Le films a ses faiblesses, essentiellement pour les raisons de réduction du montage que l'on sait, et il reste bien en-deça du livre, c'est sûr (comment pourrait-il en être autrement ? Dosto est certainement l'un des écrivains les plus durs à transposer à l'écran) Mais tout de même, il y a quelques scènes touchées par la grâce et qui démontrent une communauté d'esprit entre Dostoïevski et Kurosawa frappante. Pour moi, ces scènes là suffisent largement à emporter le morceau.Max Schreck a écrit :Je comprends pas qu'est-ce qui a fait que je sois passé à côté mais j'ai vraiment pas apprécié L'Idiot. Le bouquin est absolument sublime et je savais bien que je n'allais pas retrouver son caractère touffu dans le film, mais je ne crois pas que ce soit une question d'adaptation. C'est juste que l'histoire m'a semblé moins convaincante sur pellicule.
Kurosawa et le monde contemporain
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J'ai découvert Chien enragé. Bravo k-chan pour ton commentaire du film dans le premier post de ce topic. Je n'ai même plus à développer mon avis sous peine de te paraphraser en tous points et en moins bien. 
J'adore ce genre d'intrigues qui part d'un événement apparemment complétement anodin (la perte d'un simple objet) et qui en déroule progressivement toutes les conséquences, élargissant sa toile, cette fenêtre sur un monde occulté (dans pas mal de plans, Kurosawa inscrit ses personnages à l'intérieur de cadres formés par des éléments du décor). Le mélange entre constat social et poésie est d'une belle harmonie. La conclusion de la poursuite finale est à la fois si évidente et si puissante qu'on sait qu'on est là face à un grand film.
De même, j'ai particulièrement été impressionné par l'interprétation de Mifune, qui joue ici dans un registre qu'on lui connaît trop peu. Son personnage est un bleu, il fait profil bas, a conscience de ses erreurs.
Bon, finalement j'ai écrit plus que ce que j'avais prévu...

J'adore ce genre d'intrigues qui part d'un événement apparemment complétement anodin (la perte d'un simple objet) et qui en déroule progressivement toutes les conséquences, élargissant sa toile, cette fenêtre sur un monde occulté (dans pas mal de plans, Kurosawa inscrit ses personnages à l'intérieur de cadres formés par des éléments du décor). Le mélange entre constat social et poésie est d'une belle harmonie. La conclusion de la poursuite finale est à la fois si évidente et si puissante qu'on sait qu'on est là face à un grand film.
De même, j'ai particulièrement été impressionné par l'interprétation de Mifune, qui joue ici dans un registre qu'on lui connaît trop peu. Son personnage est un bleu, il fait profil bas, a conscience de ses erreurs.
Bon, finalement j'ai écrit plus que ce que j'avais prévu...
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Huhem ! Merci !Max Schreck a écrit :Bravo k-chan pour ton commentaire du film dans le premier post de ce topic.

Très content que tu ais aimé ce film


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Content aussi de voir que de plus en plus de gens découvrent et apprécient Chien Enragé. Entre-tous, c'est peut-être ce film qui m'a vraiment fait aimer Kurosawa. Il est si surprenant lorsqu'on le découvre après avoir vu ses films de samouraïs. C'est vrai que Mifune y est particulièrement bon et pour une fois très sobre.
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Alors là je te trouve vraiment modeste, car étant nouveau sur le forum, à chaque fois que je tombe sur une de tes chroniques ou interventions, je suis scotché.k-chan a écrit :Houla non ! C'est gentil de dire ça mais je ne suis pas sûr d'être à la hauteur.Boubakar a écrit :K-chan, pourquoi ne ferais-tu pas des chroniques "Kurosawaïennes" pour le site ? Tu te débrouilles très très bien
Quelle érudition et quelle clarté dans les propos.
Boubakar a bien raison

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K. CHAN !
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Au fait ! as-tu vu que les septs samourais et le garde du corps ressortent en nouvelles éditions chez "les films de ma vie" ???
nouveau look et nouveau digipack avec bonus inédits apparemment.
à noter que c'est d'une laideur pas possible à première vue, on dirait genre packaging superbit, c'est dire !
Mais suis-je bete ! tu dois déjà etre au courant non ?
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Au fait ! as-tu vu que les septs samourais et le garde du corps ressortent en nouvelles éditions chez "les films de ma vie" ???
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C'est fini oui ??chrislou a écrit :K. CHAN !
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Je le sais oui, mais grâce au site. Je ne les ai pas vu en magasin.chrislou a écrit :Au fait ! as-tu vu que les septs samourais et le garde du corps ressortent en nouvelles éditions chez "les films de ma vie" ???
nouveau look et nouveau digipack avec bonus inédits apparemment.
à noter que c'est d'une laideur pas possible à première vue, on dirait genre packaging superbit, c'est dire !![]()
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Mieux vaut attendre qu'un éditeur important se charge de ces films.

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Les salauds dorment en paix, 1960
Noir c'est noir. Une plongée que j'ai trouvé franchement passionnante dans les arcanes d'un scandale immobilier, ses vainqueurs et ses victimes. Kurosawa semble avoir abandonné ici toute confiance en l'humanité et livre un film franchement déséspéré avec des situations vraiment fortes, et une caractérisation des personnages qui n'est pas dénuée de poésie, avec la figure tragique de l'imposteur, justicier de l'ombre qui risque sans cesse de succomber au mal contre lequel il lutte (on peut penser à Hamlet ou à Lorenzaccio).
Plastiquement, le film est magistralement éclairé et mis en scène. La scène d'ouverture nous présente une cérémonie de mariage découpée avec une précision impressionnante, et pas mal de séquences nocturnes mettent en valeur les éclairages artificiels et les ombres avec une grande force dramatique. Un grand film, dense et plein de tension.
Noir c'est noir. Une plongée que j'ai trouvé franchement passionnante dans les arcanes d'un scandale immobilier, ses vainqueurs et ses victimes. Kurosawa semble avoir abandonné ici toute confiance en l'humanité et livre un film franchement déséspéré avec des situations vraiment fortes, et une caractérisation des personnages qui n'est pas dénuée de poésie, avec la figure tragique de l'imposteur, justicier de l'ombre qui risque sans cesse de succomber au mal contre lequel il lutte (on peut penser à Hamlet ou à Lorenzaccio).
Plastiquement, le film est magistralement éclairé et mis en scène. La scène d'ouverture nous présente une cérémonie de mariage découpée avec une précision impressionnante, et pas mal de séquences nocturnes mettent en valeur les éclairages artificiels et les ombres avec une grande force dramatique. Un grand film, dense et plein de tension.
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Ce qui m'avait marqué lors de la découverte de ce film (autre que la mise en scène), c'est le personnage de Mifune.Max Schreck a écrit :Les salauds dorment en paix, 1960
et une caractérisation des personnages qui n'est pas dénuée de poésie
Un personnage loin des archétypes du héros ou...
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Ce n'est que lorsque l'on découvre son passé, que l'on commence à l'aimer voir à s'identifier.
Une très grande audace scénaristique, qui finit par payer.
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Je finis de survoler l'excellent coffret Films noirs avec :
Entre le ciel et l'enfer, 1963
Un film très étonnant à cause de son déroulement imprévisible qui en fait finalement une oeuvre que j'ai presque envie de qualifier d'expérimentale, sur un scénario apparemment lointainement adapté d'Ed McBain.
Attention aux SPOILERS parce que je vais quasiment raconter tout le film !
Ça démarre presque de façon théâtrale : pendant une heure, montre en main, la caméra de Kurosawa reste dans le même espace clos, le salon d'un riche industriel (Mifune) qui doit faire face à une demande de rançon. Ne connaissant du film que sa durée relativement longue (2h20), je me disais que le réalisateur comptait boucler toute son intrigue à l'intérieur de ce même lieu, et je me réjouissais déjà d'un tel dispositif. Au sein d'un décor minimaliste, la mise en scène se montre éblouissante dans son placement des personnages.
Et puis on passe brusquement à un second acte extrêmement nerveux, filmé dans un train caméra à l'épaule. Sans avoir recours à de la musique, Kurosawa parvient à rendre toute cette séquence incroyablement tendue, gérant magnifiquement son suspense.
Dans le 3e acte, on abandonne le personnage de Mifune pour se concentrer essentiellement sur l'enquête de la police. Un montage alterné nous montre à la fois le travail des inspecteurs sur le terrain et leur compte-rendu lors de réunions au commissariat, le tout sur fond de chaleur étouffante qui n'est pas sans rappeller Chien enragé. Là encore c'est passionnant, et, avec une observation quasi documentaire, on va progressivement passer des hautes sphères de la bourgeoisie aux bas-fonds de la société (et c'est un vieux ferrailleur qui se confond presque avec ses ordures qui va permettre l'identification du kidnappeur).
Et là, on a droit à un dernier acte qui vire carrément au surréalisme, avec la filature du méchant garçon dans la nuit de Tokyo (?), avec un passage par un quartier peuplé de loques humaines aux frontières du fantastique, jusqu'à ce que la boucle soit bouclé. Je me réserve encore sur le sens à donner à la dernière scène mais assurément on est là face à un film qui est à la fois purement kurosawaien (?) dans ses thèmes et assez indéfinissable dans sa forme. Et ce qui est sûr, c'est que la conclusion donne tout son sens au titre, exactement comme dans Les Salauds dorment en paix.
J'ai lu que sur le plan où la fumée de la valise qui brûle s'échappe de la cheminée, la fumée est censée apparaître en rose, mais c'est pas le cas sur le dvd Wild side. Dommage.
Entre le ciel et l'enfer, 1963
Un film très étonnant à cause de son déroulement imprévisible qui en fait finalement une oeuvre que j'ai presque envie de qualifier d'expérimentale, sur un scénario apparemment lointainement adapté d'Ed McBain.
Attention aux SPOILERS parce que je vais quasiment raconter tout le film !
Ça démarre presque de façon théâtrale : pendant une heure, montre en main, la caméra de Kurosawa reste dans le même espace clos, le salon d'un riche industriel (Mifune) qui doit faire face à une demande de rançon. Ne connaissant du film que sa durée relativement longue (2h20), je me disais que le réalisateur comptait boucler toute son intrigue à l'intérieur de ce même lieu, et je me réjouissais déjà d'un tel dispositif. Au sein d'un décor minimaliste, la mise en scène se montre éblouissante dans son placement des personnages.
Et puis on passe brusquement à un second acte extrêmement nerveux, filmé dans un train caméra à l'épaule. Sans avoir recours à de la musique, Kurosawa parvient à rendre toute cette séquence incroyablement tendue, gérant magnifiquement son suspense.
Dans le 3e acte, on abandonne le personnage de Mifune pour se concentrer essentiellement sur l'enquête de la police. Un montage alterné nous montre à la fois le travail des inspecteurs sur le terrain et leur compte-rendu lors de réunions au commissariat, le tout sur fond de chaleur étouffante qui n'est pas sans rappeller Chien enragé. Là encore c'est passionnant, et, avec une observation quasi documentaire, on va progressivement passer des hautes sphères de la bourgeoisie aux bas-fonds de la société (et c'est un vieux ferrailleur qui se confond presque avec ses ordures qui va permettre l'identification du kidnappeur).
Et là, on a droit à un dernier acte qui vire carrément au surréalisme, avec la filature du méchant garçon dans la nuit de Tokyo (?), avec un passage par un quartier peuplé de loques humaines aux frontières du fantastique, jusqu'à ce que la boucle soit bouclé. Je me réserve encore sur le sens à donner à la dernière scène mais assurément on est là face à un film qui est à la fois purement kurosawaien (?) dans ses thèmes et assez indéfinissable dans sa forme. Et ce qui est sûr, c'est que la conclusion donne tout son sens au titre, exactement comme dans Les Salauds dorment en paix.
J'ai lu que sur le plan où la fumée de la valise qui brûle s'échappe de la cheminée, la fumée est censée apparaître en rose, mais c'est pas le cas sur le dvd Wild side. Dommage.
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Parce qu'inspiré d'un roman de McBain, on ne s'est pas gêner à l'époque pour une fois de plus dire que Kurosawa était trop américanisé

"Au japon, jusqu'à l'époque du film, le kidnapping était courant et peu puni. Mais par coïncidence, après ce film, le code pénal a changé, et le kidnapping est plus sévèrement poursuivi. Tout le reste du scénario est original." (Kurosawa)
Un film magistral en tout cas, qui s'inscrit parfaitement dans la lignée de son oeuvre. La scène du train est particulièrement marquante.


Je l'ignorais. C'est très intéressant est fort probable, sachant que Kurosawa voulait utiliser ce procédé dans un autre de ses films, Sanjuro. Dans la scène où les personnages utilisent un signal, avec les camélias blanc et les camélias rouge. Il souhaitait coloré les camélias rouge... en rouge. Mais il n'est pas parvenu à l'effet voulu, et a abandonné son idée. Donc la fumée rose dans Entre le ciel et l'enfer, c'est bien possible.Max Schreck a écrit :J'ai lu que sur le plan où la fumée de la valise qui brûle s'échappe de la cheminée, la fumée est censée apparaître en rose, mais c'est pas le cas sur le dvd Wild side. Dommage.

Content que tu ais enchainé et aimé ces trois thrillers sociaux édités par Wild Side.

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La courte séquence dans l'allée des drogués est en effet complètement inattendue et dingue. On sent le génie sûr de son art, qui se laisse guider par l'élan de son inspiration.Max Schreck a écrit :Et là, on a droit à un dernier acte qui vire carrément au surréalisme, avec la filature du méchant garçon dans la nuit de Tokyo (?), avec un passage par un quartier peuplé de loques humaines aux frontières du fantastique, jusqu'à ce que la boucle soit bouclé. Je me réserve encore sur le sens à donner à la dernière scène mais assurément on est là face à un film qui est à la fois purement kurosawaien (?) dans ses thèmes et assez indéfinissable dans sa forme. Et ce qui est sûr, c'est que la conclusion donne tout son sens au titre, exactement comme dans Les Salauds dorment en paix.
J'aime aussi beaucoup la dernière scène, à la fois simple et diablement efficace. On y retrouve cette fusion fiévreuse de la forme et du fond (cf les reflets des deux hommes) propre à Kurosawa.