Comment filmer l'infilmable?

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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tuco dunn
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Message par tuco dunn »

Encolpio a écrit :La souffrance est la base de nombreux films... le pianiste par exemple: pour moi c'est l'essentiel dans ce film, je ne le trouve pas du tout divertissant mais alors pas du tout (je change d'exemple...) et pourtant c'est sublime... La souffrance est la base de nombreux chef d'oeuvres dans l'histoire de l'art: La femme qui pleure de Picasso: sommet de la souffrance, Guernica, La déploration de Botticelli (Alte Pinakothek Munchen), Le crucifix de Santa Maria Novella (Florence), Sang sur le sol par Bacon (Richard Nagy Londres), Dhôtel nuancé d'abricot de Dubuffet (Beaubourg)... et des 10000er d'autres oeuvres.... Tout celà n'est pas divertissant pour moi (il faudrait je crois être assez sadique pour trouver ça divertissant!!!!!) mais c'est incroyablement vrai, juste et se sont des sommet de la création humaine...
ces oeuvres montrent de la souffrance certes, mais ce n'est pas ce qu'ils proposent comme émotion au spectateur, qui entrerait dans une salle de cinéma en souhaitant éprouver de la souffrance? ce n'est pas rien ressentir de la souffrance, à moins d'être maso...
mais cela rejoint cette question et que certains semblent partager:
je m'interroge sur la nature du plaisir que l'on peut prendre à voir de tels films...
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Message par Encolpio »

Dans ma conception des choses je crois que l'on dois faire des oeuvre de création pure sur la SHOAH, ou d'autres sujets que l'on trouve infilmable, in mintrable, car c'est peut être aussi là que l'on peut toucher au vrai et non pas dans le documentaire qui ne montre qu'un fait à un moment X....
En peinture: lorsque Magritte peint une pipe en écrivant ceci n'est pas une pipe: c'est une représentation d'une pipe une idée de la pipe et par cette représentation il vient de créer non pas une pipe mais la pipe; qui est peut-être plus vrai que n'importe quel autre pipe.
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Message par tuco dunn »

Encolpio a écrit :Dans ma conception des choses je crois que l'on dois faire des oeuvre de création pure sur la SHOAH, ou d'autres sujets que l'on trouve infilmable, in mintrable, car c'est peut être aussi là que l'on peut toucher au vrai et non pas dans le documentaire qui ne montre qu'un fait à un moment X....
En peinture: lorsque Magritte peint une pipe en écrivant ceci n'est pas une pipe: c'est une représentation d'une pipe une idée de la pipe et par cette représentation il vient de créer non pas une pipe mais la pipe; qui est peut-être plus vrai que n'importe quel autre pipe.
pour moi les mentions en gras sont contradictoires, pour l'histoire des pipes, je ne vois pas où tu veux en venir, mais je doute que tu décrives les intentions de Magritte...
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Message par Encolpio »

tuco dunn a écrit :
Encolpio a écrit :La souffrance est la base de nombreux films... le pianiste par exemple: pour moi c'est l'essentiel dans ce film, je ne le trouve pas du tout divertissant mais alors pas du tout (je change d'exemple...) et pourtant c'est sublime... La souffrance est la base de nombreux chef d'oeuvres dans l'histoire de l'art: La femme qui pleure de Picasso: sommet de la souffrance, Guernica, La déploration de Botticelli (Alte Pinakothek Munchen), Le crucifix de Santa Maria Novella (Florence), Sang sur le sol par Bacon (Richard Nagy Londres), Dhôtel nuancé d'abricot de Dubuffet (Beaubourg)... et des 10000er d'autres oeuvres.... Tout celà n'est pas divertissant pour moi (il faudrait je crois être assez sadique pour trouver ça divertissant!!!!!) mais c'est incroyablement vrai, juste et se sont des sommet de la création humaine...
ces oeuvres montrent de la souffrance certes, mais ce n'est pas ce qu'ils proposent comme émotion au spectateur, qui entrerait dans une salle de cinéma en souhaitant éprouver de la souffrance? ce n'est pas rien ressentir de la souffrance, à moins d'être maso...
mais cela rejoint cette question et que certains semblent partager:
je m'interroge sur la nature du plaisir que l'on peut prendre à voir de tels films...
Souffrir c'est vivre... c'est prendre concience de notre fin... celà nous rend plus fort, c'est se dire plus jamais ça, c'est comprendre ce qu'est le bonheur... non on ne souffre pas par plaisir (à moins d'être maso) mais parceque l'on vit. Et justement je crois que l'on peut et l'on doit ( pour se faire homme pensant) ne pas se le cacher.
Donc le plaisir que l'on peut ressentir à voir le pianiste, Salo... c'est prendre conscience de certaines choses... mais je ne comprends pas comment on peut appeller ça du divertissement
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Message par Encolpio »

pour moi les mentions en gras sont contradictoires, pour l'histoire des pipes, je ne vois pas où tu veux en venir, mais je doute que tu décrives les intentions de Magritte...[/quote]

Désolé de te donner ce cours... je suis historien de l'art, tu peux me faire confiance sur Magritte...
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Message par tuco dunn »

Encolpio a écrit :pour moi les mentions en gras sont contradictoires, pour l'histoire des pipes, je ne vois pas où tu veux en venir, mais je doute que tu décrives les intentions de Magritte...
Désolé de te donner ce cours... je suis historien de l'art, tu peux me faire confiance sur Magritte...[/quote]

tu devrais donc savoir que les interpretaions que l'ont peut faire des oeuvres ne sont pas toujours/souvent la représentaion des intentions son auteur, et cela est souvent jusitfié en disant que l'oeuvre n'appartient plus à son auteur, donc ton "cours" ne m'apprend rien sur les intentions de l'artiste mais sur l'interpretation que l'on t'a apprise de l'oeuvre(que je ne trouve pas pertinante)...
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Message par Encolpio »

Pour cet exemple c'est Magritte, tout le suréalisme, les historiens de l'art et de l'esthétique qui donne cette interprétation (couplée avec celle de la représentation n'est jamais la vérité... contradictoire tout ça... comme quoi!!!!!!)
Le "vrai" est bien au delà de la seule représentation, du seul écrit... si tu pense ne pas pouvoir exprimer une vérité allant vers "la vérité" en faisant un film effectivement tu fais peut être uniquement du divertissement. Mais justement je crois que des artistes comme certains réalisateurs sont aller vers cette part de vérité (Lang, Chaplin, Bergman....), ils peuvent toucher à l'universel et l'intemporel au travers de leurs oeuvres car elles sont vraies...
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Message par tuco dunn »

Encolpio a écrit :Pour cet exemple c'est Magritte, tout le suréalisme, les historiens de l'art et de l'esthétique qui donne cette interprétation (couplée avec celle de la représentation n'est jamais la vérité... contradictoire tout ça... comme quoi!!!!!!)
Le "vrai" est bien au delà de la seule représentation, du seul écrit... si tu pense ne pas pouvoir exprimer une vérité allant vers "la vérité" en faisant un film effectivement tu fais peut être uniquement du divertissement. Mais justement je crois que des artistes comme certains réalisateurs sont aller vers cette part de vérité (Lang, Chaplin, Bergman....), ils peuvent toucher à l'universel et l'intemporel au travers de leurs oeuvres car elles sont vraies...
"la représentation n'est jamais la vérité, Le "vrai" est bien au delà de la seule représentation", je suis tout à fait d'accord avec ça et c'était plus cela mon interpretation de "la pipe"(je n'en connaissait pas d'autres que la mienne que j'ai trouvé moi même dans mon ésprit qui est le mien, et j'ai le droit de la conserver puisque comme disent les votres:"une oeuvre n'appartient plus à son auteur :wink: ),
mais étrangement, je trouve que cela entre en contradiction avec une partie de ce que tu disais un peu plus tôt...

finalement, je pense que nos désaccord portent plus sur des définitions et des conceptions differentes que sur le veritable fond...
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Message par Encolpio »

mais oui c'est en contradiction j'y ai fait ref dans mon post précédant. tout ça pour dire que c'est beaucoup plus complexe que le cinéma= divertissement=art, pour dire le vrai n'est pas forcement ce que l'on voit. donc pour dire des oeuvres artistiques pures (Salo) peuvent être plus vrai encore que certains documentaires. Donc je ne crois pas que le documentaire soit la seule direction à prendre pour traiter de tels sujets.
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Message par Encolpio »

Les gens savent qu'ils vont souffrir lorsqu'ils vont voir le pianiste. Ils savent que celà parle de la SHOAH, ils n'y vont pas pour prendre du bon temps!! ce qui est bon une fois sorti c'est de se poser des questions, prendre conscience de se que l'on ai.... enfin je rabache... mais je crois que l'on peux aller voir un film en se disant je vais souffrir.
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Jordan White
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Message par Jordan White »

Doudou a écrit :Aucun plaisir à voir Salo et je ne pense plus que c'est un grand film. La dernière fois que je l'ai vu, ce film m'a dégouté et pourtant, j'suis pas une p'tite nature. ce qui m'a le plus gêné, c'est que derrière son masque de poête hedoniste et je n'sais quoi d'autre, Pasolini me donne l'impression qu'il a pris du plaisir à faire ce film, mais un réel plaisir, limite gros fantasme assouvi... Rien de ce que je dis n'est là pour prêcher une quelconque morale, ce serait bien l'hopital qui se fout de la charité, je pense tout simplement que ce film n'a rien d'extraordinaire si ce n'est qu'on voit des gens obligés de bouffer leur merde. Quant à tout ce soit disant contenu politique, oui, sûrement mais ce n'est pas ce que les gens retiennent de ce film. Je commence à avoir le même sentiment sur Irreversible, quoique le reste du film hormis le viol est plutôt dramatiquement drôle, ce qui sauve le tout à mes yeux.

Après avoir lu les quelques interviews écrites, recherché et décortiqué les entretiens donnés et parus à l'époque jusqu'aux témoignages les plus récents, je ne crois pas avoir vu une référence à un fantasme chez Pasolini. C'est peut-être l'interprétation que tu en fais, mais pour moi il n'existe pas. Si c'est de l'ordre sexuel, je ne comprends pas ta remarque. Je pense que c'est beaucoup plus terre-à-terre que ça, il a pris le roman de Sade et l'a adapté à la réalité historique de SALÒ. Point. Un fim sur le fascisme.
L'ambiance sur le plateau était contre toute attente merveilleuse et décontractée. Au vu de ses engagements politiques marxistes ( auxquels personnellement je n'adhère pas), il est plus un poète d'extrême gauche dans les idées qu' un poète hédoniste.
Pour moi ça reste un grand film.
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-Kaonashi-
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Message par -Kaonashi- »

johndoe_df a écrit :J'ai vu nuit et brouillard version courte (32 min) la semaine dernière.
C'est la seule version hein... vu que c'est un court métrage.
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-Kaonashi-
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Message par -Kaonashi- »

Je vois que la question de l'infilmable dans cette discussion tourne essentiellement autour de la question des camps de concentration et d'extermination nazis.
Je dois bien admettre que, même si j'aime bien La Vie est belle, Le Pianiste, Amen., et dans une moindre mesure La Liste de Schindler (le coup de la douche, même si je comprends pourquoi cette scène est là, et surtout la fin avec ce Schindler pleurant, bien ridicule) ; donc même si j'aime bien ces films, mon avis tend à rejoindre celui de Claude Lanzmann.

Ce à quoi je veux en venir ici, c'est un exemple bien particulier de représentation cinématographique des camps. Je pense en particulier à l'introduction de X-Men, qui se passe à l'entrée d'Auschwitz (ou un autre camp, j'ai un doute). Je sais que mon attitude peut sembler ridicule, mais je ne supporte pas cette scène. Pas par ce qu'elle montre, mais simplement par son existence. Que fait une telle scène dans un film de divertissement ? Je trouve d'un goût passablement douteux de montrer ça en intro de ce film (que j'aime moyennement en dehors de ça), et à la limite du malsain.
Cette scène a son importance pour la caractérisation du personnage Magneto et par extension pour le reste des mutants de l'histoire, mais ça me gêne beaucoup de voir ce sujet - l'horreur des camp - utilisée dans un film qui ne traite pas réellement de la question.
Je me demande si je suis un peu le seul à le ressentir comme ça (certains disent que je chipote beaucoup).
John Constantine
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Message par John Constantine »

-Kaonashi Yota- a écrit : Ce à quoi je veux en venir ici, c'est un exemple bien particulier de représentation cinématographique des camps. Je pense en particulier à l'introduction de X-Men, qui se passe à l'entrée d'Auschwitz (ou un autre camp, j'ai un doute). Je sais que mon attitude peut sembler ridicule, mais je ne supporte pas cette scène. Pas par ce qu'elle montre, mais simplement par son existence. Que fait une telle scène dans un film de divertissement ? Je trouve d'un goût passablement douteux de montrer ça en intro de ce film (que j'aime moyennement en dehors de ça), et à la limite du malsain.
Cette scène a son importance pour la caractérisation du personnage Magneto et par extension pour le reste des mutants de l'histoire, mais ça me gêne beaucoup de voir ce sujet - l'horreur des camp - utilisée dans un film qui ne traite pas réellement de la question.
Je me demande si je suis un peu le seul à le ressentir comme ça (certains disent que je chipote beaucoup).
je comprends plus ou moins ton malaise: mettre un thème assez sérieux dans un film de divertissement, qui veut se la péter un peu. J'ai surtout l'impression que les US ont un rapport différent avec cette période: ils ne la nient, ne la minimisent pas mais ont néanmoins moins de scrupules à l'introduire dans des fictions moins solennelles. Les sorciers nazis, que ce soit dans Indy ou Hellboy, c'est typiquement américain tout comme l'idée de broder sur des méchants costumés dans Captain America [Crane Rouge, c'est une idée ridicule sur le papier]... ç'a à l'air d'être "exotique" pour eux.

Pourtant si X-Men ne traite pas directement de la Shoah, ils traite bien sûr du racisme et de ses conséquences. L'idée de Magnéto dans un camp est déjà dans la bd, mais elle peut être "redondante" dans un film sur (à peu près) le racisme. Chacun sa sensibilité. Ca ne me choque pas tant que ça. C'est juste un peu maladroit mais Singer s'en tire mieux que dans Un élève doué.
Puissant, corrompu et menteur
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You two do make a charming couple though, you're both, what's the expression, damaged goods.
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