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Critique de film
Le film

Le Défi des flèches

(Arrow in the Dust)

L'histoire

Bart Laish (Sterling Hayden), un déserteur en route pour l’Oregon, tombe sur un convoi de pionniers massacrés par les Indiens. Le seul survivant appartient à l’escorte militaire qui était chargée de le protéger, le Major Andy Pepperis, un cousin éloigné qui a fait ses classes avec lui à West Point. Mourant, faisant appel à son sens de l’honneur, il fait promettre à Laish d’aller rejoindre l’avant du convoi, parti un peu avant l’attaque, pour les conduire jusqu’au Fort Laramie. Il refuse tout d’abord mais, alors qu'il tombe une seconde fois sur une caravane décimée, il décide de prendre l’uniforme de l’officier décédé et de s’octroyer son identité. Ayant rejoint le convoi, il prend la tête des opérations. Il doit se défendre contre les assauts incessants des Apaches et des Pawnees ; les deux tribus se sont réunies, semblant vouloir s’emparer de marchandises cachées dans le chariot du chef de convoi, un homme a priori peu recommandable. Des armes et des munitions sans doute ? Ignorant tout de sa véritable identité, tout le monde obéit sans discuter aux ordres de Bart. L’éclaireur Crowshaw (Tom Tully) l’a en revanche reconnu mais décide de faire comme si de rien n’était, ayant plus confiance en le déserteur qu’en la personne du précédent commandant, trouvant que ce dernier manquait par trop de poigne et d’initiative...

Analyse et critique

Après la découverte du sympathique Justicier de la Sierra (Panhandle) et de l’excellent Fort Osage, je fondais de grands espoirs sur la possibilité de faire encore de jolies trouvailles avec Lesley Selander. Mais à la vision d'Arrow in the Dust, il se confirme que les scénaristes Blake Edwards (oui, le fameux réalisateur de La Panthère rose) et Daniel B. Ullman devaient être les principaux instigateurs de la qualité de ces deux précédents films. Malgré le fait d’avoir loupé d'innombrables westerns de Selander, ce 56ème opus ne me fait plus trop regretter (probablement à tort) de n’avoir pas eu l’occasion d’en voir plus car Le Défi des flèches se révèle être un navet de première catégorie, aussi mauvais qu’inconsistant, aussi bâclé qu’ennuyeux, aussi laid que léthargique. Quand une équipe entière (aussi bien technique qu’artistique) se fiche à ce point de son travail, inutile d'aller cautionner longtemps le résultat ! Néanmoins, après avoir entretemps visionné quelques-uns de ses westerns des années 50, il m'apparaît que le cinéaste a néanmoins encore quelques belles réussites à son actif. 

Premier film en Technicolor du studio de la Poverty Row, Allied Artists, Le Défi des flèches était également sorti en France sous le titre Emboscado, qui évoque une tactique mexicaine utilisée par le personnage de Sterling Hayden et qui consiste "à persuader l’ennemi qu’il vous a mis en fuite pour pouvoir ensuite contre-attaquer avec un plus grand effet de surprise." Qu’importe le titre, avec ce film de Lesley Selander, on ne compte plus le nombre de mauvais westerns avec Sterling Hayden en tête d’affiche. Son talent de comédien n’était d’ailleurs pas inné car lorsqu’il n’eut pas de grands réalisateurs pour le diriger, il s’avérait médiocre ; pour sa défense, il faut dire que l’idiotie des scripts des westerns dans lesquels il eut à tourner ne risquait pas de l’aider à faire des efforts. Ici, il interprète un déserteur qui se retrouve du jour au lendemain à la tête d’un détachement de cavalerie sous une fausse identité, sans que personne ne s’aperçoive qu’il n’a jamais eu à commander jusqu’à présent ; auparavant, il était tombé sur un convoi décimé dont le seul survivant était... un de ses cousins. Une fois sa mission accomplie, on lui avoue qu’on savait qui il était et on lui laisse réintégrer l’armée sans rechigner ! Entretemps, il aura eu à combattre toujours de la même façon des Indiens aussi idiots que mollassons : ils se laissent tirer comme des lapins, n’ayant pas compris la tactique de leur ennemi après pourtant une vingtaine d’attaques répétées. Le ridicule des situations n’a d’égal que le bâclage de la mise en scène ou encore la laideur plastique de l’ensemble (avec stock-shots en pagaille), les plans se suivant sans continuité dans l’éclairage (voire même des décors), les cavaliers passant d’un paysage montagneux à un paysage de plaine en deux temps trois mouvements, le tout sans non plus aucun sens du rythme de la part du monteur.

Voici un exemple pour mieux appréhender le "je-m'en-foutisme" général de ce petit western militaire de série, dont même l’intrigue sentimentale surgit comme un cheveu sur la soupe (pauvre Coleen Gray, totalement sacrifiée) ! Sterling Hayden propose que le convoi parte de nuit, les Indiens n’étant pas censés attaquer en nocturne. Quelques séquences plus loin, les chariots avancent en pleine lumière. Ce n'est pas très grave car une ellipse aurait très bien pu nous transporter plusieurs heures plus tard. Mais voilà qu’un protagoniste vient nous rappeler - en nous disant bien clairement et bien fort - qu’il est minuit, alors que les soldats transpirent et plissent leurs yeux gênés par le soleil !! Pas même une nuit américaine, aussi laide soit-elle ; Selander préfère filmer une pleine nuit dans une lumière radieuse. Comme si cela ne suffisait pas, le film est intempestivement bavard avec des dialogues inintéressants au possible, les cascadeurs et les figurants ne semblent pas très vifs ni même convaincants, mal grimés en Indiens. Bref, c’est mal joué, mal filmé, mal monté, mal photographié, mal dialogué, mou comme ce n’est pas permis, répétitif et ennuyeux. Esthétiquement, il n'y a pas un plan pour rattraper l’autre : un résultat calamiteux pour un film à fuir. La seule chose qui aurait pu retenir notre attention était l’agréable chanson I’m no longer a stranger... si elle n’était pas chantée à plus de cinq reprises. Mais ce n'est pas la peine de nous attarder plus avant sur ce mets peu ragoûtant.

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La fiche IMDb du film

Par Erick Maurel - le 6 juillet 2018