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Test blu-ray
Image de la jaquette

Soigne ta droite

BLU-RAY - Région B
Gaumont
Parution : 8 février 2023

Image

Comme pour le Blu-ray de Sauve qui peut (la vie), le master de Soigne ta droite a été produit en 2010 en HD pour la sortie du coffret DVD paru la même année. Les tenues sont assez semblables, de qualité forcément en deçà de travaux 4K récents mais proposant tout de même des conditions de visionnage très honorables. La définition est reste encore un peu douce, notamment à cause d'une légère faiblesse dans les contours, on peut sentir une douceur dans le niveau de détail, un peu retenu, malgré des gros convaincants. La gestion du grain est un peu trop effacée, dans un ensemble très propre et très stable. Les contrastes sont équilibrés, la colorimétrie est étalonnée de manière assez neutre, sans saturation forcée mais avec un certain naturel qui ne force pas sur les dérives magenta. Pour une même source, le transfert en Blu-ray est forcément plus convaincant, comme le montre le comparatif ci-dessous.

comparatif DVD Gaumont (2010) vs. Blu-ray Gaumont (2023) : 1 2 3 4 5 6 7 

Son

Gaumont propose une très bonne restitution du mixage stéréo d'origine. Comme pour l'image, Godard a travaillé le son de manière très complexe, jouant sur la spatialisation, les textures, les rendus. L'ensemble est très détaillé et bénéficie d'un spectre assez large et très équilibré, jusque dans les graves plutôt efficaces. On notera une belle présence des voix et des ambiances. La piste a été entièrement nettoyée des traces d'usure et du souffle, qui peut toutefois être présent, par exemple lors des sessions d'enregistrement des Rita Mitsouko, conformément à la prise de son d'origine.

Suppléments

Gaumont reprend les suppléments de son coffret DVD paru en 2010 : des entretiens très intéressants menés par Pierre-Henri Gibert avec des collaborateurs du film, ainsi que deux court métrages, désormais sous-titrés en anglais et pour les Sourds et malentendants.

Meeting WA (26 min - SD - 4/3 - VOSTF)
Ce n’est pas de « rat » mais de « merle » des villes dont parle JLG au sujet de WA, lui qui s’est désormais fait merle des champs. En 1986, à l’occasion de la sortie d’Hannah et ses sœurs, il se rend à New York prendre des nouvelles de ce cinéaste aimé, Woody Allen (qu’on pense à sa belle apparition dans King Lear), celui-ci lui ayant répondu à une lettre par un billet d’avion. Il interviewe son confrère, qui répond avec concentration et sérieux… vraisemblablement inconscient du triturage que l’autre ne manquera pas d’opérer au montage pour commenter les propos de son interlocuteur (dans le but, surtout, d’en accentuer l’américanité). Il est dangereux de se laisser filmer par Godard : après que l’un et l’autre en aient chacun à leur manière rhétorique rajouté sur les ravages de la télévision sur la cinéphilie, Jean-Luc suggère à Woody que le montage de son dernier film, quand il présente plusieurs bâtiments new-yorkais, est très inspiré du rythme télévisuel. Woody répond ne pas savoir si cette influence est réelle ou non (question moins décisive s’il n’avait pas érigé juste avant la petite lucarne en assassin du cinéma, on croirait les débats actuels sur l’effet des plateformes). En dépit de la perversité du geste, l’admiration de Godard est tangible, sincère, tout comme l’affection d’Allen à son égard est visible, dans sa manière de s’amuser de certaines remarques, de sourire chaleureusement à certaines questions et d’en prendre d’autres avec la plus pleine considération. Les deux sont au fond artistiquement si éloignés qu’ils peuvent se reconnaître et s’aimer sans entraves. Parce que passé l’échange, retour de l’autre côté de l’Atlantique : c’est du merle des villes que celui des champs attend des nouvelles de NYC.


Lettre à Freddy Buache (11 min - SD - 4/3)

« Les Suédoises sont en général aussi moches que les Parisiennes, comme à Londres. Non, les seules villes où toutes les filles que l'on croise dans la rue sont assez jolies, pas sublimes d'accord, mais comme toi, charmantes, des filles à qui l'on peut mettre, je ne sais pas moi, quinze sur vingt parce qu'elles ont toutes quelque chose, ce n'est ni Rome, ni Paris ni Rio de Janeiro, c'est Lausanne et Genève. »  À Bout de Souffle
Fidèle à sa manière de détourner des commandes et de mordre la main qui le nourrit, Godard utilise en 1981 un mandat fait par la Ville de Lausanne pour les 500 ans de celle-ci pour s’adresser à un ami du coin (alors maître des lieux de la Cinémathèque suisse) et moquer ce projet même. Pourtant, il s’en acquitte : le portrait de Lausanne est bel et bien fait, en peintre qui la considère comme une ville de bleu et de vert, bleu du lac en bas, vert des arbres en haut. Lausanne, c’est la rencontre de deux villes (une lacustre et une montagnarde) en une seule, avec ses passants qui montent et qui descendent entre. D’après un mot de Lubitsch apparemment, qui sait filmer l’eau et les pierres, les lacs et les montagnes, saura filmer les hommes – dont acte, dans ce film court qui lui est dédié, ainsi qu’à Flaherty et qui convoque « Yves » (Yersin, selon toute vraisemblance), autre cinéaste du canton, plus campagnard que citadin, lui (et qui devait au départ co-réaliser cette commande). L’éloge n’a rien d’hypocrite (si son auteur n’aime probablement pas beaucoup la « Ville de Lausanne » en tant qu’entité politique, il a de la tendresse pour Lausanne elle-même et ses habitants). Il se fait sur le Boléro de Ravel, comme Gershwin était utilisé dans Manhattan pour célébrer la Grande Pomme. Ici, Godard répond d'avance par sa manière de cadrer en travellings (de ne pas sur-pratiquer le cut) à la célérité urbanistique qu’il regrettera dans Hannah et ses sœurs. Y a pas le feu au lac. Le choix d’intégrer ce film court sur le même disque que son échange avec Allen est de ce point de vue bienvenu. De tous, c’est pour des raisons peut-être un peu idiotes en partie (je l’avais découvert juste avant de m’installer dans cette ville et je le revois juste avant d’en partir) l’un de ceux que je considère parmi les plus enthousiasmants.


JLG/ADB (10 min - SD)
Antoine de Baecque, journaliste, spécialiste de la Nouvelle Vague et biographe d'une partie de ses représentants, revient sur Soigne ta droite à travers lequel Godard casse son cinéma et son personnage médiatique. Motivé par la rencontre avec Jacques Villeret, Godard décide de former avec lui un "duo comique" qui commenterait de manière critique la société (et la politique) française de l'époque. De Baecque évoque les évolutions qui enrichiront et finalement morcelleront le film au fur et à mesure des quatre années de production : l'influence de la chef opératrice Caroline Champetier, la collaboration de nombreux acteurs ou l'intégration des Rita Mitsouko dont il filme les sessions de studio, comme il l'avait fait avec les Rolling Stones. Il parle enfin du "formidable acteur comique" Godard, dans un personnage burlesque et désaccordé, dans la lignée de celui qu'il avait créé pour Prénom Carmen.

JLG/JCC (29 min - SD)
Avec la séduisante simplicité qu'on lui connaît, le regretté Jean-Claude Carrière raconte sa collaboration inhabituelle mais stimulante avec le "météore" Jean-Luc Godard, "un des points de contact les plus obscurs et lumineux" qu’il a croisé. Il évoque le retour du cinéaste "à une forme d’histoire" par un processus de création qui élimine le passage à l’écrit, Godard cherchant d’abord à atteindre une intuition, filmant leurs discussions ou lui projetant des brouillons visuels (montages d’images et de peintures) qui pourront inspirer des scènes. Jean-Claude Carrière raconte comment Godard fait tout pour "prévoir l’imprévisible" sur le tournage à partir d’une structure de scénario, quelques dialogues et des "citations indispensables" qu’il utilise comme "des appuis". Il attend le moment propice pour tourner, quitte à mobiliser une équipe pendant des jours sans rien produire. De la même façon, il a besoin d’un long temps de réflexion avant de se lancer dans le montage, pouvant fixer les boîtes de bobines pendant plusieurs heures. Jean-Claude Carrière évoque le cinéma de Jean-Luc Godard, modèles de cadre et de bande sonore, dont le processus d’écriture est devenu le sujet de ses films. Il rappelle la fraîcheur et la modernité d’A bout de souffle, dont les audaces formelles sont aujourd’hui assimilées, et l'admiration du réalisateur pour les trouvailles narratives d'Abbas Kiarostami.

JLG/CC (26 min - SD)
La chef opératrice Caroline Champetier a travaillé plusieurs années ("relativement heureuses") pour Jean-Luc Godard, homme "un peu autiste" mais réalisateur qui savait provoquer un "désir de cinéma". Elle évoque le  cinéaste "de la coupe" et "du geste cinématographique", nostalgique du "choc du cinéma muet de 1926 à 1929" qui représentait "l’invention d’un langage", assimilée par Godard dans une recherche pour s’éloigner du système narratif traditionnel, trop "inféodé à la littérature". Elle raconte ses années de travail, engagée à plein temps, avec une petite équipe autonome et sur de multiples projets simultanés. Elle se souvient de Godard sur un plateau, le "rapport extrêmement physique" à ce qu’il filmait, sa façon "purement instinctive" de trouver les cadrages qui étaient comme des "trajets vers la lumière", avec une "nécessité de la beauté". Elle revient sur Soigne ta droite, "un film philosophique absolu" à la vision qui semble aujourd’hui prophétique, "une suite de partitions" et un travail "segmenté" que Godard a recomposé au montage. Elle se souvient du tournage dans le studio des Rita Mitsouko, "un capharnaüm extraordinaire", l’amour de Godard pour le burlesque et son identification au Chaplin entrepreneur, et la dégradation de leurs rapports pendant le tournage de Hélas pour moi ("il avait moins de plaisir à tourner"). Un entretien (de Pierre-Henri Gibert) absolument passionnant.

JLG/PJ (16 min - SD)
Le compositeur Pierre Jodlowski ne cache pas son admiration pour l'art de Jean-Luc Godard qui remet le cinéma en question et le spectateur "en activité", totalement en phase avec ce travail sur notre perception des choses, notamment à travers le son qu’il aborde "dans toute sa complexité". Fasciné par la voix du cinéaste, "un objet de poésie sonore" qui appartient "à la sonothèque idéale", Jodlowski évoque l’"oeuvre multimédia" très élaborée d’un artiste "homme de la mémoire" qui s'inspire dans toutes les époques...

Bande-annonce (3min 17s - HD)

En savoir plus

Taille du Disque : 43 072 320 637 bytes
Taille du Film : 23 042 193 408 bytes
Durée : 1:21:29.291
Total Bitrate: 37,70 Mbps
Bitrate Vidéo Moyen : 34,97 Mbps
Video: MPEG-4 AVC Video / 34970 kbps / 1080p / 24 fps / 16:9 / High Profile 4.1
Audio: French / DTS-HD Master Audio / 2.0 / 48 kHz / 885 kbps / 24-bit (DTS Core: 2.0 / 48 kHz / 768 kbps / 24-bit)
Subtitle: French / 30,830 kbps
Subtitle: English / 22,192 kbps

Par Stéphane Beauchet - le 22 juin 2023