Menu
Test dvd
Image de la jaquette

Les Enfants du paradis

DVD - Région 2
Pathé
Parution : 15 novembre 2006

Image

Depuis 2002, l'édition Criterion était celle de référence. On oubliera aisément celle de René Château en 2003 qui faisait le service minimum. Aussi la surprise est de taille quand on regarde ce beau master entièrement restauré. La compression est quasi parfaite pour un film qui a 61 ans. Peu de poussières à l'écran, très beau contraste, il n'y a pas à dire Pathé a fait l'effort que demandait un tel chef-d'oeuvre.

Son

Restauration également en ce qui concerne la piste son qui bénéficie du même soin apporté à l'image. Notons que Pathé nous propose une version supplémentaire en Dolby Digital 5.1 un peu inutile pour un film de ce type. Privilégier les ambiances par rapport au dialogue n'était pas une très bonne idée d'autant plus que la qualité de la piste DD 2.0 est de très haute qualité surtout par rapport à un film d'un tel âge.

Suppléments

DVD 1

Présentation du film par Carole Aurouet - 31'51
Carole Aurouet est l’une des grandes spécialiste de l'oeuvre de Jacques Prévert. Elle a publié divers ouvrages, dont le spécial Prévert dans la revue CinémAction et une étude sur les scénarios de Prévert : Les Scénarios Détournés de Jacques Prévert (Dreamland). Elle est docteur en littérature et civilisation française à la Sorbonne. Elle fait plus qu'une présentation, nous racontant la genèse et l'histoire du film vu à travers le regard de Prévert (elle parle peu de Carné), nous expliquant comment il travaillait « en construisant rigoureusement ses brouillons scénaristiques » basé sur deux grandes feuilles de papier bristol sur lesquelles il dessinait les personnages avec des indications les concernant. On aperçoit ces magnifiques brouillons à l'image, déjà reproduits dans le scénario original de Jacques Prévert publié par les Éditions Monza en 2000. Filmé dans son bureau en plan fixe, cette demi-heure passée en la compagnie de Carole Aurouet se regarde avec un vif intérêt. Notons juste une grosse erreur dans sa première phrase en indiquant que Carné est né en 1909, alors qu'il s'agit de 1906 (on ne le répétera jamais assez) ce qui pour l'année du centenaire ne fait pas très sérieux, surtout que Pathé ressort justement ce dvd pour cette occasion !

Jacques Prévert & Arletty (documentaire) - 13'09
Issu d'un documentaire sur Arletty tourné par Claude-Jean Philippe en 1974, ces treize minutes sont pour l'amateur d'Arletty et de Prévert véritablement bouleversantes. Prévert parle d'Arletty avec grande émotion, évoquant notamment sa voix, « On ne fait pas assez attention aux voix de gens. » Il a ces belles phrases : « Elle a l'érotisme chaste. » , « Elle est pareille dedans, pareille dehors. » On sent qu'Arletty a beaucoup compté pour Prévert. A un moment le journaliste lui pose cette question stupide : « Arletty est-elle un personnage plutôt transparent ou mystérieux ? » et Prévert, interloqué par cette question, de remettre à sa place le présomptueux en répondant « qu'il n'y a rien de plus mystérieux que quelqu'un de transparent ! » Il faut voir comment Prévert parle d'Arletty avec cet air de chien battu, quasiment la larme à l'oeil. Peu avant, Arletty avait lu le beau poème irrévérencieux de Prévert, Quartier Libre, entre le commandant et l'oiseau. Arletty apparaît dans ce reportage embellie par l'âge avec cette voix magique, ce regard de femme libre, confiant que « chacun a une petite cachette qui ne se révèle pas. »

Marcel Carné : le retour - 8'25
Filmé durant le tournage de son dernier film La Merveilleuse visite, Marcel Carné évoque une fois de plus ses débuts avec Jacques Feyder. On aperçoit le comédien Roland Lesaffre et Jean Gabin dans une séquence d'archives qui rappelle que lorsque Le Jour se lève est sorti, « il a fait un bide noir ». Séquence un peu courte.

Ciné Parade : Alexandre Trauner - 1'43
Court extrait d'interview en 1982 dans lequel Trauner évoque avec émotion ses années de clandestinité durant la guerre. Il a pu continuer à travailler grâce à des « amis gentils » comme Léon Barsacq, Georges Wakhévitch, Max Douy et déclare : « J'ai survécu et nous avons travaillé sur des films que nous avons beaucoup aimés comme Les Enfants du Paradis ». Puis il évoque Prévert qui, dans les années trente lors d'un tournage dans les Baux de Provence, lui avait déjà parlé avec fascination des « courts d'amours, du bon roi René ». Nous supposons qu'il parlait de l'époque des Troubadours et de l'Amour courtois. Nous n'en saurons pas plus car l'interview est coupée.

Interview : Alexandre Trauner - 4'31
Dans ce nouvel extrait, Alexandre Trauner évoque sa carrière et Arletty « un être qu'il aime beaucoup », pour qui il éprouve une grande tendresse. Il nous raconte qu'à l'époque on se demandait s'il fallait peindre les décors en noir et blanc. Trauner pense que c'est faux car « une tache de couleur vous fait imaginer une chose qu'une tache en noir et blanc ne fait pas » tandis qu'à l'image apparaît les dessins des décors d'Hôtel du nord et du Jour se lève. Il finit par donner sa définition du décor de film qui se trouve « entre l'architecture, la sculpture, la peinture, la photographie. » Le moment le plus fort de l'interview (qui n'est pas daté) se situe quand le journaliste lui demande si « la création fait qu'on ne vieillit pas ? » Il y a alors un long silence avant que Trauner n'ajoute « qu'on ne sait pas... Enfin, ça c'est une autre paire de manches. » L'air de dire « vous êtes bien gentils mais vous n'allez pas me la faire, ça serait bien sympa mais malheureusement je sais que ce n'est pas le cas ».

Galerie des décors : planches dessins de Alexandre Trauner - 1'24
Pathé clôt cette belle série de bonus par une galerie photographique des dessins de Trauner pour Les Enfants du Paradis.

DVD2

Tête d'affiche : Lady Arletty - 13'27
Pathé poursuit sur sa lancée avec cette belle interview d'Arletty en 1969. Elle parle de son enfance à Courbevoie, de son père mort écrasé par un tramway. Michel Simon explique que c'est peut-être « ce qui lui donne un coté fière, sauvage, indépendant », qu'il se sent proche d'elle car elle a connu l'usine et « s'est faite toute seule », tout comme lui. Interviewé par France Roche, Arletty ajoute que s'il lui avait fallu « tirer les sonnettes » elle serait resté « dans son plumard, c'est un peu venu à moi en fait » car « même des types qui ont besoin de vivre ne tirent pas les sonnettes, question de caractères ». C'est sur que ça doit être difficile à comprendre pour certains ! Elle parle ensuite de ses débuts, lorsqu’elle s'amusait à jouer dans les revues, contrairement au théâtre qu'elle n'aimait pas du tout. Elle n'était l'élève de personne et n'imitait personne. C'est un fait qu'Arletty a créé un personnage qui n'existait pas au cinéma et encore moins dans le cinéma hollywoodien de l'époque. Henri Jeanson dit fort justement que « c'est un personnage qui a beaucoup de dignité, de classe, d'élégance, qui n'a aucune vulgarité, qui a une présence extraordinaire et qui dégage une sorte de poésie involontaire par tout ce qu'elle dégage ». Arletty apparaît ainsi dans ce documentaire comme une grande dame malicieuse lorsqu’elle dit : « Le culot m'amuse mais le manque de tact ça me choque ». C'est Michel Simon qui termine cet extrait en déclarant qu’Arletty était quelqu'un de très pudique, « une vertu assez rare dans nos métiers », et qu'il y avait « autant de fantaisie dans sa vie privée que dans sa vie professionnelle », et d’ajouter : « c'est un éloge que je lui adresse ».

Monsieur Cinéma : Interview de Jean-Louis Barrault - 7'03 (Tchernia)
Interviewé par Pierre Tchernia en 1976, Jean-Louis Barrault parle du trentième anniversaire de la compagnie de théâtre qu'il a créée avec Madeleine Renaud. C'est l'occasion pour lui d'évoquer les divers endroits où ils ont élu domicile. « Comme on dit, nous avons roulé notre bosse. » Tchernia le fait parler des personnages historiques qu'il a interprétés au cinéma, comme Berlioz dans le film de Christian-Jaque ou Louis XI dans Le Miracle des loups d'André Hunebelle. Bien sûr, il parle de son personnage de Baptiste Debureau. Lors de ses recherches, il avait été frappé par « le contraste entre un acteur parlant et bavard comme Frédérick Lemaître et un acteur silencieux comme Debureau », faisant un parallèle avec le premier film parlant de Chaplin.

Une légende, une vie : Pierre Brasseur - 10'13
Pour évoquer Pierre Brasseur son père, Claude Brasseur raconte quelques anecdotes, comment il le faisait répéter etc... Pierre Brasseur « avait horreur de parler de choses graves, profondes, de son métier » ; il avait ainsi « une sainte horreur d'une certaine catégorie d'acteurs qu'il appelait les fanas de l'art drama par exemple ». On réalise que le personnage de Frédérick Lemaître a été en partie basé sur son caractère par Jacques Prévert. Claude Brasseur nous apprend qu'il travaillait beaucoup ses rôles sans toutefois le crier sur les toits, par pudeur. Au final un portrait assez émouvant dans lequel apparaît Pierre Brasseur dans un court extrait où celui-ci parle du problème de savoir quoi faire de ses mains en répétant, et du fait de se retrouver avec « trois mains », vous comprendrez en regardant ce bonus. En revanche, l'extrait de l'interview est coupé en pleine phrase (avec un léger fading) alors que Claude Brasseur raconte que son père lui lisait le rôle de Sganarelle du Don Juan de Molière.

Tournage des Enfants du Paradis - 5'09
Remercions Pathé, une fois de plus, pour avoir extrait de leurs archives ces rushes du tournage des Enfants du Paradis. Ces cinq minutes sont une aubaine pour tous les amoureux de ce film. L'extrait choisi est la scène entre Garance et le Comte de Montray lorsque celui-ci la rencontre dans sa loge et lui offre un énorme bouquet de fleurs : « Tout ce qui m'appartient, je le dépose à vos pieds. » Cette scène est filmée sous plusieurs angles et l'on regrette de ne pas en voir plus. Combien y a-t-il de rushes qui subsistent ? Les verra-t-on un jour ?

Galerie photos - 23'06
L'inévitable galerie de photos est un passage obligé pour tout bonus qui se respectent. Après une première série de photographies de tournage en noir et blanc au rendu impeccable intervient la surprise de cette série avec toute une série de photographies en couleur ! Certes, il n'est pas précisé s'il s'agit de photos colorisées à l'époque ou si elles ont véritablement été prises en couleur mais permettons-nous d'en douter par la manière dont le rose aux joues semble trop souligné. Quoi qu'il en soit, cette série met en avant la richesse des costumes avec ce coté Technicolor un rien désuet qui n'est pas désagréable. Ces photos sont l'oeuvre de l'un des pionniers de la photographie de cinéma Roger Forster qui eu pour élève le célèbre Raymond Voinquel qui travailla beaucoup pour Carné.

Galerie des costumes : planches dessins de Mayo - 1'17
Cette longue série de bonus, tous plus intéressant les uns que les autres, finit par les très beaux dessins de Mayo pour les costumes du film. Mayo avait été conseillé à Carné par Prévert qui l'avait rencontré durant la guerre par des amis communs du groupe Octobre. Peintre de vocation, il s'était reconverti dans les décors et costumes pour le théâtre et le cinéma.

Filmographies
Les filmographies concernent Marcel Carné, Jacques Prévert, Arletty, Jean-Louis Barrault et Pierre Brasseur.

Par Philippe Morisson - le 16 octobre 2006