Menu
Test blu-ray
Image de la jaquette

Marché de brutes

BLU-RAY - Région B
Rimini Editions
Parution : 15 juin 2021

Image

Encore une belle initiative à saluer de la part de Rimini qui propose cet été deux Films noirs réalisés par Anthony Mann, des séries B produites par une petite société indépendante qui n'avaient jusqu'alors jamais été restaurées à leur juste valeur. Lorsque Wild Side les avait éditées en 2006 en DVD, nous devions alors nous contenter de vieux masters analogiques rudimentaires, pour ne pas dire préhistoriques, c'étaient alors les seuls transferts qui étaient disponibles. L'éditeur américain ClassiFix a pris en charge la restauration de Marché de brutes en 2018 à partir de plusieurs éléments nitrate fournis par le British Film Institute, la pellicule ayant été préalablement restaurée avant d'être scannée en 2K. Il va sans dire que le résultat est incomparable avec ce que nous avions à disposition jusqu'à présent. Les travaux de restauration ont été effectués de manière sérieuse et, même s'il reste encore quelques petites améliorations à faire, c'est la première fois que Marché de brutes est aussi dignement restitué en vidéo. Le matériel fourni par le BFI est dans l'ensemble de très bonne qualité. Il n'est pas fait mention du négatif original mais d'"éléments à grain fin", autrement dit un probable "marron". On distingue cependant des passages issus d'une seconde source, de génération inférieure, à l'état sensiblement moins convaincant, plus mesuré et marqué par le temps, qui correspond en fait à la seconde bobine (de 9 min 49 s à 19 min 41 s). Dix petites minutes à la texture plus douce et à l'étalonnage parfois un peu plus réduit. Hormis les plans truqués (fondus) qui sont logiquement moins précis, conséquence du processus de fabrication de l'époque, le reste du film est très correctement loti, avec une définition et un niveau de détail plutôt satisfaisants, même si on aurait parfois souhaité davantage de précision. On n'a cependant aucun mal à distinguer quelques plans à la mise au point fragile, dont un spectaculairement flou !, et à profiter des textures et des éléments fins de l'image. La copie est stable, profondément nettoyée, et bénéficie de contrastes aussi bien tenus que possible, assez denses mais conservant encore du détail - à l'exception de quelques plans plus "collés" pour compenser de fréquentes instabilités du niveau de noir (seul véritable défaut de ce beau transfert). L'étalonnage est plutôt nuancé, proposant une gamme de gris variée et très agréable, à des années-lumière de l'ancien master DVD. L'ensemble est porté par un grain argentique bien présent, plus épais durant la fameuse 2e bobine ou les plans truqués. Une très belle présentation, encore imparfaite mais largement recommandable.

comparatif DVD Wild Side (2005) vs. Blu-ray Rimini (2021) : 1 2 3 4 5 6 7

Son

La partie sonore tient aussi très bien la route. Le spectre est un peu couvert, ce qui permet de limiter le souffle mais ôte en même temps un peu de précision et de détail. Les voix sont assez claires et l'équilibre avec les ambiances n'a pas été affecté. On ne relève pas de saturations ou de sifflantes prononcées, ce qui est un bon point. L'ensemble est très propre, sans craquements ou traces d'usure disgracieuses.

On signalera un décalage des sous-titres à partir de la 28e minute. Un désagrément heureusement très bref, qui perturbe le visionnage pendant 90 secondes seulement.

Suppléments

Marché de brutes est proposé dans un très élégant digipack avec fourreau, au visuel inspiré des affiches d'époque (ce qui a tout pour nous plaire). Le film est présenté en DVD et en Blu-ray, accompagné d'un livret de 28 pages signé de l'excellent Christophe Chavdia, de l'agence La Plume, à qui l'on devait déjà les livres sur Richard Fleischer et John Milius, édités en supplément par Rimini. La Fureur des hommes est divisé en plusieurs parties, avec des récits relativement précis, détaillés et passionnants, comme à chaque fois. Un premier focus s'intéresse au réalisateur Anthony Mann, révélé par le genre du Film noir qui lui permet déjà de montrer un talent que la critique ressentira à l'époque comme de l'apprentissage, le cinéaste n'ayant été pris au sérieux que bien plus tard, au moment des cinq westerns tournés avec James Stewart. "Super Mann" débuta au théâtre, comme acteur puis metteur en scène et directeur de compagnie, passa même par la télévision et put enfin travailler pour le grand écran sur des petits budgets. Il se qualifiait lui-même de "faiseur", ce qui ne l'empêchait pas d'élaborer une mise en scène efficace et très stylisée malgré le budget à l'économie, créant un "monde mental et visuel à part"... qui fera sa renommée. Sa rencontre avec l'alter ego John Alton, célèbre directeur de la photographie, sera décisive. Pour la suite du livret, Christophe Chavdia s'intéresse justement à la carrière d'Alton, un "homme flamboyant" qui savait prendre ses distances avec un système des studios très conservateur. Influencé par Rembrandt, il pourrait être qualifié de co-auteur pour ses oeuvres avec Anthony Mann. Une partie du livret est ensuite consacrée à La Brigade du suicide, dont nous reparlerons dans quelques semaines, ainsi que Marché de brutes qui nous intéresse aujourd'hui. Christophe Chavdia revient sur ce projet élaboré sous les contraintes de la censure, un "film sur la persistance de la noblesse humaine dans un monde corrompu", dont il décrit le marketing "crapoteux" au moment de la sortie en salles.

Féminin singulier (15 min - HD)
Unique supplément proposé sur le Blu-ray, un entretien avec le critique Jacques Demange (Positif) qui livre une bonne analyse de Marché de brutes, Film Noir "totalement maîtrisé de bout en bout", dans lequel Anthony Mann se fait plaisir grâce à une caméra inventive et une lumière "fabuleuse". Demange explique comment le cinéaste montre ici son savoir-faire et affine son style visuel et rythmique en piégeant un héros évadé de prison par le cloisonnement des espaces, dans un grand huis clos oppressant qui enferme dans la ville (la "cellule urbaine") comme dans la campagne extérieure, avec son horizon obstrué par des branches ou une forêt qui cerne les personnages dans des "cadres envahis par les ténèbres". Le critique précise comment Mann utilise de manière originale la traditionnelle voix off et l'identité féminine, la femme fatale cette fois placée au premier plan du récit, observe la façon dont le film s'approprie et détourne les codes et la mythologie du genre, et voit dans la brutalité de certaines scènes une touche personnelle que l'on retrouvera dans ses futurs westerns. Demange survole cette première partie de carrière, comme avec La Cible vivante, un "film de transition", et considère Anthony Mann comme un cinéaste "pré-moderne", à la fois classique et annonçant la période du Nouvel Hollywood où les réalisateurs ont su travailler en imposant leurs idées.


En savoir plus

Taille du Disque : 20 850 681 388 bytes
Taille du Film : 16 992 589 824 bytes
Durée : 1:19:20.338
Total Bitrate: 28,56 Mbps
Bitrate Vidéo Moyen : 25,03 Mbps
Video: MPEG-4 AVC Video / 25036 kbps / 1080p / 23,976 fps / 16:9 / High Profile 4.1
Audio: English / DTS-HD Master Audio / 2.0 / 48 kHz / 2010 kbps / 24-bit (DTS Core: 2.0 / 48 kHz / 1509 kbps / 24-bit)
Subtitle: French / 16,331 kbps

Par Stéphane Beauchet - le 28 juin 2021