Bon, je viens m'inscrire en faux des avis majoritaires sur cette nouvelle mission.
En vrai, il m'est sincèrement difficile de lui trouver de réelles qualités, autres que par effet de nivellement avec le reste de l'industrie hollywoodienne, qui atteint généralement les abîmes de la nullité depuis quelques années. Donc, certes, c'est "moins pire". Parce que Cruise reste un entertainer impliqué, et que je n'ai donc pas la sensation qu'on me crache au visage. Mais quelque part, devoir se réjouir de cet état de fait (comme nombre de critiques désormais, dont les plumes étaient il y a encore peu de temps autrement plus acerbes à chaque sortie d'un nouveau
Tom movie), c'est une pure démission, une indulgence de contexte. C'est dit, on peut évacuer et passer à autre chose.
Donc, le film, pris pour ce qu'il est :
- une succession de séquences-concept lâchement reliées entre elles. Dire que les scénarios des M:I étaient mal branlés, c'est vraiment faire fi du canevas admirable délicatement mis en place sur le premier opus, qui est un véritable travail d'orfèvre dans sa mécanique implacable, mais sert également un propos, des thématiques, et non pas juste des symboliques éculées et des successions de clichés vivants. Ici, les transitions sont opérées par des séquences de Tom-qui-court (sur un toit d'aéroport, dans des ruelles etc...). Ces plans-signature étaient auparavant autrement plus motivés qu'ici. Au mieux, on peut y voir une ironie de cinéaste.
- un gloubi-boulga informe audio-visuel. Pour être honnête, McQuarrie s'était joliment acquitté de la tâche dans les deux films précédents, qui avaient une identité propre. Ici, chaque séquence paraît autonome, dans le style, l'approche (la séquence du désert, celle d'exposition dans le QG à Washington - mauvais pastiche du De Palma d'ailleurs, on voit vraiment la différence de regard de cinéaste, ou encore la très longue poursuite finale), comme si on avait vraiment affaire à plusieurs épisodes de la série, mis en scène par des tâcherons anonymes. Peut-être le film a-t-il passablement essuyé les plâtres d'une production covidesque chaotique, mais sur ce genre de film, moi spectateur, je dois pouvoir en faire abstraction. Je ne m'appesantirai pas sur l'horreur composée par Lorne Balfe, succession de basses fréquences, percussions mixées très haut et très fort, et de cordes pour les moments calmes (et plats) d'exposition entre personnages.
- les personnages, tiens. Pas grand chose à se mettre sous la dent. Je serai d'accord cela dit pour admettre que, au fur et à mesure des scènes, la dynamique de progression du personnage d'Hayley Atwell est bien fichue et que le moment de flottement (ie d'incarnation de l'humain dans la machine) post Venise, quand l'équipe fait le point, reste un moment agréable. Mais c'est bien tout. Et ce n'est pas le traitement insultant réservé à Rebecca Ferguson qui me fera changer d'avis. Il suffit de comparer l'impact émotionnel du final de
Fallout avec ce petit prout vénitien pour voir tout ce qui sépare ne serait-ce que ces deux films. Rarement eu autant l'impression d'assister à un spectacle de marionnettes inanimées depuis cet autre tâcheron de J.J. La séquence de la boîte avec ses recadrages successifs, variations d'échelles de plans et montage algorithmique, quelque part, ça m'a fait l'impression d'assister à une comédie. Manquait juste Peter Sellers à un moment pour que l'effet soit complet.
- on en vient donc à Tom. J'aime vraiment bien la personne de cinéma (à distinguer de l'homme en privé donc) qu'il avait fini par devenir, comme le résume très bien Demi-Lune d'ailleurs. Mais là, le non-jeu est poussé dans de tels retranchements au profit de l'exploit sportif que, très franchement, on aurait pu donner son rôle à une doublure sur les scènes dialoguées que le film n'en souffrirait pas vraiment. Un acteur devenu cascadeur (de luxe), c'est rare comme trajectoire de carrière (et qu'il en profite, parce qu'on voit aussi désormais les limites de l'âge et des traitements anti-douleurs pour tenir - regardez les plans statiques avec Ethan en costume, Tom y est tout bouffi par la cortisone, tandis que dans les scènes d'action il est affûté). Ça nourrit peut-être son addiction à l'adrénaline, mais le cinéma est clairement déficitaire dans l'affaire. Parce que tout ça finit par se rejoindre avec les autres nullités hollywoodiennes évoquées plus haut : l'humain s'est fait la malle, ne reste que le
ride. Et quand ce dernier est à ce point rabâché, il ne reste plus grand chose en vérité. Vu hier et il m'en reste juste suffisamment en tête pour pondre ce pavé.
Le pire film de la série depuis
MI3 (c'est dire).
EDIT : oublié de mentionner qu'il s'agit effectivement d'un demi-film, ou plutôt d'une succession d'épisodes de série (ce qui pourrait expliquer la nature décousue de l'ensemble). Pris juste pour ce qu'il est, le film ne tient pas debout, n'est qu'une longue introduction au film suivant. Cette mode infâme doit cesser
