Juillet
2021
Film du mois
Le Détachement féminin rouge, Xie Jin, 1961
Le réalisme socialiste, c'est ni plus ni moins du cinéma classique hollywoodien. En URSS, la tendance fit grise mine, qui enterrait les inventions des années 1920. Mais dans ce sommet maoïste, c'est beau comme un John Ford - un brin maniériste fordien même, plus que "réaliste", avec le colorisme calculé d'un
Searchers ou
Quiet Man - et joyeux, libidinal comme une romcom de l'âge d'or. Où le désir mis en circulation, au lieu d'être consommé en eau de rose, serait sublimé dans l'enthousiasme du collectif révolutionnaire. Toute la vertu et le tout vice du film reposent sur cette opération !
Quant à sa leçon d'émancipation féminine, ce Détachement rouge renvoyait soviétiques et yankees ensemble à l'école.
Suivi de
Taipei Story, Edward Yang, 1985
Un couple taiwanais ne part pas en Amérique. Qu'à cela ne tienne, l'Amérique a fait le voyage.
Panelstory, Věra Chytilová, 1980
Réalisme et surréalisme y sont tout pareils et le monde mal carré-barré comme un chantier HLM.
Dans l'air printanier de la Tchéquie des années 60, le grand cinéma moderne de Chytilová fleurissait en feu d'artifice ; plus tard, sous la grisaille de la "normalisation", la patrouille n'a jamais rattrapé sa fièvre d'invention, sa drôlerie, sa morgue, qui trouvent asile dans l'absurde, où la comédie, de plus en plus sardonique, et l'horreur deviennent aussi tout pareils (voir l'extraordinaire
Refuge du loup) : Chytilová contemporaine de Kafka, par-delà la tombe. D'ailleurs...
Les autres très beaux films du mois
...
Amerika, rapports de classe, Huillet-Straub, 1984 !
et
Val Abraham, Manoel de Oliveira, 1993
Coal Money, Wang Bing, 2009
Shiva Baby, Emma Seligman, 2020
etc.