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Critique de film
Le film

La Caravane de feu

(The War Wagon)

L'histoire

Taw Jackson (John Wayne) a injustement été condamné et a passé deux années en prison. Il est aujourd’hui libéré sur parole et revient dans sa région pour se venger de l’homme qui l’a non seulement fait emprisonner mais s’est également emparé de ses terres. En effet, ces dernières regorgent de poussière d’or et Frank Pierce (Bruce Cabot) en extrait des tonnes qu’il convoie jusqu’à la ville dans son War Wagon, sorte de diligence blindée non seulement escortée d’une trentaine d’hommes mais également munie d’un tout nouveau fusil mitrailleur. Taw Jackson a dans l’idée d’élaborer un plan pour dévaliser l’un de ses chargements d’un demi-million de dollars. Pour ce faire il embauche quatre hommes avec chacun leur spécialité : Wes (Keenan Wynn), un conducteur de chariots, le jeune alcoolique Billy (Robert Walker), expert en explosifs, Levi Walking Bear (Howard Keel), un Indien qui pourra négocier l’aide des tribus Kiowas, ainsi que Lomax (Kirk Douglas), un perceur de coffres. Une situation assez cocasse puisque Lomax, tueur à gages à ses heures perdues, a été également enrôlé par Pierce pour se débarrasser du trop encombrant Jackson. Mais l’offre de ce dernier sera beaucoup plus alléchante et voici nos cinq lascars qui se lancent dans la préparation de cette dangereuse opération...

Analyse et critique

Les très bons Gun the Man Down d’Andrew V. Mclaglen, Sur la piste des Comanches (Fort Dobbs) de Gordon Douglas, Six chevaux dans la plaine (Six Black Horses) de Harry Keller, mais aussi et surtout les fabuleux Sept hommes à abattre (Seven Men from Now), L’Homme de l’Arizona (The Tall T), La Chevauchée de la vengeance (Ride Lonesome), Comanche Station, tous signés par Budd Boetticher... Puis Burt Kennedy décide de se lancer dans la réalisation : le pantouflard A l’Ouest du Montana (Mail Order Bride), l’exécrable Le Retour des sept (Return of the Seven), l’étrange et - sur un postulat pourtant passionnant - malheureusement raté Frontière en flammes (Welcome to Hard Times)... Il n'est pas besoin d’une plus longue démonstration pour en tirer une conclusion simple mais triste : le jour où Burt Kennedy a décidé de troquer sa machine à écrire pour une caméra, il aurait mieux fait - selon l'expression - de se casser une jambe ; car ce ne sont pas les westernophiles qui y auront gagné au change ! Et ce n’est pas l’affligeant The War Wagon qui me fera pour l’instant changer d’avis même s'il se pourrait que certains de ses westerns parodiques ultérieurs vaillent finalement le coup d'oeil ; nous en reparlerons en temps et en heure.

Il s’agit d’une sorte de western de commandos, un sous-genre - non pas dans le sens péjoratif mais dans un système classificatoire - initié par le classique de John Sturges, Les Sept mercenaires (The Magnificent Seven), et dont le plus beau fleuron pourrait avoir été l’année précédente le très efficace Les Professionnels de Richard Brooks. Dans le western de Burt Kennedy, John Wayne, injustement jeté en prison durant deux ans et spolié de ses terres par le même homme qui l’avait fait condamner, revient se venger en décidant de s’emparer de l’or que ce vil gros propriétaire extraie de son propre domaine et transporte en ville à bord de ‘a "caravane de feu", une sorte de diligence blindé dotée d’un fusil mitrailleur dernier modèle. Pour mener à bien cette opération, il va embaucher quatre hommes d’horizons différents, chacun avec leurs spécialités ; parmi eux, un perceur de coffres mais également un tueur à gages cupide embauché par ailleurs pour le tuer par celui que Taw souhaite justement cambrioler... Si j'ai été assez clair, vous conviendrez qu'il s'agissait d'un postulat de confrontation assez cocasse. Et pourtant, à l'image de l'ensemble du film, ce postulat s'avère totalement bâclé, le scénariste - adaptant pourtant sa propre histoire - ne faisant aucun effort pour nous le rendre attractif. Car oui, il faut bien le dire, avoir eu pour la première fois entre les mains deux vedettes de cette envergure - qui ne se retrouveront plus jamais à l'écran - pour les faire bêtement cachetonner dans un western aussi affligeant, voilà qui est assez triste ! Certes, les quelques séquences sympathiques leurs sont entièrement dues sauf que si nos deux stars semblent s’être bien amusées sur le tournage, leur bonne humeur a beaucoup de mal à se communiquer au spectateur.


Dimitri Tiomkin semble faire des variations sur sa fabuleuse partition de Alamo sans jamais que son nouveau soundtrack n'arrive à la cheville du précédent, le chef opérateur William Clothier semble s’être en partie désintéressé de son travail devant le peu de cas fait par son réalisateur des décors naturels à leur disposition, les éclairages en studio ne sont pas ce qu'il a fait de mieux et les transparences se révèlent assez indignes de l’époque... mais les principaux fautifs de ce ratage demeurent cependant le scénariste et le metteur en scène. Si le premier ne rend absolument aucune péripétie captivante - certaines idées se révèlent même totalement idiotes, l'humour volant souvent au ras des pâquerettes - et n’exploite absolument pas ses seconds rôles - -pauvres Keenan Wynn et Howard Keel, qui devaient vraiment avoir besoin d’argent pour accepter des personnages aussi peu développés -, le travail du second est tellement peu soigné que le résultat donne un film non seulement totalement prévisible mais, bien plus grave, mollasson - voire amorphe - que ce soit pour les séquences (mal) dialoguées ou pour les moments plus mouvementés. Kennedy se montre incapable de donner le moindre rythme ni la moindre ampleur à ses scènes d’action. Un comble pour un film qui semble pourtant avoir bénéficié de moyens conséquents !

Il est ainsi consternant de voir qu’avec une telle affiche réunissant deux aussi grandes stars, le résultat soit une mécanique aussi vide, un film aussi affligeant, asthénique, stéréotypé, voire souvent idiot et pas très drôle. Il y avait un réel potentiel de western décontracté et nonchalant à exploiter ; peine perdue, tout relève de la plus grande paresse. Heureusement la même année, Kirk Douglas et John Wayne seront les vedettes de westerns autrement plus recommandables, La Route de l’Ouest (The Way West) d’Andrew V. McLaglen pour le premier, El Dorado de Howard Hawks pour le second. On se console comme on peut !

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La fiche IMDb du film

Par Erick Maurel - le 8 juillet 2017