
Cœurs brûlés
BLU-RAY - Région B
Elephant Films
Parution : 29 août 2023
Image
Comme souvent, le jugement porté sur une édition HD dépend un peu d'où on la regarde.
D'une part, la seule édition française à ce jour était un DVD de la Collection Marlene Dietrich, sorti chez Universal en 2005, et passablement abîmé. Le passage à la haute-définition représente évidemment un gain substantiel (même si...), et on pourrait donc conclure en disant que cette édition représente "la meilleure édition française à ce jour" (en particulier si la nécessité de sous-titres français est en jeu).
comparatif DVD Universal (2005) vs. Blu-ray Elephant (2023) :
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D'autre part, d'autres éditions HD sont sorties de par le monde (certaines déjà anciennes), chez les Américains de Criterion en 2018 et chez les Britanniques de Powerhouse en 2019, et si on les met en perspective avec cette édition française 2023, la comparaison n'est pas vraiment flatteuse : l'édition Criterion par exemple (voir comparatif ci-dessous, avec les mêmes images) avait été réalisée à partir d'une remasterisation consécutive au scan 2K d'une copie de sureté 35 mm, il semblerait que l'édition Elephant ait fait appel à un master plus ancien, (comme en atteste d'ailleurs la présence du logo Universal).
comparatif Blu-ray Criterion (2018) vs. Blu-ray Elephant (2023) :
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Les différences sont assez nombreuses et presque toujours à l'avantage de l'édition américaine : propreté d'ensemble (les saletés sont ici assez nombreuses et parfois envahissantes, voir par exemple la capture 6 de la galerie ci-contre à droite, par exemple) ; quantité d'information sur les bords de l'image, notamment en haut et en bas (voir le képi de Gary Cooper sur la 4ème image du comparatif ci-dessus) ; qualité des blancs et des noirs, parfois opaques ; stabilité de l'image ; rendu du grain...
Evidemment, le film porte son âge (il date de 1930), et on sait, quand on aborde un film aussi daté, qu'il ne faut pas nécessairement s'attendre à des miracles ; ce qui est rageant ici, c'est d'avoir l'impression de ne pas avoir disposé du meilleur matériel disponible.
Son
Constat similaire, à un degré moindre. La piste sonore porte son âge, et des scratchs ou du souffle demeurent, présents mais sans rendre le visionnage pénible.
Suppléments
Le supplément le plus conséquent est une discussion proposant une analyse du film par Mathieu Macheret et Théo Esparon (29' - HD). Assez complémentaires (à Mathieu Macheret la dimension théorique, conceptuelle, à Théo Esparon les éléments plus techniques, notamment sur la question de l'analyse sonore), les deux spécialistes insistent dans un premier temps sur le contexte de production de Morocco, étroitement lié à la sortie de L'Ange bleu. Mathieu Macheret insiste ensuite sur l'exotisme du film, lié à cette "fantasmation hollywoodienne" de l'ailleurs, dans la casbah de Mogador qui constitue ici un "lieu-monde", un lieu qui "contient le monde entier". L' "importance du son" - qui alors "ne va pas de soi" - est ensuite évoquée, pour un cinéaste qui vient du muet et auquel il reste irrésistiblement lié. On aborde ensuite le motif du triangle amoureux, fortement "polarisé", dans lequel l' "amour n'est pas pavé de fleurs et violons" mais est une "lutte âpre", et là encore, la parole (ou son absence) joue un rôle décisif, à travers tout ce qu' "on ne dit pas", la "communication indicible qui passe par le corps", et Théo Esparon loue notamment le "minimalisme", la "réduction à des gestes" dans lesquels "se concentre l'énergie du film", à l'oeuvre spécifiquement dans Morocco. La relation avec le troisième sommet du triangle, le personnage de La Bessière, est également passée au crible de leur analyse, qui en fait ressortir la complexité, et là encore, la question sonore est illustrée, par la séquence du collier de perles, puis celle des retrouvailles dans la taverne. Ils discutent enfin de la pertinence du concept d' "amour fou", souvent "plaqué sur le cinéma de Sternberg", mais qui leur semble ici relever de "quelque chose de très différent", quelque chose de la "pulsion désirante". La dernière séquence vient clore l'analyse, Mathieu Macheret décrivant "l'orchestration de ce geste sublime" en forme d' "appel du corps", tandis que Théo Esparon insiste de son côté sur sa "pulsion rythmique".
On retrouve également sur le disque un module (qui apparaît en bonus de plusieurs éditions récentes d'Elephant consacrées à des films mettant en scène l'actrice) dans lequel Xavier Leherpeur entreprend un Portrait de Marlene Dietrich (12'30" - HD), cette "enfant du siècle", à la fois "symbole sexué" et "porteuse de toute une histoire". Les contours du "mythe Dietrich" sont définis à partir de la manière dont les grands cinéastes qu'elle a croisés (Hitchcock, Wilder, ou évidemment Josef von Sternberg) vont filmer son corps, sa silhouette, "dans son intégralité et dans sa force", mais aussi en particulier son regard "jamais dupe de rien". A travers son parcours (son éducation rigoriste à laquelle elle s'oppose pour développer son goût de la provocation ; l'émulation libérale du Berlin des années 20...), Xavier Leherpeur fait ressortir la volonté, chez la comédienne, "de ne jamais baisser les yeux, de ne jamais s'excuser de rien", ce qui contribuera à sa postérité, auprès notamment des mouvements féministes. Une partie est spécifiquement consacrée à la période américaine de Dietrich, motivée par la volonté des studios de trouver une concurrente à Greta Garbo, mais durant laquelle elle parviendra à faire ressortir sa singularité, à travers sa voix, les thèmes audacieux de ses chansons ou sa manière très particulière de capter la lumière. Enfin, il établit la postérité de Marlene Dietrich en identifiant un certain nombre de personnalités ou de domaines dans lesquels son influence reste présente.
Dans Josef Von Sternberg par Jean-Pierre Dionnet (12 min - 1080i - module là aussi figurant en bonus de plusieurs éditions), le journaliste et critique évoque la carrière du réalisateur, de ses débuts au temps du muet (dont il devint l'un des grands metteurs en scène en quelques années à peine) à sa rencontre avec son égérie Marlene Dietrich, et les 7 films tournés ensemble, "parmi les plus beaux du monde". Il décrit la personnalité de ce personnage "tout à fait à part", fermé et très exigeant, dont la réputation difficile accélérera son éloignement des studios.
Figurent également sur le disque des bandes-annonces (de qualités inégales) de films liés à Marlene Dietrich et édités ces derniers mois par Elephant Films (Morocco, mais aussi Shanghaï Express, La Femme et le pantin, Agent X27, L'Ange et le mauvais garçon, La Maison des sept péchés ou L'Impératrice rouge)
En savoir plus
Taille du Disque : 38 154 401 792 bytes
Taille du Film : 23 128 154 112 bytes
Durée : 1:32:04
Total Bitrate: 33,49 Mbps
Video: MPEG-4 AVC Video / 1080p / 23,976 fps / 16:9 / High Profile 4.1
Audio: Anglais / DTS-HD Master Audio / 2.0 / 48 kHz / 24-bit (DTS Core: 2.0 / 48 kHz / 1509 kbps / 24-bit)
Sous-titres : Français, Anglais