Des Filles disparaissent - Les Criminels

La collection Make My Day ! s'est enrichie l'été dernier de deux opus se déroulant en Angleterre, réalisés par deux cinéastes majeurs.

Des filles disparaissent est présenté à partir du même matériel édité chez Cohen Media aux Etats-Unis en 2016. Il s'agit d'une restauration très correcte malheureusement limitée par l'une des sources utilisées. Les travaux se sont appuyés sur une copie nitrate 35mm complétée sur un bon tiers du film par un élément acétate 16mm, logiquement plus épais. La majeure partie du film (issu de l'élément 35mm) a assez belle allure, bien aidée par un transfert convaincant qui ressemblerait parfois presque à du 2K. La définition est alors plutôt satisfaisante, avec du détail (sans excès), un grain léger mais suffisamment organique et des contrastes très bien ajustés. Le bât blesse pour le segment issu de l'élément complémentaire (correspondant à peu près à 3 bobines, pour une durée de 36 minutes à partir de la 36e minute). S'installe alors une douceur assez marquée, avec une nette perte de précision, une gamme de gris moins nuancée et des blancs un peu plus exposés. De manière générale, si la copie a été largement nettoyée, les images ne sont pas tout à fait stables, surtout durant la demi-heure "complétée" où les tremblements de cadre se font moins discrets. On regrettera surtout de légères mais permanentes pulsations du niveau de noir pendant tout le film, un défaut que l'on aurait pu corriger.

Les Criminels reprend la belle (mais inégale) restauration éditée par StudioCanal en Angleterre en 2019, dans sa collection Vintage Classics, puis aux Etats-Unis chez Kino Lorber en 2020. Les travaux ont été réalisés en 4K à partir du négatif original complété par différentes sources de générations différentes, et donc comme pour Des filles disparaissent de qualité moindre. Le long segment issu du négatif (de 0h10 min à 1h07 min) est d'une excellente qualité : fine, précise, détaillée, au noir & blanc subtil, avec un grain fin, organique et non gommé. Malheureusement, le reste apparaît plus doux, souvent correct en définition mais parfois bien épais (notamment le finale) et largement lissé de toute patine argentique (en d'autres termes, il n'y a pas de grain). Heureusement, la solidité du noir & blanc permet de conserver un semblant de qualité durant les parties à faible HD. Dommage de ne pas avoir pu utiliser l'entièreté du négatif, visiblement incomplet, partiellement perdu voire trop dégradé. Mais l'ensemble a été largement stabilisé, totalement nettoyé (ce qui ne semble pas être le cas des éditions anglo-saxonnes), avec des contrastes bien gérés, sans pulsations. On relèvera quelques visages encore un peu trop clairs, un ajustement très ponctuel, peut-être respectueux de la photographie d'origine, en tout cas caractéristique de certains laboratoires de restauration britanniques.

DVD StudioCanal (2004) vs. Blu-ray StudioCanal (2023) : 1 2 3 4 5 6 7

Uniquement proposée en version originale sous-titrée, la partie sonore de Des filles disparaissent est plutôt honnête mais tout de même assez modeste. Il n'y a pas eu de véritable traitement pour corriger les usures du temps : on sentira donc un souffle léger mais permanent, quelques "plops", craquements ou frottements. L'ensemble est un peu couvert, moyennement détaillé et à la présence modérée.

La bande-son des Criminels reste correcte mais on a connu plus convaincant. La dynamique est modeste, le spectre reste un peu trop limité au médiums et en oublie les graves, avec un rendu très couvert qui certes masque le souffle disgracieux mais obstrue sans doute beaucoup les ambiances (désormais très retenues) et la présence des voix : elles ne manquent pas de clarté mais sont comme distantes. On relèvera quelques sifflantes légères et très ponctuelles.

Des filles disparaissent

Préface de Jean-Baptiste Thoret (7 min - HD)
Seul complément de ce Blu-ray, une brève présentation par le critique, historien du cinéma et directeur de la collection Make My Day ! qui rappelle la carrière de Douglas Sirk et resitue le film dans une période où il cherche encore "sa vitesse de croisière". Il analyse en quelques mots cette rareté, remake de Pièges de Robert Siodmak (disponible chez Gaumont), un "drôle de film" qui passe d'un genre à l'autre, du thriller façon Jack L'Eventreur à la comédie américaine enlevée, et se montre un efficace support pour la comédienne Lucille Ball, ultra popularisée quelques années plus tard par une série télévisée. Il souligne le choc des cultures de cette Américaine énergique qui fait face au flegme britannique, évoque la galerie de personnages et d'univers entre la satire, la farce macabre et le drame, et parle de l'imaginaire de l'acteur Boris Karloff qui enrichit l'une des plus belles séquences du film. 

Les criminels

Préface de Jean-Baptiste Thoret (10 min - HD)
Le directeur de la collection Make My Day ! se réjouit de faire découvrir Les Criminels, "un film formidable" tourné par Joseph Losey durant son exil européen, qui retrouve pour la seconde fois Stanley Baker, "version pauvre et prolétaire de Sean Connery". Jean-Baptiste Thoret évoque le savoir-faire du cinéaste malgré de petits moyens, son attention documentaire qui n'est pas sans rappeler celle du Trou, tourné quasiment au même moment, les références à L'Ultime razzia de Stanley Kubrick qui restent toujours en mémoire, ou le soin apporté par Losey pour se démarquer des films de prison en filmant les conséquences davantage que les actes eux-mêmes. Il revient sur quelques membres éminents de l'équipe comme le directeur de la photographie Robert Krasker ou le scénariste Jimmy Sangster qui oeuvra notamment pour la Hammer.

The Criminal revu par Olivier Père (49 min - HD)
Excellent entretien avec le directeur de l'unité cinéma d'Arte France, journaliste, critique et passeur indispensable du cinéma de patrimoine. Il revient sur la carrière "très particulière" de Joseph Losey dont le cinéma "très américain" sera influencé par l'esthétique européenne lorsqu'il fuira les Etats-Unis pour l'Angleterre et basculera peu à peu vers un cinéma épuré, baroque et plus intellectuel, rivalisant avec Luchino Visconti. Olivier Père livre ensuite une analyse passionnante des Criminels où il sent un Losey davantage intéressé par le monde de la prison que par les rouages de son scénario. Il remarque ainsi quelques "béances", ellipses ou omissions d'éléments propres au genre, des personnages féminins sacrifiés qui renforcent une lecture homosexuelle, ou au contraire note la construction dialectique d'un récit allégorique qui adopte ses thèmes favoris, dont l'espace clos et la contamination de l'enfermement. Losey aborde le monde de la prison sous ses aspects documentaires, observant des règles très organisées et des rapports de domination qui reflètent ceux de la société britannique. Le héros est un gangster à l'ancienne qui doit faire face au crime organisé, interprété par Stanley Baker, "un symbole de la virilité" utilisé ici dans une "violence passive" (comme l'était Alain Delon dans Mr. Klein). Olivier Père relève enfin la théâtralité de la scène du kiosque (les gangsters censés être un groupe se tournent tous le dos, enfermés dans des cadres), revient sur les références au cinéma de Stanley Kubrick, notamment Orange mécanique qui serait une version grotesque du cinéma de genre britannique, et dans lequel apparaît Patrick Magee, ou évoque le motif répété de la main comme force supérieure qui entrave le chemin du héros.

Des filles disparaissent

Taille du Disque : 27 207 372 192 bytes
Taille du Film : 25 718 083 584 bytes
Durée : 1:43:02.843
Total Bitrate: 33,28 Mbps
Bitrate Vidéo Moyen : 29,98 Mbps
Video: MPEG-4 AVC Video / 29981 kbps / 1080p / 23,976 fps / 16:9 / High Profile 4.1
Audio: English / DTS-HD Master Audio / 2.0 / 48 kHz / 1559 kbps / 24-bit (DTS Core: 2.0 / 48 kHz / 1509 kbps / 24-bit)
Subtitle: French / 41,247 kbps

Les criminels

Taille du Disque : 34 774 090 535 bytes
Taille du Film : 24 600 201 216 bytes
Durée : 1:37:45.000
Total Bitrate : 33,56 Mbps
Bitrate Vidéo Moyen : 29,99 Mbps
Video: MPEG-4 AVC Video / 29995 kbps / 1080p / 24 fps / 16:9 / High Profile 4.1
Audio: English / DTS-HD Master Audio / 2.0 / 48 kHz / 1844 kbps / 24-bit (DTS Core: 2.0 / 48 kHz / 1509 kbps / 24-bit)
Subtitle: French / 18,750 kbps