
Hier soir, j'ai donc découvert Une Histoire Immortelle, TV film réalisé pour l'ORTF par le génial Orson Welles en 1967 et qui fut diffusé l'année suivante dans sa version française de 50 minutes. Parallèlement, le cinéaste tourna une version anglaise de 57 minutes qui fut par ailleurs projetée au cinéma dans certains pays. C'est cette version que j'ai visionnée via le somptueux BR restauré et édité par Gaumont.
À mon avis, Une Histoire Immortelle est un GRAND film de Welles où le cinéaste se met lui-même en scène aux côtés de prestigieux comédiens tels que Jeanne Moreau, Roger Coggio, Norman Eshley (acteur britannique vu dans Terreur Aveugle de Fleischer ou encore dans la fameuse série horrifique Thriller, créée par le non moins fameux Brian Clemens) ou encore Fernando Rey dans un petit rôle de marchand. Un conte comme seul Welles sait les magnifier, adapté d'une nouvelle de la baronne danoise Karen Blixen, dont le cinéaste américain était un fervent admirateur. C'est par le biais de Jeanne Moreau que cette aventure fut possible, l'ORTF cherchant à investir des moyens pour produire un TV film mettant en scène la célèbre comédienne. Welles vivant à l'époque en Espagne, elle le contacta pour lui faire part du projet qu'il accepta en proposant l'adaptation de L'Éternelle Histoire rédigée par Blixen et éditée en 1958 dans le recueil Le Festin de Babette Et Autres Contes.
Mr Clay, vieux bonhomme malade, aigri et très riche, n'aime que les livres de comptes et déteste les rêves et les prophéties. Suite à une conversation avec son secrétaire, il se souvient d'une histoire qu'on lui a racontée, celle d'un marin qui reçoit cinq guinées en échange d'une nuit d'amour avec une jeune et belle dame. Le vieil homme décide de transformer cette légende en réalité avec la complicité de son jeune assistant. Mais les choses ne se passeront pas comme prévues…
À l'instar de Kubrick à la même époque (qui rêvait en secret de réaliser Star Wars VII), Welles opère un minutieux travail de mise en scène exaltée par le boulot d'un jeune chef opérateur belge de 32 ans, Willy Kurant, remplaçant au pied levé le précédent directeur photo renvoyé par le réalisateur au bout de 3 jours. La réunion des deux hommes crée indéniablement une magie cinématographique peu commune. Un vrai grand film onirique et prodigieux bercé par les intemporelles mélodies d'Erik Satie.
9/10

Puis dans le cadre de mes découvertes du cinéma français sous toutes ses formes, j'ai commencé à me plonger dans l'univers complètement barré de Jean-Denis Bonan avec le court-métrage Tristesse Des Anthropophages, réalisé en noir et blanc en 1966 et immédiatement censuré par le gouvernement Pompidou sous la présidence de Charles de Gaulle. Ce film fut considéré comme perdu pendant 49 ans avant d'être retrouvé et restauré par Luna Parks Films et les Archives Françaises du Film en 2015.
Dans un monde où tout est interdit sauf ce qui est obligatoire, un jeune homme, producteur en scatophagie dans un fast-food à la mode où de riches clients viennent se nourrir d'excréments humains, se souvient de ses moments de liberté passés avant d'être harcelé par une horde d'hommes littéralement obsédés par les conventions.
Chaque scène du métrage est une métaphore à propos de la dictature qui préfigure Salò ou les 120 Journées de Sodome de 9 ans. On y voit même Jean Rollin, ami de Bonan, y faire de la figuration.
6.5/10

Ce soir, c'est fiesta sur la plage avec les potes. Si je regarde un film en rentrant, ce sera certainement La Femme Bourreau, le 1er long-métrage de Bonan, réalisé en 1968.