoté mais dont certains éléments se révèlent néanmoins assez prévisibles.

Parmi les autres plaisirs distillés par un épisode dont on pouvait cependant attendre beaucoup mieux - même si loin d’être déplaisant ni antipathique grâce surtout à l’alchimie qui s'opère entre les deux protagonistes principaux -, on retient une promenade bucolique en calèche, un charmant pique-nique romantique, une Yvonne de Carlo chantant entre autres Plaisir d’amour, une belle garde-robe pour la comédienne, ses touchants adieux en toute fin au magistrat vieillissant, une résolution assez émouvante... Guère captivant mais cependant assez séduisant surtout grâce à sa première partie intimiste, nostalgique et somme toute très réussie dans sa simplicité.

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  • 2.13 - Siege
  • Réalisation : Don McDougall
  • Scénario : Donn Mullally
  • Guest Star : Philip Carey
  • Première diffusion 18/12/1963 aux USA - 04/12/1966 en France
  • DVD : VOSTF et VF
  • Note : 8.5/10

Le pitch : Trampas gagne une grosse somme au jeu ; il décide de se rendre au Nouveau-Mexique pour y régler de vieilles dettes. Il a en tête d’en profiter pour revoir une femme dont il fut grandement amoureux. Entretemps elle s’est mariée avec le shérif (Ron Hayes) qui a été placé là par son beau-frère (Philip Carey), banquier et homme le plus influent de la ville de Logan, celui-là même qui avait chassé Trampas par parce qu’il n'appréciait pas que ce dernier courtise sa sœur. Logan est également sous la coupe des Comancheros depuis que l’armée est partie. Trampas va leur être confronté alors qu’il a découvert un crime dont ils sont coupables...

Mon avis : Pas plus tard qu’à l’occasion de mon avis à propos de l’épisode précédent, j’écrivais que ce dernier confirmait à cette date un milieu de saison qui patinait un peu. Pour me faire mentir, le réalisateur du magnifique No Tears for Savannah et le scénariste du formidable Impasse avec Eddie Albert - deux des meilleurs épisodes de la série - s'associent pour nous offrir sans tarder un petit chef-d’œuvre dans la lignée dramatique "un homme seul contre tous" inspirée de grands classiques du western urbain tels Le Train sifflera trois fois (High Noon) de Fred Zinnemann et surtout le sublime et insurpassable Decision at Sundown de Budd Boetticher à côté duquel Siege n’a pourtant pas à rougir. Le fait que Don McDougall soit l’un des réalisateurs qui signera le plus grand nombre d’épisodes du Virginien ne peut que nous rassurer quant à sa continuité qualitative ; espérons qu’il tiendra souvent toutes les promesses que Siege met en avant ici, même si cela semble difficile car partant de très haut ! L’intrigue s’éloigne de Shiloh et de Medicine Bow pour nous faire voyager jusqu’au Nouveau-Mexique où Trampas se rend pour régler les dettes qu’il avait contractées là-bas cinq ans auparavant en compagnie de son père dont il est question ici à plusieurs reprises, ce qui nous renvoie ainsi au premier épisode de cette deuxième saison, Ride a Dark Trail, qui revenait en flashback sur la rencontre entre Trampas, Garth et le Virginien.

Siege est le premier de deux épisodes qui se suivent et dans lesquels tous les principaux protagonistes récurrents de la série sont absents à l’exception de Trampas dont le personnage s'étoffe encore, toujours canaille et enfantin mais également d'une belle noblesse de cœur. Doug McClure en profite pour nous prouver à nouveau son immense talent malgré d’autres comédiens chevronnés à ses côtés, la plupart en l’occurrence tous remarquables à commencer par Nestor Paiva (le gérant de l’hôtel), mais surtout Philip Carey (le banquier) et Ron Hayes (le shérif et gendre du premier) qui nous offrent tous deux d’admirables prestations. L’épisode débute d’une manière très légère : Trampas remporte une grosse somme aux cartes et décide de racheter ses roublardises passées en se rendant dans une petite ville du Nouveau-Mexique qu'il avait quittée voici cinq ans en arrière en laissant de nombreuses dettes. A son crédit, il faut dire qu’il en fut chassé par l’homme le plus influent de la ville, un banquier qui voyait d’un mauvais œil la cour qu’il faisait à sa sœur. Ayant été enamouré de cette jeune femme dont il avoue continuer à rêver au cours de quelques longues nuits d’hiver, Trampas a évidemment dans l’idée d’en profiter pour la revoir. Lorsqu’il apprend qu’elle a entretemps épousé le shérif, ne souhaitant pas provoquer quelconque jalousie, il prend la décision de ne pas aller à sa rencontre mais à la place de rendre visite à un couple de vieux amis qui lui étaient venus en aide à l’époque et chez qui il avait travaillé. Arrivé sur place, il les trouve assassinés et, sous le coup de la colère, part à la poursuite des meurtriers, les traces de chevaux étant encore toutes fraîches.

Il n’a aucun mal à retrouver le petit groupe de trois hommes encore en possession d’objets trouvés sur les cadavres ; il est obligé d’en tuer un par légitime défense mais ramène les deux autres en ville afin qu’ils soient jugés en bonne et due forme. Sauf que ces deux coupe-jarrets font partie des Comancheros qui ont plus ou moins pris le contrôle de la ville sous la direction de l’inquiétant Pedro Lopez (Joseph Campanella tout à fait crédible en bandit mexicain). Par peur des représailles, tout le monde essaie de convaincre Trampas de retirer sa plainte afin que les deux meurtriers soient relâchés. Le cowboy de Shiloh comprend alors que les habitants, terrorisés depuis que l’armée à quitté leur contrée, ont capitulé devant les décisions des Comancheros et que les notables ont plus ou moins accepté la mainmise et l’impunité de ces derniers tant qu’ils peuvent avoir la paix. Il s'agit d'une sorte de pacte de "non agression" de la part des bandits mexicains si les citoyens ferment les yeux sur leurs exactions et activités illicites. Alors qu’il est en quelque sorte son rival en amour, Trampas va se prendre d’amitié pour l’homme de loi, faire naître un très beau respect mutuel et lui ouvrir les yeux quant à la lâcheté de ses concitoyens ; ce dernier va se désolidariser de celui grâce à qui il a pu trouver cette place et retrouver l’estime de soi en soutenant Trampas dans sa volonté de ne pas transiger avec les despotes et au contraire de mener à bien la punition légale des criminels quitte à prendre de grands risques. Outre sa vie, l’homme de loi met son mariage en danger puisque son épouse, très pragmatique, refuse qu’il se lance dans cette "croisade". Comme la plupart des protagonistes, le personnage de la jeune femme est d’une incroyable richesse, évoluant constamment au point de revenir en fin de compte vers son mari avec cette tirade : « I may not always agree with you, but I know now that doesn’t matter. The important thing is that you know what you have to do. »

De remarquables lignes de dialogues, un admirable sens de l'éthique au sein d'un scénario aussi rigoureux que passionnant que ce soit au niveau de la peinture des personnages comme celle des relations qu’ils entretiennent, et une mise en scène tout aussi accomplie, aussi bien réglée lors des séquences dialoguées que pour les scènes d’action, rares mais d’une redoutable efficacité à l’exemple de l’affrontement final qui constitue le climax de l'épisode et débute par un étonnant et crescendo suspense - le spectateur se demandant comment Trampas va pouvoir se sortir de cette impasse -, pas indigne des meilleures séquences similaires au cinéma, la prise de conscience commune des habitants quant à leur veulerie les faisant trouver l’émancipation et le courage de se réunir pour mettre fin aux agissements de leurs tyrans. Siege est un épisode majeur, sans aucune mièvrerie et tout simplement remarquable, tout aussi sobre que digne et d'une profonde humanité. Nous touchons ici à l’excellence !

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  • 2.14 - Man of Violence
  • Réalisation : William Witney
  • Scénario : John D.F. Black & James Patrick
  • Guest Star : Michael Pate & DeForest Kelley
  • Première diffusion 25/12/1963 aux USA - 14/05/1966 en France
  • DVD : VOSTF
  • Note : 6.5/10

Le pitch : Trampas est à El Paso pour s’occuper de la vente d’un lopin de terre ayant appartenu à son père. A cette occasion, il rencontre son oncle à qui il propose de l'accompagner à Medicine Bow. Seulement, se trouvant pris au milieu d’un hold-up, le vieil homme se fait tuer. Trampas part à la recherche des meurtriers, deux soldats déserteurs qui convoitent une mine d’or sur le territoire Apache. Malgré le fait qu’il soit désormais interdit aux Blancs, Trampas s’y aventure accompagné de quelques compagnons de fortune dont un médecin militaire alcoolique (DeForest Kelley) et un aventurier peu recommandable (Michael Pate)...

Mon avis : Le précédent et remarquable Siege - à ce jour le plus grand épisode de la série - se terminait avec le départ de Trampas pour El Paso après qu’il a échappé de très près à la mort dans une autre petite ville de la frontière du Nouveau-Mexique dans laquelle il avait réussi in-extremis à faire chasser les Comancheros qui la terrorisaient depuis un bout de temps. L’arc narratif se poursuit dans Man of Violence qui ne met à nouveau en scène parmi les personnages récurrents de la série que le seul Trampas. A peine après avoir retrouvé son oncle, qui lors d’une très belle séquence le prie de ne pas suivre leur exemple - "des escrocs roublards et alcoolos" - à lui et son père, Trampas le perd puisque le vieil homme se fait bêtement tuer alors qu’il allait déposer de l’argent dans le coffre-fort de la banque au moment même où se déroulait un cambriolage. Essayant d’empêcher les voleurs de s’enfuir avec ses billets, il se prend une balle dans le ventre ; et voilà Trampas privé de tous les membres de sa famille, d’autant plus peiné que son oncle venait d’accepter de le suivre à Medicine Bow pour s’installer avec lui dans un ranch qu’ils auraient acheté grâce à leurs économies. Parti à leurs poursuites pour se venger, le cow-boy de Shiloh retrouve au fort le plus proche l'un des deux criminels gravement blessé. Le comédien qui l’interprète n’est autre que Leonard Nimoy, surtout célèbre pour avoir tenu le rôle de Spock dans la série originale Star Trek. Attention cependant pour les fans, son rôle ici ne consistera qu’à être couché et agoniser sans qu'aucune parole ne sorte de ses lèvres.

Le médecin militaire, quant à lui, est joué par DeForest Kelley qui tiendra lui aussi l’un des rôles principaux de la même série, à savoir celui du Docteur McCoy. Et comme si cela ne suffisait pas, le scénariste John D.F. Black sera lui aussi de l'aventure Star Trek, produisant et écrivant par exemple The Naked Time ainsi que quelques épisodes de la seconde série de la franchise, The Next Generation avec Patrick Stewart. Les Trekkies devraient donc être intéressés par cet épisode, d’autant que le personnage interprété par DeForest Kelley se voit attribuer une place prépondérante au sein de l'intrigue ; dommage cependant que le comédien soit souvent tenté d’en faire un peu trop, les séquences au cours desquelles il est ivre s’avérant du coup un peu pénibles. Ce médecin dépressif, rongé par les remords et la culpabilité - pour une chose que je ne vous dévoilerai pas sous peine de spoiler quelques premières surprises se déroulant dès la première demi-heure -, va se joindre à Trampas alors que ce dernier décide de partir à la recherche du deuxième assassin de son oncle. Il semblerait que cet homme se soit réfugié en territoire Apache où il aurait découvert un filon d’or. Ayant eu vent de l'affaire, un maquignon-aventurier peu recommandable se joint également au petit groupe ainsi que l’épouse de l’homme recherché, cette dernière espérant ainsi empêcher Trampas de tuer son mari et convaincre celui-ci de se rendre à la justice, persuadée de son innocence.

L’inquiétant et dangereux aventurier, c’est Michael Pate, l’un des très bons seconds rôles westerniens ; quant à la femme, il s’agit de la comédienne Peggy McCay, plutôt convaincante au milieu de ce groupe d’hommes. Après le départ du fort, l’épisode se déroule alors tout en extérieurs au milieu de majestueux paysages désertiques encerclés de montagnes rouges encore jamais rencontrés au cours du Virginien. L’utilisation qui en est faite par William Witney est plutôt inspirée et en tout cas très dépaysante pour la série, habituellement cantonnée presque exclusivement au sein des mêmes décors de type "Wyoming tourné en Californie". Rappelons qu’en cette fin de XIXème siècle, le gouvernement américain, par un traité d’inviolabilité, avait interdit aux hommes blancs de pénétrer sur les territoires alloués aux Apaches sous peine de déclencher une nouvelle guerre indienne. Que certains spectateurs aient pu trouver l’épisode raciste par le simple fait que les auteurs montrent les Apaches pourchasser les intrus afin de les tuer est assez sidérant ! [Que ce "politiquement correct" ridicule disparaisse une bonne fois pour toutes, cela nous ferait le plus grand bien...] En effet, jamais les guerriers ne sont décrits comme des sauvages : ils se protègent peut-être un peu violemment mais ils n’en restent pas moins tout à fait dignes et en tout cas dans leur droit lorsque l’on veut bien se replacer dans le contexte de l’époque. D'autant plus que les prospecteurs illicites, s'ils avaient été dérangés dans leur extraction, n'auraient sans doute pas hésité à tuer les Indiens sans plus de scrupules. Fin de la parenthèse "morale" ! Les séquences de poursuites à cheval sont d’une grande efficacité ainsi que les scènes d’action dont la confrontation finale avec les Indiens d’une rare sauvagerie pour une série peut-être un peu vite et à tort taxée de "familiale" alors qu'en l’occurrence il s’agit ici d’un récit jonché de morts violentes et au bout duquel peu de monde sortira indemne.

Des décors - un fort - et des paysages encore jamais utilisés au sein de la série, une intrigue assez fluide et linéaire aux nombreux rebondissements, un Doug McClure qui confirme une nouvelle fois son talent, des scènes mouvementées extrêmement énergiques pour un ensemble bien mené mais néanmoins un peu décevant surtout en comparaison de l’épisode précédent - faute avant tout à une caractérisation sans nuances de certains personnages et à un scénario manquant un peu de rigueur et sans grandes surprises, surtout pour les amateurs de westerns qui auront une impression de "déjà-vu". Quoi qu’il en soit, et même s’il ne s’agit pas d’un épisode majeur, nous aurions tort de faire la fine bouche devant cette fiction assez sombre mais extrêmement plaisante à suivre.

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  • 2.15 - The Invaders
  • Réalisation : Bernard McEveety
  • Scénario : Donn Mullally
  • Guest Star : Ed Begley
  • Première diffusion 01/01/1964 aux USA - Jamais diffusé en France
  • DVD : VOSTF
  • Note : 7.5/10

Le pitch : Une ancienne connaissance du juge Garth, le gros rancher Mike Tyrone (Ed Begley), arrive du Texas avec ses deux fils et sa fille Margaret (Beverley Owen). Chassé par la sécheresse, il a décidé de venir s’installer à Medicine Bow avec son cheptel. Il a dans l’idée de racheter toutes les terres et ranchs alentours, même si pour en arriver à ses fins il lui faut en venir aux menaces. Ce tyrannique éleveur voit également d’un mauvais œil que de vulgaires cow-boys tournent autour de sa fille pour qui il souhaite le mieux quitte à faire place nette autour d’elle. C’est ainsi que Trampas est malmené suite à sa visite chez la jeune femme...

Mon avis : Le scénariste Donn Mullally ne signera que six épisodes du Virginien ; et au vu de son immense talent et de sa remarquable sûreté d’écriture, ceci est bien dommage. Ca l’est d’autant plus que The Invaders est déjà le quatrième, les deux restants n’étant pas prévus pour tout de suite. Que ceux qui ont de la mémoire se rappellent du magnifique Impasse (avec Eddie Albert), du curieux et réjouissant The Money Cage (avec Steve Forrest) ainsi et surtout que du mémorable Siege - à ce jour le plus grand épisode de la série - et ils en concluront que le nom de Mullally au générique devrait être une valeur sûre. Ce quinzième épisode de la saison 2 vient nous le confirmer : son scénario est un modèle d’intelligence et de rigueur et, même si la résolution de l’intrigue paraîtra effectivement très abrupte, tout ce qui a précédé contribue à nous la rendre crédible à condition bien évidemment d’avoir été très attentif. Sans trop en dévoiler, ce final qui pourra sembler ahurissant - notamment dans le changement qui s’opère d’une seconde à l’autre chez le personnage joué par Ed Begley - est une sorte de sacrifice consenti par le personnage féminin afin qu’une tragédie n’ait pas lieu qui aurait mis à mal des dizaines de personnes qui lui sont chères - parents, connaissances, amoureux. On peut prendre ce happy-end encore plus positivement si l’on considère que la jeune femme retrouve ainsi une certaine "liberté" (mais je vous laisse découvrir pourquoi sous peine de trop en dire).

En effet, Margaret, malgré son caractère très fort et le fait qu'elle tienne tête à son père - contrairement à ses frères plus dociles -, reste néanmoins sous l’emprise de ce patriarche qui l’étouffe en l’empêchant de vivre à sa guise. Puisque son père la met sur un piédestal et a les moyens financiers d’en faire une "princesse", il fait le vide autour d’elle, ne voulant lui offrir que ce qui se fait de mieux et lui trouver un mari censé être à la hauteur, autant dire une perle rare. Du coup, il refuse non seulement qu’un simple cow-boy tourne autour d’elle mais a aussi dans l’idée de s’emparer de toutes les terres alentours pour en quelque sorte les lui offrir en "dot". « Je ne te savais pas aussi snob », lui dira le juge en comprenant que Tyrone veut ce qu’il y a de plus beau, de plus grand et de plus cher pour sa fille lorsqu’en arrivant à l’hôtel le Texan demande la suite la plus luxueuse juste le temps qu’elle fasse sa toilette, quitte à chasser celui qui s’y trouve. Et en l’occurrence il s’agit justement de Garth qui s’en amuse puisqu’ils étaient amis il y a 30 ans (l’épisode ne sera pas avare de remémorations de souvenirs de jeunesse entre les deux hommes). Plus encore que tyrannique et arrogant, Tyrone est fou de sa fille, ce qui le rendra moins antipathique au bout du compte. Néanmoins, le voir arriver de son Texas natal, chassé par la sécheresse, et vouloir s’imposer sans plus tarder et avec une arrogance outrancière sur des terres déjà détenues par des fermiers et éleveurs qu’il menace de représailles s’ils n’acceptent pas de les lui vendre, nous le rend immédiatement odieux. Ed Begley (12 hommes en colère - Twelve Angry Men) interprète à merveille ce personnage que l’on aime ainsi haïr. Malgré tous les éléments mis en place au cours de ce curieux épisode, ce dernier repose donc avant tout sur l’amour exclusif d’un père pour sa fille pour laquelle il est prêt à faire toutes les folies, y compris à piétiner tout ce qui l’entoure et ceux qui se mettent sur son chemin.

The Invaders s’appesantit aussi sur les retrouvailles de Tyrone et de Garth qui semblent n’avoir pas réglé tous leurs comptes à l’époque, sur la romance "interdite" qui se met en place entre Trampas et la fille du rancher, sur le plan machiavélique ourdi par les Texans pour s’accaparer toutes les terres de la région, sur la peur des petits éleveurs de se voir chassés avec pertes et fracas... Un scénario foisonnant et d’une richesse étonnante rehaussé par le fait que les dialogues se soient révélés de très grande qualité et que, malgré une atmosphère d'ensemble plutôt sombre, l’humour n'ait pas été oublié, notamment au travers des quelques phrases laconiques et moqueuses balancées par le Virginien avec le plus grand sérieux : « Ne voudriez-vous pas lui acheter un harmonica à Noël ? » demande-t-il au juge alors qu’il entend Betty taper laborieusement sur son piano. La complicité entre Doug McClure, Gary Clarke et James Drury n’a peut-être encore jamais été aussi évidente, la bonhomie du trio composé de nos trois cow-boys étant à l’origine de plusieurs séquences truculentes, à commencer par celle inénarrable chez le barbier en tout début d’épisode. Quant à l’histoire d’amour, qui se révèlera l'une des causes de l’envenimement du conflit qui se profile, elle est tout à fait convaincante du fait de la belle écriture du personnage de Margaret, femme moderne, intelligente, cultivée, et qui possède un caractère bien trempé au point de parvenir à gêner et faire rougir Trampas. Avec sa voix grave et son inhabituelle beauté, Beverley Owen est assez mémorable, bien plus que dans le seul film qu’elle tournera, La Patrouille de la violence (Bullet for a Badman) de R.G. Springsteen. La description de l’amitié qui s'installe entre Betsy et elle est également assez agréable.

Non seulement l’épisode est très bon mais il nous offre également le plaisir de retrouver enfin réunis tous les protagonistes principaux, nous octroie de belles envolées musicales - parmi les plus lyriques de cette deuxième saison -, une belle utilisation des paysages - notamment ces chevauchées au milieu des prairies d’herbe jaune - ainsi que de jolis mouvements de caméra dus à Bernard McEveety, le réalisateur qui nous avait pourtant précédemment beaucoup déçus avec The Fatal Journey mais dont la mise en scène de The Invaders se rapproche davantage de celle de l’excellent It Takes a Big Man, autre sommet de la série. L’intrigue est tellement copieuse - un peu trop pour la durée qui lui a été allouée - qu’elle aurait mérité de s’étaler sur au moins un bon quart d’heure de plus. Elle nous laisse certes donc logiquement quelques regrets concernant la résolution des diverses situations ainsi qu’une impression de bâclage final. Mais tout ce qui a précédé fut tellement bon, la progression dramatique tellement efficace que nous n’allons pas faire la fine bouche, d’autant que nous aurons eu aussi le plaisir d’entendre Roberta Shore Yodler Sourwood Mountain avec talent et que nous nous étions précédemment enthousiasmés sur le culot de certains effets de montage parallèle ainsi que sur l’originalité propre à quelques virages abrupts pris par le scénario ainsi que sur cette idée de l’affrontement quasi inévitable qui n’arrivera finalement jamais. Une belle réussite !

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  • 2.16 - Roar from the Mountain
  • Réalisation : Earl Bellamy
  • Scénario : Carey Wilber & Franklin Barton
  • Guest Star : Jack Klugman & Joyce Bulifant
  • Première diffusion 08/01/1964 aux USA - Jamais diffusé en France
  • DVD : VOSTF
  • Note : 4/10

Le pitch : Trampas découvre un homme mort près de Big Springs. Après avoir cherché des indices près du corps, Steve aperçoit des traces qui ne trompent pas, celle d’un couguar qu’il sera facile de traquer puisqu’il semble être blessé à une patte. Après que le chasseur qui menait la battue a perdu ses chiens tués à leur tour par le félin, le groupe constitué par plusieurs membres du ranch Shiloh se disloque et seul Steve décide de poursuivre la recherche du tueur d’hommes. Epuisé après avoir perdu le cheval qui portait ses provisions, il arrive dans une ferme où une jeune femme (Joyce Bulifant) le recueille et le soigne...

Mon avis : Après l’excellent The Big Deal - avec Ricardo Montalban en inoubliable guest star de ce 4ème épisode de la série -, Earl Bellamy fera encore plus fort en nous octroyant à nouveau un magnifique épisode, d’une grande dignité et d’une belle hauteur de vue concernant la réflexion menée sur les thématiques du courage et de la justice, le superbe The Judgment avec un inoubliable et inquiétant Clu Gulager, le plus bel épisode de la première saison. Un réalisateur mésestimé car au cinéma il signera également durant les années 60 quelques très bons westerns dont La Parole est au colt (Gunpoint) avec Audie Murphy ou Sans foi ni loi (Incident at Phantom Hill) avec Robert Fuller et Dan Duryea. Le ratage que se révèle être Roar from the Mountain ne lui est aucunement imputable, reposant quasiment entièrement sur les épaules des deux auteurs dont Carey Wilber qui fut bien plus inspiré précédemment puisqu'il avait déjà écrit pour Le Virginien deux épisodes corrects. Espérons qu'il s'agit seulement d'un faux pas car le scénariste va être par la suite convoqué à de très nombreuses autres reprises.

Et pourtant l’épisode plongeait d’emblée le spectateur dans le vif du sujet. Pas de prologue à Medicine Bow ni à Shiloh : la première séquence nous amène directement en pleine nature sur les lieux de l’action - ou plutôt de l’inaction - puisque un cadavre est découvert par Trampas qui attend que l’on vienne le rejoindre. Il ne faut pas longtemps à Steve pour mener l’enquête et pour décréter avec assurance que le meurtrier est un redoutable félin, un couguar blessé à la patte et donc assez aisé à suivre par les traces qu’il laisse. La poursuite s’engage avec à la tête du groupe un chasseur aguerri qui s’est joint à la traque avec ses chiens. Ce dernier est un dénommé Dubois, un fermier d’origine française. Dès lors, on commence à s’inquiéter pour la qualité de l’épisode, le comédien interprétant cet homme s’avérant assez vite pénible avec son accent à couper au couteau et ses expressions "folkloriques". Ses chiens se font éventrer par le couguar et il décide de ne pas poursuivre plus avant, ayant déjà trop perdu à son goût. Les hommes de Shiloh pensent que sans les bêtes, la chasse aura du mal à aboutir et que de toute manière un groupe sera moins discret et du coup moins efficace qu’un homme seul pour la traque du fauve. Steve se porte volontaire et dès lors exit Trampas, Henry Garth et le Virginien qui n’étaient là que pour se rappeler à nous le temps de quelques minutes. Et voilà notre cher Steve qui, décidant d'en faire une affaire personnelle du fait d'avoir déjà eu des démêlés avec ce genre d'animal, sera le seul des protagonistes principaux à rester tout du long de ce récit qui débute comme un survival.

Le réalisateur, sentant probablement qu'il allait être difficile de meubler 80 minutes avec un script aussi mince, commence à insèrer d’innombrables plans d’animaux alors que Steve entame son "voyage" de plus de 200 miles. Il prend même un peu trop son temps à faire stagner ses plans sur les cieux nuageux ou sur les crépuscules, aussi beaux soient-ils. On sent qu’il faut faire du remplissage et notre inquiétude du début quant à la capacité du scénario à nous captiver plus avant ne fait qu’augmenter. Puis notre héros, harassé et affamé suite à la perte du cheval qui portait ses vivres, arrive aux abords d’une ferme où une jeune femme l’invite à entrer se restaurer. Elle lui apprend que son époux recherche lui aussi le félin depuis que ce dernier a tué son fils. Même s’il s’agissait de l’enfant d’un premier mariage de son mari, elle ne lui a jamais pardonné de ne pas être intervenu assez vite pour éviter le drame, l’homme ayant préféré perdre un peu plus de temps à aller chercher son fusil plutôt que de se jeter immédiatement dans la mêlée. A la réflexion, s’il avait choisi la seconde solution, il y aurait peut-être eu deux morts au lieu d'un seul... Les réactions sont non seulement peu crédibles mais également bien trop répétitives, la jeune femme n’arrêtant pas de revenir sur la lâcheté de son mari, expliquant à son invité - en cherchant d'ailleurs à fuir avec lui - qu’elle ne l’aime plus et le méprise même depuis ce temps-là. Un vague triangle amoureux se met alors en place, le caractère romantique de l'épisode ne se révélant guère plus convaincant que la partie "aventure" faute à une direction d’acteurs hésitante mais surtout à des personnages pas très bien écrits. Avec sa voix de canard à la Joanna Newson, Joyce Bulifant est assez craquante mais son personnage est tellement peu étoffé qu’il ne nous touche guère et aurait même in fine tendance à nous agacer. Jack Klugman qui interprète son mari n’est guère plus mémorable, les réactions de cet homme jaloux n’étant pas beaucoup plus vraisemblables, témoin la dernière séquence que je ne vous dévoilerai pas mais qui s’avère plus gênante que réellement angoissante.

A l’actif de cet épisode, qui s'avère vite inintéressant et manquer singulièrement d’épaisseur, de beaux paysages et des séquences d’action plutôt efficaces mettent en scène le couguar, le cascadeur, et le dompteur de la bête est à féliciter pour leur travail. L’idée de la caméra subjective pour l’avancée du félin aurait été bien vue si elle n’avait pas été utilisée à outrance et si le monteur n'avait pas décidé de reprendre à chaque fois le même plan. Cette histoire aurait été parfaite pour un épisode d'Au nom de la loi par exemple, avec des épisodes d’une durée inférieure à une demi-heure ; ici, on a essayé de meubler comme on a pu pour faire atteindre à cette fiction la durée réglementaire quasiment équivalente à celle d'un film de série B. Et autant dire que le temps semble long car l’ensemble se traîne et que l’intrigue se révèle aussi ennuyeuse que peu captivante ; on préfèrera revoir le très curieux et envoutant Track of the Cat de William Wellman. En revanche, une notification assez curieuse : l’orchestration et la composition du morceau musical lors de l’attente nocturne auprès du point d’eau préfigurent celui, rythmique, d’Ennio Morricone lors de la séquence pleine de suspense du piège tendu en pleine ville dans Il était une fois dans l’Ouest de Sergio Leone. Le compositeur italien se serait-il alors souvenu de cet épisode du Virginien ?

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  • 2.17 - The Fortunes of J. Jimerson Jones
  • Réalisation : Don McDougall
  • Scénario : Carey Wilber
  • Guest Star : Pat O'Brien
  • Première diffusion 15/01/1964 aux USA - Date de la diffusion en France inconnue
  • DVD : VOSTF et VF
  • Note : 5.5/10

Le pitch : Après vingt ans de prospection sans succès, J. Jimerson Jones (Pat O’Brien) décide par dépit de faire sauter sa cabane. C’est alors qu’il découvre un gisement d’or qui se trouvait juste dessous. Le voilà riche ! Il se rend donc à Chicago pour commencer à profiter de la vie. Au même hôtel sont descendus le juge Garth et sa fille Betty. Cette dernière va avoir une amourette avec un jeune journaliste qui venait juste avant de se faire rabrouer par Garth, tandis que notre nouveau millionnaire va être la cible d’un trio d’escrocs. Son honnêteté et sa naïveté vont faire échouer toutes leurs tentatives de filouterie...

Mon avis : En ayant lu tellement de mal à son sujet, qu’après le plutôt mauvais Roar from the Mountain je m’attendais au pire de cette deuxième fiction "virginienne" consécutive écrite par Carey Wilber. Du coup ma surprise, certes toute relative, fut pourtant bien réelle. Non pas que cet épisode soit une grande réussite - loin de là - mais malgré le fait d'être incontestablement mineur, je l’ai néanmoins suivi avec un certain plaisir coupable. Avant tout, il faut prévenir les aficionados du western qu’ils ne seront pas à la fête s’ils s’attendent à en visionner un, puisque exit tout ce qui pourrait se rapprocher de près ou de loin du genre, à l'exception de l'époque. Il s’agit ici plutôt d’une comédie dont l’intrigue, après un court prologue en extérieur, se déroule ensuite intégralement au sein d'un hôtel de Chicago, aucune séquence d’action - pas même la plus petite bagarre - venant s’y inviter. Les avertissements et précautions d’usage ayant été édictés, la pilule devrait pouvoir ainsi mieux passer. L’histoire s’engage en fait dans deux directions bien différentes qui n'ont qu’assez peu de liens entre elles : une romance ainsi qu’une comédie de l’escroquerie, toutes deux débordantes de bons sentiments. Vous savez désormais à quoi vous attendre : amateurs de séquences mouvementées, vous pouvez passer votre chemin !

The Fortunes of J. Jimerson Jones débute alors qu’un vieux prospecteur d’or décide de faire sauter la cabane qu’il habite depuis vingt ans, totalement découragé d’avoir travaillé toutes ces années pour rien. Quelle n’est pas sa surprise lorsque sous les décombres il découvre un gisement ; il est désormais riche et décide de tout quitter pour aller vivre chichement à Chicago. Dans le train qui le conduit vers la grande ville, il rencontre le Juge Garth et sa fille en route pour la même direction pour quelques jours de vacances. Sur les conseils du juge, qu’il avait connu à Medicine Bow, Jones descend au même hôtel. Deux intrigues vont ainsi pouvoir se dérouler simultanément - puisque se déroulant dans le même lieu confiné - pour ne converger qu’à de très rares moments. D’une part nous suivons les situations cocasses déclenchées par la naïveté, le manque d’éducation et de savoir-vivre du personnage principal qui, de "bouseux" doit se faire du jour au lendemain aux usages du grand monde. Pour prendre un exemple assez parlant, lorsqu’il s’attable pour la première fois au restaurant de l’hôtel, il ne sait déjà pas ce que représente un menu et ensuite commande une huitre et une douzaine de homards ; ce que les serveurs lui apportent sans sourciller après cependant lui avoir fait répéter à plusieurs reprises ses désidératas.On devine par cet exemple le genre de comique de situations mis en place par le scénariste. De même, mais en un peu moins lourdaud, John fait échouer toutes les tentatives d’escroquerie à son encontre sans évidemment le vouloir et paradoxalement grâce à son honnêteté et ses scrupules ; je vous laisse découvrir comment en ne vous dévoilant rien de ces séquences finalement assez amusantes.

J. Jimerson Jones va ainsi déjouer successivement une tricherie à la bourse, une filouterie aux cartes et une tentative de chantage au mariage. Les escrocs s’avérant tenaces, alors qu’ils vont enfin réussir à s’emparer des millions du vieil homme, ce sont d’autres personnages qui vont les tenir en échec : une femme de chambre bien attentionnée tombée sous le charme de ce gentil millionnaire, ainsi que le juge et sa fille qui ne supportent pas de voir cet homme foncièrement bon se faire démunir par des canailles, un trio d’escrocs composé de deux hommes et une femme, cette dernière étant très bien interprétée par une savoureuse Jeanne Montgomery très à l’aise en intrigante vile et séductrice. L’autre piste scénaristique, qui ne rejoindra la première qu’en toute fin d’épisode, est la romance qui se noue entre Betty et un tout jeune journaliste (David Macklin) qui s’était fait vertement repoussé par le juge dès leur première rencontre alors que le jeune homme lui demandait une interview avec peut-être un peu trop d'arrogance apparente. Le principal intérêt de cette partie romanesque provient du fait de voir le juge sentir pour la première fois sa fille se détacher et lui "échapper", devenir une femme attirante et désirable qui ne peut ainsi tout logiquement que s'éloigner de lui. Les séquences qui vont réunir Lee J. Cobb et Roberta Shore sont d’une grande tendresse, et peu importe les bons sentiments lorsqu’ils sont mis en avant avec autant de douceur et lorsqu'ils parviennent à rendre l’ensemble aussi touchant.

La conclusion de cette sorte de fable est que la bonté, la générosité et l’amitié peuvent faire barrage à toutes sortes de pièges tendus par n’importe quel malfaiteur, et que l’argent ne fait pas forcément le bonheur. Certains trouveront cette morale assez mièvre voire niaise, d’autres s’en délecteront ; le principal aura été de ne pas prendre tout cela au sérieux et que ce happy-end nous ait fait venir le sourire aux lèvres, ce qui a été le cas me concernant. Le postulat de départ était savoureux, la mise en place certes assez laborieuse et la mise en situations assez "lourdaude" et peu nuancée, mais in fine l’ensemble se sera avéré pas aussi désagréable qu’attendu. On remerciera Don McDougall qui une fois de plus a parfaitement bien su gérer le rythme de sa mise en scène et sa direction d’acteurs, même si Pat O’ Brien aura pu au départ un peu agacer. Un épisode de comédie un peu désuet mais assez amusant.

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  • 2.18 - The Thirty Days of Gavin Heath
  • Réalisation : John Florea
  • Scénario : Mel Harrold
  • Guest Star : Leo Genn
  • Première diffusion 22/01/1964 aux USA - Jamais diffusé en France
  • DVD : VOSTF
  • Note : 7.5/10

Le pitch : Gavin Heath (Leo Genn), un immigrant britannique ayant autrefois été propriétaire d’un ranch aux environs de Medicine Bow, revient sur les lieux après s’être enrichi, bien décidé à se réintégrer à la communauté. Malheureusement il est mordu par un chien enragé et le médecin ne lui laisse comme espoir qu’environ 30 jours à vivre. Après une période dépressive chez le juge Garth, il décide de passer ses dernières heures en actions philanthropiques, néanmoins toujours torturé par son passé dans l’armée britannique où il fut considéré comme un lâche ainsi que par un conflit avec Trampas qui ne semble pas avoir été résolu...

Mon avis : Vous venez d’être bénéficiaire d'une grosse fortune mais on vous apprend qu’il ne vous reste plus que 30 jours à vivre ? Qu’allez-vous faire de ce dernier mois sur terre et comment allez vous dépenser l'argent acquis ? C’est le postulat de départ que nous proposent le réalisateur de télévision John Florea en collaboration avec Mel Harrold dont cet épisode du Virginien sera le seul et unique travail en tant que scénariste, voire même sa seule activité pour le cinéma ou la télévision. Malgré la relative "virginité" de l'auteur de l'histoire, autant dire d’emblée qu’il s’agit d’une des très belles réussites de cette deuxième saison, un épisode captivant et d’une densité assez étonnante, surtout que le résumé ci-dessus ne reflète que très partiellement tous les éléments mis en avant au cours de ce récit pétri d’une belle humanité sans pour autant tomber dans la mièvrerie. Sans trop en dévoiler, essayons cependant de vous en faire saisir toutes les richesses thématiques et d’écriture d’autant que tout ce qui va vous être raconté ci-après ne l’est absolument pas par ordre chronologique au sein de cette fiction ! Gavin Heath, citoyen britannique, prend part à l'âge de 19 ans à la fameuse charge de la brigade légère qui a lieu durant la guerre de Crimée en 1855. Faisant semblant d’être touché en tombant expressément de cheval, il se fait passer pour mort au tout début de la bataille ; accusé de lâcheté il est dégradé puis chassé de l'armée. Plus tard, après qu’il eut émigré aux USA, il acquiert un ranch proche de celui de Shiloh dans une vallée lui rappelant les lieux de cette bataille. Une autre couardise lui fait se mettre Trampas à dos ; honteux et désargenté, il part dans le Colorado où il fait fortune.

De retour dans la petite bourgade de Medicine Bow en homme désormais riche, il espère se réinstaller dans cette région où il s’était lié d’amitié avec la plupart des habitants et où il souhaite enfin se poser après avoir réglé quelques dettes non seulement financières mais aussi morales. En effet, ses démons sont toujours présents, l’empêchant de goûter à la sérénité que sa fortune aurait dû lui apporter, le tout renforcé par la froideur de Trampas à son égard, le cowboy de Shiloh ne semblant pas avoir encore digéré ce qui s'était déroulé voici trois ans en arrière et qui avait failli le tuer. Quoi qu’il en soit, Gavin décide de fêter en grande pompe sa richesse et son retour ; il reprend contact avec la plupart de ses anciennes connaissances et notamment avec Sally, une Saloon Gal au cœur d’or qui ne l’avait pas oublié (superbe personnage interprété par Ina Victor). Betty et Garth paraissent eux aussi ravis de ce retour et sont agacés par les réactions de Trampas à son encontre : "I don't hate him any more than I hate that mad dog-I just don't want to be around either of them." Tout aurait été pour le mieux si le jour où Gavin s'était rendu sur ses anciennes terres, il ne s'était pas fait mordre par un chien dégoulinant de bave aux lèvres (celui dont parle justement Trampas dans la phrase précédente et qu'il avait croisé peu avant avec inquiétude). Un citoyen étant agonisant du fait d’avoir attrapé la rage, les "chances" pour que ce soit également le cas pour l’Anglais sont très grandes ; le médecin lui annonce que si cela se confirme, il n’aura plus qu’une trentaine de jours à vivre. Sa première réaction est de se cloitrer volets fermés, de se replier sur lui-même et de désespérer. Sur quoi le juge Garth l’invite au contraire à profiter au maximum de son dernier mois sur terre et éventuellement de retourner mourir dans le Royaume-Uni qu’il chérit tant.

Ayant beaucoup à se faire pardonner sur place et estimant ne pas avoir le temps d’entreprendre un tel voyage, il va avoir l’idée non seulement de se racheter de sa veulerie mais également de faire de Medicine Bow un petit coin d’Angleterre par quelques décisions philanthropiques mais aussi par des "cocasseries" au contraire peu appréciées de ses concitoyens, comme le fait de demander à hisser l’Union Jack en plein centre de la ville et surtout à deux jours du 4 juillet, fête de l’indépendance. A cette occasion, il se défendra avec une belle éloquence par un passionnant exposé historique, rappelant à ses concitoyens que sans les Anglais, l’Amérique ne serait pas ce qu’elle est devenue, leur remémorant que la plupart de leurs ancêtres sont des descendants des habitants de l’Angleterre, qu’ils devraient ainsi aussi bien respecter son drapeau que lui respecte le leur. Je ne vous en dirai pas plus mais sachez que le final devrait plaire aux amateurs d’action, se déroulant alors que l’on se lance à l’attaque d’une bande d’Indiens renégats qui se sont enfuis de prison après avoir pris Trampas en otage. Une séquence d’une belle efficacité, ample et pleine de panache, se terminant sur une note fortement émouvante. Si la direction d’acteurs s’avère parfaite, Leo Genn est admirable et domine l’ensemble de l'excellent casting par une prestation mémorable dans la peau de cet Anglais richissime, dépressif et en quête de rédemption qui se définit comme "a ghost of a man without a family, country, or soul." Si son nom ne vous dit pas grand-chose, vous connaissez surement le visage de cet comédien britannique qui tourna pour tous les principaux cinéastes anglais, de Carol Reed à Laurence Olivier en passant par Michael Powell et Zoltan Korda, et qui aux USA fut entre autres le Petronius du Quo Vadis de Mervyn LeRoy ou le Strabuck du Moby Dick de John Huston.

Un épisode au récit assez vertigineux, qui en plus d’être d’une extrême gravité et bourré de références historiques, provoque des réflexions sur la mort, la philanthropie, la seconde chance, la rédemption, le courage et la lâcheté grâce à d’excellents dialogues et à des déclamations enflammées de magnifiques tirades de Shakespeare ou Tennyson. Bien réalisé - avec notamment, lors de la séquence de la fête, une superbe contre-plongée accompagnée d’un léger mouvement de caméra s’avançant sur Leo Genn resté seul dans le saloon à demi-éclairé au milieu des bouteilles disséminées -, superbement écrit, magnifiquement interprété, une histoire non seulement totalement inédite dans un western, d’une densité assez étonnante pour seulement 70 minutes d’un épisode télévisé, mais également remplie d’émotion et de notations originales pour le genre comme ce décor du salon de thé ou ce pasteur au discours plutôt progressiste. Un must de cette deuxième saison !

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  • 2.19 - The Drifter
  • Réalisation : Don McDougall
  • Scénario : Carey Wilber & Frank Fenton
  • Guest Star : Leif Erickson & Gregg Palmer
  • Première diffusion 29/01/1964 aux USA - 22/01/1967 en France
  • DVD : VOSTF et VF
  • Note : 7/10

Le pitch : S’arrêtant devant une ferme à l’abandon, le Virginien se remémore son arrivée à Medicine Bow sept ans plus tôt. Traversant les terres du ranch Shiloh, il se fait tirer dessus par les hommes de main du juge Garth qui le soupçonnent de faire partie des cow-boys de leur voisin et ennemi, Peterson (Leif Erickson). Se liant d’amitié avec un des hommes de ce dernier, le Virginien le sauve d’un passage à tabac ; pour le remercier Peterson lui offre un emploi. Il tombe amoureux de la fiancée de son régisseur ce qui met d’autant plus sa vie en danger qu’il commence aussi à entrevoir les dessous peu glorieux du conflit qui oppose les deux ranchs…

Mon avis : Après des épisodes "flash-back" qui nous avaient narré comment Steve (Duel at Shiloh à la moitié de la première saison) et Trampas (Ride a Dark Trail qui ouvrait la deuxième saison) étaient arrivés à Medicine Bow, il fallait bien qu’un jour le personnage titre de la série ait aussi cet insigne honneur de se voir attribuer une fiction nous expliquant le parcours qui l'a mené dans cette région du Wyoming. Comme dans le premier épisode cité ci-dessus et qui était un remake de L'Homme qui n'a pas d'étoiles (Man Without a Star) de King Vidor, ce semblant de "pilote" se déroule à nouveau à travers un récit ayant pour thème principal une war range - autrement dit un conflit entre plusieurs éleveurs -, nos héros travaillant au début dans le ranch adverse de celui qu’ils intégreront plus tard, à savoir Shiloh que dirige le juge Garth. Une intrigue qui pour les aficionados du genre ne proposera certes que très peu de surprises mais que l’excellent scénariste Frank Fenton (L’Aigle vole au soleil, Le Jardin du diable, Rivière sans retour, Fort Bravo…) réussit à mener jusqu’au bout avec une solide assurance dans l’écriture et une belle richesse dans la description des personnages. Bref, une bonne cuvée même si son manque d’originalité ne peut pas la faire côtoyer les sommets de la série.

C’est en s’approchant d’un domaine à l’abandon sur les terres du juge Garth que le Virginien se remémore ce qui s’y est produit sept ans auparavant. Lorsque, avant de plonger dans ses pensées et son passé, il dit à Steve que les habitants de cette ferme fantôme sont tous morts, on sait d’emblée que nous allons assister à un drame, le fatalisme de cette phrase apportant à l’épisode une sorte d’aura de mélancolie qui le rend encore plus poignant, le compositeur de la musique s’étant lui aussi engouffré dans ce ton. Le flash-back peut alors débuter ! Le Virginien - dans une tenue autre que celle noire et rouge qu’il arbore dans quasiment tous les épisodes lorsqu’il n’est pas en costume de ville - galope dans les plaines du Wyoming lorsque qu’un coup de feu fait s’écrouler son cheval sous lui, raide mort. Ce sont des hommes de main travaillant à Shiloh qui l’ont pris pour un cowboy du ranch voisin, avec qui ils sont en conflit depuis quelque temps sans que personne ne semble se souvenir de l’élément déclencheur. C’est ainsi que, un peu molesté, le Virginien fait la connaissance de son futur patron, le juge Garth ; et autant dire que la rencontre s’avère glaciale. Puis notre héros sans nom se rend au saloon pour oublier dans un verre la réception peu cordiale qu’on vient de lui faire. Là, un homme lui demande de partager son moment de détente dans le seul but de pouvoir s’amuser un petit moment avant de se faire tomber dessus par un groupe d’inquiétants personnages qui l’attendent aux quatre coins de la pièce pour lui faire sa fête. Ayant pitié de lui et reconnaissant dans ces "bourreaux" quelques-uns de ceux ayant fait partie de son "comité d’accueil", le Virginien fait en sorte qu’une bagarre générale se déclare pour brouiller les pistes et attirer l'attention ailleurs ; ce qui donne lieu à une séquence aussi cocasse qu’efficace, la majorité du mobilier en faisant les frais.

On se rend ainsi compte d’emblée que, comme je l’avais déjà auparavant décelé, Don McDougall demeure l’un des meilleurs réalisateurs de la série, sa gestion de l'action, l'ingéniosité de ses placements de caméra et les effets qu'il obtient des cascadeurs s'avérant d'une redoutable efficacité. Cette bagarre dantesque sera l’une des dernières séquences avec un peu d’humour, le reste va sombrer dans le drame et la plus profonde noirceur. Après une nuit en prison, le Virginien est délivré par le patron de l’homme qu’il a "sauvé" d’un passage un tabac ; cet important rancher paie sa caution et rembourse les dommages occasionnés avant de lui offrir un emploi dans son domaine. Là, le Virginien va tomber amoureux de la fille de ce gros éleveur au grand dam du régisseur qui, outre s’être fiancé à cette dernière avec de vilaines idées derrière la tête, se révèle être celui par qui le conflit avec Shiloh est arrivé. Je ne vous en dirai pas plus afin de ne pas vous gâcher toute la découverte de ce récit formidablement bien mené, sauf à vous dire que les morts violentes vont s’accumuler alors que dans le même temps le Virginien va se lier d’amitié avec son futur patron lors de scènes réellement émouvantes alors qu’ils se rendent compte s’être trompés sur leurs comptes respectifs. A cette occasion, le Virginien sortira l’une des phrases emblématiques qui pourrait résumer la non-violence et le progressisme de la série en disant en substance au juge qu’il rêvait d’un homme qui œuvrerait pour l’avenir mais qu’il n’en avait jamais connu avant lui, à savoir un gros rancher capable de travailler pour les générations futures avant de penser à lui-même.

Les aficionados du genre trouveront probablement l’intrigue déjà vue mais l’intelligence du scénario, l’efficacité de la réalisation et la qualité de l’interprétation font de cet épisode un très bon cru. Concernant le casting, outre un James Drury qui ne nous déçoit pas, on se souviendra surtout d’un Gregg Palmer inquiétant à souhait, d’un excellent Leif Erickson dans le rôle du rival de Garth ainsi et surtout de Mariette Hartley qui fut déjà le personnage féminin principal aux côtés de James Drury dans l’un des plus grands westerns de l’histoire du cinéma, Coups de feu dans la Sierra (Ride the High Country) de Sam Peckinpah. Ici, elle a à nouveau la chance de s’être fait octroyer un personnage richement dépeint, celui d’une jeune fille aux idées modernes mais se trouvant seule et isolée par le fait d’être en quelque sorte "emprisonnée" au sein de sa famille. Pour couronner le tout, on trouve d’efficaces scènes d’action et des séquences de dialogues mémorables grâce à la complicité de Lee J. Cobb et James Drury. Ce mélange de romance malheureuse, de récit policier (qui a pu tirer les cartouches qui ont tué un certain personnage et blessé le Virginien ?) et de pur western devrait plaire au plus grand nombre, d’autant qu’il permet de découvrir le background de notre héros-titre.

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  • 2.20 - First to Thine Own Self
  • Réalisation : Earl Bellamy
  • Scénario : Les Crutchfield
  • Guest Star : Bruce Dern
  • Première diffusion 12/02/1964 aux USA - 30/08/1983 en France
  • DVD : VOSTF et VF
  • Note : 7/10

Le pitch : Après avoir fait fortune, Silas se rend à Medicine Bow pour y retrouver sa sœur. Sur le chemin il recueille un jeune guitariste, Randy. Alors que celui-ci est parti chercher de l’eau, Silas se fait tuer et cambrioler par deux bandits. Seule sa petite fille Mélanie est témoin du meurtre, mais elle est tellement sous le choc qu’elle n’arrive pas à innocenter Randy lorsque les hommes du ranch Shiloh le découvrent sur les lieux du crime. De peur de se faire lyncher, le jeune homme s’enfuit. Une longue traque se met en place alors que Betsy, persuadée de l’innocence de Randy qu’elle a importunément rencontré, va tout faire pour l'aider...

Mon avis : First to Thine Own Self est un épisode non seulement très réussi mais aussi important pour l’ensemble de la série puisqu’il introduit un nouveau personnage qui restera en son sein durant 70 épisodes, jusqu’à la fin de la quatrième saison. Il s’agit de Randy Benton, un jeune vagabond orphelin qui est accusé d’un meurtre qu’il n’a pas commis. Le seul témoin du crime, une fillette de six ans, est tellement choquée par le drame auquel elle a assisté qu’elle n'arrive même pas à l’innocenter. Un jeune homme tout aussi attachant que s'avère être le comédien, d’une étonnante droiture pour quelqu’un n’ayant pas eu la chance d’avoir une enfance heureuse, mais qui malheureusement a "appris" à être méfiant et à ne faire confiance en personne. A la constante recherche de petits boulots à droite à gauche, il ne quitte jamais sa guitare dont il joue à merveille, chantant du Country Blues d’une manière tout à fait remarquable, sa voix jurant avec son visage poupin, bien plus rocailleuse qu’attendu. Le comédien s’avère donc non seulement tout à fait sympathique mais également sacrément talentueux dans le domaine musical, interprétant ici trois mélodies dont une - I'm So Lonesome I Could Cry - signée par le grand Hank Williams. A la fin de cet épisode mouvementé, le Virginien lui proposera de rester travailler pour lui et de rejoindre son équipe de cow-boys. Il gagne ainsi le droit de s'incorporer aux principaux protagonistes, ce qui à mon humble avis nous promet de bons moments puisque je suis aussi ravi de son intégration que Betsy semble l'être, elle qui est tombée sous son charme en tout bien tout honneur et qui est en fin de compte le personnage principal de cet épisode, la seule à avoir immédiatement cru en l’innocence de ce jeune homme et qui n’en a jamais démordu malgré les avis contraires de ses proches.

Leur rencontre représente d’ailleurs le côté cocasse de ce récit par ailleurs très dramatique. Nous n’avions encore jamais eu l’occasion de voir Betsy aussi espiègle ; alors qu’elle voit Randy dans son plus simple appareil en train de se baigner dans un immense abreuvoir, elle s’amuse de la situation tout en le titillant, lui "volant" ses vêtements en lui disant que s’il veut les récupérer il devra s’approcher d’elle. Une séquence tout à fait délicieuse et qui nous prouve que la charmante Roberta Shore a encore fait des progrès en tant qu’actrice, les scènes qu’elle partage avec James Drury s’avérant elles aussi d’une étonnante justesse dans un registre beaucoup plus grave. En effet, totalement sûre d’elle, Betsy veut rester loyale à Randy tout en sachant que si elle veut lui sauver la vie elle devra le "dénoncer" au Virginien qui a dans l’idée de le faire arrêter, croyant au contraire en sa culpabilité. Lors de ces moments de fortes émotions, le Virginien citera Shakespeare pour parler de loyauté - confirmant ainsi le fait d’être cultivé - et Roberta Shore versera des larmes tout à fait crédibles alors qu’elle ne sait plus quoi faire pour démêler l’inextricable situation dans laquelle s’est mis son protégé, pour éviter le danger qui pèse sur sa propre tête ainsi que sur celle de la petite fille, cette dernière par le fait d'avoir été témoin du meurtre et étant a priori capable de reconnaître les coupables. Randy, qui a surpris une conversation chez la tante de Mélanie, le confirme et annonce à Betsy que les criminels vont tout faire pour les éliminer, sans néanmoins penser à prévenir les hommes de loi de peur de se faire arrêter.

"Enquête policière'" cachette dans une grotte, mystère, suspense et traque impitoyable pour un épisode qui devrait plaire aux amateurs d’extérieurs et d’action. Earl Bellamy filme le tout avec ampleur et efficacité, témoin toutes ces séquences où l'on voit les cow-boys de Shiloh galoper sur les terres alentour du ranch à la recherche du jeune homme, ou encore celle teigneuse qui oppose à mains nues le Virginien à l’un des meurtriers, d’une violence et d’une hargne assez étonnantes pour une série télévisée réputée "familiale". Alors certes, le caractère noble de Randy, son amitié avec la fillette et les chansons qu’il entonne pourront faire penser à de la mièvrerie mais il n’en est rien ; toutes ces séquences se maintiennent toujours sur le fil du rasoir, bien plus sensibles, douces et tendres que ridicules, nunuches et moralisatrices. Il faut dire que la petite Claire Wilcox ne manque pas de charme elle non plus. Dommage que par ailleurs le casting soit un peu bancal : Mary Laroche et Jan Merlin ne se montrent pas très convaincants dans les rôles de la sœur et du beau-frère du chercheur d'or assassiné, L.Q. Jones est pris en flagrant délit de cabotinage lors d’une séquence de cartes au réfectoire, lui qui jusqu’à présent s’était révélé assez juste. En revanche, Bruce Dern est inquiétant à souhait dans la peau d’un personnage haïssable, alors que l’on note l’absence dans cet épisode du juge Garth et de Trampas et que par contre Steve nous octroie quelques scènes assez amusantes.

Une histoire assez prévisible, parfois invraisemblable dans les réactions de certains personnages, sans réelles surprises, mais néanmoins parfaitement bien charpentée pour un scénario signé Les Crutchfield, fluide, efficace et carré. Nous sommes contents de retrouver de nombreux thèmes musicaux déjà entendus et appréciés par ailleurs, de leur voir ajouter trois bonnes chansons, un peu d’humour, de nombreux extérieurs, beaucoup d’émotion et de tensions. Un beau patchwork qui, sans faire atteindre à cet épisode les sommets de la série, n’en demeure pas moins extrêmement agréable. Et très bon capital de sympathie pour Randy Boone - le cousin de Richard Boone - à qui l’on souhaite d’autres aussi beaux moments que ceux que les auteurs lui ont offerts ici.

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  • 2.21 - A Matter of Destiny
  • Réalisation : Maurice Geraghty
  • Scénario : Al C. Ward
  • Guest Star : Peter Graves
  • Première diffusion 19/02/1964 aux USA - Jamais diffusé en France
  • DVD : VOSTF
  • Note : 7/10

Le pitch : Robert Gaynor (Peter Graves), riche entrepreneur de Chicago, a décidé de connaître la chaine de la viande de A à Z. Pour ce faire, il achète un ranch près de Shiloh et s’y rend pour apprendre auprès des meilleurs. Sans le vouloir il va bouleverser la vie de beaucoup de monde à Medicine Bow, à commencer par Trampas dont il "s’empare" de la fiancée. Un certain Pat Wade (Richard Jaeckel) arrive quasiment en même temps ; il s’agit d’une vieille connaissance de Trampas que le Virginien accepte dans son équipe pour le gros travail qui les attend pour rassembler le bétail ; il semble pourtant être venu pour une raison précise, bien moins noble...

Mon avis : Après son arrivé à Shiloh dans l’épisode précédent, le désarmant comédien Randy Boone semble s'être confortablement installé et se sentir très à son aise au milieu des cow-boys du ranch. Ici, dans un épisode réalisé par le très bon Maurice Geraghty déjà signataire de l'excellent Impasse, il prend en sorte la place d’un Steve qui est aux abonnés absents. Son caractère et son tempérament sont toujours aussi attachants et en bonus il nous octroie en duo avec Betty, Paper of Pins, une chanson entrainante lors d’une séquence de fête organisée par le juge Garth. Son capital de sympathie demeurant au beau fixe, les amateurs de la série se réjouissent donc à nouveau du fait qu’il poursuive l’aventure durant encore de nombreux épisodes d’autant que l’alchimie fonctionne très bien que ce soit avec Roberta Shore ou avec James Drury. Quoi qu’il en soit, c’est en l’occurrence dans cet épisode l’une des deux guest stars qui domine le reste du casting, le futur Jim Phelps de Mission : Impossible que l’on avait déjà pu voir à plusieurs reprises au cinéma y compris dans le domaine du western ; il était effectivement très bien dans les superbes Wichita (Un jeu risqué) de Jacques Tourneur ou encore dans Le Raid (The Raid) de Hugo Fregonese. Dans A Matter of Destiny, il s’avère remarquable, bien plus charismatique que l’autre invité de prestige, Richard Jaeckel, que l’on a parfois du mal à trouver crédible en... tueur à gages sombre et taciturne.

Car oui, la surprise est éventée assez vite et l’on devine assez rapidement que ce jeune homme n’arrive pas à Medicine Bow par hasard mais qu'il est ce qu'on pourrait appeler une sorte "d'infiltré" ; il s’avère en effet que des concurrents de Gaynor le paient pour se débarrasser de ce rival encombrant ; l’ex cowboy - qui a autrefois travaillé avec Trampas - a pris un mauvais chemin, ce nouveau métier lui rapportant bien plus tout étant bien moins éreintant. L’acteur est loin d’être mauvais mais son personnage n’apporte pas grand-chose à l’intrigue pas plus que l’idée d’avoir ajouté ce personnage de gunman, le scénario étant déjà bien assez riche sans qu’il n’y ait eu besoin de rajouter un suspense inutile qui au contraire affaiblit un peu l’ensemble. Car sinon, l’épisode est principalement centré sur Robert Gaynor, homme d'affaires et millionnaire de l’Est des États-Unis venu se rendre compte sur place de la gestion d’un ranch après en avoir acheté un pour avoir la mainmise sur toute la chaine de la viande, de l’éleveur au consommateur. Un nouveau capitaliste qui n’hésite pas à relever les manches et à participer à toutes les tâches pour mieux appréhender le travail de tout un chacun. Ce qui permet au spectateur d’avoir un aperçu documentaire très intéressant concernant l’organisation d’un grand rassemblement de bétail. Où l'on apprend en même temps que Gaynor comment on établit un camp principal où sera stocké le matériel ainsi que des camps secondaires éparpillés sur le domaine, comment on attrape les bêtes pour vérifier la présence de tiques, comment on s'organise entre les différents éleveurs...

Des idées vont pouvoir être échangées entre le régisseur et l’entrepreneur, chacun apportant son expérience à l’autre pour rendre cet imposant travail tout à la fois encore plus productif et moins exténuant. Tout se passe pour le mieux jusqu’au jour où, une fois le troupeau rassemblé, sans le dire à ses voisins, Gaynor va s’accaparer tous les trains disponibles pour le transport de ses bêtes, faisant comprendre que le fait de leur laisser plus d’espace en les "dispatchant" dans un plus grand nombre de wagons les fera moins stresser, les gardera en meilleure santé tout en les amaigrissant moins. Il n'a évidemment pas tort mais ce à quoi il n’a pas immédiatement pensé, c’est que les autres ranchers finiraient perdants : arrivant plus tard sur le marché, les prix auront entretemps chuté et les acheteurs seront pour beaucoup déjà servis. Mais ce sont les nouvelles règles du jeu de ce capitalisme naissant et de l'ouverture à la concurrence ; ce qui est certes pénalisant pour les "rivaux" mais pas pour autant illégal. Et c’est la grande force du scénario de faire de ce personnage, qui aurait facilement pu être odieux, un homme finalement très attachant par sa capacité d’écoute et de compréhension, l'immense talent de Peter Graves faisant le reste. Les manigances de Gaynor n’en sont en fait pas vraiment puisque le magnat acceptera sans problèmes des concessions après avoir discuté avec les concurrents, dont il ne s’imaginait pas forcément qu’il les mettrait ainsi dans une situation aussi difficile.

Gaynor, un personnage très original richement dépeint, un gentleman magnat débonnaire et a priori dénué d’états d’âme mais au final d’une belle noblesse et sachant se montrer humble. On ne lui en veut même pas lorsqu’il s’accapare la fiancée de Trampas puisque rien n’est calculé : ils tombent sous le charme l’un de l’autre et décident de convoler en justes noces. Il n’empêche que Trampas devra in fine faire un choix cornélien : choisir entre sauver la vie d’un homme qui lui a subtilisé sa femme ou celle d’un vieil ami qui a sombré sur une mauvaise pente. Sur un rythme assez paisible, voici un scénario bien ficelé pour une histoire assez captivante juste un peu plombée par un dernier quart d’heure au suspense pas nécessaire et par une Jean Hale qui a un peu tendance à surjouer, tout comme ici Doug McClure que l’on avait connu plus subtil, rendant ainsi assez faible l’aspect romance de l’épisode. Hormis cela, figurent au programme des réjouissances : un combat à poings nus extrêmement teigneux entre Peter Graves et Doug McClure et quelques notifications passionnantes sur l'arrivée du capitalisme aux États-Unis à la fin du XIXème siècle. Un très bon épisode !

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  • 2.22 - Smile of a Dragon
  • Réalisation : Andrew V. McLaglen
  • Scénario : Cy Chermak & Don Ingalls d'après une histoire de Borden Chase
  • Guest Star : Richard Carlson
  • Première diffusion 26/02/1964 aux USA - 12/06/1966 en France
  • DVD : VOSTF et VF
  • Note : 7/10

Le pitchDurant l'attaque d'une diligence, tous les passagers sont tués à l'exception de Trampas qui en réchappe miraculeusement mais qui n'arrive pas à convaincre le shérif Marden (Richard Carlson) ni de son identité ni de son innocence dans ce massacre. Une course-poursuite est alors entamée, Trampas tentant d'échapper à l'homme de loi qui n'a qu'une seule idée en tête, le lyncher. Le cowboy de Shiloh va trouver de l'aide en la personne d'une jeune Chinoise qu'il prend dans un premier temps en otage. Quant à Steve qui est venu chercher la dépouille de son ami soi-disant mort, il se joint à la milice partie à la poursuite des meurtriers...

Mon avis : Cet épisode assez linéaire, du style "survival", avec Trampas comme protagoniste principal, a été réalisé par Andrew V. McLaglen qui a beaucoup œuvré pour le western au cinéma. Fils de l’acteur Victor McLaglen et assistant de John Ford, son premier film était en 1956 le très prometteur Gun the Man Down avec James Arness. En 1961, il eut énormément de succès avec l’amusant western humoristique Le Grand McLintock qui mettait en scène le duo John Wayne / Maureen O’Hara. Juste après sa seule et unique contribution à la série Le Virginien, il signera encore quelques très belles réussites dans le genre avec surtout le très beau et très fordien Shenandoah (Les Prairies de l’honneur) mais également, malgré sa réputation calamiteuse qui m’est toujours assez incompréhensible, La Route de l’Ouest (The Way West) aux ambitions encore plus vastes et au budget bien plus conséquent, un western épique qui narrait les aventures et le long périple d’une caravane de pionniers se rendant en Oregon. Souvent malmené par la critique française, le réalisateur prouvait à nouveau avec l'épisode qui nous concerne ici qu’il était loin d’être maladroit ou ridicule derrière une caméra !

En effet, filmé dans de nombreux décors naturels que McLaglen utilise à merveille, Smile of a Dragon est rondement mené et très efficace, la mise en scène s’avérant constamment rigoureuse et très précise. Outre l’attachante jeune actrice japonaise Miyoshi Ume qui apporte beaucoup de fraicheur à ce sombre et sanglant épisode, la guest star est ici Richard Carlson dans le rôle d’un homme de loi impitoyable, "an ambitious man without a heart and therefore dangerous." Cet artiste hollywoodien un peu oublié fut entre autre réalisateur d’un bon western en 1954, Four Guns to the Border (Quatre tueurs et une fille) - deuxième des six films qu’il signa - mais était surtout connu en tant que comédien. Il fut en 1948 la tête d’affiche de L'Antre de la folie (Behind Locked Doors) de Budd Boetticher, et plus tard de deux des films de science-fiction parmi les plus célèbres des années 50, Le Météore de la nuit (It Came from Outer Space) ainsi que L’Etrange créature du lac noir (Creature from the Black Lagoon), tous deux signés par Jack Arnold. Entre-temps, dans le domaine du western, il faisait partie du casting de L'Expédition de Fort King (Seminole) - à nouveau réalisé par Budd Boetticher - dans lequel il était très convaincant en officier psychotique, maniaque de la discipline et du règlement. Il se sera certainement souvenu de ce rôle antipathique pour son monolithique shérif Marden ici présent.

L’histoire est assez simple. Lors d’un voyage en diligence, Trampas est le seul survivant de l’attaque de celle-ci. Sa lettre d’introduction signée par le juge Garth ayant été retrouvée sur l'un des morts, Trampas passe pour décédé alors que dans le même temps il est pris pour l’un des meurtriers par un homme de loi qui semble refuser d’écouter ses explications. Ayant réussi à s’échapper des griffes de ce shérif coriace, Trampas n’aura alors de cesse que de le fuir pour sauver sa peau ; il sera aidé par une jeune Chinoise rencontrée sur son chemin et qui connait très bien les cachettes de la région. A Shiloh, Steve, ayant appris le "décès" de Trampas, se rend dans cette contrée californienne chercher sa dépouille et en profite pour se joindre au posse organisé pour rechercher les bandits. Ayant cru deviner la méprise concernant la mort de son ami, il va alors devoir le défendre et lui éviter le lynchage. L’intrigue très linéaire ne consiste qu’en une efficace course-poursuite avec en filigrane le thème de la difficulté d’intégration aux USA de la population asiatique et de leurs conditions de vie déplorables, par l'intermédiaire des personnages d’une jeune Chinoise et de son père venus aux États-Unis faire fortune mais ayant été déçus par l’accueil qui leur a été fait ainsi que par le racisme de leurs concitoyens : "When I was a little girl, my father told me I was like a beautiful doll to be adored and have the blood of royalty in my veins. But in America, I was less than a woman and my blood was yellow.”

Tout ceci n’est pas particulièrement ni surprenant ni très original mais dans l'ensemble plutôt bien scénarisé (il faut dire aussi qu'il s'agit au départ d'une histoire écrite par Borden Chase), le récit fait par la jeune femme étant assez émouvant d’autant que Kim Ho tombe dans le même temps sous le charme de Trampas. Le twist final est assez prévisible mais la résolution ne manque ni de punch ni de rythme, McLaglen ayant l’habitude de mettre en boîte de dynamiques scènes d’action tout étant très à l’aise dans ce domaine. Entre-temps Kim Ho aura appris de Trampas qu’il valait mieux lutter que fuir et nous aura dépeint un beau portrait du cow-boy de Shiloh qui sort encore plus grandi de ce très joli épisode : "You are kind, even gentle with a love for life […] You are modest, and this is a quality to be admired. You are also tall and handsome, so I'm sure if you did not seek out the ladies the ladies would seek you." Une réussite que cette fiction mouvementée, touchante et non dénuée de sagesse.

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  • 2.23 - The Intruders
  • Réalisation : Charles R. Rondeau
  • Scénario : Dean Riesner
  • Guest Star : Darren McGavin, Hugh Marlowe & David Macklin
  • Première diffusion 04/03/1964 aux USA - 20/11/1966 en France
  • DVD : VOSTF et VF
  • Note : 7/10

Le pitch : Etant tombé sous le charme de Betsy lors de leurs rencontres à Chicago, le jeune journaliste Eddie (David Macklin) rend à son tour visite à la jeune femme. Le juge Garth ayant oublié d’ouvrir le télégramme annonçant son arrivée, il n’est guère enchanté par cette venue ; en effet, il avait fait en sorte d’envoyer tous ses cow-boys loin du ranch pour accueillir à Shiloh une conférence secrète qui devait se tenir entre Indiens et membres du gouvernement afin de discuter de paix. Une réunion a priori pas secrète pour tout le monde vu que d’inquiétants personnages se mettent à tourner autour de la propriété du juge...

Mon avis : Dans le 17ème épisode de cette même deuxième saison, The Fortunes of J. Jimerson Jones, Betsy et Garth, lors d’un voyage d’agrément à Chicago, avaient fait la connaissance d’un fringant journaliste à peine sorti de l'adolescence. Une romance s’était alors nouée entre la jeune femme et le citadin, qui s’était fait tout d’abord vertement repoussé par le juge dès leur première rencontre alors que le jeune homme lui demandait une interview avec peut-être un peu trop d'arrogance apparente. Plus tard ils s’étaient réconciliés mais avec un peu d’amertume pour Garth, car pour la première fois il sentait sa fille se détacher et lui "échapper" pour un autre homme, devenir une femme attirante et désirable qui ne pouvait ainsi tout logiquement et irrémédiablement que s'éloigner de lui. Alors qu’Eddie était plein d’aplomb "à domicile" et dans son environnement urbain, sur le "terrain adverse" il se montrera non seulement extrêmement maladroit mais également grandement intimidé par Betsy. Ce qui ne fera qu'entériner pour Garth le fait que cet importun visiteur s'est réellement amouraché de sa fille, cette pensée étant à l’origine d’une très jolie séquence d'explications entre Lee J. Cobb et Roberta Shore qui fait d’ailleurs écho à la plus mémorable de l’épisode dont il est fait cas en début de paragraphe.

La première demi-heure, fraiche et guillerette, va être consacrée à la continuité de cette romance extrêmement platonique ainsi qu’au fait que ce "pied tendre" pataud et empoté soit l’objet des gentilles moqueries des cow-boys du ranch à cause de ses tenues vestimentaires, de sa manière de chevaucher, de ses maladresses et de ses habitudes de "jeune blanc-bec" qui détonnent évidemment avec celles des habitants du Wyoming. Nous aurons également la chance, durant cette première partie bougrement plaisante, d’entendre Roberta Shore fredonner en s’accompagnant au piano la superbe chanson traditionnelle Greensleeves, ainsi que de constater une fois de plus le très grand talent de chanteur de Randy Boone entonnant ici - pour malheureusement trop peu de temps - l’excellente I Ride An Old Paint. Beaucoup d’humour et de bonne humeur donc mais aussi une certaine gêne de voir un jeune homme aussi sympathique se sentir aussi mal à l’aise ; à tel point qu’il va faire croire avoir reçu un télégramme de son patron pour éviter de participer au rassemblement de troupeau auquel on lui avait proposé de prendre part. Sauf que le jour où le malchanceux Eddie devait partir, il se retrouve être pris en otage par trois hommes inquiétants et dangereux en même temps que tous ceux qui étaient restés à Shiloh, soit le juge Garth, Betsy, Randy - qui venait juste de se faire blesser par inadvertance par le tenderfoot, faute à un lancer plus que malhabile au jeu du lancer de fer à cheval -, ainsi qu’un des principaux protagonistes de la conférence à venir qui s’était invité un peu à l’avance - interprété par l’excellent Hugh Marlowe.

L’épisode opère alors une vertigineuse rupture de ton, passant d’une intrigue familiale et bon enfant à un suspense sombre et oppressant. Ces quatre bandits connaissent donc l’existence de la conférence qui doit se ternir à Shiloh, et complotent de la faire capoter car un processus de paix irait à l’encontre de leur business qui n’est autre que la vente d’armes aux Indiens. Ils sont donc tout simplement venus attendre les plénipotentiaires afin de tuer le chef indien, pas assez belliqueux à leur goût et qui risque ainsi de les mettre sur la paille. Le Virginien, qui était revenu sur ses pas suite à la blessure de son cheval, va se retrouver pris en otage à son tour après avoir été touché assez gravement par la balle d’un des agresseurs. Parmi les membres de cette bande, l’excellent Darren McGavin tient le rôle de la tête pensante alors que nous trouvons un tout jeune David Carradine inquiétant à souhait dans le rôle de son homme de main surnommé The Utah Kid, un tueur sardonique et sans scrupules. Comment ces trafiquants ont-ils eu connaissance de cette conférence "top secrète" ? Ce sera l’objet d’un twist totalement inattendu que je me garderai de vous divulguer, venant s’y ajouter des morts assez violentes, plusieurs moments de suspense parfaitement bien gérés dans la tension ainsi que la découverte d’un fait peu glorieux dans la carrière juridique de Garth, dont il se servira néanmoins pour faire basculer la situation et en arriver à un dénouement logiquement heureux pour les principaux protagonistes de la série. Bien évidemment je ne vous en dévoilerais rien non plus, sauf que cette manigance de dernière minute pensée par le juge Garth paraît un peu grossière pour être crédible et affaiblit ainsi un peu la fin d’un épisode qui avant cela s'était constamment maintenu à un haut niveau.

Quoi qu’il en soit, cette fiction signée par l'homme de télévision Charles R. Rondeau s’avère tout à fait honorable, parfaitement bien mise en scène, écrite et interprétée, permettant par la même occasion d’aborder le problème indien - même si très succinctement -, cette absence ayant été jusqu’à présent reprochée à la série. Nous ne le verrons pas longtemps mais nous sommes contents de retrouver dans la peau du grand chef Sioux l’un des comédiens ayant le plus souvent interprété les chefs indiens, Chief Iron Eyes Cody. Quant à L.Q. Jones, il est de nouveau absolument inénarrable notamment lorsqu’il imite la façon de monter à cheval du jeune citadin. Un épisode de belle tenue qui devrait plaire au plus grand nombre et au cours duquel on regrettera juste l’absence de Doug McClure.

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  • 2.24 - Another's Footsteps
  • Réalisation : R.G. Springsteen
  • Scénario : Frank Chase
  • Guest Star : John Agar
  • Première diffusion 11/03/1964 aux USA - Jamais diffusé en France
  • DVD : VOSTF et VF
  • Note : 8.5/10

Le pitch : Le jeune Dan Grant est tout fier de montrer au Virginien la nouvelle arme qu’il vient d’acquérir. Malheureusement, au cours d’un hold-up qui s’ensuit, il est bêtement tué pour avoir voulu ramasser son revolver. Le régisseur de Shiloh part dans le Montana à la recherche des meurtriers, espérant les appréhender afin qu’ils soient légalement jugés. Il en fait arrêter deux mais il lui manque celui qui a tiré. Le voilà reparti jusqu’à une ferme où il pense trouver le criminel ; mais il tombe sur son épouse fiévreuse et son jeune fils. Le mari n’étant pas rentré, il décide de les aider le temps que la femme se rétablisse et que le bandit revienne...

Mon avis : Le scénariste Frank Chase n’en était pas à son coup d’essai au sein de la série puisqu’il avait auparavant déjà signé dans la saison 1 le superbe et touchant If You have Tears avec Dana Wynters, ainsi que dans cette deuxième saison le très bon épisode avec Robert Redford, The Evil That Men Do. On partait donc assez confiant même si le postulat de départ rappelait surtout l’épisode jusqu’à présent le plus faible/raté qu'il m'ait été donné de voir, à savoir The Fatal Journey, celui qui narrait la tentative de vengeance du Virginien à l’encontre du meurtrier de la journaliste Molly, l’un des principaux protagonistes des débuts de la série. Situation paradoxale : autant la mort d’un tel attachant personnage ne nous procurait quasiment aucun désarroi, autant celle du jeune Dan Grant - que nous n’aurons pourtant côtoyé qu’à peine cinq minutes - sera le point de départ d'un épisode admirable et riche en émotions. On peste alors a posteriori contre un tel premier rendez-vous manqué pour le même genre d’intrigue, mais on l’oublie bien vite devant la totale réussite de ce second essai porté à bout de bras par un James Drury qui aura rarement été aussi bon, passant d’un registre à l’autre avec une étonnante facilité sans pourtant jamais perdre en crédibilité, son personnage acquérant à ce stade encore plus d’aura, de subtilité et de richesse, se révélant de moins en moins manichéen même si toujours d'une grande noblesse. Nous allons essayer de suivre cet épisode au travers son parcours.

Au départ, on voit le Virginien se désoler intérieurement de l’amour que porte son jeune protégé pour une arme dont il se vante qu’elle lui a couté sept mois de salaire. Néanmoins, il a l'intelligence de ne pas casser son enthousiasme juvénile et décide de ne pas faire tout de suite le rabat-joie, le temps que son cow-boy savoure le plaisir que lui a valu son acquisition. Le voyant mourir sous ses yeux deux minutes après lors d'un hold-up qui tourne mal, le posse mis en place par le shérif pour rattraper les coupables ayant fait chou blanc, il décide de prendre lui-même les choses en main ; son paquetage étant toujours prêt, il part dans le Montana suite à la découverte de la marque d’un ranch de cet Etat sur le cheval abandonné du meurtrier fuyard. Ses adieux à Steve et Randy, qui avaient eu dans l’idée de l’accompagner, sont très pudiques mais laissent affleurer une grande émotion de part et d’autre ; l’amitié est très importante pour ces cow-boys de Shiloh. Lors de son voyage et pour arriver à récolter des informations, le Virginien va faire preuve à la fois d’une froide détermination et d’une pugnacité qui le conduisent à des comportements d’une violence assez viscérale, laissant une mauvaise impression à ses quelques rencontres y compris celles qui n'avaient rien à se reprocher. Il restera néanmoins dans la légalité lorsqu’il s’agira de mettre en prison deux des trois cambrioleurs ; pour l’anecdote, l’un des deux acteurs n’est autre que son propre frère alors que le second est celui de Robert Mitchum. Ayant réussi à obtenir d’indispensables indices, tels le nom du meurtrier ainsi que celui de l'endroit où il se terre, voilà le Virginien reparti pour une dernière étape. Sauf que l’homme n’est pas au rendez-vous, et qu’il trouve en lieu et place un jeune garçon qui le tient en joue ainsi que sa mère fiévreuse au point de s’écrouler sur le sol peu après son arrivée.

Ici, dans cette ferme isolée, se déroulera tout le reste de l’épisode, soit les deux tiers de sa durée. Après un virage scénaristique aussi original qu’inattendu - puisque d'une course-poursuite on passe carrément à un huis clos -, les westerners que nous sommes se trouveront en un autre terrain connu qui pourrait se situer quelque part entre Shane et Hondo. Nous assisterons ainsi - sans aucune mièvrerie - à l’éducation d’un jeune garçon par le régisseur de Shiloh. Si ce dernier est resté sur place, c'est d’une part - noble attitude - pour venir en aide à ces deux personnes fragiles et esseulées, de l’autre - de façon un peu moins glorieuse - avec dans l’espoir d’obtenir des renseignements sur l’époux et le père pour se faire confirmer ou non son identité et savoir s’il s’agit bien du criminel recherché. L’épisode n’étant pas longtemps basé sur ce mystère très vite éventé, il s’appesantira donc beaucoup plus longuement sur un récit d’apprentissage d’une belle et grande dignité - critique de la violence, des armes, justification des actes barbares des indiens... -, mais aussi sur l’affection qui grandit entre l'enfant et le Virginien, sur l’attirance qui se fait jour entre ce dernier et la femme de l'assassin présumé, ainsi que sur de nombreux questionnements et choix cornéliens pour notre héros. Peut-il se laisser aller à une romance avec une femme dont le mari est sur le point de revenir au foyer ? Doit-il éduquer le jeune garçon comme s’il était son fils ? Peut-il s’occuper de cette famille avec autant d’énergie sans leur avouer le but premier de sa visite et sachant qu’il finira par leur soustraire un de ses membres ? Peut-il recommencer sa vie en abandonnant Shiloh pour se lancer dans la gestion de son propre ranch ? Peut-il se venger en allant à l’encontre de la loi et de la justice ? A-t-il la légitimité de le faire surtout lorsqu’il a été témoin de la tragédie, le meurtrier masqué lui ayant soufflé à l’oreille qu’il n’avait jamais voulu en arriver à une telle extrémité (« I didn't wanna, he forced me. » ) ? Peut-on comprendre les actes de sauvagerie des Indiens, sachant qu’ils agissent ainsi surtout parce qu’ils sont pourchassés et affamés ?

Toutes ces questions, le Virginien va se les poser et sera souvent aussi perplexe et tiraillé que le spectateur même s’il s’en sortira une fois encore la tête haute grâce à sa droiture et à son éthique ; néanmoins, sa malchance avec les femmes perdurera et c’est en "poor lonesome cowboy" qu’il rentrera à Medicine Bow. Il va de soi que si l’épisode est aussi admirable, ce n’est pas du seul fait d’une interprétation parfaite de notre acteur principal mais aussi des performances tout aussi remarquables de ses partenaires, que ce soit une touchante Sheree North - comédienne que l’on verra dans de nombreux très bons films des années 60 et 70, notamment sous la direction de Don Siegel - qui embellit au fur et à mesure de l’avancée de l’épisode et de son amour grandissant pour son "sauveur" - les Indiens ayant failli la tuer -, le jeune Dennis Holmes ou encore John Agar, l’inoubliable Lieutenant Cohill du chef-d’œuvre de John Ford, She Wore a Yellow Ribbon (La Charge héroïque), ici mémorable durant les dix dernières minutes de l’épisode, à l’origine d’une longue séquence de suspense psychologique extrêmement tendue. Pour couronner l’ensemble, le tout est très bien réalisé - tout simplement la meilleure fiction de R.G. Springsteen -, écrit, dialogué, photographié et mis en musique. Un épisode d'une formidable densité, d'une étonnante richesse thématique et émotionnelle, ainsi que d'une efficacité qui en font non seulement un sommet de la série mais du western tout court.

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  • 2.25 - Rope of Lies
  • Réalisation : Herschel Daugherty
  • Scénario : Les Crutchfield
  • Guest Star : Peter Breck & Paul Fix
  • Première diffusion 25/03/1964 aux USA - Jamais diffusé en France
  • DVD : VOSTF et VF
  • Note : 6.5/10

Le pitch : Dans une gare, un homme inquiétant est à la recherche d’une certaine Alma que l’on retrouve justement à Medicine Bow. Elle vient d’acquérir un ranch voisin de celui du juge Garth mais a beaucoup de mal à se faire obéir par les cow-boys du précédent propriétaire. Elle est donc à la recherche d’un régisseur et jette son dévolu sur Steve, qu’elle semble avoir bien étudié et dont elle apprécie en premier lieu son maniement des armes. Malgré le fait que ses amis de Shiloh le lui déconseillent fortement, Steve, par orgueil et pour contrer leurs sarcasmes, accepte la proposition qui s'avère un piège et qui va mettre sa vie en danger...

Mon avis : Comme on le devine à la lecture du pitch ci-dessus, l’intrigue louchant pour une bonne part vers le film policier, je ne pourrai pas vous en dire beaucoup plus quant aux manigances mises en place par la très séduisante jeune femme interprétée par Diana Millay, ravissante actrice blonde qui a quasi exclusivement travaillé pour la petite lucarne et qui s’avère plutôt bonne comédienne. Alma Lowell est l’une de ces femmes fatales chère au film noir, de prime abord très aimable, sachant se faire attirante et désirable pour arriver à ses fins, sa sympathie de façade cachant en fait une vilenie de garce capable de faire tuer n’importe quel gêneur même parmi ses plus proches. Je ne m’égarerai donc pas à aller bien plus loin pour éviter les réprimandes des anti-spoilers même si certains penseront déjà que les révélations sont bien trop nombreuses : pourtant le fait dévoiler les côtés sordides du personnage féminin, ainsi que ses probables malversations à venir, ne vend pas la mèche de trop grandes surprises car tout cela, on l’aura deviné assez vite, et ce dès la séquence inaugurale qui se déroule loin de Medicine Bow et au cours de laquelle on fait immédiatement connaissance avec un homme inquiétant et taciturne, tout de noir vêtu, qui recherche apparemment pour la tuer la jolie propriétaire terrienne dont il sera question tout au long de l’épisode. Pour vouloir assassiner une femme avec une telle détermination, il faut qu’elle ne soit pas totalement innocente... le titre nous le laissait d'ailleurs facilement deviner.

Après Another's Footsteps, l'admirable épisode précédent au cours duquel le Virginien s’était éloigné de Medicine Bow à la recherche des assassins d'un de ses employés, Rope of Lies réintègre les lieux familiers de la série avec un peu plus de fantaisie et moins de tension que préalablement même si des morts seront encore au rendez-vous. Un épisode écrit par Les Crutchfield - le scénariste de First to Thine Own Self qui introduisait dans la série peu de temps auparavant le personnage de Randy - et réalisé par Herschel Daugherty, déjà signataire de l’original The Man From the Sea avec un excellent Tom Tryon dans le rôle d’un marin tombant amoureux d’une jumelle assez trouble, ainsi que du non moins réussi Run Quiet avec un Clu Culager très crédible dans le rôle d’un sourd-muet clochardisé. Rope of Lies n’est pas non plus du tout désagréable et se suit sans aucun ennui, mais il se situe néanmoins un peu en deçà des précédents épisodes faute à un scénario un peu inutilement tarabiscoté (notamment l’échange des armes) et à un manque de tension dramatique dans la dernière partie procédurale qui voit arriver sur le devant de la scène un avocat de la défense interprété par un habitué du genre, Paul Fix, qui sera à l'origine d'une résolution guère captivante et pour tout dire un peu bâclée. Pour autant, ce plaisant épisode nous aura offert notre lot de plaisirs et de petites "nouveautés".

A commencer par le fait de trouver dès cette date dans une série "familiale"n et avant les films de Sergio Leonen un cow-boy sale et mal rasé, ici en la personne du comédien Sam Reese, sa tête de fouine sournoise et son rire d’hyène faisant leur effet. On tombe également sur une séquence "documentaire" rarement - ou jamais - vue dans un western, celle du rangement et du tri des harnais, qui semble avoir été filmée à l’improviste tellement les comédiens abordent à ce moment-là un naturel confondant, notamment lorsque James Drury vient à donner un coup de pied "pour de rire" à Randy Boone. On se félicitera également une nouvelle fois des portraits nuancés des protagonistes principaux jamais ni tout blancs ni tout noirs, ici Steve tout à fait lucide quant à son mauvais caractère et à son orgueil, avouant avoir en partie accepté la proposition de la jeune femme de devenir son régisseur pour prouver aux autres railleurs qu’il en était capable, balançant même au Virginien qui essayait avec sagesse de l’en dissuader : « You took your chance when it came along ! What’s wrong with me doin’ the same thing ? »  Steve est certes sous le charme de la belle blonde mais pense également à la promotion qui découlerait logiquement de ce nouvel emploi. Il se rendra vite compte n’être pas fait pour ce métier, ayant non seulement du mal à se faire respecter malgré le fait d’avoir donné une sacré raclée à l’un de ses hommes qui ne lui rendait pas la vie facile - une bagarre à mains nues d’une extrême brutalité -, mais ne se sentant également pas du tout à l’aise avec la paperasse. Conscient de son tempérament pas toujours agréable, Steve ne sera d’ailleurs pas plus dupe de sa bêtise, comprenant parfaitement bien s’être fait mené en bateau, avoir été manipulé et s’être fourvoyé dans une machination qui s'est terminée en tragédie.

Outre Diana Millay et Gary Clarke qui nous offrent de bonnes compositions, et alors que l’on note l’absence dans cet épisode de Trampas et du juge, la guest star Peter Breck s’avère lui aussi plutôt convaincant dans un rôle d’escroc un peu inquiétant ; nous sommes également ravis de retrouver pour la deuxième fois un très bon William Smith dans le rôle d’un des cow-boys de Shiloh. Le tout manque donc un peu de puissance dramatique, le suspense n’est pas vraiment de la partie - sauf lors de l’excellente scène nocturne qui mène au drame -, le final est un peu vite expédiée, mais même si Rope of Lies ne saurait se mêler aux plus grands épisodes de la série, il n’en demeure pas moins extrêmement agréable et non dénué d’humour malgré la noirceur de l’ensemble.

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  • 2.26 - The Secret of Brynmar Hall
  • Réalisation : Robert Totten
  • Scénario : Herman Groves
  • Guest Star : Jane Wyatt & Tom Skerritt
  • Première diffusion 01/04/1964 aux USA - 24/04/1980 en France
  • DVD : VOSTF et VF
  • Note : 4.5/10

Le pitch : Le Virginien confie à Randy le soin de conduire Besty au manoir de Brynmar Hall, là où deux ans plus tôt elle avait assisté à un drame, la mort de son amie Mildred dans l’incendie de cette fastueuse demeure. La mère de la jeune fille (Jane Wyatt) l’a conviée, ainsi que les autres invités de ce jour tragique, à venir fêter ce triste anniversaire car il semblerait qu’elle ait une chose importante à dire à tous les témoins de ce malheureux accident. Coincé par la tempête, Randy se voit dans l’obligation de rester sur place. Cette nuit-là, on assiste à des choses mystérieuses, à commencer par un lustre imposant qui tombe au plein milieu des convives...

Mon avis : De très nombreuses séries télévisées, qu’elles soient anciennes ou contemporaines, tentent de temps à autre de proposer un épisode qui sort de l’ordinaire par rapport au ton et au style habituels de l’ensemble. Pour ne parler que de celles que je connais, Grey’s Anatomy s’est une fois essayé à la comédie musicale, une autre au fantastique, alors que The West Wing nous soumettait un épisode comme s’il était filmé d’un point de vue documentaire journalistique. Malgré leur profonde originalité, force était de constater qu’ils ne constituaient pas de franches réussites. Et malheureusement il en va de même pour ce 26ème épisode de la saison 2 du Virginien, sorte de mélange entre Daphné du Maurier (Rebecca), Agatha Christie (Dix petits nègres) et les films d’épouvante de la Hammer. Au programme donc : un inquiétant manoir - qui ressemble à la maison hantée de Disneyland Paris -, des bruits bizarres et effrayants, des faits mystérieux ou (et) dangereux comme un lustre qui tombe sur les invités, un serpent vivant que l’on trouve dans un lit, une boite à musique qui se met à jouer toute seule, un corbeau noir, des portes qui claquent, une cave et une chambre mortuaire pleines de toiles d’araignées, un serviteur que l’on dirait tout droit sorti de La Famille Addams... le tout par une nuit venteuse et orageuse striée d’éclairs et assourdie par d’intempestifs coups de tonnerre, la tempête allant même faire place à un moment donné à une violente tornade ; joli suspense d’ailleurs par le simple fait du silence qui s'instaure d'un seul coup au moment où la maison doit se trouver dans l’œil du cyclone.

L’ambiance gothique étant posée, reste à faire la connaissance des personnages qui vont partager ce huis clos le jour anniversaire d’une tragédie qui s’était déroulée deux ans auparavant et où ils étaient déjà tous réunis en ces mêmes lieux. Ce jour-là, leur jeune amie et hôtesse avait brûlé en même temps que son père dans un incendie dont on a jamais su comment il s’était déclaré, dont on a jamais su s’il s’était agit d’un accident ou d’un geste meurtrier. En revanche, la mère de la défunte semble connaitre le fin mot de l’histoire car lors du repas qu’elle préside aujourd’hui, elle déclame à l’assemblée que le coupable de ce drame dont elle ne s’est jamais remise se trouve autour de la table. A partir de cet instant, le spectateur va devoir cogiter en même temps que les protagonistes, la culpabilité passant de l’un à l’autre personnage jusqu’à la résolution finale. Parmi les potentiels coupables, en tout premier lieu Betsy. En l’absence de tous les protagonistes principaux de la série - à l'exception aussi de Randy -, l’épisode donne ainsi l’occasion à Roberta Shore de tenir la tête d’affiche ; sans surprise, elle s’en sort avec les honneurs, parfaitement à l’aise dans le rôle de la screaming girl typique des films d’épouvante. Les trois autres jeunes gens sont interprétés par la ravissante Brooke Bundy, Mark Goddard et surtout par un excellent Tom Skerritt, déjà présent dans l’un des meilleurs épisodes de la série, Impasse, connu par la suite pour avoir fait partie de l’équipage du Nostromo dans le fabuleux Alien de Ridley Scott.

Les autres comédiens - qui tiennent les rôles des habitants du manoir - sont Jane Wyatt, Virginia Gregg et Victor French. Si Jane Wyatt (House by the River de Fritz lang) a tendance à en faire un peu trop dans le côté mélodramatique, il faut bien se rendre à l’évidence que l’interprétation d’ensemble est de très belle tenue. La direction artistique - costumes et décors - se tient très bien elle aussi alors que le réalisateur de télévision Robert Totten nous gratifie de nombreux et très jolis plans dont cette plongée sur la pièce principale, à l’endroit même où tombera le lustre qui aura failli tuer plusieurs personnes. Alors, pourquoi cette note peu glorieuse qui a été attribuée à cet épisode ? Parce que le scénario ne s’avère pas forcément très captivant, qu’il ne tient pas non plus très bien la route 70 minutes durant, et parce que l’ensemble fait vraiment trop hors-sujet au sein d’une série western, les spectateurs que nous sommes n’arrivant pas à retrouve nos marques, l’épisode étant trop éloigné des nobles préoccupations habituelles d’une série qui vole très haut et qui aborde très souvent des thématiques passionnantes, ce qui n'est pas le cas ici. Non pas qu’un pur divertissement de temps à autre ne soit pas le bienvenu - bien au contraire et d’ailleurs la série l’a prouvé à maintes reprises, parfois avec grande réussite notamment dans le domaine de la comédie - mais il se trouve tout simplement que  The Secret of Brynmar Hall n’a pas très bien vieilli.

Parmi les petits plaisirs à piocher néanmoins, quelques jolis accords de guitare par un Randy Benton toujours aussi attachant même si un peu en retrait, un très luxueux décor de maison victorienne, une belle photographie... Même si l’idée de départ n’était pas mauvaise, le résultat est trop éloigné du style et du ton habituels de la série, trop rempli des clichés du film d’épouvante ; un épisode un peu poussif qui plaira probablement par son atmosphère oppressante et lugubre aux amateurs de romans gothiques mais qui laissera également les fans de la série un peu sur leur faim même si l’ensemble s’avère loin d’être déshonorant.

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  • 2.27 - The Long Quest
  • Réalisation : Richard L. Bare
  • Scénario : Carey Wilber
  • Guest Star : Ruta Lee & Joseph Campanella
  • Première diffusion 08/04/1964 aux USA - Jamais diffusé en France
  • DVD : VOSTF
  • Note : 6.5/10

Le pitch : Mary Ann vit seule avec Crickett, un garçon de 12 ans, dans une ferme près de Shiloh. Un jour elle découvre que sa maison a été mise sens dessus dessous. Le coupable est un détective (Joseph Campanella), embauché par une célèbre comédienne (Ruta Lee) pour essayer de récupérer son enfant qu’elle a abandonné à la naissance mais qui pourrait désormais lui rapporter gros. La bible de famille subtilisée par le détective mentionne le fait que Mary Ann n’est pas la mère biologique et s’avère donc une preuve suffisante pour lui supprimer la garde de l’enfant. Le Virginien, qui a de l’affection pour la famille, va leur venir en aide...

Mon avis : Après un épisode en huis clos à l’atmosphère "fantastico-baroque" qui s'était avéré assez moyen, voici que notre série préférée prend d’autres chemins de traverse pour virer avec beaucoup plus de réussite vers le mélodrame familial et procédural. L’histoire est très simple et très fluide. Mary Ann vit en paix dans une ferme près de Shiloh en compagnie de son fils Crickett âgé de 12 ans ; celui-ci est un enfant bien élevé, poli et serviable qui vient souvent rendre visite à Randy et au Virginien, appréciant plus que tout être témoin et prendre part à la vie quotidienne du ranch. La femme et l’enfant vont voir leur vie basculer le jour où Judith, une célèbre comédienne, arrive à Medicine Bow accompagnée d’un détective pour demander la garde du jeune garçon qu'elle dit avoir abandonné à la naissance. En effet, elle prétend être sa mère biologique et le détective trouve rapidement la preuve de ce fait après être allé fouiller la maison de Mary Ann au sein de laquelle il a trouvé la bible familiale indiquant que le véritable enfant de cette dernière est mort depuis de longues années dans un incendie qui avait également causé la mort de son époux. Tout porte à croire que la nouvelle arrivante dit la vérité et qu'elle est dans son bon droit ; d’ailleurs son avocat a entièrement confiance même si les motivations de cette femme séduisante sont loin d'être très glorieuses. Le shérif vient alors remettre une injonction à la "mère adoptive" pour laisser le jeune garçon à la garde de sa véritable génitrice. Au moment où elle décide de s’enfuir avec Crickett de peur de le perdre, le chariot de Mary Ann se renverse et elle se retrouve blessée et immobilisée, soignée par Betsy.

Le Virginien, qui a toujours eu beaucoup d’affection pour elle et l’enfant, va décider de leur apporter son aide même s’il comprend parfaitement que la requérante a toute légitimité pour réclamer son "dû". Comme on l’aura aisément compris, la thématique principale va être basée sur une réflexion concernant ce qui fait une mère : « Being a mother is much more than bearing a child. » Sur le papier, tout ceci aurait facilement pu faire tomber cette fiction dans la plus grande mièvrerie si le ton d’ensemble avait été plus mélodramatique et si les comédiens s'étaient révélés peu convaincants, ce qui n’est évidemment pas le cas, même si le réalisateur Richard L. Bare ne lésine pas sur une utilisation intempestive d’une musique outrancièrement dramatique lors de quelques séquences dialoguées et qu’il pousse parfois ses comédiennes à en faire un tout petit peu trop. Le cinéaste n’accomplit pas vraiment de miracles au niveau de la mise en scène mais a eu en revanche la chance d'être très bien secondé - comme c’était déjà le cas pour les trois précédents épisodes qu’il signa, dont le superbe If You Have Tears avec Dana Wynters - et de formidablement bien diriger ses acteurs. Ici les deux personnages féminins antagonistes ont la chance d’être incarnés par deux comédiennes rivalisant de talent, Patricia Breslin et surtout Ruta Lee dans un rôle pourtant pas vraiment gratifiant de mère indigne. Cette dernière - l’une des Sept femmes de Barberousse de Stanley Donen, pourtant très pénible cette même année 1964 aux côtés d’Audie Murphy dans le rôle d’une femme dévoyée dans La Patrouille de la violence de R.G. Springsteen - est constamment remarquable, et ce jusqu’à cet épilogue absolument admirable qui ne démérite pas face aux meilleurs de la série, ni bâclé ni trop vite expédié comme c’est parfois le cas, et d’une dignité qui force le respect.

A leurs côtés, un James Drury qui confirme depuis quelques épisodes avoir acquis encore plus d’aisance et sachant se faire en quelques secondes tour à tour espiègle et violemment déterminé. L'humour pince-sans-rire et la profonde lucidité de son Virginien, fusionné au même mélange concernant un Randy bien moins naïf qu'il n'y parait, sont à l’origine de quelques situations savoureuses et de répliques très amusantes lors du premier quart d’heure, que ce soit en rapport à la "gossiperie" des habitants de Medicine Bow ou à celui de l’immaturité du jeune vacher quant aux femmes et à la boisson (« Danny, give him a sarsaparilla »). Les séquences que notre "héros" partage avec Ruta Lee sont savoureuses, notamment celle où il pense lui donner une grande leçon de morale un peu neuneu et où elle lui rétorque « You're a clever man, and I don't trust clever men. » L’autre acteur d’importance au sein de cet épisode est celui qui tient le rôle du détective, à savoir Joseph Campanella, qui avait déjà été tout à fait crédible en bandit mexicain dans le génial 13ème épisode de cette saison 2, le fameux et très sombre Siege de Don McDougall. Carey Wilber, pourtant scénariste de quelques-uns des épisodes les moins satisfaisants de la série (The Fortunes of J. Jimerson Jones ou Roar from the Mountain), se sort avec les honneurs de cette trame dramatique assez prévisible - hormis la fin dont je vous laisse la surprise -, en évitant au maximum les poncifs et en mettant dans la bouche des principaux protagonistes des lignes de dialogue de très grande qualité.

S’échappant à nouveau des traditionnelles intrigues westerniennes, ce drame de l’adoption manque d’intensité mais se révèle néanmoins vraiment réussi grâce surtout à une interprétation de haut niveau qui nous amène en point d’orgue à un face-à-face vraiment poignant et tendu entre les deux mères. Nous aurons également eu droit à une bagarre courte mais vigoureuse mettant en présence James Drury et Joseph Campanella, à une vision assez ironique de Medicine Bow par notre protagoniste principal (« Nice friendly little town. In fact, those two ladies are so friendly that by supper time there won't be a person in Medicine Bow that doesn't know about this little drive »). Sans atteindre - loin de là - des sommets, voici un épisode très plaisant et bénéficiant d’un des plus beaux épilogues qu’il nous ait pour l’instant été donné de voir.

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  • 2.28 - A Bride for Lars
  • Réalisation : Earl Bellamy
  • Scénario : True Boardman
  • Guest Star : Katherine Crawford
  • Première diffusion 15/04/1964 aux USA - Jamais diffusé en France
  • DVD : VOSTF
  • Note : 2.5/10

Le pitch : Lars, voisin du juge Garth et également gros rancher, fête son futur mariage avec une jeune Suédoise qu’il a rencontrée dans son pays d’origine et qu’il doit aller chercher à Laramie où est stationné le convoi qui la transporte. S’étant blessé aux bras après avoir voulu faire une démonstration de force, et par ce fait incapable de se déplacer dans l’immédiat, il demande de l’aide aux cowboys du ranch Shiloh. C’est à Trampas que revient l’honneur de faire ce voyage pour ramener cette charmante mais espiègle jeune femme (Katherine Crawford). Sur leur chemin, ils auront à faire face à des bandits et à des Indiens...

Mon avis : Ce cinquième épisode est signé par Earl Bellamy, qui s’avère un réalisateur on ne peut plus inégal au sein de cette série, tournant par ailleurs en cette même décennie des westerns très honorables pour le cinéma, titres que j'ai déjà évoqués par ailleurs. Pour ne s'en tenir qu'au seul Virginien, il y aura eu au cours de la première saison le délicieux The Big Deal avec Ricardo Montalban puis surtout The Judgment avec Clu Gulager qui peut toujours être considéré comme l'un des indéniables sommets de la série. Ce sera ensuite A Portrait of Marie Valonne qui aura probablement déçu ceux qui se souvenaient des deux précédents, un épisode "mélodramatico-romantico-policier" qui s’avérait bien en deçà mais dont la mise en scène restait très agréable. Si le ratage de Roar from the Mountain ne lui était aucunement imputable, reposant quasiment entièrement sur les épaules des deux auteurs, il n’en va pas de même pour l’épisode qui nous concerne ici et qui se révèle indigne de la série même si le principal "coupable" en est le scénariste True Boardman, qui par la même occasion nous inquiète un peu lorsque l’on sait qu’il travaillera à nouveau pour Le Virginien à pas moins de quinze reprises. Touchons du bois en "priant" pour qu'il se ressaisisse à temps !

En effet, cette fois nous sommes en présence d’une histoire totalement inintéressante, ce qui se sent d'emblée, ne nous plaçant pas dans des conditions très favorables à l'égard de cette fiction. En gros, et pour simplifier au maximum, Trampas est chargé d’aller chercher à Laramie la future épouse d’un rancher grand ami du juge Garth (ce dernier est d’ailleurs absent de la série depuis un bon moment, on se languit de voir revenir l'excellent Lee J. Cobb). Même si l'on avait voulu creuser un peu plus en profondeur, nous aurions eu du mal à en raconter davantage ou à en retirer quoi que ce soit puisque A Bride for Lars fait du surplace - au propre comme au figuré : voir à ce propos le paragraphe suivant - et n'aborde vraiment aucune thématique particulière. Au demeurant, il s'agit d’un épisode expressément humoristique, quasiment pas amusant une seule seconde mais au contraire plutôt extrêmement laborieux voire parfois même assez embarrassant (la vision ultra-caricaturale des Indiens, les gags ratés qui s'éternisent, la lourdeur de l'ensemble...) Et comme chacun le sait, rien de plus ennuyeux qu’une comédie pas drôle ! Mais s’il ne s’agissait que de cela... Car nous n’allons quand même pas tout mettre sur le dos du médiocre scénariste qui cependant, il est vrai, a frappé très fort pour sa première incursion dans la série, accumulant les incohérences et les situations pas du tout crédibles comme le fait que Trampas laisse à plusieurs reprises sa compagne de route seule alors que les dangers s’annoncent et s'amoncellent dans les parages et tout autour.

Scénariste non seulement à la ramasse mais qui par la même occasion a contaminé ses acolytes, rendant l’ensemble totalement bâclé, y compris une direction d’acteurs qui laisse franchement à désirer - pas plus John Qualen que Katherine Crawford n’étant spécialement bien mis en valeur - ainsi qu’une musique d’une lourdeur pachydermique avec ses effets "pour faire rire". Sans parler de la ridicule image figée représentant un ciel a priori magnifique que regarde avec extase notre Suédoise un peu nunuche, lorsque l’on remarque à ce point que le voyage de retour de Trampas de Laramie à Medicine Bow n’est constitué que de plans du même chemin filmé toujours au même endroit bien reconnaissable avec les mêmes reliefs et le même arbre en fond de plan, on se dit que le réalisateur ne s’est pas senti concerné par son travail. Lorsque l’on voit Trampas faire le pitre comme jamais encore sans à aucun moment nous convaincre dans ce registre - l’imitation des loups et des coyotes qui se prolonge au point d’en devenir gênante pour le si sympathique comédien - on se dit que personne n’était dupe de la bêtise de l’ensemble. Nous nous en étions d’ailleurs rendus compte dès le pré-générique de presque 10 minutes qui annonçait le ton et le manque de consistance d’un épisode qui allait non seulement ne jamais réussir à décoller mais qui de plus allait s’enliser encore plus dès le départ pour Laramie. Car au tout début, la réunion de Trampas, Steve et le Virginien faisait encore la part belle à une fantaisie de plaisant aloi.

Même les nombreux twists qui se succèdent en fin de parcours ne nous auront pas plus amusés que surpris ! Pour couronner le tout, les Indiens ne sont pas forcément dépeints avec une grande dignité - la Suédoise donne même un cours de cuisine aux squaws de pacotille -, le suspense et la tension qui auraient pu être de mise de temps à autre sont totalement éventés d’une part à cause du ton humoristique de l’ensemble, de l’autre à cause de l’incroyable incrédibilité des situations : par exemple la femme ouvre grand son sac rempli de liasses de billets devant tout un groupe d’inconnus. On se consolera en assistant à un bain de Katherine Crawford dans un petit plan d’eau ou à quelques mimiques assez drôles de Doug McClure qui sera aussi de la bagarre finale quasiment burlesque, "à la McLintock". Plus stupide que drôle, on oubliera très vite ce déplaisant moment pour passer à autre chose de plus consistant !

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  • 2.29 - Dark Destiny
  • Réalisation : Don McDougall
  • Scénario : Frank Chase
  • Guest Star : Robert J. Wilke
  • Première diffusion 29/04/1964 aux USA - Jamais diffusé en France
  • DVD : VOSTF
  • Note : 7/10

Le pitchSteve et Randy sont sur la trace de voleurs de chevaux. Ils réussissent à les appréhender sauf que durant cette arrestation Steve est dans l’obligation d’en tuer un qui n’est autre que le frère du chef de gang (Robert J. Wilke). Randy parvient à rattraper un fuyard qui s’avère être… une fuyarde, la propre fille du ‘patron’ des bandits. Le shérif propose au Virginien qu’elle soit hébergée à Shiloh le temps que le procès se déroule. Durant ce séjour 'forcé', elle va devoir surtout s’occuper de Randy qui vient de gravement se blesser alors qu’il tentait de dompter un cheval farouche ; l’épine dorsale ayant été touchée, le voici partiellement paralysé…

Mon avis : Après A Bride for Lars, le calamiteux précédent épisode 'comédie potache', à vrai dire plus gênant qu'amusant, les valeurs les plus sures de la franchise sont invitées à faire remonter la pente à la série, soit le réalisateur Don McDougall en collaboration avec le scénariste Frank Chase. On peut maintenant affirmer sans trop de risques de se tromper que, comme je l’avais déjà auparavant décelé, Don McDougall demeure l’un des meilleurs réalisateurs du Virginien, sa gestion de l'action, l'ingéniosité de ses placements de caméra et les effets qu'il obtient des cascadeurs s'avérant une fois encore d'une redoutable efficacité. Ici toutes ces qualités sont de nouveau au rendez-vous avec également quelques très belles idées de mise en scène ; il suffit pour s’en rendre compte de visionner la formidable séquence du bal au montage très 'cut', de revoir le très beau mouvement de caméra dévoilant avec pudeur la claustration de Randy lorsqu’il se retrouve esseulé dans une grange à peine éclairée, ou encore les rares scènes d’action à la fois d’une sécheresse qui confine à l’épure et d’une vigueur assez remarquable. Quant au scénariste Frank Chase, il n’en était pas non plus à son coup d’essai au sein de la série puisqu’il avait auparavant déjà signé dans la saison 1 le superbe et touchant If You have Tears avec Dana Wynters, ainsi que dans cette deuxième saison le très bon épisode avec Robert Redford, The Evil That Men Do, sans oublier le formidable Another’s Footsteps, l’une des plus belles réussites de la franchise jusqu’à présent.

Dark Destiny doit donc autant à ses qualités d’écriture que de réalisation, l’histoire s’avérant par ailleurs sans grandes surprises ni porteuse de thématiques réellement passionnantes ou novatrices (ce qui n'est pas forcément une critique négative). Elle est avant tout basée sur les émotions qui vont naitre à l’occasion des relations tout d’abord hostiles qui se tissent entre un Randy devenu paralysé suite à un accident de dressage et à la jeune femme qui a pour mission de l’aider malgré elle dans sa rééducation, la fille d’un voleur de chevaux qui, en attendant le procès de son père qui doit avoir lieu dans les jours qui suivent, est invitée à rester à Shiloh, profitant de l’absence de Betty pour occuper sa chambre. Tout d’abord tendues, leurs relations antagonistes vont évoluer vers plus de compréhension, de tolérance voire même de rapprochement sensuel, Randy n’étant finalement pas insensible au charme de la jeune fille qui est certes ravissante tout autant vêtue à la garçonne qu’en robe de soirée. L’épisode est également le premier des deux -outre évidemment celui qui l’a introduit dans la série- à prendre le jeune Randy Benton pour personnage principal, l’enrichissant et le faisant évoluer, détrompant ainsi ceux qui jusqu’à présent n’avaient vu en lui qu’un chanteur un peu fade ; ce qu’il n’est d’ailleurs pas non plus, son interprétation ici de ‘Ridin’ that New River Train’ s’avérant une nouvelle fois sacrément talentueuse, loin de toute mièvrerie.

Une belle prestation de Randy Boone qui parvient à nous inquiéter pour son personnage, les spectateurs se demandant constamment s’il va pouvoir remarcher un jour malgré sa grave lésion de l’épine dorsale, mais également dans le rôle de Billy Jo de la jeune actrice de télévision Brenda Scott, ainsi que de Robert J. Wilke et son visage grêlé. Un comédien qui vous est peut-être inconnu de nom mais dont vous connaissez obligatoirement le visage puisqu’il fut l’un des comédiens 'westerniens' les plus prolifiques dans les années 50 et 60, faisant entre autre partie de la distribution de classiques du genre -et non des moindres- tels Le Train sifflera trois fois de Fred zinnemann, Je suis un aventurier et L’Homme de l’Ouest de Anthony Mann ou encore Les Sept mercenaires de John Sturges. Il interprète ici le père de Billy Jo qui est également le chef du gang de voleurs de chevaux qui n’a désormais plus qu’une idée en tête s’il arrive à fuir la prison, se venger de Steve qui durant la première séquence a abattu son frère. Un épisode certes donc plutôt grave et dramatique mais qui n’en possède pas moins de très bons dialogues assez acérés, intelligents et pour certains plutôt amusants, voire les trois simultanément. Quelques exemples de la qualité des dialogues : alors que les cow-boys de Shiloh amènent au shérif les voleurs de chevaux, l’homme de loi leur dit “You know, one of these days, you boys from Shiloh are going to surprise me and come in here just for a friendly visit” ; sur quoi le Virginien lui rétorque “You can’t say we don’t do our bit for law enforcement.” Alors que Randy se prépare à dompter un fougueux cheval, il annonce à ses comparses “When I’m finished with him, some old lady can keep him in her parlor like a pet dog.”

L’épisode se lancera également sur de petites pistes de réflexions autour de la loyauté -Billy Jo doit-elle ou non aider à faire évader son père de prison ?- de ‘l’humanisation’ d’une personne au contact des autres, de la frustration de se retrouver cloué à un fauteuil et aux conséquences que cet état de fait amène sur le caractère du blessé et des ses proches… A défaut d’être inoubliable ni fortement captivant, un très joli épisode qui se termine sur une séquence très émouvante, qui nous aura permis de faire plus ample connaissance avec Randy et qui nous octroie de spectaculaires séquences de dressages de chevaux, sans oublier un beau débat initié par le Virginien sur les vertus du travail pour subvenir à ses besoins et sur les méfaits de l’argent trop facilement gagné. Certes un peu moralisateur et naïf mais pas forcément inutile pour autant.

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  • 2.30 - A Man Called Kane
  • Réalisation : William Witney
  • Scénario : Dean Riesner
  • Guest Star : Dick Foran
  • Première diffusion 06/05/1964 aux USA - Jamais diffusé en France
  • DVD : VOSTF
  • Note : 7/10

Le pitch : Lors d’une randonnée à cheval, Randy et Betsy découvrent une grotte dans laquelle git un squelette humain. Ils trouvent également 1000 dollars en pièces d’or. D’après un agent du gouvernement (Dick Foran), il semblerait que ce soit une minime partie d’un trésor caché par les Confédérés durant la Guerre de Sécession. L’histoire étant parue dans les journaux, nombreux sont les étrangers qui arrivent dans la région pour soi-disant trouver du travail. L’un d’entre eux, Johnny (Jeremy Slate) s’avère être le frère ainé de Randy. Si les deux sont ravis d’être à nouveau réunis, une tragédie va néanmoins découler de ces retrouvailles…

Mon avis : Après Dark Destiny, Randy Bonne et son personnage Randy Benton sont à nouveau à l’honneur de ce dernier épisode de la saison 2 ; en l’occurrence son capital de sympathie ne cesse d’augmenter -même sans avoir eu ici à fredonner une seule chanson (certains au contraire s'en féliciteront)- et il acquiert encore un peu plus d’envergure et de richesse psychologique. La malchance dans sa vie privée -qui l'a fait arriver aux environs de Medicine Bow et s'insérer à la série à l’épisode 20 de cette même saison- se poursuit ici, une nouvelle tragédie familiale allant endeuiller cette fin de saison qui va s’avérer assez grave même si dans le même temps elle va entériner le fait que désormais la famille de Randy sera définitivement celle du ranch Shiloh. Il aura fallu attendre les toutes dernières secondes pour pouvoir souffler après que le suspens constant de cette intrigue nous aura fait nous demander si Randy n’allait pas y laisser son honneur voire même sa peau. Mais je n’en dirais pas plus, certains allant même estimer que c’en est déjà de trop ! L’épisode débute d’une manière assez amusante par une balade à cheval de Randy et Betsy, la jeune fille se plaignant d'avoir soif et du fait que Randy n’ait pas pensé à emporter une gourde ; sur quoi le cow-boy poupin rétorque avec une ironie et un sarcasme que nous ne lui connaissions encore pas : “Well, I didn’t! I didn’t bring a sofa pillow,a box of chocolates or a mandolin either!” S’ensuit l’arrivée du duo dans un endroit assez paradisiaque encore jamais vu dans le courant de la série, une imposante cascade surplombant une paisible étendue d’eau.

C’est ici que Randy –qui a donc retrouvé l’usage de ses jambes- découvre une grotte dans laquelle il s’empresse de pénétrer, y trouvant non seulement un cadavre très ancien mais également un petit pécule en pièces d’or. William Witney et les équipes techniques utilisent remarquablement tous ces nouveaux lieux ; non seulement la grotte fait beaucoup moins ‘carton-pâte’ que toutes les précédentes déjà ‘visitées’ dans le courant de la série mais également les extérieurs sont superbement mis en valeur par le réalisateur qui nous octroie de très beaux mouvements d’appareils et qui filme l'endroit par d’impressionnantes plongées de caméra. Déjà auteur de plusieurs épisodes, le fameux cinéaste de serial fait montre ici de plus d’originalité et d’inventivité que précédemment et permet de faire terminer cette saison à un très bon niveau, rattrapant les quelques 2 ou 3 épisodes peu glorieux qui furent diffusés peu de temps avant. Le scénariste Dean Riesner accomplit lui aussi un très bon travail, arrivant à nous tenir en haleine durant toute la durée de l’épisode, nous faisant deviner dès le début que l’ensemble risque de mal tourner sans que nous ne puissions saisir par qui et comment. En effet il a la bonne idée de faire en sorte que nous ne sachions jamais vraiment sur quel pied danser concernant les deux Guest Star interprétés par Jeremy Slate –qui tournera plusieurs fois pour Henry Hathaway durant les 60’s- et Dick Foran, le cow-boy chantant d’un nombre incalculable de westerns de séries B durant les 30’s et 40’s…

Dick Foran tient ici le rôle d’un agent du gouvernement dont la mission est de chercher et ramener un trésor de guerre caché lors du conflit civil par les Confédérés sur le domaine de Shiloh, alors que Jeremy Slate joue le personnage qui se révèle être le demi-frère de Randy. Ce dernier a beau être plutôt bon comédien, il manque néanmoins d’un peu plus de charisme pour arriver à porter un tel personnage ; et du coup l’émotion ou l’angoisse que nous aurions du ressentir tour à tour sont un peu minimisées par cette prestation peut-être un peu trop timide. Nous regrettons aussi que la plus que charmante Merry Anders n’ait pas été plus longtemps présente à l’écran, nous gratifiant cependant d’une très bonne chanson ; une comédienne bien plus talentueuse que ce que l’on a souvent lu ici et là, la même année également tout à fait convaincante dans un western de cinéma aux côtés de Audie Murphy, le très sympathique Feu sans sommation (The Quick Gun) de Sidney Salkow. Outre Randy Boone, c’est James Drury qui tient le rôle le plus important de cet épisode, ayant probablement réussi en cette fin de saison à convaincre les plus réticents du début, désormais remarquablement à l’aise dans son rôle, plaisamment nonchalant à certains moments, endurci et déterminé à la séquence suivante, sachant passer d’un registre à l’autre avec crédibilité. Lorsque l’agent du gouvernement s’excuse de parler de la défaite du Sud devant un virginien, ce dernier lui répond intelligemment que tout ceci est du passé et que ça ne le touche aucunement de faire partie des ‘vaincus’. Si le juge et Trampas sont encore absents – ils se sont faits très discrets ces derniers temps- Steve est de nouveau heureusement là pour ses ‘collègues’ puisqu’il arrivera encore une fois à temps pour éviter un drame. Que les amateurs de Gary Clark en profitent car il ne va pas tarder à quitter la série !

Encore des dilemmes cornéliens pour Randy, des situations assez inextricables pour le Virginien pour arriver à maintenir le bon fonctionnement du ranch Shiloh, une énigme à résoudre quant à l’emplacement du butin, d’excellentes séquences au saloon, une entraineuse mignonne à croquer, un soupçon de serial, de la violence assez sèche, des dialogues de haute volée, des superbes extérieurs dont William Witney se sert avec talent, de bons comédiens, une écriture aux petits oignons… Pour clore cette deuxième saison, tout était réuni pour un quasi sans-faute et pour donner envie aux spectateurs de poursuivre plus avant. Mission réussie avec cette fiction un peu triste même si d’autres épisodes s’étaient auparavant avérés plus puissants.

A suivre...

Lien vers les épisodes de la saison 3

Lien vers le test du coffret DVD saison 2 vol.1

Lien vers le test du coffret DVD saison 2 vol.2

Lien vers le test du coffret DVD saison 2 vol.3

Par Erick Maurel - le 26 août 2017