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Critique de film
Le film
Affiche du film

Frankenstein Junior

(Young Frankenstein)

Analyse et critique

On ne peut pas prétendre que Mel Brooks soit le plus subtil des réalisateurs comiques, ni même nier la grande irrégularité de son humour, privilégiant nettement le quantitatif au qualitatif ; mais il est au moins aussi difficile de ne pas lui reconnaître le mérite d'avoir donné - au moins durant les premières années de sa carrière cinématographique - quelques unes de ses plus belles pépites au sous-genre qu'est la parodie. Frankenstein Junior, son quatrième long métrage, est ainsi un hommage aussi appuyé que décalé aux productions horrifiques du studio Universal mettant en scène la créature de Frankenstein, et notamment La Fiancée de Frankenstein de James Whale ou Le Fils de Frankenstein de Rowland V. Lee : de la direction artistique pleine de cette saveur gothique si particulière au jeu merveilleusement daté des comédiens, en passant par le décalque à l'identique (ou presque...) de certaines scènes emblématiques (le refuge chez l'aveugle ou la rencontre avec la fillette pour La fiancée..., la partie de fléchettes pour Le Fils...), Mel Brooks prend un malin plaisir à faire « tout comme », pour mieux insérer ses touches personnelles, potaches et surréalistes.

Sans ostentation ou souci du gag à tout prix (ce qui deviendra ensuite l'un de ses défauts majeurs), il pousse les séquences, dans leur cohérence, jusqu'à la frontière du loufoque ou de l'absurde : l'aveugle chez qui la créature trouve refuge est ainsi un peu plus maladroit que l'original (merveilleux numéro comique de Gene Hackman, qu'on aura rarement vu dans ce registre), ou les cheveux dressés de la dulcinée trouvent une origine « électrique » inattendue... On sait par ailleurs que Mel Brooks comédien avait une inclinaison appuyée au cabotinage, multipliant pour le meilleur et parfois pour le pire les clins d'œil à son spectatorat ; absent de l'écran dans ce film-ci, il laisse son extraordinaire casting s'épanouir, d'une Madeline Kahn irrésistible de raideur au fidèle (et ici bossu) Marty Feldman, en passant par Gene Wilder (admirable) ou Peter Boyle dans le rôle touchant de la créature : à l'image de leur inoubliable duo de cabaret, le film enchaîne avec rythme les morceaux de bravoure, les répliques drolatiques y fusent, jusqu'à un admirable rebondissement final (l'un de ces fameux coups de génie scénaristiques qui parsèment - et parfois sauvent - les films de Brooks) pour s'avérer (et d'assez loin) l'œuvre la plus homogène, la plus aboutie, et la plus enthousiasmante de la carrière du cinéaste. Nous avons qualifié un peu sévèrement le registre parodique de sous-genre ; Frankenstein Junior est la preuve par l'exemple qu'il s'y cache tout de même des trésors, de petits chefs-d'œuvre.

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La fiche IMDb du film

Film réédité en salle par Splendor Films

Date de sortie : 2 novembre 2011

La Page du distributeur

Par Antoine Royer - le 1 novembre 2011