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Rétrospective Pierre Perrault

La Cinémathèque Française propose du 7 au 25 novembre une rétrospective consacrée au grand cinéaste québécois Pierre Perrault.

Méconnue en France, l’œuvre de Pierre Perrault est d’évidence l’une des plus précieuses et importantes du cinéma documentaire. Si Robert Flaherty, son père de cinéma, filme des gestes et inscrit ses personnages dans le monde par la lutte incessante qu’ils mènent contre une nature hostile, Perrault filme la parole car tout, pour lui, passe par elle. Les premiers hommes en nommant les objets, les animaux, les éléments naturels qui constituaient leur environnement leur donnaient corps, les incarnaient. Pour Perrault, le cinéma rejoint cette pratique presque magique : montrer quelque chose ne lui donne pas vie, il faut nommer cette chose, il faut qu’elle soit transfigurée par l’esprit humain, décrite par la parole. C’est à travers la parole que les êtres se dévoilent, c’est la captation du langage qui permet de voir à l’intérieur d’eux. Perrault tout au long de son œuvre va creuser ce mystère, par le cinéma bien sûr mais aussi au travers d’une production littéraire très riche, le cinéaste étant également poète et essayiste.

Si Perrault poursuit la voie de Flaherty, il n’est pas sans rapport avec la démarche de Jean Rouch, son contemporain. Tous deux mettent le principe d’écoute de l’autre au cœur de leur geste documentaire. Rouch ne filme pas l’Afrique avec son savoir, sa connaissance ethnologique. Il plie ses films à ce qui se passe devant sa caméra, apprend à laisser de côté sa vision occidentale pour reproduire avec la plus grande justesse les mondes africains. Si les gestes, les coutumes, la marche, les voyages fondent le cinéma de Rouch, Perrault ne peut approcher les populations qu’il filme de la même manière. Les habitants de l’Île-aux-coudres - qu'il filmera à plusieurs reprises - sont des hommes de la parole, c’est donc cette parole qui fonde son cinéma. Tout l’art de Perrault est de nous amener à écouter, à entendre ce qui est dit.

D’où l’importance pour lui du cinéma direct. Il impose le son synchrone, seule façon pour lui de restituer ce monde qu’il entend filmer. Un monde qui préexiste au film et qui pousse le cinéaste à s’immerger dans la matière même de son sujet, à appréhender, à réagir non seulement aux visages, aux hommes, aux gestes, aux lumières, aux paysages, mais aussi et surtout aux paroles, aux bruits de fond, à la musicalité du monde. Ce cinéma direct passe par un refus du commentaire, cette voix qui impose, qui sait, qui pense savoir. Perrault écoute les gens et leur redonne la parole. Il se nourrit des accents, des expressions, des patois, et ce déferlement d’une langue enfin libérée rend bien désuet, vieillot, pompeux et inutile le sacro-saint commentaire du narrateur. Ce cinéma direct est un mouvement mondial. En Afrique, Jean Rouch libère la parole des colonisés, en France Chris Marker et ses amis créent les Groupes Medvedkine qui permettent aux ouvriers de se la réapproprier. Des espaces d’expression enfin offerts à ceux qui jusqu’ici n’ont pu que se taire...

Le programme de la rétrospective

Conférence : Qui êtes-vous Pierre Perrault ?

Pour la suite du monde sur DVDClassik

Le Règne du jour sur DVDClassik

Les Voitures d'eau sur DVDClassik

Par Olivier Bitoun - le 8 novembre 2012

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