Test blu-ray
Image de la jaquette

Bayan Ko

BLU-RAY - Région B
Le Chat qui Fume
Parution : 30 novembre 2021

Image

Après Carlotta, c'est Le Chat qui Fume qui s'est intéressé à Lino Brocka avec son film Bayan Ko. Grâce à la coproduction française avec la société Stephan Films, détenue par la productrice-réalisatrice Véra Belmont, le matériel monté avait été rapatrié en métropole pour l'étape du mixage afin d'être présenté sans censure au Festival de Cannes en 1984. Pour ce transfert illégal, les négatifs avaient été mélangés avec de nombreuses bobines inutiles pour passer plus discrètement les douanes et échapper à la dictature de Ferdinand Marcos. Vu que le matériel était toujours stocké en France, Le Chat qui Fume a pu l'utiliser et mener sa propre restauration 4K en 2020, après un scan 5K des négatifs effectué au laboratoire VDM.

C'est un beau transfert, à la précision et au niveau de détail palpables. La copie est totalement stabilisée, complètement nettoyée des traces d'usure. L'étalonnage reste assez naturel, avec des contrastes relativement fidèles aux réglages de l'époque, c'est-à-dire des noirs peu denses et parfois légèrement colorés. La colorimétrie conserve une certaine patine photochimique en ne succombant que très peu à un ajustement plus moderne de la palette : on évite largement les dérives magenta, et c'est tant mieux, avec des tonalités qui restent naturelles. De bien belles conditions en tout cas pour profiter de cette pépite philippine qu'on n'aurait jamais pensé voir un jour édité en Ultra-HD. Car le petit plus de cette édition, loin d'être négligeable et qui fait honneur à l'éditeur, est de proposer également le film en Ultra-HD et en HDR10. Les rendus en piqué, en détail et en colorimétrie sont à peu près équivalents (les rouges sont toutefois assez éclatants). L'UHD permet quand même une meilleure maîtrise du grain, toujours fin et organique, alors que le Blu-ray laisse passer quelques infimes altérations malgré un débit vidéo très solide.

Son

Restaurée à partir du négatif son d'origine, la piste audio est de très bonne facture. Elle a été totalement nettoyée des traces d'usure et bénéficie d'un aspect cristallin évident. L'ensemble est surtout fidèle au mixage d'origine entièrement post-synchronisé : on retrouve des voix légèrement plus mises en avant dans un paysage sonore souvent précis, aux arrière-plans palpables.

Suppléments

Les suppléments sont tous proposés sur le Blu-ray :

Lino Brocka par Bastian Meiresonne (62 min - HD)
Spécialiste du cinéma asiatique, consultant et programmateur pour de nombreux festivals, Bastian Meiresonne aborde avec enthousiasme et précision le cinéma de Lino Brocka, "étonnant réalisateur" de près de 70 films dont il retrace le parcours et les "expériences de vie", de la "crise de foi" où il devint mormon à son passage à San Francisco où il vivait de petits boulots, puis ses débuts de réalisateur pour la télévision philippine jusqu’au cinéma, un film "à l’eau de rose" puis la reconnaissance critique avec Manille. Il présente les grandes lignes de sa filmographie, entre simples divertissements locaux qui le maintiendront longtemps sous les radars de la critique, à des pamphlets virulents contre le régime dictatorial de Marcos. Bastian Meiresonne raconte comment Brocka est devenu peu à peu un "rebelle au pouvoir", se révélant publiquement contre deux lois de Marcos puis le choc de l’assassinat de l'opposant Ninoy Aquino qui "va faire déborder le vase". Il revient sur la sélection cannoise de Bayan Ko qui court-circuitait la censure, les provocations anti-Marcos pendant la conférence de presse, la pression à son retour aux Philippines, les menaces de coupes dans le film sans qu’il ne cède jamais, ou son emprisonnement qui soulèvera une mobilisation internationale. Le programmateur montre comment Bayan Ko, "véritable OVNI du cinéma mondial", est sa façon d’exprimer "sa haine contre le régime Marcos" qui prend le peuple en otage, en faisant passer des messages dans les détails, sous couvert d’un mélodrame qu’il juge "convenu". Il explique la chanson-titre interdite, les allusions à l’Arabie Saoudite, les grévistes en jaune, les vraies manifestations filmées alors qu'elles sont interdites, le héros représentatif des Philippins ou les situations qui illustrent un pays appauvri pendant que Marcos garde les devises. Il décortique la séquence finale, "scène-clé pour Brocka", qui est une reconstitution symbolique de l’assassinat de Ninoy Aquino, avec son héros martyr et la présence de médias qui rapportent les faits sans donner la parole au peuple. Un bon complément, très intéressant et recommandable, qu'on aurait souhaité davantage travaillé sur la forme...

Le Chat qui Fume propose également deux archives d'époque assez intéressantes :

Entretien avec Véra Belmont (9 min - SD)
Interrogée avant la diffusion de Bayan Ko en février 1986 dans la case "Cinéma sans visa" sur FR3, la productrice du film parle avec admiration et enthousiasme de Lino Brocka, cinéaste généreux et impliqué, "presque un leader politique", qui refusait de tourner à l'étranger tant que la situation ne s'améliorait pas dans son pays. Elle évoque le climat politique "très pesant", raconte comment elle a été impliquée dans le film par l'entremise de Pierre Rissient, et la façon dont les bobines ont passé la frontière en douce, revient sur la carrière du film, les prix ou la future sortie aux Etats-Unis. Est également diffusé un extrait d'entretien de Lino Brocka par Yves Mourousi pendant le Festival de Cannes 1984 : le cinéaste parle du tournage illicite, non soumis à la censure, tourné avec de vrais policiers "qui comprenaient la cause".

Bayan Ko au Festival de Cannes 1984 (2 min - SD)
Dans ce reportage diffusé au Journal Télévisé d'Antenne 2, France Roche évoque la présentation de Bayan Ko à Cannes, expliquant comment les bobines du film ont passé discrètement la frontière "dans des valises d'amis complices". Lino Brocka évoque le titre Bayan Ko, chanson populaire contestataire et hymne officiel de l'opposition aux Philippines, et parle de son film, "un cri pour demander un changement de gouvernement", avouant ne pas savoir ce qui l'attend lorsqu'il rentrera dans son pays, rappelant ce qui est arrivé à l'opposant Ninoy Aquino, assassiné "en plein jour"...

En savoir plus

Blu-ray

Taille du Disque : 45 122 620 608 bytes
Taille du Film : 31 418 112 000 bytes
Durée : 1:49:51.125
Total Bitrate: 38,13 Mbps
Bitrate Vidéo Moyen : 34,52 Mbps
Video: MPEG-4 AVC Video / 34528 kbps / 1080p / 24 fps / 16:9 / High Profile 4.1
Audio: Philippine (Other) / DTS-HD Master Audio / 2.0 / 48 kHz / 1641 kbps / 24-bit (DTS Core: 2.0 / 48 kHz / 1509 kbps / 24-bit)
Subtitle: French / 30,367 kbps
Subtitle: English / 30,996 kbps

Par Stéphane Beauchet - le 17 avril 2023