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Fritz Lang : La période américaine

Publié : 3 avr. 07, 22:28
par les.photos.dalix
Je lance ce sujet pour essayer de trouver, avec votre aide, les grandes constantes de l'oeuvre américaine de Fritz Lang.
Petite présentation de l'oeuvre. L'oeuvre américaine de Fritz Lang c'est 22 films en 20 ans, ce sont plusieurs genres abordés avec plus ou moins de bonheur: le western, la critique social, le film noir, le film de guerre, le film d'aventure en costume, le film de propagande anti nazie. 22 films et une propension à ne jamais rester dans le même studio plus de deux films de suite (chose pas si courante alors).
Grand préjugé sur l'oeuvre américaine: ces films ont été fait à hollywood donc il a eut moins de liberté donc les films sont moins bons. D'ailleurs ne faut il pas le reconnaître? On parle aujourd'hui bien plus de metropolis et de m le maudit que de fury ou de rancho notorious
Il est pourtant étonnant de remarquer la cohérence que revêt la période américaine de Fritz Lang, cohérence qui semble encore plus forte que la période allemande.
Fritz Lang le dit dans "Le mépris", le grand thème de ses films c'est la lutte contre le destin, ce qui compte le plus c'est la lutte, il parle même de "révolution". Ce sont tous les mécanismes menant au crime qui sont démontés sous le fameux angle de l'objectivité. Ce sont les conséquences du crime, cette culpabilité toujours si présente.
Mais ce sont aussi des constantes filmiques, ce que l'on appelle la mise en scène de la vision ,des points de vue. Fritz Lang accuse les médias, nous pointe du doigt dans notre façon de voir. C'est aussi la persistance d'une esthètique de la lumière dont "le secret derrière la porte" est le plus représentatif. C'est l'évolution vers un réalisme de plus en plus fort, avec un sens du détail qui ne cessera d'avoir de l'importance, des mouvements de camera qui ne se justifie que dans la logique de l'action.
Comment considérez vous l'oeuvre américaine de Fritz Lang, quelle importance lui donnez vous? Quelles forces et faiblesses animent cette oeuvre selon vous?
Le rapprochement fait avec Hitchcock vous semble t-il pertinent?


EDIT DE LA MODERATION:

N'hésitez pas à consulter les topics consacrés aux films américains du réalisateur

Le retour de Frank James (1940) et sa Chronique Classik
Les bourreaux meurent aussi (1943) et sa Chronique Classik
La femme au portrait (1944) et sa Chronique Classik
Espion sur la Tamise (1944) et sa Chronique Classik
La rue rouge (1946) et sa Chronique Classik
Le secret derrière la porte (1948)
House by the river (1950) et sa Chronique Classik
L'ange des maudits (1952)
Le démon s'éveille la nuit (1952)
La femme au gardenia (1953)
Les contrebandiers de Moonfleet (1955) et sa Chronique Classik

la Chronique Classik de Règlements de compte (1953)

Re: La période américaine de Fritz Lang

Publié : 3 avr. 07, 22:42
par AtCloseRange
les.photos.dalix a écrit :Je lance ce sujet pour essayer de trouver, avec votre aide, les grandes constantes de l'oeuvre américaine de Fritz Lang.
Petite présentation de l'oeuvre. L'oeuvre américaine de Fritz Lang c'est 22 films en 20 ans, ce sont plusieurs genres abordés avec plus ou moins de bonheur: le western, la critique social, le film noir, le film de guerre, le film d'aventure en costume, le film de propagande anti nazie. 22 films et une propension à ne jamais rester dans le même studio plus de deux films de suite (chose pas si courante alors).
Grand préjugé sur l'oeuvre américaine: ces films ont été fait à hollywood donc il a eut moins de liberté donc les films sont moins bons. D'ailleurs ne faut il pas le reconnaître? On parle aujourd'hui bien plus de metropolis et de m le maudit que de fury ou de rancho notorious
Il est pourtant étonnant de remarquer la cohérence que revêt la période américaine de Fritz Lang, cohérence qui semble encore plus forte que la période allemande.
Fritz Lang le dit dans "Le mépris", le grand thème de ses films c'est la lutte contre le destin, ce qui compte le plus c'est la lutte, il parle même de "révolution". Ce sont tous les mécanismes menant au crime qui sont démontés sous le fameux angle de l'objectivité. Ce sont les conséquences du crime, cette culpabilité toujours si présente.
Mais ce sont aussi des constantes filmiques, ce que l'on appelle la mise en scène de la vision ,des points de vue. Fritz Lang accuse les médias, nous pointe du doigt dans notre façon de voir. C'est aussi la persistance d'une esthètique de la lumière dont "le secret derrière la porte" est le plus représentatif. C'est l'évolution vers un réalisme de plus en plus fort, avec un sens du détail qui ne cessera d'avoir de l'importance, des mouvements de camera qui ne se justifie que dans la logique de l'action.
Comment considérez vous l'oeuvre américaine de Fritz Lang, quelle importance lui donnez vous? Quelles forces et faiblesses animent cette oeuvre selon vous?
Le rapprochement fait avec Hitchcock vous semble t-il pertinent?
Voilà bien une affirmation qui me semble hative.
En France tout du moins, la période américaine est vénérée par un grand nombre de cinéphiles que ce soit pour Fury, Man Hunt, The Big Heat, Moonfleet (un des films les plus aimés des critiques) et j'en passe...

Publié : 3 avr. 07, 22:55
par les.photos.dalix
Précisons cela comme un préjugé au passé, bien sûr la période américaine a été redécouverte par la nouvelle vague...
Cela ne m'avance pas trop.

Publié : 4 avr. 07, 00:35
par angel with dirty face
les.photos.dalix a écrit :Précisons cela comme un préjugé au passé, bien sûr la période américaine a été redécouverte par la nouvelle vague...
Cela ne m'avance pas trop.
Je ne sais pas trop si on a attendu La Nouvelle Vague pour découvrir Fritz Lang. Perso, quand j'ai vu mes premiers Fritz Lang, je ne savais rien de La Nouvelle Vague...
Sinon l'équation Hollywood = Moins de liberté = Films moins bons... Sans vouloir être méchant, ça fait un peu cliché. Et même si je considère que la fin d'un film comme Beyond A Reasonable Doubt (1956) est complètement ratée, il fallait oser faire un western aussi original que Rancho Notorious (1952) et Lang l'a fait en Amérique.
AtCloseRange a écrit :En France tout du moins, la période américaine est vénérée par un grand nombre de cinéphiles que ce soit pour Fury, Man Hunt, The Big Heat, Moonfleet (un des films les plus aimés des critiques) et j'en passe...
Tu as tout dit. Je ne connais pas aujourd'hui un cinéphile qui se soit arrêté à M Le Maudit ou à Metropolis...

Publié : 4 avr. 07, 01:08
par les.photos.dalix
J'ai dit
"préjugé", préjugé qui ont historiquement été ceux de la critique française des années 40 et 50 envers les films de fritz lang. Aujourd'hui il me semble tout de même que pour ceux qui s'intéréssent de loin au cinéma les titres de "m le maudit" et "metropolis" leur parviendront plus vite aux oreilles que ceux de "fury" "les contrebandiers de moonfleet", etc...
bien sûr les cinéphiles savent voir clairement les choses, et tout le but de mon sujet est de mettre en valeur la période américaine. Et de l'interroger...

Publié : 4 avr. 07, 19:28
par Randolph Carter
AtCloseRange a écrit :En France tout du moins, la période américaine est vénérée par un grand nombre de cinéphiles que ce soit pour Fury, Man Hunt, The Big Heat, Moonfleet (un des films les plus aimés des critiques) et j'en passe...
Certes,et j'ajouterai que la période post-américaine de Lang n'est pas mal non plus:
"Le tigre du bengale" et "le tombeau hindou" sont deux fims d'aventures somptueux ,films sur lesquels la critique française de l'époque a deversé des torrents de boue!Comme quoi,il y avait déjà des Skorecki à l'époque. :uhuh:

Publié : 4 avr. 07, 20:20
par MJ
Ma période préfére de cet auteur.
Moonfleet, The Secret Behing the Door, Rancho Notorious... on touche au pure cinema d'Alfred Hitchcock.
Ces films ont une puissance formelle et sémantique absolument incroyables, qui atteindront leur apogée avec le dyptique Indien.
Ce sont deux univers très différents mais en pur terme de gestion de l'espace, le Lang américain me rappelle beaucoup un certain Howard Hawks!

Publié : 4 avr. 07, 21:15
par les.photos.dalix
Tu peux préciser ton rapprochement avec Hawks?

Publié : 5 avr. 07, 12:55
par MJ
les.photos.dalix a écrit :Tu peux préciser ton rapprochement avec Hawks?
Thématiquement et même formellement ce sont deux univers très différents, hein! Mais je ne peux m'empêcher de trouver que dans l'usage des décors, le rapprochement se tient. Il me semble que Moonfleet et Rio Bravo appréhendent de manières assez proches les espaces où se déplacent les personnages, par exemple: Lieux clos, contigus, petits par rapport aux personnages. On sait d'ailleurs que Hawks les avait volontairement fait rapetisser pour son film et même si il n'use presque d'aucuns travelling, on retrouve dans Der Tiger von Eschnappur cet aspect presque étouffant du décor.
Après la comparaison s'arrête là et je doute même qu'ils se soient influencés réciproquement, mais il n'est peut-être pas anodin qu'ils aient été deux étendards des hitcock-hawksiens de la Nouvelle Vague. Et je dois avouer que c'est l'un des traitements de la mise en scène avec lequel je me sens le plus en phase.

Publié : 6 avr. 07, 12:53
par Verdi
Il existe un excellent livre qui s'intitule Fritz Lang en Amérique-Entretien avec Peter Bogdanovich (Ed. Cahiers du Cinéma).

Publié : 6 avr. 07, 13:24
par angel with dirty face
Verdi a écrit :Il existe un excellent livre qui s'intitule Fritz Lang en Amérique-Entretien avec Peter Bogdanovich (Ed. Cahiers du Cinéma).
Exact! Il est très bien ce bouquin...

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Y a aussi : Le Double Scénario Chez Fritz Lang de Gérard Leblanc & Brigitte Devismes, édité par Armand Colin. C'est un livre indispensable pour les admirateurs de The Big Heat (Règlement De Compte, 1953)...

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Publié : 6 avr. 07, 16:18
par Cathy
Pour avoir vu il y a peu le secret derrière la porte, c'est vrai qu'on s'approche un peu de Hitchcock dans la démarche narrative, et surtout le thème, mais l'invraisemblable vérité me semble plus être dans la tradition des purs films noirs que des Hitchcocks. En tous les cas, c'est la periode américaine que je préfère chez Fritz Lang, même si je dois dire que je suis fan du Tigre du Bengale et du Tombeau Hindou !

Publié : 6 avr. 07, 18:36
par les.photos.dalix
Justement à propos de l'invraisemblable vérité... C'est un film qui ne cesse de me surprendre, tout semble aller dans le sens de l'intrigue. Quand je dis "tout", je parle de la réalisation même: jamais la mise en scène de Fritz Lang a atteint un tel point d'épure: les jeux sur la lumière sont très peu prononcés (on est très loin du secret derrière la porte), les mouvements de camera sont nombreux mais toujours discrets, et jamais amples. Ce n'est pas nouveau: Fritz Lang disait que chaque mouvement de camera devait être "rationnel" par rapport à l'intrigue, aller dans le sens de l'intrigue, ne jamais être ostentatoire. On trouve cela particulièrement à partir de "réglements de compte". Mais réglements de compte, à la différence de l'invraisemblable vérité, montre la violence: ne serait que par le visage de gloria grahame découpé en deux après avoir été ébouillanté. La violence dans l'invraisemblable vérité est toujours psychologique, elle est comprise dans l'intrigue, dans son coeur même.
J'ai beaucoup de mal à analyser la mise en scène de l'invraisemblable vérité, elle est comme fuyante. Comme un objet qui vous glisse entre les mains dès que vous tentez de le saisir.
Luc Moullet dans son livre sur Fritz Lang dit qu'en dehors du scénario il n'y a "rien", le vide. Affirmation totalement hative, mais comment caractériser précisément la mise en scène de l'invraisemblable vérité? comment la caractériseriez vous?
Pour revenir à ce que tu disais MJ par rapport aux décors (remarque intéréssante), est ce que tu retrouves, dans la période américaine de Fritz Lang, d'autres exemples de films avec un usage de décors contigus? Je ne vois pas d'autres exemples personnellement. Peut être house by the river?

Publié : 6 avr. 07, 21:05
par MJ
les.photos.dalix a écrit :Pour revenir à ce que tu disais MJ par rapport aux décors (remarque intéréssante), est ce que tu retrouves, dans la période américaine de Fritz Lang, d'autres exemples de films avec un usage de décors contigus? Je ne vois pas d'autres exemples personnellement. Peut être house by the river?
Rancho Notorious, ou le western claustrophobique. Et tous ses films noirs (du moins pour ce que j'ai vu), jouent à un niveau ou à un autre sur l'altérité du décor. On a toujours l'impression qu'ils sont trop petits pour réellement contenir les personnages.

Publié : 6 avr. 07, 22:39
par les.photos.dalix
Tous ses films noirs? Je te suis pour "la rue rouge", "la femme au portrait".
Pour "réglements de compte" je n'ai pas le souvenir de décors petits par rapport aux personnages, de même pour "while the city sleep" , "le secret derrière la porte" et "l'invraisemblable vérité" ...
Comment tu comprends cet usage des décors,pour "rancho notorious" tu parles de "western claustrophobique", il est certain que le film est loin d'utiliser les grands espaces, on pourrait parler de western "psychologique"... est ce en cela que tu disais "claustrophobique"? les décors permettant une plus grande concentration sur les personnages?