Black Swan (Darren Aronofsky - 2010)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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Flol
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Re: Black Swan (Darren Aronofsky - 2010)

Message par Flol »

Parfois un peu lourd dans ses effets et ses symboliques, en plus d'être un véritable jeu de pistes multi-référentiel (Polanski, Cronenberg, Carrie, entre autres...), mais tout de même un sacré bout de péloche. Le crescendo final m'a laissé essoufflé tant j'ai eu cette impression de vivre une expérience sensorielle et organique. :shock:
C'est donc un objet fascinant, à la mise en scène au plus près des corps (les séquences de danse sont bluffantes...de la même manière que les combats de The Wrestler, d'ailleurs), même si sur le fond, rien de bien nouveau finalement.
Un bon gros 8/10 quand même, parce que je me rends que je n'arrête pas de repenser au film et à l'atmosphère sombre qu'il distille tout du long.
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Demi-Lune
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Re: Black Swan (Darren Aronofsky - 2010)

Message par Demi-Lune »

Ratatouille a écrit :Le crescendo final m'a laissé essoufflé tant j'ai eu cette impression de vivre une expérience sensorielle et organique. :shock:
Effectivement, un très grand moment de cinéma, d'une puissance lyrique et émotionnelle exceptionnelle (j'en ai eu des frissons). Une véritable apothéose.



N'oublie pas de mettre ta note sur le topic à Karras ! :D

P.S. : Nestor, je t'ai répondu en page précédente. :wink:
Dernière modification par Demi-Lune le 12 févr. 11, 17:59, modifié 1 fois.
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nobody smith
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Re: Black Swan (Darren Aronofsky - 2010)

Message par nobody smith »

Je craignais pas mal de chose avant de rentrer dans la salle, moi qui suis pourtant admiratif du travail de Aronofsky depuis ses débuts. Une impression ne provenant non pas tant des mauvaises critiques mais au contraire de l’accueil très enthousiaste généré et de la pluie de récompense qui risque de s’en suivre. Si je me remémore certains cas récents (Martin Scorsese avec the departed ou Kathryn Bigelow avec the hurt locker), cela donne des auteurs brillants se retrouvant primés pour un film certes réussit mais loin d’être un de leurs sommets. Ça n’a pas loupé : je ne trouve pas que black swan soit le chef d’œuvre d’Aronofsky (en même temps cette place est déjà prise à mes yeux par the fountain) mais ça ne pas empêché d’apprécier la chose. Nestor a résumé le problème principal avec ce côté sur-signifiant. On reproche souvent à Aronofsky de sourligner les choses. Personnellement, si je dois avouer qu’il commet d’énormes maladresses (le fameux zoom sur la cicatrice dans the wrestler), j’ai toujours été séduit par cette approche qui cherche pousser à bout ses possibilités pour faire ressentir quelque chose à son spectateur. Black swan se rate sur ses effets car effectivement tout est clair. On comprend rapidement la teneur de l’objet et par conséquent ses limites. Aussi murement étudiés et pensés soient-ils, les oppositions noir/blanc et autres jeux de miroir répétés sont assimilés en quelques instants et le tout est bloqué en plus par sa régurgitation d’influence. Le recyclage des œuvres de Polanski, Cronenberg et Kon s’avère en effet bien mal digéré tant le regard de l’auteur sur son personnage est peu convaincant. D’ailleurs le personnage évolue tellement peu durant tout le film que c’est dans la précipitation qu’on nous fait émergé le cygne noir tant attendu. Pourtant donc, si je semble m’énerver contre le film, c’est loin d’être le cas. Malgré un trait forcé plus que jamais, les choix d’Aronofsky restent fascinants pour l’œil et certaines séquences sont de pures merveilles. Je classe bien sûr là-dedans le fabuleux final où tous les défauts du film arrivent à être balayé pour l’élever vers un bijou d’émotion. J'ai également beaucoup aimé la peinture du milieu de la danse. Un peu comme the wrestler, je n'étais absolument pas venu pour ça (en l'occurence la plongée dans la folie schizo était une invitation plus enthousiasmante) et je me suis vraiment passionné par le sujet. Et forcément, difficile de ne pas être captivé par la prestation de Natalie Portman (je reste quand même plus sensible aux charmes d’une Mila Kunis, imparfaite mais qui ne truque pas comme dit l’autre). Au final, je comprends le ressentie de certains entre frustration et fascination. A la seconde vision me convaincra surement pour savoir si c’est une arnaque ou un vrai bon film. En l’état, je penche quand même pour la deuxième option.
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Flol
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Re: Black Swan (Darren Aronofsky - 2010)

Message par Flol »

nobody smith a écrit :Aussi murement étudiés et pensés soient-ils, les oppositions noir/blanc et autres jeux de miroir répétés sont assimilés en quelques instants et le tout est bloqué en plus par sa régurgitation d’influence. Le recyclage des œuvres de Polanski, Cronenberg et Kon s’avère en effet bien mal digéré tant le regard de l’auteur sur son personnage est peu convaincant. D’ailleurs le personnage évolue tellement peu durant tout le film que c’est dans la précipitation qu’on nous fait émergé le cygne noir tant attendu. Pourtant donc, si je semble m’énerver contre le film, c’est loin d’être le cas. Malgré un trait forcé plus que jamais, les choix d’Aronofsky restent fascinants pour l’œil et certaines séquences sont de pures merveilles.
Voilà, c'est exactement ça : le film a beau être parfois énervant dans sa recherche absolue d'effets sursignifiés et sursignifiants (gros travail sur le son...mais parfois trop "travaillé", justement), et malgré le fait qu'au bout de 5 minutes, on a bien compris où le film voulait en venir...eh bien je me suis vite retrouvé emporté dans cette spirale vers la folie, magnifiée par la splendide musique de Tchaïko-Mansell et le jeu habité de Natalie Portman. Et incroyable...mais après m'avoir gonflé pas mal dans ses derniers films, j'ai trouvé Vincent Cassell très bon. :o
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Demi-Lune
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Re: Black Swan (Darren Aronofsky - 2010)

Message par Demi-Lune »

nobody smith a écrit :tant le regard de l’auteur sur son personnage est peu convaincant. D’ailleurs le personnage évolue tellement peu durant tout le film que c’est dans la précipitation qu’on nous fait émergé le cygne noir tant attendu.
:o Portman évolue tout le long du film, c'est même son propos ! :o
Par ailleurs, il est logique que le cygne noir n'apparaisse qu'à la fin, puisque son arrivée succède à toute une série de transformations chez Portman, aussi bien physiques que comportementales.
Quant aux indices, bien sûr qu'ils sont visibles, bien sûr qu'on sait à quoi s'en tenir, même la bande-annonce ne dissimulait rien. Je ne pense vraiment pas que ce soit ça, le vrai cœur du film.
Dernière modification par Demi-Lune le 12 févr. 11, 18:14, modifié 1 fois.
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Re: Black Swan (Darren Aronofsky - 2010)

Message par nobody smith »

Demi-Lune a écrit :
nobody smith a écrit :tant le regard de l’auteur sur son personnage est peu convaincant. D’ailleurs le personnage évolue tellement peu durant tout le film que c’est dans la précipitation qu’on nous fait émergé le cygne noir tant attendu.
:o Portman évolue tout le long du film, c'est même son propos ! :o
Par ailleurs, il est logique que le cygne noir n'apparaisse qu'à la fin, puisque son arrivée précède toute une série de transformations chez Portman, aussi bien physiques que comportementales.
Que le cygne noir se dévoile uniquement à la fin, c’est logique. Le problème, c’est que j’attends des effets d’annonce de cette apparition annoncée dans le titre. On doit attendre avec impatience et en même temps redouté cette inévitable point final. Or pour cela, j’attends que le personnage évolue de par sa confrontation entre sa part virginale et celle tentatrice. Au-delà des tours de passe-passe visuels qu’on a déjà explicité, je trouve ce fameux tiraillement interne conduisant à la transformation assez chiche par rapport à la démarche voulue. J’ai tout particulièrement l’impression que la scène de la boite de nuit a été incorporé pour permettre un changement drastique et rapide du personnage afin de justifier pleinement un final imminent. Le sujet du film est bien l’évolution d’un personnage mais ça n’est pas ce que j’ai apprécié le plus. Comme je l’ai dit précédemment, je voulais aimer un film sur la folie avec la danse en toile de fond et j’ai aimé un film sur la danse avec la folie en toile de fond.
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Re: Black Swan (Darren Aronofsky - 2010)

Message par monk »

aurelien86 a écrit :
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monk a écrit :
ben complétement "lisse", au sens premier du terme, un peau en plastique. Honnêtement, ça m'a choqué.
Ca n'enlève rien à sa performance, et même, si j'osais un peu de sarcasme, elle n'en est que meilleur, car c'est quand même fort d'arriver à exprimer quelque chose dans ces conditions ! :uhuh:
Le débat est élevé là. Je pense que parler du film présente plus d'intérêt, non ? (je précise que je ne l'ai pas encore vu)
Ouais le débat est élevé. C'est un forum, ça arrive.
Messieurs de la police du bon gout merci de supprimer nos posts !
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Re: Black Swan (Darren Aronofsky - 2010)

Message par monk »

nobody smith a écrit :J’ai tout particulièrement l’impression que la scène de la boite de nuit a été incorporé pour permettre un changement drastique et rapide du personnage afin de justifier pleinement un final imminent.
C'est tournant important pour le personnage. Le film nous la présente dans son status quo antérieur par le menu. Leroy met la pression, elle veut le rôle, l'obtient et subit beaucoup de pression. La boite de nuit est un début de libération, l'élément qui la fait sombrer. C'est un choix, Aronofski aurait peut être pu faire une progression plus inéaire, il a choisi la rupture. Je trouve que ça fonctionne plutôt bien, ça me parait cohérent.
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Re: Black Swan (Darren Aronofsky - 2010)

Message par ballantrae »

Quand bien même Black swan est bardé de références (De Palma,Polanski, Cronenberg, Powell , peut-être Argento), il me semble les intégrer intelligemment pour accoucher de son film brillant, à la fois balisé par une structure nette dès la bande annonce et traversé d'accidents, de ruptures qui donnent des coups d'accélérateur au récit.
Comme Nolan, Aronofsky est un cinéaste/cinéphile qui relit ses classiques non pas pour le pur plaisir de la citation , du collage (ça, c'est Tarantino! allez, j'arrête...) mais pour donner une oeuvre viscéralement personnelle , très pensée dans sa structure comme dans ses textures (Nolan est un cinéaste qui aime la Maîtrise intellectuelle, D A vise plus l'upprecut à coups d'images et de sons plus organiques).
Certes, DA est un manipulateur (mais bon, je crois que nombre de grands le sont de Hitchchcok à Lynch en passant par Resnais,Fellini, JLG,...); certes, il n'est pas un inventeur de formes mais c'est un sacré filmeur qui en est à son cinquième film et devrait sans trop de mal rejoindre des auteurs tels que Fincher dans le nouveau "nouvel Hollywood".Avec Wes Anderson, Nolan et quelques noms antérieurs tels que Gray, les Coen.
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Re: Black Swan (Darren Aronofsky - 2010)

Message par frédéric »

Pour ma part, film moins hystérique ou malade que ce qu'on dit un peu partout, j'ai trouvé le tout largement très accessible pour un Aronofsky, mais c'est un Aronofsky et le style peut dérouter, mais pour ma part j'ai aimé. Natalie Portman est c'est vrai absolument formidable mais Vincent Cassel est étonnamment sobre. La dernière partie est très belle. De là à être aussi enthousiaste que beaucoup non, mais le résultat vaut le détour.
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Re: Black Swan (Darren Aronofsky - 2010)

Message par magobei »

En vrac, mes impressions: comme dans The Wrestler, Aronofsky signe un film brut, sec, caméra à l'épaule (en écho aux intentions du metteur en scène Leroy, qui veut livrer une version "brute" du Lac des cygnes); du coup, son Black Swan, est un film très physique sur la danse, refusant la tentation esthétisante de la "belle image".

On y trouve aussi des obsessions très "cronenbergiennes" sur le corps, ses blessures, sa déchéance - obsessions très "aronofskiennes" aussi, finalement, puisqu'elles étaient déjà présentes dans The Wrestler. Le vieillissement, l'âge est une thématique centrale chez le réal, même si Black Swan prend le chemin inverse de Randy "The Ram", catcheur en pré-retraite; ici, c'est une danseuse dans la fleur de l'âge qui a son "moment", sa chance de se réaliser. On retrouve dans les deux films, la même urgence, le même mépris des conséquences. Pour la danseuse ou le catcheur, le seul truc qui compte c'est la scène/le ring. Un côté "live fast, die young", qui en font des figures éminemment romantiques.

Sur cette belle étude de personnage et cette splendide parabole sur la danse, Aronofsky plaque une seconde trame, paranoïaque: la psyché chancelante de Nina, petit rat d'opéra maintenu en enfance par une mère abusive, qui entre en résonance avec la trame classique du Lac des cygnes, le cygne blanc vs. le cygne noir. Une thématique du double, bipolaire (au sens clinique) qu'Aronosfky illustre avec des flashs, des scènes fantasmagoriques, qui tirent parfois son film vers le fantastique.

Ce trop-plein aurait pu nuire au propos, rentre le film bancal, mais il s'en sort très bien, notamment à travers le magnifique "coda" final. Par rapport à The Wrestler, l'adhésion est moins pleine et entière en ce qui me concerne - quelques petits trucs, notamment les effets sonores, étaient un peu de trop - mais l'ambition était aussi plus élevée ici.

8/10
"In a sense, making movies is itself a quest. A quest for an alternative world, a world that is more satisfactory than the one we live in. That's what first appealed to me about making films. It seemed to me a wonderful idea that you could remake the world, hopefully a bit better, braver, and more beautiful than it was presented to us." John Boorman
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Re: Black Swan (Darren Aronofsky - 2010)

Message par riqueuniee »

Ce qui m'a un peu embêtée,c'est le côté parfois convenu du scenario (en ce qui concerne la danse).On y retrouve des thèmes présents (plus ou moins ) dans d'autres films sur la danse classique,comme la mère abusive,qui a manqué sa carrière et reporte ses ambitions sur sa fille,les rivalités entre danseuses,l'ex-étoile,etc...Ceci dit,ce milieu,montré comme très dur,me semble présenté de façon très crédible (même si ça ne passe pas forcément toujours ainsi).
C'est un peu dommage par rapport au côté horrifico-fantastique sur le double et la folie.
Je suis assez d'accord avec ce qui a été dit un peu plus haut "non pas un film sur la folie avec la danse en toile de fond,mais un film sur la danse avec la folie en toile de fond".
Dernière modification par riqueuniee le 13 févr. 11, 22:50, modifié 1 fois.
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Re: Black Swan (Darren Aronofsky - 2010)

Message par Joe Wilson »

J'en sors convaincu malgré quelques regrets...entre autres, une folie trop appuyée visuellement dans une description quotidienne, confondant parfois l'excès et la caricature. Aronofsky insiste aussi maladroitement sur les blessures qu'inflige Nina à son corps, de manière mécanique et forcée (n'est pas Cronenberg qui veut...).
Mais Black Swan reste pour moi un choc cinématographique : Aronofsky s'empare de thèmes qui me sont chers (l'abandon de soi, la confusion entre l'art et la vie, le lien entre l'art et la souffrance), ose aller jusqu'au bout de ses intentions et livre un film d'une mémorable ampleur dramatique. Les séquences dansées, de l'introduction du rêve au crescendo final, sont magnifiques dans l'exaltation du mouvement, l'appropriation d'une personnalité et la recherche d'une démesure dans la conception d'un rôle.
Natalie Portman semble de bout en bout au bord de l'effondrement, prisonnière d'une tension et d'une crispation, d'une gestuelle qu'elle ne parvient pas à libérer...et c'est ce qui lui permet de porter un traumatisme avec une intensité prodigieuse. Grâce à son engagement, Black Swan dégage une viscéralité jusque dans la délivrance d'une métamorphose.
Face à elle, Barbara Hershey et Winona Ryder expriment beaucoup de justesse, bien que leur portrait (en miroir du personnage de Nina) manque de nuances dans la mise en scène. Même impression pour Mila Kunis, qui parvient à révéler Nina à elle-même...si son personnage frôle l'exagération dans sa sensualité et sa sexualité débridées, il demeure cohérent comme instrument et reflet d'un don de soi. Démarche qui prend sens lors des dix dernières minutes, grandioses dans leur flamboyante intimité, poignantes dans leur jusqu'au boutisme.
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Re: Black Swan (Darren Aronofsky,2010)

Message par Miss Nobody »

Stark a écrit : Me reste l'impression d'un film qui enfile la plupart des clichés du genre : on est on terrain balisé dès le départ, on sait parfaitement où Aronofsky va nous emmener, tant il fait preuve (comme souvent) d'une lourdeur éléphantesque dans la formalisation de son propos. Pour un film qui vise, par son sujet-même, le vacillement, le vertige et la perte des repères, ça pose un léger problème.
(...)
Aronosfsky plombe par ailleurs son film de quelques séquences désespérément plates et attendues pour illustrer le basculement et l'évolution de son personnage. On me rétorquera à juste titre que dans ces moments, le film ne fait rien d'autre que développer son sujet (la perte de l'innocence et ses corrolaires), mais je pense qu'il y avait matière à être moins attendu dans le traitement. D'une façon générale, le cinéaste me semble témoigner la plupart du temps d'un souci de performance qui m'agace souvent chez lui (Requiem for a dream, The Fountain comme exemples canoniques) : il cherche à attiser le ressenti du spectateur au forcing à coups d'effets chocs calculés pour ça. Ca vient sans doute en partie de mes attentes de spectateur, mais je suis très peu client de ce genre de procédés.

Mais, mais, mais... Black Swan est encadrée par deux séquences mémorables, qui parviendraient presque à faire oublier que ce n'est pas un très bon film. D'abord une ouverture scotchante de beauté graphique, où Aronofsky semble témoigner d'un vrai regard de cinéaste, d'une vraie originalité dans son appréhension du sujet : le ballet et le vertige auquel essaie de se livrer l'héroïne (entre féérie et cauchemar baroque). Et surtout un final impressionnant de virtuosité et de puissance lyrique, où enfin la grâce prend son envol, où enfin le cinéaste ouvre une brèche dans la litanie routinière de sa mise en forme. En une suite de plans-séquences jouant admirablement du jeu de vases communiquants entre scène et coulisse, entre imaginaire et réalité, Aronofsky orchestre une ascension qui tient à la fois de l'épiphanie et du requiem, sompteusement servi par un montage visuel et sonore assez vertigineux. Que ce soit dans l'audace de ses visions (la métamorphose live de Nina sur scène) ou dans la sensibilité poignante avec laquelle il capte les émotions de sa protagoniste au coeur du tourbillon (ses larmes tristement séchées face au miroir, lorsqu'elle prend conscience de ce qui lui arrive - scène absolument superbe), le film frappe grand et fort. Alors la recherche de performance dans je parlais plus tôt atteint son but, parce qu'elle dépasse le stade de la démonstration petit bras de baguettiste roublard pour atteindre quelque chose de vraiment assumé dans son ambition opératique.
Je me retrouve bien dans ce message qui ouvre le topic. J'ai été dans l'ensemble peu convaincue, mais quelques scènes (celles que tu cites, en fait, Stark) sortent du lot, il est vrai.

Par ailleurs, suis-je la seule à avoir trouvé les quelques effets spéciaux du film assez ratés et peu intéressants (la métamorphose finale en cygne noir, très réussie, mise de côté)? Je pense au quelques arrachages de peau, aux effets de chair de poule, de miroirs, aux "morphings" à répétition et à la première petite transformation en cygne (avec les jambes qui se brisent)...
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Major Tom
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Re: Black Swan (Darren Aronofsky - 2010)

Message par Major Tom »

Je rejoins les avis déçus.
Film à Oscars accessible au public. Le film est intéressant, mais plein de clichés sur la représentation de la folie à l'écran, assez mal filmé (j'ai horreur de la caméra à l'épaule, et qu'est-ce que c'est que ce grain hideux?), pas très subtil (quatre ou cinq scènes de touche-pipi), sans surprise, caricatural, prétentieux, avec une symbolique lourdingue... Il y a un indéniable brio mais aussi un goût pour les effets appuyés qui a fait que j'en avais déjà marre, déjà au bout de dix minutes, du m'as-tu-vu de la mise en scène et de son effet spécial de la caméra invisible dans les miroirs... Bref, c'est aronofskien. Ceci dit, j'aime plutôt bien ses premiers films, sans les porter aux nues car, comme toujours (et comme ici), plus de forme que de fond. Mais on ne peut lui enlever sa maîtrise de la direction d'acteurs et du plan séquence. Au-dessus de tout ça, évidemment, il y a le personnage central et les interprétations qui sont très bonnes ; Portman trouve peut-être bien le rôle de sa vie... et Mila Kunis est un étonnant sosie de Marion Cotillard.
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