Menu
Critique de film
Le film
Affiche du film

The Death Kiss

L'histoire

L’interprète principal de The Death Kiss, Miles Brent, est assassiné lors du tournage de la scène finale du film. La police se rend compte que la victime jouissait d’un grand succès auprès des femmes d’Hollywood, faisant de ces dernières autant de coupables potentielles. Alors que les soupçons se portent de plus en plus intensément sur Marcia Lane, la scénariste Franklyn Drew décide de mener sa propre enquête…

Analyse et critique

En 1932, malgré son énorme succès obtenu grâce à Dracula, l’acteur hongrois Bela Lugosi ne parvient pas à décrocher de contrat longue durée à Hollywood. Contrairement à un Boris Karloff courtisé par la Universal et ponctuellement par d’autres studios, il doit donc continuer à faire ses preuves. Entre 1934 et 1936, il obtiendra des rôles marquants, qu’il interprétera de manière inoubliable au sein d’œuvres légendaires (The Black Cat, The Raven, et dans une moindre mesure The Invisible Ray). Cette gloire fragile lui permettra tout au moins de traverser les années 30 la tête haute, au travers de quelques très belles productions. Son nom fait vendre, le public l’apprécie, mais les studios l’exploitent (la Universal tout particulièrement) et l’enferment dans un registre qui déclinera donc peu à peu avec lui. Durant l’année 1932, il va tourner un certain nombre de films modestes et tombés dans l’oubli. Parmi eux, le très beau White Zombie de Victor Halperin lui donnera la stature qu’il mérite, mais pour un salaire presque dérisoire. C’est dans cette période d’incertitude et de travail forcené pour prouver qu’il est un acteur sérieux qu’il tourne ce très banal The Death Kiss.

A Hollywood, les années 30 voient arriver un florilège de films criminels bâtis sur le principe d’Agatha Christie (un coupable dont le public ignore le nom jusqu’à la fin et une enquête pour le désigner). Ces « crime-drama », comme on peut les appeler, sont notamment l’apanage de grands studios tels que la Warner Bros. et la MGM au travers de films interchangeables et réalisés par des artisans de seconde classe. La 20th Century Fox ne sera pas en reste avec sa série "Charlie Chan", de même que la Universal qui va produire un certain nombre de films à enquêtes. Certaines œuvres émergent cependant au-dessus de la mêlée, à l’instar de l’efficace Meurtre au chenil réalisé par l’immense Michael Curtiz pour la Warner, ou bien de la prestigieuse série des Thin Man qui débute en 1934 sous la direction de W. S. Van Dyke pour la MGM. De son côté, la Monogram profite également du filon, peu cher à produire, de même que d’autres petites sociétés comme la KBS. C’est elle qui va sortir The Death Kiss, réalisé par Edwin L. Marin, homme à tout faire pour les studios les plus divers qui se fera notamment un petit nom avec le western de série B. Il nous livre ici un film typique du genre, avec son jeune héros au visage pur, sa fournée de personnages antipathiques représentant autant de coupables possibles et son issue forcément théâtrale avec la désignation topique du tueur. Et cela fonctionne plutôt correctement, entre révélations d’arrière-cour et progression, suivant des codes diégétiques bien délimités. En deux mots, le film aligne les figures criminelles potentielles pour ensuite nous en détourner par un alibi solide comme du fer, tout en maintenant l’incertitude quant à leur caractère. La toile de fond, utilisant l’atmosphère des tournages hollywoodiens, est une bonne idée rendant l’ensemble plus sympathique encore. Parmi les membres de la distribution, citons David Manners et Edward Van Sloan, alors tous deux dans une bonne période, alignant des films d’épouvante devenus des classiques du genre (Dracula de Tod Browning et The Mummy de Karl Freund qu’ils tournent ensemble, ainsi que Frankenstein de James Whale pour Van Sloan et The Black Cat d’Edgar G. Ulmer pour Manners). Bien sûr, c’est encore une fois un véritable plaisir de voir déambuler Bela Lugosi dans cette galerie de personnages inquiétants. Cantonné à jouer un second rôle, il n’en n’est pas moins à l’aise dans la peau d’un homme à la fois habituel le concernant (mystérieux) et original (un être relativement normal comparé à la collection de personnages fous et/ou monstrueux qu’il interprétera par la suite). La star est ici une fois encore la meilleure raison de revoir ce film qui, par ailleurs, se tient convenablement durant ses 70 minutes, alternant semi-surprises et suspense relativement opérationnel.

Ni meilleur ni moins bon que la cohorte moyenne de films criminels produits à la même époque, The Death Kiss est un agréable divertissement, pratique pour occuper sa soirée, à condition toutefois d’être peu exigeant. Le meilleur de la carrière de Bela Lugosi est heureusement à venir.

En savoir plus

La fiche IMDb du film

Par Julien Léonard - le 16 juin 2011