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Test blu-ray
Image de la jaquette

L'Homme de Bornéo

BLU-RAY - Région A, B, C
Elephant Films
Parution : 23 février 2021

Image

Pour L’Homme de Bornéo, il n’existait jusqu’ici qu’un DVD américain datant de 2006, aujourd’hui bien daté et qui présentait une dominante magenta typique. Devant le Blu-ray édité cette année par Elephant Films, on ne peut qu’être satisfait. L’image est annoncée comme restaurée et c’est l’évidence, même si l’on reste toujours méfiant vis-à-vis des masters provenant du studio Universal qui ne sont pas toujours de première jeunesse. Ici la restauration s’avère probante ; la copie a été très bien nettoyée (il reste de très fines et rares scories) et sa stabilité est exemplaire (sauf lors des fondus, mais on va y revenir). L’image est assez séduisante et lumineuse (parfois un peu trop), clairement douce aussi, mais le réducteur de bruit n’a pas été destructeur. On se doit également de préciser la présence d’une légère accentuation des contours. Mais nous avons bien affaire à de la haute définition avec un grain argentique présent même si atténué, finement structuré ou plus grossier selon le cas, et une belle définition générale (mise en exergue, entre autre, par le rendu des matières). En revanche, on observe une nette chute de définition lors des fondus enchaînés, accompagnée d’une petite instabilité du cadre. Il s’agit là d’une manifestation logique et attendue puisque que les techniques de fondus de l’époque étaient sujettes à ce type d’effet dégradant ; mais comme cette figure de style est ici très utilisée dans la narration, il faut avouer qu’on a bien plus de mal à s’y habituer qu’à l’accoutumée. Les contrastes, de leur côté, ne sont pas très soutenus avec des tons moyens peu nuancés, même les noirs peuvent se montrer denses parfois. Enfin, il faut parler de la colorimétrie, un facteur essentiel dans L’Homme de Bornéo. En s’appuyant de l’Eastmancolor, le cinéaste et son chef opérateur Russell Harlan ont pris l’option de désaturer les rouges et les tons associés, voire de les éliminer. Il en résulte une dominante jaune-orange associée à des tons vifs qui renforcent avec une belle efficacité l’impression d’ensoleillement agressif et de chaleur étouffante propres à la jungle. Ce choix photographique a heureusement été respecté par ce nouveau master, mais il nous est bien sûr impossible d’affirmer si l’étalonnage de ce dernier l’a accentué ou pas. En conclusion, ce troisième film de la collection Robert Mulligan se révèle à son tour une réussite.

Son

Les deux pistes sonores DTS-HD Master Audio 2.0 proposées sont parfaitement nettoyées, claires, confortables à l’écoute et avec un souffle minimal. C’est la musique de Jerry Goldsmith qui tire le meilleur parti de ces mixages mono. La version française possède des voix plus ternes, légèrement réverbérées, et sont placées, comme de coutume, un peu trop en avant au détriment des ambiances qui se voient étouffées et réduites à l’arrière-plan lors des dialogues. Pour trouver le bon équilibre, il faut bien sûr se tourner vers la bande-son originale, plus naturelle, plus précise, plus enveloppante aussi, avec des ambiances vivantes et bien rendues. D’autant plus que le doublage français n’est pas des plus heureux sur le plan dramatique pour au moins Rock Hudson.

Suppléments

Portrait de Robert Mulligan (23 min 27 - 16/9 - DTS-HD MA 2.0 - 2021 - HD)
Dans ce documentaire, richement illustré d’affiches, de photos et d’extraits des trois films édités par Elephant Films, Jean-Pierre Dionnet dispose de tout le temps nécessaire et peut se permettre de déclarer sa flamme à Mulligan, un cinéaste souvent oublié à son grand regret mais dont on ne cesse heureusement de redécouvrir l’œuvre. Il explique les raisons de cette sous-estimation, en partie par la grande discrétion de l’artiste. Dionnet cite quelques repères biographiques (son intérêt pour la théologie, son passage chez les marines, ses nombreux petits jobs) puis rappelle les origines télévisuelles de Mulligan (comme d’autres célèbres cinéastes de sa génération) qui réalisa 35 téléfilms. Adepte de la nécessité de changer régulièrement de genre, cinéaste sensible de l’enfance -à laquelle il revient souvent - et du regard de l’enfant sur le monde, « prodigieux révélateur d’acteurs », Robert Mulligan trouve en Dionnet un fervent défenseur. Et voilà que celui-ci, dès la neuvième minute, décide de lister tous les films du cinéaste ! Et pari tenu avec une présentation succincte mais juste de chacun d’entre eux (sauf un, qu’il n’a pas pu voir) avec leurs thématiques et l’approche adoptée par le cinéaste, dont bien sûr Du silence et des ombres (« pour moi l’un des plus beaux films du monde »), Un été 42, son plus gros succès, L’Autre et The Nickel Ride (son film préféré de Mulligan). Que l’on soit sensible ou non à la faconde de Jean-Pierre Dionnet, ce document mérite franchement le détour car il sait donner un aperçu pertinent du cinéma de Mulligan, dont il existe par ailleurs très peu d’exégèses.




Analyse du film par Nachiketas Wignesan (21 min 34 - 16/9 - DTS-HD MA 2.0 - 2021 - HD)
On retrouve une troisième fois l’enseignant de cinéma qui défend avec assurance ce film de studio, L’Homme de Bornéo, un « film grevé de défauts » mais dont il entend souligner les qualités. Wignesan insiste en premier lieu sur le « choc visuel » procuré par la photographie et sur la musique de Jerry Goldsmith, « pleine d’assonances et de notes frappées et grattées ». Cet ensemble de sensations provoque à ses yeux un « choc physique avant un choc intellectuel ». Il s’attache ensuite à analyser l’intrigue à travers la thématique classique de « la quête de soi-même » dans un film d’aventures en décrivant le personnage joué par Rock Hudson et son évolution. A travers la rencontre potentielle avec Dieu, il pose la question « d’un film déiste ». Wignesan évoque le voyage intérieur, dans le but de perdre « sa partie animale et négative », en rappelant les sous-entendus du titre original - The Spiral Road. Il y voit donc « un film sinueux et des registres de jeu et d’acteurs différents. » Parmi quelques scènes surprenantes, il met en relief la séquence « moderne » dans le camp où apparaît la musique créée par les indigènes qui passe d’extra-diégétique à réelle, en hors champ, avec la caméra qui représente le danger extérieur. Il évoque aussi et surtout l’idée de la « magie », des « trucs », qui seraient pour lui « la clé du film » en relation avec l’interrogation sur Dieu.  Ainsi Wignesan tente de nous faire sentir l’apport de Mulligan dans ce film de commande où il doit imprimer sa personnalité. Pour le cinéaste, « le monde est obscur, bizarre, dangereux » et c’est en toute logique que son film suivant marque sa vraie naissance au cinéma avec le superbe Du silence et des ombres.

Le film par Jean-Pierre Dionnet (6 min 51 - 16/9 - DTS-HD MA 2.0 - 2021 - HD)
Dans cette courte intervention, qu’il faudrait voir plutôt après le film qu’avant, le journaliste offre quelques pistes pour apprécier cet Homme de Bornéo, tiré d’un livre « verbeux » de Jean de Hartog situé dans les Indes orientales. Dionnet, qui adore Rock Hudson, trouve ce dernier formidable et estime « qu’il la joue un peu Cary Grant » par sa prestance et sa gestuelle. Il rappelle néanmoins l’échec du film et en liste selon lui quelques raisons. Puis il présente les deux autres comédiens formant le trio principal de ce « film le plus choral de Robert Mulligan », notamment Gena Rowlands dont il précise « le jeu à part » et distant, annonciateur de sa future carrière hors des studios hollywoodiens. Dionnet revient enfin sur la structure en deux parties de L’Homme de Bornéo, et considère lui aussi qu’il constitue la première adaptation d’Au cœur des ténèbres de Joseph Conrad, avant de conclure trop habilement sur le traumatisme d’enfance qui ramène cette œuvre vers le corpus filmique de Mulligan. On sent Jean-Pierre Dionnet intéressé par ce film mais sans plus, donc moins enflammé que d’habitude, tentant néanmoins de donner envie au spectateur d’aller se perdre lui aussi dans la jungle avec Rock Hudson.


Bande-annonce (1 min 06 - 1.85 16/9 - DTS-HD MA 2.0 - VF - 2021)
Il s’agit ici d’un film-annonce monté par l’éditeur à partir du nouveau master, donc impeccable sur le plan technique, afin de faire la promotion de ses Blu-ray et DVD. Il est seulement dommage de n’avoir pas pu proposer la bande-annonce originale mais il est fort probable qu’elle soit rare à dénicher.

Dans la même collection
On trouve ici le film-annonce de la collection Robert Mulligan (1 min 10) commenté par Jean-Pierre Dionnet et les bandes annonces des films suivants avec Rock Hudson parus chez Elephant Films : La Légende de l’épée magique (2 min 38 - VOST), Qui donc a vu ma belle ? (2 min 49 - VOST), Etranges compagnons de lit (2 min 51 - VOST), Le Sport favori de l’homme (2 min 16 - VOST) et Capitaine Mystère (2 min 30 - VOST). A part la première bande-annonce qui est un montage effectué par l’éditeur à partir d’images restaurées, toutes les autres sont d’époque, soit « dans leur jus ».

Par Ronny Chester - le 22 avril 2021