Yasujiro Ozu (1903-1963)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Alexandre Angel
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Re: Yasujiro Ozu (1903-1963)

Message par Alexandre Angel »

Il devrait y avoir du support, non ?
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

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Arn
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Re: Yasujiro Ozu (1903-1963)

Message par Arn »

J'imagine oui, l'inverse serait étonnant. Mais je ne sais pas s'ils ont déjà communiqué officiellement dessus.
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Arn
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Re: Yasujiro Ozu (1903-1963)

Message par Arn »

Vu Femmes et voyous cet aprem.
Un sympathique mélange des genres où Ozu insuffle une grosse dose de romance et de mélo dans un film de gangster.
Imparfait mais intéressant. Rien que pour voir la jeune Kinuyo Tanaka dans ce rôle de jeune femme moderne. Elle se retrouve d'ailleurs en opposition avec une autre femme, plus ancré dans la tradition. Ça inverse un peu les rôles des Soeurs Munekata à venir bien plus tard.

La photo est sublime.
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Jack Carter
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Re: Yasujiro Ozu (1903-1963)

Message par Jack Carter »

bruce randylan a écrit : 3 mai 14, 13:05 Seishun Hoka Go / le soir de la jeunesse[/b] (Tsuneo Hatanaka - 1963)

Deux vieux amis révèlent à une femme qu'ils ont bien connu sa mère - désormais veuve - quand elle était jeune et qu'ils pourraient bien être tous son véritable père.

Il s'agit téléfilm tiré d'un scénario de Yasujiro Ozu. Il me semble même qu'il travailla à la préparation du film avant de décéder. C'est donc devenu un production pour la télévision filmé par l'obscur Tsuneo Hatanaka.
Le look visuel est assez pauvre (y compris dans le master qui existe) avec une poignée de décors anonymes et assez factices. De la même manière, la mise en scène et le découpage sont à des kilomètres de la précision, de la poésie, de la subtilité et du rythme de Ozu.
Mais passées les scènes d'expositions un peu laborieuses (15 minutes), c'est un véritable régal puisque ça reste malgré tout du pur Ozu avec sa galerie de personnages typiques de son univers : les vieux alcooliques, la veuve, le jeune fille qui chercher à se marier mais ne trouve pas de prétendants à son goût, le salary man timide, l'épouse autoritaire, les références aux enfants qui sont moins attentionnés envers leurs parents que des membres extérieurs de la famille etc...

et puis ce ton assez unique avec des situations délicates traitées avec un mélange de légèreté polie et de philosophie sereine. La séquence où les deux amis apprennent à l'héroïne que sa mère avait trois amants (qui avaient signé un pacte de "non agression" :lol: ) est vraiment irrésistible d'humour loin de tout éclat mais aussi exempt de la moindre vulgarité. Il faut voir les réactions de la jeune fille, un peu gêné par ces révélations mais qui décide d'en rire également avec une sacrée répartie (quand les deux vieux annoncent que le surnom de son "père" était "vieux boeuf", celle-ci s’écrie "ah mais je suis une génisse alors !" :mrgreen: )
Ca fonctionne parce que les acteurs surjouent juste ce qu'il faut pour faire passer ces traits de caractères atypiques sans pour autant tomber dans la farce ou le vaudeville basique. D'ailleurs, ça donne une certaine concision à la psychologie qui n'a pas besoin de recourir aux paroles (comme les réactions de cette autre femme qui fait les gros yeux en écoutant son fiancé parler à une inconnue au téléphone). D'ailleurs tous les personnages, premiers comme seconds rôles, sont extrêmement attachants et humains avec une personnalité loin d'être uniforme : la marâtre autoritaire mais bienveillante, la copine qui fait croire qu'elle du tempérament mais devient effacée quand son mari arrive, l'héroïne qui essaye de séduire un homme en le faisant boire en jouant aux dés... D'ailleurs on peut se demander si ses hésitations à choisir à mari proviennent pas de sa triple paternité...

Une nouvelle fois aussi, derrière les sourire, la légèreté et la politesse, il y a une profonde mélancolie - presque une véritable détresse - pour les personnages les moins âgés qui n'ont pas encore la maturité d'avoir le recul pour se montrer attendri par leur passé. La toast final que portent les personnages au "soir de la jeunesse" (alors qu'ils sont eux-même à l'approche de l'obscurité de la vie) a quelque chose d'une sagesse magnifique et lumineuse.

Pour un titre posthume, c'est un petit bijou quand bien même on ne retrouve pas tout à fait la sensibilité filmique de son auteur.
Je suis donc vraiment ravi d'avoir eut la chance de découvrir cette énorme rareté. Pour les parisiens, il repasse dimanche soir à la cinémathèque.
ce telefilm, ainsi que le court-metrage La Danse du lion, restauré en 4K, seront proposé en bonus du coffret Carlotta à venir :D
https://www.cinefeel.fr/dvd/35450200874 ... ujiro-ozu/
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John Holden
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Re: Yasujiro Ozu (1903-1963)

Message par John Holden »

Je vais tâcher de revendre le BR de Dernier caprice d'ici Mars. :mrgreen:
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Jeremy Fox
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Re: Yasujiro Ozu (1903-1963)

Message par Jeremy Fox »

Chronique de Les Sœurs Munakata, mon film du mois de mars et désormais l'un de mes Ozu préférés.
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Alexandre Angel
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Re: Yasujiro Ozu (1903-1963)

Message par Alexandre Angel »

Petites remarques préalables à plus d'exploration.
Je ne lis pas encore le texte d'Erick avant de découvrir le film, ce qui ne saurait tarder mais, d'ores et déjà, je suis impatient de lire car ça a l'air dense et approfondi!
Pour l'instant, j'ai lu en grande partie les comptes-rendus techniques de Stéphane et des premières réflexions émergent.

La principale, qui couvait depuis longtemps chez moi au sujet des restaurations au sens large, est que, si on ne s'arqueboute pas systématiquement sur des principes d'amélioration technique qui peuvent éventuellement aller à l'encontre d'une sorte de "véracité" originelle d'un film, il n'est pas illégitime de préférer une version antérieure à l'upgrade.
Et Stéphane parle justement de cela à propos de Dernier caprice (lequel, soit dit en passant, ne figure pas dans le coffret "Ozu en 20 films") mais je l'avais constaté avec les autres films en couleurs que j'avais vus projetés en salle récemment : c'est en effet un peu froid. Alors certes, on gagne en stabilité et en définition et c'est, de toute manière, du très bon travail.
Mais comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire, pour rien au monde, je ne me séparerais du coffret Arte Video, paru en 2004, qui, outre le fait qu'il s'agit là du plus joli coffret de tout ce que j'ai pu voir en matière d'éditions, tous supports confondus, présente des copies d'une justesse et d'un raffinement, en termes colorimétriques, absolument irremplaçables même si correspondant moins au critères actuels d'amélioration technique.

Je m'étais dit ça devant ces projections : que je prenais acte de ces nouvelles versions qui avaient leur qualité mais qu'elles ne pourraient en aucun cas prendre la place des copies Arte Video du coffret de 2004, plus le dvd simple d'Herbes flottantes, mais celui-là chez MK2.

De la même manière mais pour des raisons moins engageantes de ma part, ce que j'ai parcouru de la restauration d'Il était un père en HD me semble délayer l'impact visuel (même imparfait) de la version SD, les contrastes me paraissant quelque peu noyés dans une texture "farineuse", comme recouverte de poussière.

Cela dit je suis moins sûr de mon ressenti que ce que j'en faisais remonter vis-à-vis de l'exemple précédent (car ça marche moins pour le noir et blanc que pour la couleurs) et comme j'apprends qu'il s'agit d'une version intégrale, non censurée..
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

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Re: Yasujiro Ozu (1903-1963)

Message par Nestor Almendros »

Merci, j'ai corrigé la coquille.
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Re: Yasujiro Ozu (1903-1963)

Message par Arn »

Jeremy Fox a écrit : 1 avr. 24, 07:19 Chronique de Les Sœurs Munakata, mon film du mois de mars et désormais l'un de mes Ozu préférés.

:D Belle chronique dont je partage l'enthousiasme. Le film est aussi assez haut dans mon top du réalisateur.
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Jeremy Fox
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Re: Yasujiro Ozu (1903-1963)

Message par Jeremy Fox »

Arn a écrit : 1 avr. 24, 15:12
Jeremy Fox a écrit : 1 avr. 24, 07:19 Chronique de Les Sœurs Munakata, mon film du mois de mars et désormais l'un de mes Ozu préférés.

:D Belle chronique dont je partage l'enthousiasme. Le film est aussi assez haut dans mon top du réalisateur.
Merci 8)
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tenia
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Re: Yasujiro Ozu (1903-1963)

Message par tenia »

Alexandre Angel a écrit : 1 avr. 24, 09:23La principale, qui couvait depuis longtemps chez moi au sujet des restaurations au sens large, est que, si on ne s'arqueboute pas systématiquement sur des principes d'amélioration technique qui peuvent éventuellement aller à l'encontre d'une sorte de "véracité" originelle d'un film, il n'est pas illégitime de préférer une version antérieure à l'upgrade.
Au-delà de l'aspect de "est-ce que voir tel film en resto 4K n'est pas trop propre ?" (remember Massacre à la tronçonneuse, typiquement), il me semble que cela revient ici, au fond, simplement à questionner le degré de fidélité à l'oeuvre. Dans le cas présent, et comme je l'explique dans le topic Carlotta, je ne suis moi non pas convaincu par l'étalonnage de la nouvelle restauration (ça, plus une très probable grosse bidouille en tout début de film), dont je me demande d'où il sort, a fortiori peu de temps après avoir vu un autre étalonnage Ozu surprenant mais très proche de celui-ci (Herbes flottantes).

Mais ce qui est certain, c'est qu'en plus de ce qui peut être "évidemment" questionnable côté visuel peut être plus à bas bruit coté audio alors que c'est bien plus objectivement problématique. Or, la plupart des films d'Ozu ont reçu de nouvelles restaurations qui intègrent des nouvelles restaurations sonores, et plusieurs (la majorité ?) sont pires que les précédentes. En l'état, il est donc a minima sur cette partie plus que légitime de préférer le travail précédent, mais il serait même très légitime de questionner ce qui a été fait sur les nouveaux travaux et comment ce résultat a-t-il pu être jugé proposable et de qualité, vu qu'il est pire que des travaux qui ont parfois 20 ans et plus.

Enfin, et au-delà de cet aspect spécifique, la plupart des films du coffret m'ont paru moins bien restaurés que ceux parus jusque là, et si je peux comprendre que c'est en partie du aux éléments physiques, il est aussi assez clair que plusieurs des films ont simplement fait l'objet d'un traitement numérique plus agressif et intrusif (dont, jusque là, seul Le goût du riz au thé vert était fondamentalement concerné). Et c'est aussi le cas au niveau du noir et blanc des films en n&b dans le coffret : le niveau de noirs de Femmes et voyous (en tout cas tel que conservé par Carlotta) est totalement à la ramasse (pas étonnant que les Britanniques aient estimé qu'il fallait corriger ça), plus encore que sur Il était un père, pas gâté là-dessus non plus. Et encore une fois, je ne comprends pas pourquoi ces films reçoivent ces approximations là, notamment Femmes et voyous dont les bases ne paraissent pas si éloignées que ça des films en noir et blanc du gros coffret. Cela donne l'assez désagréable impression de films traités comme des films secondaires dans le cadre de la préservation des films d'Ozu.
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Alexandre Angel
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Re: Yasujiro Ozu (1903-1963)

Message par Alexandre Angel »

Et moi qui faisait le sympa en reconnaissant que c'était quand même du bon boulot :?
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Re: Yasujiro Ozu (1903-1963)

Message par tenia »

Alexandre Angel a écrit : 1 avr. 24, 15:46Et moi qui faisait le sympa en reconnaissant que c'était quand même du bon boulot :?
Sur Dernier caprice, je pense que seul l'étalonnage (et la bidouille en début de film) pose souci, et que la présentation est sinon tout à fait dans la lignée du boulot visuel fait sur les autres films couleurs du cinéaste (Bonjour, Le goût du saké, etc), mais les films en noir et blanc me semblent vraiment avoir été traités par l'équipe bis du labo, à grands renforts de filtrages intrusifs qui n'avaient pas été utilisés à une telle intensité sur la très grande majorité des autres films. Ce que tu ressens devant la nouvelle restauration d'Il était un père va d'ailleurs dans ce sens (même si je n'irais pas jusqu'à préférer le DVD pour autant), et je suis persuadé qu'il était possible de faire mieux sur Les soeurs Munakata, Une femme dans le vent et Récit d'un propriétaire même avec ces éléments probablement assez endommagés tout de même. Les bases sont heureusement bonnes, mais cela reste, en l'état, perfectible et donc décevant.

Reste ensuite le son, problème récurrent sur un trop grand nombre de travaux, au Japon notamment mais pas que.
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Re: Yasujiro Ozu (1903-1963)

Message par Alexandre Angel »

SPOILER

Je sors de Dernier caprice, version 4K du nouveau coffret Carlotta et c'est très bon en fait (je parle de l'image) au sens où il a été dit que l'étalonnage privilégiait une colorimétrie plus éteinte mais qui fait ressortir les touches de couleurs de manière subtile (et souvent sublime). En effet, à mesure que la mort du personnage principal infléchit le récit vers la configuration du deuil, deux couleurs finissent par régner sur cette palette : le noir et le blanc. C'est le blanc des kimonos estivaux, des chemises idoines mais aussi celui d'une grisaille urbaine vaguement léthargique. Et c'est le noir des kimonos funèbres, couplé à celui des corbeaux qui envahissent l'image aussi surement que ceux des Oiseaux d'Hitchcock, qui porte la tonalité des séquences finales de manière saisissante. Mais tout au long du film, bon nombre de scènes d'intérieur expriment quelque chose de sépulcral, dont le côté imprégnant est entretenu par une atmosphère caniculaire qui renforce cette impression. Souvent, l'image est doucement colonisée par des ténèbres qui creusent l'image, la rendent saillante, lui confèrent contrastes et dégradés.
De tous les Ozu en couleurs, Dernier caprice est probablement le plus complexe, le plus amer : cocasse et primesautier en un premier temps, puis brutalement enténébré par l'effarant mystère du temps qui passe. Et quand on passe de la cheminée du crematorium crachotant une fumée blanchâtre à la procession funèbre de la famille Kohayagawa sur un ponton longeant la mer, la musique soudainement lugubre de Toshiro Mayuzumi nous étreint jusqu'au cœur des entrailles.

Il n'y a rien à faire, c'est génial.
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