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Critique de film
Le film
Affiche du film

Les Misérables

L'histoire

1815, Jean Valjean qui vient de purger 19 ans de prison (condamné aux fers 5 ans pour vol puis 14 après de multiples tentatives d'évasion) est libéré du bagne de Toulon. Son garde chiourme, Javert, lui remet un papier qu'il doit faire signer par les autorités de toutes les localités qu'il traverse jusqu'à Pontarlier, sa destination finale. A Digne, en raison de ce mandat encombrant et dissuasif, il ne trouve refuge nulle part sauf dans la demeure de Monseigneur Myriel qui, malgré l'air menaçant et peu engageant de Valjean, lui offre avec un désintéressement désarmant le couvert et l'hospitalité. La nuit, Valjean s'enfuit avec la vaisselle en argent. Alors qu'il est arrêté puis ramené par les gendarmes, l'évêque leur indique de le libérer et lui donne en plus les chandeliers en argent. A nouveau sur la route, Valjean croise la route d'un petit garçon à qui il vole une pièce. Subitement pris de remords, de peur sans doute de retourner au bagne, il essaie de rendre sa pièce au petit Savoyard qui a disparu. Au même moment à Paris, Fantine fait la connaissance dans un bal d'un étudiant avec qui elle va avoir une fille, la petite Cosette. 8 ans ont passé, Jean Valjean est devenu le respectable M. Madeleine, inventeur d'un procédé révolutionnaire en verroterie qui lui a permis d'être un homme respecté à Montreuil-sur-Mer à tel point qu'on l'a élu maire. On retrouve Fantine qui travaille dans l'atelier de M. Madeleine, elle a quitté Paris après avoir été délaissée par le père de son enfant. Les Thénardier, de vils aubergistes de Montfermeil, près de Paris, à qui elle a confié la garde de Cosette, entendent obtenir des intérêts de la situation, lui demandant de plus en plus d'argent, Fantine ne peut plus les honorer. En outre, elle est renvoyée de l'atelier, ne peut plus payer son loyer, se prostitue, vend ses dents, ses cheveux. Pendant ce temps, Javert, devenu inspecteur à Montreuil, croit reconnaître le forçat Jean Valjean quand ce dernier sauve la vie du père Fauchelevent écrasé sous sa charrette... C'est le début d'une interminable course poursuite entre les deux hommes, ainsi que la poursuite pour Jean Valjean / M. Madeleine, puis bientôt Fauchelevent, d'une vie entièrement consacrée à la rédemption...

Analyse et critique

Huit ans avant d'entreprendre la réalisation des Misérables, Raymond Bernard avait déjà eu comme projet, après le tournage du fastueux Miracle des loups (1924), une adaptation de Victor Hugo, L'homme qui rit. Hélas la S.G.F. (Société Générale de Films) qui doit financer ce projet, décide, au même moment, de sauver du naufrage le Napoléon d'Abel Gance dont le tournage a été interrompu suite à la faillite de la Westi-Consortium. Il semble que Gance aurait refusé qu'on prive Raymond Bernard du budget pour réaliser son film mais ce dernier, finalement, va plaider pour l'achèvement de Napoléon qu'il juge prioritaire. Cette anecdote, rapportée par Kevin Brownlow (dans La Parade est passée, Institut Lumière/Actes Sud, 2011) et retranscrite par Eric Bonnefille (dans Raymond Bernard, fresques et miniatures, L'Harmattan, 2011) dit bien toute l'estime qui existait entre ces deux monstres sacrés du cinéma français muet des années 20, les seuls en France dont les oeuvres, au souffle épique, étaient en mesure de rivaliser avec les réalisations de D.W.Griffith ou S.M.Eisenstein pour ne citer que ces deux-là. (Intolérance, The Birth of a Nation, Le Cuirassé Potemkine). Après une expérience d'acteur vite abandonnée - dans Jeanne Doré (1915), l'adaptation d'une pièce de son père, le célèbre dramaturge Tristan Bernard) - Raymond Bernard commence très tôt sa carrière dans le cinéma en tant qu'assistant réalisateur de Jacques Feyder. En effet depuis 1916, celui-ci met en scène pour Gaumont des adaptations de nouvelles ou de pièces de Tristan Bernard.

Appelé sur le front lors de la Première Guerre mondiale, Feyder est remplacé par Raymond Bernard à la fin de 1917. Son premier travail seul, en tant que réalisateur, encore une adaptation de son père (Le ravin sans fond), est d'ailleurs entièrement tournée en extérieurs dans le sud de la France, ce qui situe déjà le futur réalisateur des Misérables comme un inlassable passionné des nouvelles possibilités techniques du cinéma. En 1924, après un certain nombre de réalisations, éprouvé aux secrets du métier, il est sollicité par Henri Dupuy-Mazuel, fondateur de la société de production "Les romans historiques filmés", pour mettre en chantier Le Miracle des loups, une oeuvre d'une ampleur monumentale par les milliers de figurants qu'elle compte ainsi que par certaines scènes d'anthologie telles que Beauvais assiégée ou encore celle où une meute de loups se couchent devant l'héroïne. Suivront deux autres films, Le Joueur d'échecs (1927) et Tarakanova (1930), achevant de révéler l'ambition de Raymond Bernard qui se distingue déjà du tout-venant des réalisateurs français par une aptitude prodigieuse à "faire exister" une multitude de figurants, un choix judicieux de ses interprètes, enfin une science méticuleuse du montage.

Le passage du muet au parlant se fait avec une facilité déconcertante pour Raymond Bernard dont le premier film pour la firme Pathé-Natan, Faubourg Montmartre (1931), est un mélodrame poignant, aux dialogues très adroits pour un film postérieur de seulement deux ans aux premières oeuvres parlantes, admirablement servi par Gaby Morlay et Charles Vanel qui entame à l'occasion une riche collaboration avec le réalisateur puisque suivront Les Croix de bois (1931) et Les Misérables. Les Croix de bois, adaptation de Roland Dorgelès, est un vibrant plaidoyer pacifiste qui montre avec une force inouïe l'horreur de la guerre. Elle est l'occasion pour le réalisateur de poursuivre ses recherches techniques, une obsession chez lui. Il fut notamment, entouré de techniciens brillants, le pionnier dans les mélanges de pistes sonores afin de pouvoir entendre à la fois les paroles des acteurs ainsi que les bruits de guerre dans les mêmes scènes.

Quand, en 1932, les frères Natan entreprennent d'adapter le roman fleuve de Victor Hugo, tout est mis en oeuvre pour que cette réalisation dispose d'une production à la hauteur de ce monument de la littérature française. Raymond Bernard vient à peine de terminer les derniers travaux de montage des Croix de bois, son précédent film, le premier budget conséquent que lui a accordé Pathé-Natan. Satisfaits du résultat final, les responsables de production confient les pleins pouvoirs au réalisateur et entendent bien rivaliser avec les plus prestigieuses productions américaines. Les premières difficultés devant une telle entreprise furent de ramener à la plus simple expression la prolifération de détails dans le portrait de chaque personnage, une habitude chez Victor Hugo. Ensuite il s'agissait de circonscrire l'essentiel du récit autour d'un petit noyau de personnages, de les suivre au cours d'événements marquants, ceux qui viennent spontanément à l'esprit à l'évocation du roman. Malgré cela, il est très vite apparu que la durée du film serait conséquente, en vertu de quoi, il fut décidé dans un premier temps un film en deux parties. Les garanties de succès du film aidant, les producteurs consentirent à une troisième partie. André Lang, collaborateur de Raymond Bernard au scénario, ainsi qu'aux dialogues du film, s'explique ainsi (dans L'ami du peuple du soir, 3.12.1932) : "La première partie de notre triptyque correspond assez bien aux épisodes de la première partie du livre (Fantine). Le second film a nécessité une ample élimination de détails ou d'anecdotes secondaires qui embarrassaient la marche du récit. En somme nous avons fait de ce second film une sorte d'amalgame des trois chapitres livresques (Cosette, Marius, L'Idylle rue Plumet et l'épopée rue St-Denis). Quant à notre troisième film, il reste l'adaptation assez exacte du dernier livre du roman (Jean Valjean)." Parmi ces garanties, le choix très étudié du tandem d'auteurs concernant la distribution qui devait être à la hauteur des figures fortes du livre, notamment le personnage hybride que constitue Jean Valjean / Monsieur Madeleine / Fauchelevent et même le père Champmathieu. Disons le tout de suite, Harry Baur EST, au sens physique et sensible du terme, ce personnage tout à la fois bagnard repenti, industriel établi et respecté, vieillard soucieux de l'avenir de sa fille adoptive et aussi, lors de l'émouvante scène de tribunal, le père Champmathieu, charron à l'allure débonnaire, un peu idiot. A propos de cette fameuse scène de tribunal, où la succession rapprochée de plans Jean Valjean / Champmathieu exprime avec force tout le talent d'interprétation du grand comédien qu'était Harry Baur, et qui a comme finalité la  révélation du véritable accusé, elle sera reproduite trois ans plus tard par Raymond Bernard dans Le Coupable (1936), où le même genre de révélation agira comme une catharsis pour le héros interprété par Pierre Blanchar.

Charles Vanel lui, prête toute la subtilité de son jeu au service d'un Javert, garde-chiourme devenu inspecteur dont l'existence, qu'on devine exsangue, est toute entière consacrée à tenter de démasquer le forçat Jean Valjean. Dans Monsieur Vanel (Jacqueline Cartier), Charles Vanel fait cette analyse étonnante : "Avez vous remarqué que Hugo, par le jeu des consonnes, lie les deux noms ? VAL jean et ja VERT, JA vert et val JEAN ? Recto, verso, pile ou face... Les deux personnages se suivent comme la nuit et le jour, l'un poursuivant le Bien et l'autre le Mal. Chacun à un virage de son destin fait grâce à l'autre de la vie." Et c'est vrai qu'on peut envisager le personnage de Javert comme un décalque obscure de Valjean qui, comme le souligne Paul Vecchiali (L'Encinéclopédie, éditions de l'Oeil, 2010) est moins à la recherche de rédemption qu'en quête de dignité. Il le précise d'ailleurs à la fin du film quand, se présentant le lendemain du mariage de Cosette et Marius et avouant à ce dernier son passé de forçat, il dit avoir fait du mieux qu'il pouvait , et s'il a fait le bien, alors tant mieux mais ce n'était pas une fin en soi. Javert, quant à lui, fera tout, au contraire pour empêcher Jean Valjean d'obtenir cette dignité. On a souvent, à juste titre, loué la qualité d'ensemble de l'interprétation et, sous entendu, la justesse du choix de ces interprètes par Raymond Bernard et ses collaborateurs. Néanmoins, on se dit que parfois la providence oeuvre avec bienveillance puisqu'il semblerait qu'au désarroi du réalisateur, Eponine fut finalement interprétée par Orane Demazis alors qu'Arletty avait été initialement pressentie. De même pour Josselyne Gaël préférée à Danielle Darrieux pour le rôle de Cosette. Comme le souligne Jacques Lourcelles (Dictionnaire du cinéma, Robert Laffont, 1993), on a du mal à imaginer ce qu'auraient apporté de plus les deux actrices.


Ce qui, d'une certaine façon, en dit long sur la logique interne de l'oeuvre, la manière dont elle existe par elle-même, presque affranchie de la personnalité de ses interprètes, excepté Harry Baur, car a posteriori de toutes les versions précédentes (Henry Krauss dans le version d'Albert Capellani, 1911, qui ici, joue le rôle de Monseigneur Myriel ; Gabriel Gabrio dans la version de Henri Fescourt, 1925 ; Gino Cervi dans la version de Riccardo Freda, 1948 ; Jean Gabin dans la version de Jean-Paul Le Chanois, 1958, pour les plus célèbres) il n'existe pas d'autres interprètes qui aient donné à Jean Valjean une apparence et une personnalité aussi définitives et unanimement saluées. Dans le rôle des Thénardier, Charles Dullin et Marguerite Moreno sont saisissants également et, par la jubilation qui transpire de leurs regards et autres grimaces, on devine, pour le partager, le plaisir qu'ils ont dû éprouver à incarner ces crapules. Enfin, même si leur jeu n'a pas la roublardise des comédiens professionnels, Gaby Triquet et Emile Genevois dans les rôles respectifs de Cosette enfant et Gavroche sont loin d'être honteux et parfois même très émouvants (les scènes où Cosette craint le courroux de la mère Thénardier, la scène où Gavroche dévalise de leurs munitions les soldats morts sur les barricades puis celle où il meurt après avoir été abattu par les soldats). Jacques Salles (dans Raymond Bernard, Anthologie du cinéma, 1979) rapporte ce propos d'André Lang tiré d'une conférence (publié dans Conferencia, journal des Annales de l'Université du 1er aout 1933) : "Nous souhaitions dégager des Misérables toute partie ignorée du grand public, toute l'aventure psychologique, souterraine et même freudienne avant la lettre." Jacques Salles ajoute : "C'est en quelque sorte de cette intériorité que naît la perfection du film, qui s'attache moins aux péripéties de l'action qu'au moteur du récit : le caractère des personnages."

Un autre élément en dit long sur l'ambition des producteurs et du réalisateur (rapporté dans Décors de cinéma, un siècle de studios français, Max et Jacques Douy, édition du collectionneur, 2003) aidés par deux habitués des plateaux de tournage de Raymond Bernard, Jean Perrier et Lucien Carré : "Les décors de ce film étaient très importants par leur nombre et leur taille. Ainsi le terrain de 3 500 m2 des studios de Joinville au 47 Avenue du Président Wilson s'avérait trop exigu pour y construire le décor du Faubourg St-Antoine et il fut donc décider de le construire sur un terrain à Biot, dans les Alpes-Maritimes, pour bénéficier de l'assistance technique qu'apportaient les studios de la Victorine à Nice. Les travaux furent dirigés par Lucien Carré assisté du chef constructeur André Landart, lequel avait travaillé à l'édification du temple d'Angkor, à l'Exposition Coloniale de 1931." Il faut, à ce titre, souligner tout le bénéfice de la lumière chaude et expressive du Sud de la France qui donne un relief éclatant à ces décors, théâtres d'un des plus mémorables morceaux de choix du film, les insurrections de 1832 à Paris. Cette mise en perspective des décors accentue même le caractère fondamentalement "studio" du film, sans jamais cependant donner l'impression de carton-pâte. Il faut dire à ce propos que le montage sec de Raymond Bernard, d'une précision méticuleuse, saisit avec un talent étonnant la vérité de l'instant dans les scènes d'action, mariant miraculeusement l'image et le son (les scènes de désordre et de panique lors de l'émeute à l'occasion du cortège funèbre du Général Lamarque, filmées caméra à l'épaule, technique empruntée au reportage, déjà vue dans Les Croix de bois), l'alternance toujours à propos, sans qu'elle soit ostentatoire, de plans serrés et de plans aériens d'ensemble visant à signifier la tension crescendo lors de la préparation de l'affrontement final sur les barricades, rendent ces passages incroyablement modernes encore aujourd'hui. On pourrait même aller jusqu'à souligner, comme Paul Vecchiali, l'économie d'artifice dans la dramatisation (le suicide ellipsé de Javert, l'affrontement hors champ des insurgés et des soldats, etc... Enfin, comment ne pas évoquer ces admirables plans séquences qui amènent de subtiles transitions, comme celle où l'on voit Jean Valjean déchirer son acte de libération de forçat avec un plan sur ces morceaux de papiers emportés par le vent puis après un fondu, dans le plan suivant, on retrouve des papiers volants dans la rue qui sont des cartons d'invitation pour une fête donnée sur les Champs-Elysées. Ou encore, à la fin de la première partie, lors de l'arrestation de Jean Valjean par Javert, on voit l'épaule de Valjean, la main de Javert qui l'agrippe puis en surimpression les barreaux de la cellule de la prison, enfin les barreaux écartés pour signifier son évasion. Tout l'art du cinéma de Raymond Bernard est contenu dans cette technique d'une décontraction impérieuse.

On l'a dit, du roman de Victor Hugo est tirée la substantifique moelle du caractère de l'oeuvre et de ses personnages. Une des caractéristiques du film est de présenter Jean Valjean comme une figure christique dont l'idée même de faire le bien n'a aucune signification puisqu'elle n'est pas recherchée. Dès les premiers plans, on voit la silhouette massive de Valjean en contre-plongée soutenant une cariatide et on devine qu'il porte déjà toute la misère du monde sur ses épaules. En effet, de l'imbrication inéluctable du destin de chaque personnage naît dans l'inconscient du spectateur le sentiment de contempler une peinture toute chrétienne de l'humanité à travers le portrait de pêcheurs en quête de respectabilité ou de dignité (Jean Valjean), de pêcheurs versant inexorablement du côté du mal (Les Thénardier); enfin de pêcheurs à la trajectoire plus tourmentée, traînant leur âme solitaire comme s'ils erraient pour l'éternité au purgatoire (Javert). Cette unité de tons, cette synthèse heureuse dans le portrait du caractère de chaque personnage, ainsi que leur destinée, sont également adroitement mises en évidence par la partition musicale d'Arthur Honegger (Le Miracle des loups, 1924 ; Napoléon, 1927) structurant avec clarté certaines séquences qui, selon qu'il s'agisse de scènes d'action avec grouillement de figurants, selon qu'il s'agisse d'une scène de tension dramatique dans un espace plus confiné mettant aux prises quelques personnages seulement, retombent toujours sur leurs pattes, donnent un rythme reconnaissable tout au long de l'oeuvre. "J'ai tout d'abord lu le scénario d'après lequel j'ai composé mes trois génériques (anecdote intéressante puisqu'on sait que pour la version qu'on connait aujourd'hui, les génériques sont identiques pour les trois parties), car il faut une unité de construction pour donner un sens dramatique à une oeuvre. J'en ai donc retenu les idées générales qui m'ont servi à établir mes thèmes principaux."

Cette familiarité entre les trois parties du film participe certainement au caractère durable de l'oeuvre dans le temps qui, pour peu qu'on soit sensible à ce cinéma dès la première partie, devient addictive tant du point de vue des personnages que de l'univers dans lequel ils évoluent. Leur existence propre n’aurait plus guère de sens selon qu'on déciderait de voir une partie sans les autres ou avant les autres. Pourtant, comme le rapporte Eric Bonnefille, Raymond Bernard ainsi qu'Emile Natan avaient insisté à l'époque sur le fait que les trois épisodes avaient été conçus de façon à être "indépendants l'un de l'autre et susceptibles d'être vus séparément sans en devenir obscurs." Il faudrait, pour vérifier la justesse de ces propos, poser la question à une personne découvrant Les Misérables dans le désordre ou n'ayant vu qu'une partie, lui demander si elle ressent un manque criant dans le portrait des personnages, si l'histoire mériterait une suite ou un prologue. Quoi qu'il en soit, par son ampleur, les moyens exceptionnels mis à sa disposition pour satisfaire l'ambition artistique de son réalisateur, par l'alchimie presque parfaite entre les acteurs, techniciens et producteurs, par la séduction tenace qui opère spontanément à chaque nouvelle immersion dans cette réalisation unique du cinéma français, Les Misérables est bien un film hors norme qui devrait offrir pour l'éternité à son réalisateur un statut de maître qui le place aux cotés des plus grands de sa génération (Jean Renoir, Julien Duvivier, Marcel Carné, Jean Grémillon, Sacha Guitry, Marcel Pagnol). Espérons au moins que les générations à venir, en découvrant ce film, y trouveront le prétexte pour aller fouiller dans les arcanes d'une oeuvre qui recèlent de véritables trésors. Parmi ceux-là, on recommande particulièrement pour la période parlante : Faubourg Montmartre (1931), Les Croix de bois (1931), Le Coupable (1936), Les Otages (1939).

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Par Yann Gatepin - le 3 décembre 2013