Jeune femme en situation délicate, Caroline (Eliza Dushku) est recrutée par l'organisation Dollhouse. Elle accepte que sa mémoire et sa personnalité soient effacées – en vérité, stockées – afin de devenir un agent programmable selon les besoins des missions qu'on lui assigne. Ces dernières consistent à satisfaire les demandes fort diverses des clients fortunés qui sollicitent Dollhouse; qu'il s'agisse d'un simple weekend amoureux ou de la résolution d'un kidnapping.
A chaque fois, Echo – ainsi qu'elle a été rebaptisée – est confiée à Topher Brink, le scientifique maison, qui lui télécharge une nouvelle personnalité dotée des caractéristiques propres à assurer le succès de sa tâche.

Une fois le travail accompli, cette personnalité est simplement effacée de sa mémoire (la "réinitialisation") et Echo retourne à l'état "d'ardoise vierge" – pour reprendre la terminologie de la directrice, Adelle DeWitt; un état de complète passivité infantile dans lequel sont maintenus tous les pensionnaires de Dollhouse entre chaque programmation.

On le voit, la dernière création en date de Joss Whedon reprend à son compte le Frankenstein de Mary Shelley. Mais, cette fois-ci le "Prométhée moderne" (Topher Brink) ne se satisfait plus d'une seule créature, il les multiplie; ses créatures elles-mêmes se démultipliant à leur tour. Et à l'image de leur modèle littéraire les "poupées" (ou réactifs-ves) de Dollhouse peuvent s'avérer susceptibles d'échapper à leur créateur.
On saura gré à Whedon d'investir toutes les perspectives que son argument de départ esquissait.
Les questions du déterminisme, de la liberté et de l'identité sont au cœur de la série. Ainsi, en dépit des réinitialisations qu'elle subit, Echo garde des images de ses différentes expériences, lesquelles semblent amorcer l'ébauche d'une nouvelle personnalité différente de celle de Caroline.
Il n'élude pas plus le vertige métaphysique. Chaque programmation s'apparente à une véritable naissance; durant chacune de leur mission, la personnalité temporaire dont sont dotées les "poupées" constituent la seule vie dont elles ont eu et auront jamais conscience; et c'est précisément cette conscience de soi que la réinitialisation renvoie au néant.
La matière est riche, même si l'on peut s'inquiéter que Joss Whedon n'ait trop vite abattu certaines cartes après seulement quatre épisodes. Elle l' est d'autant plus que le scénariste producteur a tissé autour de son héroïne un entremêlement d'arcs narratifs dont certains permettent de mesurer l'impact durable de X Files sur la fiction télévisuelle outre-Atlantique.

Il serait tentant de reprocher à la série de sembler par instant cultiver la complication au détriment de la complexité; néanmoins, Dollhouse est une série ambitieuse et intelligente, qui promet beaucoup et ne déçoit pas jusqu'à présent.
Sans doute, ce qu'il est donné à voir de plus original et de plus accompli en ce moment sur le petit écran. A cet égard, ses admirateurs s'alarment de ce que cette originalité ne lui soit fatale auprès de son diffuseur, la chaîne Fox.
La première saison de Dollhouse (treize épisodes) - la deuxième est en cours de diffusion aux USA - est actuellement programmée sur Téva.