Qu'est-ce que cela change réellement ? Le regard de Spielberg sur sa jeunesse me semble, à mon sens, plus intéressant que celui de Gray pour les raisons évoquées ci-dessus.mannhunter a écrit : ↑23 févr. 23, 13:42reste à savoir quelle est la part fantasmée, de relecture éventuelle via les Fabelmans, et ce qui est véridique sur l'évocation de sa jeunesse..après je n'ai pas vraiment suivi les entretiens donnés par Spielberg à la sortie du film mais il me semble qu'il a donné un début de réponse en parlant d'un film "semi" autobiographique?
The Fabelmans (Steven Spielberg - 2022)
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Re: The Fabelmans (Steven Spielberg - 2022)
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Re: The Fabelmans (Steven Spielberg - 2022)
Et je rebondis sur mon propre message pour ajouter que, tout comme El Dadal, j'ai trouvé The Fabelmans au contraire bien loin de ce que l'on pouvait attendre de la part de Spielberg, qui peut parfois avoir la main lourde lorsqu'il s'agit de tirer sur la corde sensible (oh ! un Spielbergzouze qui dit du mal de son idole

Alors que, comme l'a souligné Jeremy Fox, son film s'avère finalement à l'image du score de Williams : sans effusion, discret, tout en retenue. Un côté force tranquille, maître de son art et de son sujet, qui met ses personnages au centre du projet, tandis que la mise en scène se fait subtile, sans effets ostentatoires ni lumière éclatante (ça faisait longtemps que je n'avais pas vu une photo de Kaminski qui a aussi peu l'air "kaminskienne"...et ça fait un peu de bien).
Et sans pour autant avoir versé des torrents de larmes (je dirais même que le film ne s'y prête pas vraiment, puisqu'il ne tombe jamais dans l'écueil du tire-larmes), il est difficile pour moi de ne pas être ému par ces rapports filiaux et cette volonté d'utiliser le 7ème Art pour accepter l'inacceptable (superbe séquence de découverte d'infidélité, qui m'a instantanément fait penser à De Palma en général et à Blow Out en particulier), mais aussi sur le pouvoir des images (la figure de héros construite par son film de plage).
Le tout sans niaiserie, ni naïveté ni regard béat (alors que l'affiche ratée pouvait laisser croire le contraire), mais avec justesse et délicatesse. On est loin du trip egocentrique complaisant, le regard tourné vers le passé plein de gros sabots et symbolismes lourdauds. Et le portrait qu'il fait de ses parents est magnifique (faut dire qu'ils sont sacrément bien servis par Paul Dano et Michelle Williams, absolument parfaits - cf. la scène du placard).
Le film a un aspect presque "évident", simple, tout semble couler de source, c'est extrêmement vif, enlevé et très souvent drôle (à ce titre, l'avant-dernière scène est un petit sketch comique à elle toute seule, et ce dès l'entrée dans le champ de Lynch sur un son de scratch qui stoppe la musique).
À un tel point que je crois n'avoir jamais vu 150 minutes passées aussi vite - surtout comparées aux 166 vécues la veille avec Pacifiction. C'est rarissime mais lorsque le générique de fin est apparu, je me suis vraiment dit "Attends...déjà ??". Comme quoi, Einstein avait raison : le temps, c'est relatif.
Quant au tout dernier plan, en plus de proposer une idée visuelle assez géniale, j'ai été obligé de remarquer ce qui m'a paru être un écho direct à l'une de ses œuvres majeures à venir, et ce via la musique de Williams qui, en quelques notes évoquent l'un des thèmes de Jaws (la ressemblance est beaucoup trop frappante pour que ce ne soit que coïncidence). Je ne sais pas ce que ça signifie, je ne sais même pas si c'est avéré, mais je trouve que ça conclut joliment ce magnifique film.
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Re: The Fabelmans (Steven Spielberg - 2022)
Ah? Je serais attentif ce week end, à la révision.Flol a écrit : ↑23 févr. 23, 14:54 j'ai été obligé de remarquer ce qui m'a paru être un écho direct à l'une de ses œuvres majeures à venir, et ce via la musique de Williams qui, en quelques notes évoquent l'un des thèmes de Jaws (la ressemblance est beaucoup trop frappante pour que ce ne soit que coïncidence). Je ne sais pas ce que ça signifie, je ne sais même pas si c'est avéré, mais je trouve que ça conclut joliment ce magnifique film.
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Re: The Fabelmans (Steven Spielberg - 2022)
Alors je vais te contredire quelque peu. Oui, j'ai remarqué ce passage quand Sam s'éloigne de nous d'un pas primesautier. Mais je ne trouve pas qu'elle ressemble tant que ça au thème de Jaws. Ou alors au sens hyper-large parce que des gimmicks musicaux chez un compositeur peuvent se retrouver de loin en loin.
Là, j'ai beaucoup plus directement pensé que Williams adoptait un ton picaresque au parfum d'Irlande à la fois typique du roman d'apprentissage (le jeune homme qui a trouvé sa vocation et qui va au devant de la grande aventure de sa vie) et en même temps, tout à fait à propos, puisque Sammy vient de quitter John Ford, monsieur Irlande par excellence. En résumé, le côté "gigue" est plus prononcé que pour Les Dents de la mer.
Là, j'ai beaucoup plus directement pensé que Williams adoptait un ton picaresque au parfum d'Irlande à la fois typique du roman d'apprentissage (le jeune homme qui a trouvé sa vocation et qui va au devant de la grande aventure de sa vie) et en même temps, tout à fait à propos, puisque Sammy vient de quitter John Ford, monsieur Irlande par excellence. En résumé, le côté "gigue" est plus prononcé que pour Les Dents de la mer.
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Re: The Fabelmans (Steven Spielberg - 2022)
Ah oui c'est tout à fait à ce film que ça m'a aussi fait penser. Même puissance des expressions, du regard, alors qu'ils découvrent ce qu'ils ont filmés/enregistrés.
C'est çaLe film a un aspect presque "évident", simple, tout semble couler de source
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Re: The Fabelmans (Steven Spielberg - 2022)
En fait je pense comme toi : je crois qu'il s'agit tout simplement d'un gimmick musical que Williams a reproduit probablement de façon inconsciente (de la même façon que Williams s'est régulièrement auto-cité durant ses plus de 60 ans de carrière).Alexandre Angel a écrit : ↑23 févr. 23, 15:29 Alors je vais te contredire quelque peu. Oui, j'ai remarqué ce passage quand Sam s'éloigne de nous d'un pas primesautier. Mais je ne trouve pas qu'elle ressemble tant que ça au thème de Jaws. Ou alors au sens hyper-large parce que des gimmicks musicaux chez un compositeur peuvent se retrouver de loin en loin.
Mais ça me fait plaisir d'y voir une référence à un film à venir, même si je suis certainement à côté de la plaque.

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Re: The Fabelmans (Steven Spielberg - 2022)
Encore une fois, c’est peut-être le fait d’avoir vu le film à 2 jours d’intervalle avec Armageddon Time, mais je trouve cela au contraire être un film constamment dans la nostalgie sentimentaliste, regard dans le rétroviseur en crescendo car c’est formidable, malgré la cellule familiale complexe, malgré l’antisémitisme latent, malgré ceci et cela, c’est-y pas formidable la rencontre avec l’idole ralalalala et puis ce final du héros s’en allant guilleret sur le soleil couchant dans les studios magiques qui ont donné tellement de chefs d’œuvre.Flol a écrit : ↑23 févr. 23, 14:54Et je rebondis sur mon propre message pour ajouter que, tout comme El Dadal, j'ai trouvé The Fabelmans au contraire bien loin de ce que l'on pouvait attendre de la part de Spielberg, qui peut parfois avoir la main lourde lorsqu'il s'agit de tirer sur la corde sensible (oh ! un Spielbergzouze qui dit du mal de son idole).
Le tout sans niaiserie, ni naïveté ni regard béat, mais avec justesse et délicatesse. On est loin du trip egocentrique complaisant, le regard tourné vers le passé plein de gros sabots et symbolismes lourdauds.
On peut aimer les violons, trouver le ton appréciable (j’ai trouvé le film efficacement émouvant sur le moment, notamment la fameuse partie dans le lycée, que je trouve thématiquement fascinante, effectivement sur le pouvoir des images, entre manipulation des foules et révélation du réel, et très joliment mise en scène), mais pour le reste, on est précisément sur le regard gentiment mouillé, avec son schéma narratif de success story initiatique.
A contrario, justement peut-être car la vie, notamment familiale, de Gray n’a pas eu la trajectoire de celle de Spielberg, son récit est ô combien plus sobre (certains parlaient de froid ou distant) et bien moins dans cette espèce d’obsession mais guérissante (c’est mal mais c’est bien) montrée chez Spielberg, où OK c’est quand même pas une histoire très joyeuse mais bon, au final, le pouvoir de la passion l’emporte.
Moui enfin pour le coup, ce serait le complot le plus nul de l’histoire, vu effectivement la vitesse à laquelle le fiston découvre le pot au rose. Surtout que le film appuie à mort sur le comportement légèrement étrange de sa mère, pour lequel il n’y a pas besoin de longtemps pour deviner (avant le fils) ce qui se trame. A partir de là, j’ai le souvenir d’avoir longuement attendu que le film daigne révéler cela, alors que bon, ça va quoi, on a bien compris.
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Re: The Fabelmans (Steven Spielberg - 2022)
Le problème dans ce que tu dis est que, malgré quelques similitudes (éléments autobiographiques, évocation du passé, héros enfantin ou ado, famille juive), ce sont deux films qui n'ont rien à voir. Surtout formellement. C'est comme si tu mettais en concurrence un film de Michael Powell avec un Sidney Lumet (en même temps il y a Judd Hirsch dans le Spielbergtenia a écrit : ↑23 févr. 23, 16:07 A contrario, justement peut-être car la vie, notamment familiale, de Gray n’a pas eu la trajectoire de celle de Spielberg, son récit est ô combien plus sobre (certains parlaient de froid ou distant) et bien moins dans cette espèce d’obsession mais guérissante (c’est mal mais c’est bien) montrée chez Spielberg, où OK c’est quand même pas une histoire très joyeuse mais bon, au final, le pouvoir de la passion l’emporte.

Dernière modification par Alexandre Angel le 23 févr. 23, 16:41, modifié 2 fois.
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Re: The Fabelmans (Steven Spielberg - 2022)
Oui le pouvoir de la passion comme ce qu' énonce la mère à la fin (et dans la bande-annonce): "Fais ce que ton coeur te dicte"!tenia a écrit : ↑23 févr. 23, 16:07A contrario, justement peut-être car la vie, notamment familiale, de Gray n’a pas eu la trajectoire de celle de Spielberg, son récit est ô combien plus sobre (certains parlaient de froid ou distant) et bien moins dans cette espèce d’obsession mais guérissante (c’est mal mais c’est bien) montrée chez Spielberg, où OK c’est quand même pas une histoire très joyeuse mais bon, au final, le pouvoir de la passion l’emporte.
Le Gray m'a semblé plus approfondi et subtil dans l'écriture (et la direction d'acteurs) des personnages, ça m'a paru sonner plus réaliste dans les scènes intimistes, familiales..c'est une des choses qui m'a gêné dans "The Fabelmans" presque jamais je n'ai cru à la description de cette famille.
Des conventions là encore, l'impression d'avoir vu ça ailleurs beaucoup de fois, le personnage de la brute par exemple.
Oui il y a un côté démonstratif dans cette partie là encore, de plus le scénario du film les enjeux à ce moment là (la partie "Maman a trahi Papa") ne m'ont pas vraiment captivé. Peut-être que j'aurais aimé que Spielberg passe plus de temps sur ses scènes consacrées à sa passion du 7ème Art, les scènes familiales d'une certaine banalité parasitant le reste, mais ce n'est que mon ressenti..tenia a écrit : ↑23 févr. 23, 16:07Moui enfin pour le coup, ce serait le complot le plus nul de l’histoire, vu effectivement la vitesse à laquelle le fiston découvre le pot au rose. Surtout que le film appuie à mort sur le comportement légèrement étrange de sa mère, pour lequel il n’y a pas besoin de longtemps pour deviner (avant le fils) ce qui se trame. A partir de là, j’ai le souvenir d’avoir longuement attendu que le film daigne révéler cela, alors que bon, ça va quoi, on a bien compris.
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Dernière modification par mannhunter le 23 févr. 23, 17:21, modifié 6 fois.
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Re: The Fabelmans (Steven Spielberg - 2022)
On dépasse les similitudes : projet autobiographique d’un réalisateur américain, qui nous raconte son enfance dans une cellule familiale en pleine implosion, dans une famille juive à une époque où l’antisémitisme restait latent y compris chez les jeunes, faisant du héros à cette époque une sorte de marginal.Alexandre Angel a écrit : ↑23 févr. 23, 16:38 malgré quelques similitudes (éléments autobiographiques, évocation du passé, héros enfantin ou ado, famille juive), ce sont deux films qui n'ont rien à voir. Surtout formellement.
Ce pitch s’applique EXACTEMENT aux deux films et je n’étais d’ailleurs pas le seul à avoir fait ces 2 APs au Festival Lumière, et pas le seul à sortir du Spielberg en me disant « eh mais c’est quand même la même histoire, mais traitée très différemment ».
Et ensuite : oui, justement ils sont effectivement formellement pas du tout dans le même traitement, et je me dis qu’avoir vu le Gray juste avant m’a peut-être d’autant plus mis en lumière le traitement du sujet chez Spielberg, que je trouve bien moins discrète et simple et fine que ce que certains disent. A côté, le Gray, c’est du Haneke.
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Re: The Fabelmans (Steven Spielberg - 2022)
Non tenia, je suis désolé mais ce n'est pas la même histoire. Le Gray ne traite pas de l'antisémitisme* (nonobstant l'évocation des pogroms). Il n'est sans doute pas loin je le concède ( mais la victime est avant tout un garçon noir et si l'antisémitisme est suggéré dans l'enceinte du lycée privé, le héros n'en souffre pas particulièrement).tenia a écrit : ↑23 févr. 23, 16:58 On dépasse les similitudes : projet autobiographique d’un réalisateur américain, qui nous raconte son enfance dans une cellule familiale en pleine implosion, dans une famille juive à une époque où l’antisémitisme restait latent y compris chez les jeunes, faisant du héros à cette époque une sorte de marginal.
Ce pitch s’applique EXACTEMENT aux deux films et je n’étais d’ailleurs pas le seul à avoir fait ces 2 APs au Festival Lumière, et pas le seul à sortir du Spielberg en me disant « eh mais c’est quand même la même histoire, mais traitée très différemment ».
La famille, d'autre part, n'implose pas, comme dans le Spielberg.
La question du traitement différent ne se pose pas puisqu'ils ne racontent absolument pas la même chose.
* Cela dit le Spielberg ne traite pas plus de l'antisémitisme. Il l'évoque de manière cinglante mais ce n'est pas la grande affaire du film. En revanche ce qui me paraît plus central dans le film est la judéité et les termes yiddish fusent plus que je ne l'aurais imaginé. L'arrivée dans le récit de Judd Hirsch a quelque chose de presque fantastique, comme s'il incarnait une sorte de créature de l'imaginaire juif ancestral, façon Dibbouk ou Golem. On est pas très loin des frères Coen de A serious man.
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Re: The Fabelmans (Steven Spielberg - 2022)
Et au lieu de prendre l'un pour taper l'autre, je trouve que l'évocation à caractère autobiographique des enfances de Gray et Spielberg montre à quel point les grands cinéastes ne pourront pas faire la même chose mais parviennent à suffisamment comprendre leur rétrospection qu'il ne peut qu'en sortir des visions personnelles et qui leur est propre. Or, l'un des sujets quand même principaux du Spielberg est le cinéma dans son sens propre là où la sensibilité artistique du jeune "Gray" est dans son sens de l'observation et l'imprégnation mais pas dans le lien qu'il a avec le grand écran.
Deux grands films en tout cas!
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Re: The Fabelmans (Steven Spielberg - 2022)
À nouveau, je crois que les films diffèrent surtout car le père de Gray n'a officiellement et explicitement jamais été fier de son fils et que sa mère est morte 2 ans après les évènements montrés dans Armageddon Time.
Trajectoires de vie différentes --> films aux tonalités différentes.
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Re: The Fabelmans (Steven Spielberg - 2022)
Et ce qui est fou, c’est que certains peuvent apprécier autant l’un que l’autre. 
