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Critique de film
Le film
Affiche du film

Miller's Crossing

L'histoire

Tom Reagan (Gabriel Byrne, magistral) est le bras droit de Léo (Albert Finney, dans un de ses plus beaux rôles), un chef mafieux irlandais. Tom est un peu porté sur l’alcool, complètement désabusé et cynique. Ses années dans le crime l’on fait passer maître dans l’art de la survie. Une sombre affaire d’arnaque, de lutte de pouvoir et de coucherie va mettre à l’épreuve ses capacités à se mouvoir dans un monde de turpitude et à s’en sortir grâce à sa meilleure arme : la parole.

Analyse et critique

Sous ses allures de néo-noir, Miller’s Crossing est avant tout une tragédie, une grande, une grecque. Joel et Ethan Coen parlent de la solitude du pouvoir, de la manipulation, de l’éthique comme le serine Jon Polito dans l’anthologique ouverture du film. Miller’s Crossing revêt bien les oripeaux du genre (années 1930, prohibition, Ford T, mitrailleuses Thomson à chargeur camembert et l’indispensable chapeau mou qui symbolise bien des choses dans ce film) mais c’est pour mieux nous parler de l’homme, de sa morale, de ses abandons et, au bout du chemin, de sa solitude. La reconstitution, parfaite, laisse souvent la place à la rêverie, l’imaginaire, l’absurde ; et l’intrigue, librement inspirée de La Moisson rouge de Dashiell Hammett, s’efface au profit des espoirs et des tourments des personnages.

Les frères Coen ont mis six mois à écrire le scénario, eux qui écrivent si vite (trois semaines pour Barton Fink). C’est que Miller’s Crossing brasse de multiples thèmes avec une prouesse et une légèreté qui laissent sans voix. De multiples motifs se répondent, les dialogues sont d’une rare intelligence, une attention pointilleuse est portée à chaque détail et la construction scénaristique est en tous points prodigieuse. Une construction qui joue brillamment sur la réversibilité du film. En effet, vision à après vision, l’on ne sait plus très bien si Tom est le grand ordonnateur du film ou bien un pantin bringuebalé au gré des circonvolutions de l’histoire. Miller’s Crossing est un modèle de film noir, mais aussi et surtout une réflexion profonde sur l’Amérique, ses fondations et ses mythes.

Chaque plan (la photo est de Barry - Men In Black - Sonnenfeld) est d’une beauté à tomber, clairs-obscurs à couper le souffle et couleurs comme aspirées par les ombres. Servi par un casting parfait (John Turturro, Jon Polito, Marcia Gay Harden, Steve Buscemi) et des dialogues prodigieux, Miller’s Crossing est, avec Barton Fink, le chef d’œuvre des frères Coen. Une succession ininterrompue de scènes inoubliables, un bonheur de mise en scène, un film qui invite forcément aux superlatifs. Ah oui, une dernière chose : après avoir découvert Miller’s Crossing, vous ne marcherez plus jamais de la même manière dans une forêt automnale, vous ne regarderez plus jamais la cime des arbres flottant doucement au vent de la même façon.

Dans les salles


DISTRIBUTEUR : SPLENDOR FILMS

DATE DE SORTIE : 20 février 2013

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La fiche IMDb du film

Par Olivier Bitoun - le 6 février 2013