Film du mois :

Et donc...Major Tom a écrit : ↑14 déc. 21, 20:27Pour la peine j'en combine 2 en 1 : "Je poste, tu postes..." (Commissaire, si tu nous regardes...) et mes Films du mois qui se fêteront sous le signe de... Ana de Armas ?... Jacqueline Bisset ?... Bernard Menez ?... Eh non : de la joyeuse blonde pétillante Goldie Hawn...
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FILMS DÉCOUVERTS
Une fille dans ma soupe (There's a Girl in My Soup — 1970, Roy Boulting) : 3 / 10
Avouons-le tout de suite : ce titre n'augurait rien de bon mais il ne faut jamais juger un film sur son titre et, aussi surprenant que cela puisse paraître, ça s'est avéré effectivement très mauvais. Je nuancerais toutefois en reconnaissant une qualité indéniable et qui vaut le peu de points que j'accorde à cette comédie molle, désuète et pas indispensable : son duo de têtes d'affiche composé de notre chère Goldie, l'Américaine désarmante et toujours aussi adorable dans son côté insouciante, malicieuse et maladroite ("attachiante", comme disait mon ex avant que je la pousse par la fenêtre), et du so british Peter Sellers, chroniqueur gastronomique et dragueur invétéré, donc amateur de bonne chair dans tous les sens surtout quand elle est fraîche (au-delà de 25 ans vous n'êtes plus comestibles, mesdames). Film recommandé aux militant⸱e⸱s néo-féministes/wokes/inclusi⸱ve⸱f⸱s, vous l'adorerez. En dépit d'un scénario et de dialogues indigents, pour une histoire qui ballotte entre Alfie le dragueur et Nuit d'ivresse, nos deux protagonistes rehaussent le niveau général par leur talent, parvenant même à rendre certains moments très sympathiques. C'est surtout avec l'entrée en scène de Goldie que l'on commence à se réveiller — car on s'endort dès le début. Elle va fiche le désordre dans la vie (et le cœur) du vieux coureur qu'elle va suivre de Londres à la Côte d'Azur, notamment lors de leur passage à la foire aux vins de Pouilly-sur-Loire, où elle choque les Françaises et les Français par ses petites tenues ou en finissant totalement ivre après la dégustation, et... oui, vous avez bien lu, Goldie Hawn et Peter Sellers ont tourné à Pouilly-sur-Loire.
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Le Dernier duel (The Last Duel — 2021, Ridley Scott) : 7 / 10
À ma droite, messire Ridley Scott, 84 piges, 79 Kg pour 1,74 m, 27 combats — bientôt 28 — quelques défaites (beaucoup même) mais aussi de très, très belles victoires. À ma gauche, un journaliste, interchangeable, qui lui dit que son film est moins raté au niveau authenticité historique que ses précédents. Mortecouille ! Bien que le combat contre ce nodocéphale était gagné d'avance, messire Scott a perdu son sang froid, et au lieu de lui jeter son gant, longue distance sociale oblige, il a préféré asséner au maroufle quelques "Fuck you!" royaux (rappelons qu'il a été anobli). Mais on lui pardonne, évidemment, car depuis son tout premier duel filmé quelques décennies en arrière, messire Scott a souvent prouvé qu'il méritait notre respect, et cette tentative de joute verbale musclée démontre qu'il en a encore derrière la brague. Le duel est même une histoire de famille car le regretté Tony, le frangin, a débuté par celui qui ouvre Barry Lyndon, filmé en l'absence de Kubrick, l'entraîneur et mentor (en somme le Mickey Goldmill des frères Scott), mais en suivant scrupuleusement ses indications. Oui, le premier plan de Barry Lyndon a été mis en boîte par Tony Scott ; Noël approche et je vous offre cette anecdote qui ne passionnera absolument personne quand vous la raconterez au repas de famille... Belle leçon technique offerte aux fans, Le Dernier duel est un spectacle immanquable et pourtant manqué, hélas, par un public ingrat. Visuellement c'est beau, très beau, et formidablement mis en scène. Concédons aux querelleurs un peu orchidoclastes et ergotant sur des détails (de l'Histoire) quelques plans inutiles par-ci par-là, et des longueurs sur ses 2h32 qui passent tout de même rapidement. Au cours de ces trois chapitres pour trois points de vue différents (à la De Palma, tiens, tiens), les scènes jouant sur des éléments en apparence anodins et modifiant notre vision des personnages peuvent paraître répétitives, forcément. Mais globalement cette épopée #metoo médiévale est une réussite, bien écrite et convoquant adroitement le passé et le présent — rappelant au passage qu'un film, historique ou non, est avant tout un polaroid de l'époque de son tournage — et se concluant par une baston dont se régaleront les fans de combats nerveux et dynamiques. Casting impeccable, mention pour Affleck méconnaissable, mais tous, Damon, Driver et la découverte Jodie Comer (aperçue mais vite oubliée dans La Régression des Skywalker, épisode numéro quelque chose de Star Wars) sont excellents et joliment habillés au score par Harry Gregson-Williams. Messire Ridley Scott, en très grande forme, ne va pas encore raccrocher la lance et l'épée, et c'est une bonne nouvelle.
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Parenthèse Goldie Hawn* * *
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La Mort sera si douce (After Dark, My Sweet — 1990, James Foley) : 6,5 / 10
De son vivant, Jim Thompson et le cinéma ça n'a jamais été une histoire d'amour. Kubrick, évoqué précédemment, a à peine reconnu son travail (qu'il préfère s'approprier au générique) sur l'Ultime razzia et Les Sentiers de la gloire, Peckinpah est contraint, sur le tournage de Guet-apens, de s'éloigner de la noirceur du Lien conjugal pour obéir à un McQueen acteur-producteur que l'excès de coke rend instable (on ne le répètera jamais assez : la drogue, avec modération), pour aboutir malgré tout à ce que je considère comme un des sommets de sa filmographie — peut-être même mon film préféré de Peckinpah. Thompson a fait quelques procès, puis est mort pauvre et alcoolique. Mais la littérature de série noire offrant une narration visuelle et cinégénique, Hollywood a logiquement fini par s'intéresser davantage à ses ouvrages, réputés de qualité. Nous nous retrouvons ici, avec cette adaptation de La Mort viendra, petite, en terrain familier avec le champ lexical du roman noir thompsonnien, une route coupant le désert sous une chaleur écrasante, une belle veuve portée sur la boisson (Rachel Ward), un raté qui prépare un mauvais coup (Bruce Dern) et un ancien boxeur en fuite (Jason Patric en sosie de Billy Zane), échappé d'un asile d'aliénés mais moins idiot qu'il en a l'air, et qui a autrefois tué son adversaire sur le ring... James Foley est l'auteur de films que j'ai particulièrement appréciés, le culte Comme un chien enragé ou le prestigieux numéro de grands comédiens de Glengarry Glen Ross avec ses textes de David Mamet, mais aussi de navetons terribles comme Obsession mortelle que la très bonne B.O. — inédite dans le commerce — d'un Carter Burwell échappé des frères Coen ne rattrape pas, avec un William Petersen loin de Manhunter et un inénarrable Marky Mark... La Mort sera si douce n'est clairement pas une œuvre majeure de l'ère néo-noir d'avant sa mise à mort brillante par Tarantino, mais l'excellent casting, sa mise en scène très inspirée avec son choix d'angles ou ses mouvements de caméras, couplée avec un montage concis et parfois frénétique, en font un thriller efficacement réalisé et qui se regarde agréablement, à défaut de surprendre... En parlant de surprise il y en a tout de même une, la musique, un score synthétique ordinaire pour un Hollywood Night des années 80/90 qui passe totalement inaperçu. Rien de grave, mais d'après le générique le compositeur s'appelle Maurice Jarre alors oui, ça surprend.
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Panique au lycée (Koko dai panikku — 1978, Sōgo Ishii) : 6,5 / 10
Une journée caniculaire assommante qui débute par le suicide d'un lycéen, puis un de ses camarades qui pète les plombs, accusant son impitoyable professeur de maths aux méthodes trop strictes d'en être responsable. Il s'enfuit de sa classe, vole un fusil dans une boutique d'armes, retourne dans son lycée et bute le prof en plein cours. Démarre alors une chasse à l'homme avec la police, de classe en classe, qui tourne à la prise d'otages une fois acculé dans la dernière pièce. Les amateurs de Stephen King auront peut-être noté que Rage, roman sur le même sujet signé sous le pseudo de Richard Bachman, date de l'année précédente, mais Panique au lycée est d'abord le remake d'un court-métrage réalisé deux ans plus tôt par son cinéaste débutant, donc pur hasard... La mise en scène, hyperactive, coupe autant le souffle des otages que du spectateur tant ça court dans tous les sens, jusqu'à même bousculer la caméra notamment dans la grande scène étouffante de la panique du titre. Impressionnant documentaire d'un réalisme redoutable sur la situation des lycées en banlieue selon Éric Zemmour (y compris sur les faciès : pas un seul Blanc, on vous l'avait bien dit), Panique au lycée montre justement, lors d'une séquence un peu burlesque, comment un crime peut se retrouver récupéré idéologiquement, avec ce car de miliciens fascistes venus scander leurs slogans devant le lycée. Difficile de ne pas songer aux prises de parole de la NRA Outre-Atlantique qui auront lieu après chaque tuerie en milieu scolaire. Cela finit en altercations grotesques devant l'établissement alors même que la prise d'otages a encore lieu à l'intérieur... Dans sa poursuite, on s'étonnera tout de même de ne voir aucun élève se jeter sur le tireur et de le maîtriser alors qu'une trentaine d'occasions leur sont offertes. Mais la mise en scène, énergique disais-je, et la rage palpable sur le visage de l'acteur nous le font (un peu) oublier. Premier film de Sōgo Ishii, et premier film que je vois de ce cinéaste. C'est parfois maladroit, mais je l'ai suffisamment apprécié pour m'intéresser aux autres films de son auteur. Si les spécialistes ont des suggestions...
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Parenthèse Goldie Hawn* * *
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Libres sont les papillons (Butterflies Are Free — 1972, Milton Katselas) : 7,5 / 10
Aveugle de naissance, Don a choisi de quitter le confort bourgeois de son ancienne vie pour oublier un amour déçu, et s'éloigner d'une mère conservatrice et très protectrice. Il vit pour la première fois seul dans un appartement de San Francisco où il apprend à se débrouiller, et fait la rencontre de sa nouvelle voisine, Jill, une apprentie comédienne, hippie libérée à moitié à poil la plupart du temps, désordonnée, un peu nunuche et surtout rigolote, bon vous l'aurez compris, c'est Goldie Hawn (je suis persuadé après avoir vu ce film qu'elle a inspiré le personnage de Penny, dans la sitcom The Big Bang Theory ; il y a trop de points communs). Ils se rapprochent très vite, il la corrige dans ses citations d'écrivains qu'elle mélange, tandis qu'elle l'initie à sa culture décomplexée, le recoiffe, le rhabille (ou le déshabille) et surtout le libère de ses complexes, notamment en le poussant à la chansonnette. Mais dès le lendemain, la mère de Don débarque à l'improviste... In the streeeeets... of San Franciscoooo, Gentle people... with flowers in their haaaair... Oui je sais, je chante très mal. J'aurais tellement voulu vivre en Californie à cette période même si, à l'instar de l'excellentissime Once Upon a Time... in Hollywood, il y a sûrement une part plus ou moins grande de fantasme pour une époque que je n'ai connue qu'à travers le prisme des films et de la musique... Huis-clos brillamment dialogué, adapté d'une pièce à succès de Broadway de Leonard Gershe (qui signe lui-même l'adaptation), Libres sont les papillons nous replonge dans l'insolence et la liberté de cette époque (qui a tout de même bien dû exister un peu) et de son contraste avec le monde conservateur. On ne sort qu'à quelques reprises des murs où se déroule le principal de l'action, cet appartement où on assiste en un temps très court (l'histoire se déroule sur deux jours) aux débuts d'une relation, ses moments de tendresse mais aussi, déjà, ses tourments, ses difficultés. Le talent dramatique de Goldie Hawn, qu'on percevra dans Sugarland Express, est ici d'autant plus surprenant que sa "grande scène dramatique" surgit sans prévenir, dans un des rares moments hors du huis-clos et presque en dehors du récit, à un croisement de rues de San Francisco. C'est d'ailleurs une scène d'autant plus importante que c'est le moment où le récit, après une majorité passée dans le registre plutôt léger et comique, bascule vers un ton plus dramatique malgré l'arrivée d'un Paul Michael Glaser moustachu (Starsky !). Un très beau film, méconnu chez nous même si la pièce fut reprise sur la scène parisienne avec la fille Delon. All the leaves are broooown (All the leeaaaves are broooown), and the sky is graaay (and the sky is graaaay)...
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Massacres dans le train fantôme (The Funhouse — 1981, Tobe Hooper) : 4 / 10
Le film que Hooper a préféré réaliser plutôt que E.T. (avant qu'il ne vienne faire de la figuration derrière la caméra de Spielberg pour Poltergeist, mais je suis mauvaise langue bien sûr). C'est ce qu'on appelle un mauvais choix de carrière. Les premières minutes avec ce (énième) pastiche du meurtre sous la douche de Psychose, combiné à un clin d'œil appuyé à Carpenter et son ouverture de Halloween premier du nom, semblaient vouloir annoncer la couleur qu'allait prendre le film, à savoir jouer la carte de la surprise, du retournement de situation, avec beaucoup d'humour. Finalement non. Après un long (très long) début avec plusieurs amorces de thèmes et d'idées qui s'avèreront non exploitées, à se balader dans la fête foraine où aura lieu toute l'action, il ne reste de Massacres dans le train fantôme qu'un simple film d'horreur dépassé aujourd'hui qui se suit avec un peu d'ennui, conçu certainement pour les fêtes d'Halloween, peu effrayant en dépit de maquillages superbes de Rick Baker, collant aux clichés auxquels on doit s'attendre, notamment les "jump scares" après de longs silences, et enfin avec une dernière partie où la résolution, prévisible, est étirée au maximum (j'imagine qu'il fallait grappiller de nombreuses minutes pour sortir le film avec une certaine durée). Notons surtout l'apparition surprenante d'un toujours formidable William Finley en magicien alcoolique, crédité au générique alors qu'il n'apparaît en réalité que trois minutes dans la première partie, le temps d'une scène sans grand intérêt par rapport au reste de l'intrigue, mais le "Phantom" arrive par son étrangeté naturelle et son jeu peu commun à voler tranquillou la vedette à tout le monde.
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Démence (Trhauma — 1980, Gianni Martucci) : 0 / 10
C'était ça ou regarder Zemmour face à Baba. J'aurais dû regarder Zemmour face à Baba.
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La Dernière maison sur la plage (La settima donnap — 1978, Francesco Prosperi) : 3 / 10
Période de Noël oblige, rien de tel qu'un rape and revenge pour mettre une bonne ambiance. Dans la série des dernièremaisonploitation, ici nous avons une belle villa isolée au bord de la mer, dans laquelle vivent Sœur Christina (la belle Florinda Balkan) et ses cinq élèves. Plus précisément cinq jeunes filles jolies, naïves et innocentes, prêtes pour la gentille séquestration qui s'annonce lorsque trois salopards décident de prendre le lieu comme cachette après un braquage sanglant. Le personnage principal féminin étant nonne, on a même droit à un écart vers la nunsploitation, tout ceci, bien sûr, avant le retournement très attendu (et qui met tellement de temps à arriver) avec la revanche des filles sur les types, dans une cordialité sanguinaire bon enfant. Bref, cela semble fort sympathique me direz-vous, mais en réalité, le film est particulièrement chiant, d'autant que le Craven qui lui a largement servi d'inspiration (très justement suggéré par le titre français) n'était déjà pas fameux. Au moins il y a la mer, Florinda Balkan, des plans nichons gratuits, et des acteurs (notamment de minces types blonds sans le moindre charisme et tellement crédibles) qui n'ont certainement jamais vu de gangsters auparavant — les gros plans de leurs visages où ils se forcent à faire les méchants, filmés avec un grand angle à la Jean-Marie Poiré, font plus marrer qu'autre chose.
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Parenthèse Goldie Hawn* * *
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Don't Look Up : Déni cosmique (Don't Look Up — 2021, Adam McKay) : 7,5 / 10
Rions un peu en attendant la mort. J'ai vu revenir, par ci par là sur le web, des commentaires évoquant Don't Look Up comme le Dr Folamour du XXIème Siècle. Alors n'exagérons peut-être pas mais disons-le quand même : cette satire (avec un "i", Rocka, sinon c'est pas pareil) de science-fiction deviendra sûrement un film-culte avec le temps. En tout cas je sais qu'elle me restera encore en tête dans les semaines qui viendront, si ce n'est plus. Il ne s'agit pas d'un avertissement mais bien d'un miroir à peine déformant (et très inquiétant) de notre sale époque contemporaine, et comme je le disais au-dessus (paragraphe The Last Duel), un film est toujours un polaroid de son époque. Là, nous sommes servis. Comédie tragique sur la tragicomédie du monde moderne devenu une société de l'affect et de son hystérisation, farce grinçante sur la mise en scène de la science, la tyrannie des réseaux sociaux et l'échec total de la pédagogie à travers les médias, Don't Look Up ne laisse pas indemne tout en parvenant à nous faire rire (jaune) jusqu'à son plan post-générique. Elle offre surtout l'occasion à une kyrielle de grands (et moins grands) comédiens de briller devant la caméra d'un type qui semble non seulement hyper-doué pour l'écriture, mais aussi capable de diriger remarquablement des acteurs rudement bien choisis. Je m'aperçois d'ailleurs en lisant le casting sur wikipédia que je n'en avais pas reconnu certains (Gina Gershon et Chris Evans, et Matthew Perry semble avoir été coupé au montage donc là c'est normal). Même d'épouvantables têtes à claques y trouvent peut-être le rôle pour lequel elles semblaient être nées. Jonah Hill est formidable en un détestable Trump Jr., Timothée Chalamet (que je craignais encore plus que Hill) est parfait et il y a même Tomer Sisley que j'ai trouvé bon, b*rdel de m*rde. Les têtes d'affiches, DiCaprio, Lawrence et Meryl Streep en Donald Trump au féminin, sont fabuleuses. Il y a aussi pléthore de seconds rôles formidables, notamment Mark Rilance et ses discours prometteurs parodiant la hype de riches mégalos bien réels à la Elon Musk ou Bezos, Tyler Perry et Cate Blanchett en présentateurs obsédés évidemment par la course à l'audimat, ou encore Ariana Grande (!) quelque part entre Lady Gaga, Kim Kardashian ou... Ariana Grande. Niveau science-fiction, L'Étoile mystérieuse étant un de mes albums préférés de Tintin, disons que le thème me plaisait déjà. On comprend très vite que la comète est évidemment une métaphore de l'urgence de la crise climatique qui s'aggrave à des niveaux sans précédent — on le sait, à l'avenir il y aura du sport — sur laquelle les puissants préfèrent détourner le regard, comme dans le film. Petits points négatifs : quelques longueurs, et des effets spéciaux pas toujours à la hauteur, mais passons. Sera-t-il mon film du mois ?...
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...eh bien non.
First Cow (2019, Kelly Reichardt) : 9 / 10 * Film du mois
Pas de grosses têtes d'affiches ni d'effets spéciaux pour ce qui sera peut-être aussi mon film de l'année (il va falloir que je révise un peu tout ce que j'ai vu en 2021). Avec cet excellent film au rythme lent et contemplatif s'ouvre à moi le cinéma de Kelly Reichardt, ici coscénariste, monteuse et réalisatrice. Reprenant un genre multi-abordé dans l'immense histoire du cinéma qui nous précède, en l'occurrence le western, Reichardt compose de façon très personnelle les images (essentiellement fixes) de son film comme des tableaux, très carrés (un format 4/3 en parfait contraste avec le Cinémascope), d'une subjuguante beauté qui nous happe aussitôt avec quelques plans d'introduction muets. Cette façon qu'a la cinéaste de déplacer le décor classique vers un milieu forestier plus hostile et inhabituel, avec une lenteur fort appréciable, un style esthétique soigné donc, une musique principalement à la guitare signée William Tyler, ou bien sûr la citation de William Blake en ouverture, m'ont donné une vibe du Dead Man de Jim Jarmush, un de mes films de chevet et que j'adore depuis l'adolescence — et dans lequel se trouvait déjà Gary Farmer, acteur amérindien qui jouait Nobody, et qu'on retrouve ici le temps d'une scène chez Toby Jones. Casting impeccable, d'ailleurs. Le formidable travail sur le son, proche de l'ASMR, renforce le sentiment d'accompagner les acteurs dans leur histoire, et donne une forme d'authenticité dans ce qui nous est raconté. L'histoire est simple, c'est un film avec lequel il faut simplement se laisser envoûter, emporter. Je n'en dirai évidemment pas trop, mais le final (laissant au spectateur le soin d'imaginer ce qu'il s'est passé) en forme de boucle avec le début, est une idée absolument remarquable. Oui, je crois bien que je tiens mon film de l'année...
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Parenthèse Goldie... Shower![]()
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Descente au Poste (Copshop — 2021, Joe Carnahan) : 6 / 10
Bon petit polar de série B à l'ancienne, efficace, bien fichu (on ne s'ennuie pas), Copshop repose toutefois sur un scénario sans beaucoup d'intérêt et, parfois, des dialogues cherchant le recul et l'humour "branché" pour donner des coups de coude au spectateur. Il n'échappe donc pas à cette recherche de "coolitude" héritée probablement de Shane Black, où les personnages vannent même dans des situations délicates, mais ce n'est pas omniprésent et c'est largement supportable. La dernière partie tombe dans le n'importe quoi, mais un n'importe quoi joyeux où ça tire dans les sens, au ralenti, à travers les flammes, les vitres, les murs... Les protagonistes vident des centaines de chargeurs en ratant mille fois leur cible, histoire de faire durer l'action le plus longtemps possible, mais ça reste relativement efficace. Notons surtout un très bon Gerard Butler, et même des interprétations globalement bonnes (dont Alexis Louder, alias Val, l'héroïne du film), avec un hic tout de même, Toby Huss en Tony Lamb, le tueur fou qui bute tout le monde et qui en fait des tonnes. Quelque chose de curieux est à noter également, du moins nouveau à ma connaissance : la reprise d'un thème musical particulièrement reconnaissable venant d'un autre film (là c'est quand même le "Main Theme" de Magnum Force par Lalo Shiffrin) pour servir carrément au générique d'ouverture. Quand Tarantino l'avait fait avec "Django" de Bacalov, c'était, précisément, pour son Django, sinon il piochait dans des B.O. méconnues ou des chansons de variété. Même pour Re-Animator ils avaient (un peu) modifié, ou plutôt réarrangé le thème de Psychose — autrement c'était le même, c'est vrai. Du coup le reste de la B.O. "originale" de Clinton Shorter fait un peu mal, à vouloir calquer le style Shiffrin.
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The French Dispatch (2021, Wes Anderson) : 7 / 10
Non seulement The French Dispatch ne déroge pas à aucune règle du manuel du cinéma de Wes Anderson tel qu'on s'y attend, mais va même pousser les curseurs encore plus loin sur le plan créatif, dans son enchaînement d'histoires qui s'entrecroisent comme des vignettes d'un album photo dont il semble logique de voir les pages se tourner à l'écran. Amoncellement d'idées purement visuelles, travellings latéraux robotiques mais bourrés de détails, personnages bavards s'adressant face caméra (directement au spectateur ou non), scènes passant du 4/3 au Cinémascope ou des couleurs pétantes au noir et blanc, textes variés et multiples extraits de fausses coupures de presse affichés à l'image, "coupes" à travers les décors où les personnages se retrouvent comme dans une maison de poupées ou à l'intérieur de cases de bandes dessinées (parfois littéralement, et en style ligne claire s'il vous plaît), le tout représenté généralement de façon symétrique, bref, Wes Anderson. Peut-on réellement conseiller ou déconseiller un film pareil ? C'est compliqué car avec le cinéaste, la caricature dépasse le cadre de la fiction pour en arriver à la critique où deux camps radicalement opposés s'affrontent : certains y voient de la fumisterie, d'autres un génie. Très difficile d'être nuancé car effectivement si on n'adhère pas à ce style hyper formaliste et volontairement désincarné, alors on peut le détester. Si en revanche on se laisse porter par son incontestable virtuosité de directeur artistique, dans ce cas on peut même adorer. Fan depuis ses débuts, bien que conscient de ses défauts et limites, je reste dans le camp des admirateurs. Ici ses influences (le gros du cinéma français connu des Américains, en particulier la Nouvelle Vague) sont plus flagrantes que jamais, avec même quelques citations directes à Jacques Tati. Son casting cinq étoiles incluant les têtes déjà connues de son univers est probablement son plus prestigieux à ce jour. Après Don't Look Up, c'est la deuxième fois que je trouve Timothée Chalamet très bon, même parmi ceux au-dessus du lot. Comme quoi.
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Onoda - 10 000 nuits dans la jungle (2021, Arthur Harari) : 8 / 10
Des cambriolages chez des diamantaires anversois à l'histoire vraie de Hirō Onoda, "dernier soldat" de la Seconde Guerre mondiale, on peut dire que Arthur Harari, jeune cinéaste français dont c'est ici la seconde réalisation, varie ses projets. Tourné intégralement en langue japonaise, le film montre ainsi les (très) nombreuses années passées dans les Philippines d'un soldat dévoué et oublié, continuant à se battre avec le reste de ses hommes, puis tout seul, éloigné de toute information et lorsqu'elles lui parviennent enfin, il croit bien sûr à une ruse ou à de la propagande, c'est ballot. Onoda - 10 000 nuits dans la jungle est l'incroyable récit d'un soldat endoctriné et se voulant le plus intègre possible à l'armée de son pays, déconnecté du reste du monde, égaré psychologiquement, perdu dans une jungle hostile où ses hommes (pour ceux qui choisissent de le suivre) disparaîtront les uns après les autres, et où tous ceux qui s'approchent ne sont évidemment que des ennemis, ou du moins des civils dont il faut se méfier. L'histoire, pendant 2h50, est majoritairement racontée de son point de vue à de rares scènes-près. Une belle œuvre marquante, universelle, intelligemment écrite, superbement photographiée (notamment dans les scènes de pluie diluvienne) et brillamment interprétée, en gros un des films les plus importants de 2021. Je ne l'ai pas revu depuis ma séance au cinéma, mais le premier film de Harari m'avait déjà beaucoup enthousiasmé (le très bon Diamant noir en 2015), ce qui lui fait un parcours irréprochable jusque là, souhaitons-lui que ça dure !
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Parenthèse Goldie Hawn* * *
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The Father (2020, Florian Zeller) : 8,5 / 10
La pièce, écrite par Zeller, fut acclamée et reçut de nombreux prix à travers le monde. Même chose avec le cinéma, alors que Zeller signera lui-même l'adaptation et la réalisation, donc avalanche de prix dans de nombreux festivals et un nouvel Oscar (mérité) pour Hopkins... Drame intimiste et sensoriel sur la maladie, la démence et la vulnérabilité lorsqu'on arrive à la fin de sa vie, The Father parvient à s'éloigner de sa théâtralité d'origine que l'on peut deviner pour nous plonger habilement dans une œuvre véritablement cinématographique, tournée comme un thriller déroutant, jouant sur les décors et la paranoïa, nous plongeant dans un récit déstructuré entre réalité et cauchemar, où la construction dramatique repose sur la perception d'un environnement instable, constamment en changement, et une confusion des identités. Bien sûr on parle beaucoup de la performance d'Anthony Hopkins, mais c'est tout le casting qui est exceptionnel. Tous jouent de façon parfaitement juste. Un film émouvant, formidablement écrit et mis en scène.
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The Card Counter (2021, Paul Schrader) : 8 / 10
À la dernière minute de 2021 débarque celui-ci... Un ancien militaire sorti de prison, hanté par la culpabilité après avoir été mêlé au scandale de Abou Ghraib, devient accro au poker et blackjack. Alors qu'il écume les tournois, il rencontre Cirk (ça se prononce "Kirk", "mais avec un C"), fils de militaire souhaitant se venger d'un haut gradé responsable d'avoir poussé au crime les soldats de Abou Ghraib en ayant, quant à lui, échappé à la justice. Voici donc une histoire de vengeance refusant le spectaculaire, au rythme lent, nocturne, teintée à la fois de violence et de mélancolie, avec une sobriété à la fois dans ses interprétations minimalistes comme la mise en scène. Celle-ci d'ailleurs est également très belle, le film ayant une photographie aussi élégante que son protagoniste incarné par le ténébreux Oscar Isaac, mutique, bien peigné et en costume où il ne manque aucun bouton. La bande son, constituée notamment de bruits de respirations, amplifie l'étrangeté déjà présente dans les images, et participe à l'atmosphère ambigüe de ce parcours introspectif et autodestructeur dans lequel, de Abou Ghraib à Atlantic City, du passé qu'on essaie d'oublier au présent routinier, se mélangent deux univers très différents. Très bon film, se concluant sur un clin d'œil peut-être un peu trop appuyé à un célèbre tableau de la Renaissance, et qu'il faudra certainement laisser encore mûrir... Chaque détail ayant toujours son importance, un petit mot sur le format qui m'a étonné : du 1.66 (quelque part entre le 16/9 et le 4/3), qui était le format typique du ciné indépendant européen, quasiment plus du tout utilisé aujourd'hui. Cette volonté actuelle (et séduisante à la rétine) de refaire des films dans un format ancien se confond bien avec The Card Counter qui, bien qu'évoquant un sujet contemporain, semble venir des années 70.
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Parenthèse Peter Sellers
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FILMS REVUS
Les Dents de la mer (Jaws — 1974, Steven Spielberg) : Meilleur film du cinéma / 10
Revoir aujourd'hui le meilleur film du cinéma, c'est me replonger dans mes jeunes années, période VHS, aux origines de ma cinéphilie. Cela me ramène aussi à une redécouverte plus ou moins récente sur grand écran, un hiver pré-Covid dans un cinéma où j'ai vécu d'ailleurs plusieurs belles expériences (notamment une où Demi-Lune fut mon photographe, et heureusement qu'il était là), au milieu de groupes de vétérans cinéphiles au style vestimentaire d'influence classikienne. J'étais venu seul, comme une autre spectatrice très jolie avec qui j'échangeais de timides regards dans le hall, et qui vint s'asseoir à côté de moi dans la salle. Elle m'a saisi le bras au moment du "jump scare" (vous savez forcément lequel, tout le monde dans la salle aussi car je pense que tout le monde l'avait déjà vu, mais tout le monde a quand même sursauté). Une de mes meilleures séances. Pour le meilleur film du cinéma. De toute façon c'est mathématique : Requin + Bateau + Dum dum, Dum dum = Meilleur film du cinéma.
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The Big Lebowski (1998, Coen Bros.) : 8 / 10
Intensément fan des frangins, je reste cependant assez peu amateur de leurs comédies en général — si on n'inclue pas les comédies surtout dramatiques du genre Fargo, chef-d'œuvre (ceux qui ne sont pas d'accord finiront dans le broyeur). Tout en leur reconnaissant d'évidentes qualités, je ne meurs pas d'envie de revoir Arizona Junior, Le Grand Saut ou Ave, César ! Il y a cependant une exception majeure, The Big Lebowski, le très-très haut du panier dans leur série de pures comédies, et une poilade assurée à chaque visionnage. Le film et son aura, que dis-je, son immense culte bâti autour (il est aujourd'hui inscrit au NFR et conservé à la bibliothèque du Congrès) peuvent surprendre, déconcerter, comme le public de 1955 devant le solo de guitare de Marty McFly : la première fois, personne n'est prêt. Mais c'est un film qui récompense les observateurs attentifs et ceux qui retentent l'expérience. Au cours des re-visionnages apparaissent de nouveaux détails humoristiques sur l'idiotie, la maladresse des personnages, le ridicule des situations, autant de gags cachés, des petites touches d'humour discrète auxquelles, par définition, on ne prête pas forcément attention la première fois, et le film finit par se révéler hilarant. Il y en a quelques-uns que j'avais déjà notés à l'époque (les kidnappeurs amateurs ont pris le temps de faire leur demande de rançon en découpant les mots dans les journaux à l'ancienne, alors qu'ils envoient leur lettre par fax), mais le revoir cette fois-ci m'a fait apparaître un gag qui m'avait jusque là complètement échappé :* * *
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Piège de cristal (Die Hard — 1988, John McTiernan) : 7 / 10
C'est Noël, la naissance de Brian de Nazareth et l'anniversaire de la chute de Hans Grüber de la Nakatomi Plaza (spoilers au fait... mais en même temps, vous l'avez tous déjà vu). C'est donc la période des films de Noël, du blues de Noël, de la dépression parce qu'on n'a pas de famille, de la dépression parce qu'on a une famille mais, heureusement, on a chopé la Covid ou alors mystérieusement égaré son pass sanistaire, et donc ouf, cette fois pas de repas pour entendre parler du dernier Tuche, voir le neveu faire la gueule parce qu'on lui offre un livre et qu'y dit qu'y n'aim' pas lire, ni entendre la cousine appelant à voter Zemmour sinon bientôt on enseignera les chiffres arabes à l'école, ou le beau-frère te dire que Dreyfus était vraiment coupable parce qu'un de ses potes le lui a dit... Bref, une période que j'a-do-re. Et finalement c'est toujours plus sympa de la passer à revoir des films qu'on connaît bien. Même s'ils ne sont pas parfaits, on sait ce qu'ils vont nous offrir : un bon moment. Alors Piège de cristal est-il le meilleur film de Noël, comme en débattent ceux qui ont du temps libre, et comme le clame la 20th Century Fox depuis qu'elle l'a produit (et comme elle le rappelle régulièrement, par exemple lors de la bande annonce spéciale 30 ans) ? Par rapport aux "vrais" films de Noël avec ou sans Macaulay Culkin ou Mariah Carey, oui, c'est sûr et certain. Mille fois oui. Mais sinon... peut-être, pourquoi pas, disons que mmoui... ou alors To Live and Die in L.A. — eh oui, on a tendance à l'oublier parce qu'il fait le même temps à Los Angeles en décembre qu'à Berck-sur-mer en juillet, et que le soleil californien inonde le film de Friedkin, mais il démarre notamment avec une descente de flics burnés le jour du 24 décembre, sur un putain de morceau qui dépote de Wang Chung et la découverte du corps de Jim Hart (BFF de Richard Chance qui l'a découvert lui-même dans une des poubelles de Rick Masters, faux-monnayeur notoire). Rien que cette scène en fait un meilleur film, mais... c'est un autre débat et un autre film. Donc Piège de cristal c'est bien sympa, oui. Mais là, surtout, je vous souhaite un bon réveillon à tous, soutien à ceux qui sont seuls (ou bravo si vous l'avez fait exprès), joyeux Noël et quoi qu'il advienne, soyons heureux !
...zéro.


...pour la deuxième fois.

Et si.
Bonne année à tous !
Et puis je t'offre de la lecture au-dessus. Lis, c'est très important... tant que tu lis, tu ne postes pas.
