On peut ou pas accrocher à l'histoire et aux relations très complexes que nouent entre eux les principaux personnages de ce film, encore une fois trè représentatif de son style.acidparadouze a écrit :
Le problème n'est pas là, car tout comme toi ce que je trouve interessant dans cette histoire est le thème de la culpabilité.
Neanmoins ce que toi tu considères comme un "tout", la cohérence du recit, je le considère pénible. Ce n'est pas tant les personnages qui font que le film est decevant, bien au contraire ils sont très reussis. Mais je pense en effet que le film prend une dimension hors sujet (et très hollywoodienne) avec cette dynamique de l'enquête faite de procès, de temoignages, de flashbacks... Le recit s'engouffre dans de vrais lourdeurs qui annihile autant le suspens qu'il prétend le créer.
Car la force de ce récit est justement au niveau des personnages, la situation en elle-même (le pretre va-t-il reveler le secret?) n'est pas suffisante pour créer le suspens pendant une heure et demie même si il est suffisant pour avoir des personnages d'une force immense. Or Hitchcock se sentant obligé de créer un suspens en arrive à créer plusieurs personnages et des histoires qui engendrent un film proche du film de procès (soit l'horreur totale pour ma pomme). D'ailleurs Hitchcock pensait aussi que l'etrange "hasard" des deux recits parallèles diminue la credibilité du recit. De la même manière je pense aussi que toute cette histoire developpée autour de la femme (même si le personnage en lui-même est interessant), des flashbacks puis du procès ne fonctionne pas du tout car apparait très artificiel.
Que ce soit clair, je ne considère pas le film du tout comme mauvais. Mais ne reussissant jamais à donner la mesure que les personnages méritent, on s'enchevetre dans un recit un peu lourd. Une des choses peut-etre qui ne m'ont pas plus, c'est ce que Hitchcock declare à Truffaut, c'est le manque d'humour tout comme dans Le faux coupable. De la même manière le faux-coupable manque tout autant d'energie à mon avis.
Mais il est une chose toujours plus intéressante, toujours plus subtile chez Hitchcock : c'est l'histoire que sa caméra, son style si reconnaissable entre tous, construit ou déconstruit autour d'elle-même. Il y a toujours plus à voir ENTRE les images que ce qu'elles daignent nous montrer dans un premier temps. C'est dans cet entre-deux que se révèle à mon sens la vraie histoire qu'il filme. En l'occurrence dans cette oeuvre, la vocation SURNATURELLE de quelqu'un qui n'est pas de ce MONDE, ce monde étant vu comme un procès continuel où chacun doit se justifier de tout et de n'importe quoi. Tous les personnages du film se justifient à un moment ou l'autre, que ce soit le flic, le procureur, l'assassin, le juge lui même ! lequel ose se dresser contre ce qu'il croit être un jugement inique, contraire à ce qu'il en attendait, etc.
Je ne connais pas de cinéaste en ce sens plus visible, plus omniprésent dans ses films. Les histoires qu'il a tournées pour moi ont toujours été qu'un vague prétexte pour notre artiste. Il fallait bien trouver une forme, un art pour pouvoir se raconter sans trop se montrer, dire ses obsessions et sa vérité en se servant de n'importe quel matériau plus ou moins conforme à ses désirs. Il y a ainsi dans toute oeuvre de Hitchcock, un second degré extrêmement visible, mais subtilement discret, qui correspond à la signature propre de l'artiste. C'est comme cela aussi que je comprends toutes les apparitions fugitives en chair et en os de notre bonhomme dans ses films. Le cinéaste nous rappelle intelligemment qu'il est aussi devant la caméra et pas seulement derrière, dans son HISTOIRE propre, et pas seulement dans l'histoire que nous croyons tous voir et sous laquelle il s'effacerait comme étant de trop. Dans tout film de Hitchcock, ce qui reste en définitive, c'est ... Hitchcock.