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Critique de film
Le film
Affiche du film

Les Envahisseurs de la planète rouge

(Invaders from Mars)

L'histoire

Le jeune David, observant de nuit les étoiles avec son télescope, aperçoit une soucoupe volante atterrir derrière une colline non loin de là. George, son père, va se rendre compte sur place mais ne rentre pas tout de suite à la maison. Inquiète, son épouse prévient la police. Mais George fait sa réapparition ; cependant son comportement est bizarre. Lui, si doux habituellement, est devenu étrangement taciturne et violent. David le soupçonne d’être tombé sous l’emprise d’extraterrestres, surtout que plusieurs autres habitants de la ville semblent eux aussi comme "hypnotisés". Devant le scepticisme de ceux qui l’entourent, David trouve des oreilles attentives en la personne d’une infirmière ainsi que d’un astronome fasciné par les OVNI et la planète Mars. Ces derniers ayant pu être convaincus de la présence d’extraterrestres belliqueux sur le terrain de la maison de David, ils convoquent l’armée afin de les déloger...

Analyse et critique

Ce quatrième film du coffret édité par Artus est de loin le plus célèbre ; de même qu'il possède un statut de film culte acquis en France suite à sa sortie tardive en VHS au milieu des années 80 quasiment en même temps que sortait au cinéma son remake signé Tobe Hooper (Massacre à la tronçonneuse). Mais, alors que l’éditeur tablait sur ce titre - néanmoins symptomatique de ce cinéma paranoïaque de l’époque de la Guerre froide et de la peur du "péril rouge" - pour promouvoir son coffret (l’image de la jaquette et la plupart des illustrations intérieures étant d’ailleurs tirées de Invaders from Mars), c’est malheureusement loin d’être le plus intéressant. Après une première demi-heure très prometteuse, la suite nous plonge d’abord dans l’ennui avant, qu’avec l’apparition des Martiens, ce soit l’hilarité (non recherchée) qui vienne prendre le relais. Pour un film dont le but était d’effrayer, c’est complètement raté ! Il s'agit d'une sacrée douche froide d’autant plus quand on sait que trois ans après, Don Siegel réalisait sur un thème assez similaire une œuvre d’une toute autre trempe avec L’Invasion des profanateurs de sépultures (Invasion of the Body Snatchers) et surtout beaucoup moins datée. On aura beau invoquer le second degré, l’humour involontaire, le charme suranné, le kitsch ou autre surréalisme inconscient, rien ne tiendra le coup devant ce ratage à la différence par exemple du très bon War of the Worlds (La Guerre des mondes) de Byron Haskin, sorti peu de temps après en 1953.

Invaders from Mars est le dernier film en tant que réalisateur d’un homme surtout connu pour avoir été l'un des plus grands décorateurs et directeurs artistiques hollywoodiens des années 20, 30 et 40 : William Cameron Menzies. Il reçu le premier Oscar attribué en 1928 dans la catégorie "meilleur décorateur" pour Tempest de Sam Taylor et on lui doit entre autres les merveilleux décors et toiles peintes d'Autant en Emporte le vent (Gone With the Wind) dont il réalisa même la fameuse séquence de l’incendie d’Atlanta. Sa carrière de metteur en scène sera beaucoup moins prestigieuse même si l'on peut sentir encore sa patte artistique. L’un des points positifs d'Invaders from Mars provient justement de sa direction artistique : la toile peinte évoquant la colline, lieu de l’atterrissage de l’OVNI et des disparitions mystérieuses qui s’ensuivent, est d’une poésie certaine et d’une étrangeté qui baigne aussi le reste des décors intérieurs ; la sobriété martiale, l’artificialité et le minimalisme de ces derniers (le commissariat, le laboratoire…) donnent un style étrange et une plastique surréaliste assez particulière et bienvenue, même si c’est pour une bonne partie dû à une restriction budgétaire draconienne qui avait d’ailleurs déjà été à l’origine de l’abandon d’un tournage en 3D.

Le film débute par une première demi-heure captivante, distillant un réjouissant climat de paranoïa. Leif Erickson (l’époux macho de Deborah Kerr dans Thé et sympathie de Vincente Minnelli mais surtout, pour les télévores, le héros de la série Chaparral) s’avère même très inquiétant ; la gifle qu’il retourne à son garçon est d’une grande violence. S’ensuivent d’autres séquences assez angoissantes (le sable avaleur, les regards absents de la petite fille…) jusqu’à la sortie de David du commissariat. Puis, en plus des invraisemblances qui s’accumulent dans les comportements des personnages, nous voici enfermés durant un quart d’heure avec un scientifique qui nous débite ses théories soporifiques sur l’existence de la vie extraterrestre d’une manière didactique mais surtout ennuyeuse au possible. Le réalisateur entrecoupe ce monologue par un long travelling circulaire autour du télescope dont on se demande bien l’intérêt si ce n’est peut-être essayer de nous sortir de notre torpeur. Puis, semblant avoir déjà dilapidé son budget, il enchaîne d’interminables plans (des stock-shots) sur l’avancée des chars ou d’un train de soldats pour finir dans la dernière partie par recycler jusqu’à épuisement au sein de son montage des dizaines de fois les mêmes plans, par exemple lorsque les Martiens s’enfuient à travers les grottes. Martiens qui d’ailleurs suscitent plus le gloussement que la peur avec leurs costumes (faisant penser à des pyjamas) dont on devine parfaitement les fermetures éclairs. Quant au double twist final, s’il a pu faire illusion à l’époque, il risque d’agacer encore plus le spectateur d’aujourd’hui.

Malgré ce ressenti très négatif, les aficionados de la science-fiction au cinéma seront probablement très contents de découvrir Invader from Mars, l’un de ses fleurons les plus célèbres. Et puis, le début du film valait franchement le coup !

En savoir plus

La fiche IMDb du film

Par Erick Maurel - le 22 décembre 2011