bruce randylan a écrit :Il y a d'ailleurs une scène simple mais qui dégage une rare puissance mélancolique et introspective ; celle où un responsable de la mafia retrouve le directeur de sa banque et dialogues devant un champ où broutent des vaches. Ca a l'air de rien mais l'élégance du travelling, la longueur de la prise, la tonalité des échanges, le sens du cadre, l'ironie de la scène confère au moment quelques chose d'absolu et d'intimidant.
Exactement la séquence que je citerais pour ce très solide
Charley Varrick. Ce long plan est génial, la position de Vernon sur le portail, cette "supériorité" dans la composition que
Siegel va accentuer au fil du dialogue avec un simple travelling avant et en même temps que la manipulation et le cynisme de Vernon se fait plus évident, le soleil quitte lentement la plaine jusqu'ici lumineuse. Absolument tout est dit dans les rapports entre les deux personnages, sans parler de charisme phénoménale de Vernon lors de cette séquence (et en général aussi).
Pour le reste c'est un sacré bonheur de mise en scène avec
Siegel qui monte des séquences de tensions en 2-3 plans, notamment l'ouverture absolument brillante, avec une sacré fluidité avant de mettre le spectateur à mal avec une action et une violence très sèche. Je suis plus réservé sur le scénario qui me semble un peu trop relâché, les rapports hommes / femmes pas super réussis et à la limite du grotesque (Matthau dans le lit de Felicia Farr) et un petit manque d'empathie pour les personnages.
Mais le film est rempli de petites idées brillantes qui élève les séquences : le fait de filmer l'entrée de Matthau chez la photographe d'un côté, celle de Baker de l'autre côté, Vernon qui discute en poussant une fillette sur sa balançoire, l'aspect tentaculaire de l'univers des gangsters et l'arrivée un peu décalée de Baker au bordel, la scène ou Baker va récupérer une voiture dont les traites n'ont pas été payées, etc. Il y a toute cette création d'un microcosme autour de son intrigue de base qui enrichit l'univers du film, mais en même affaiblit un peu la mécanique du scénario. Avec un peu de recul, pas sûr que ce soit une si mauvaise chose.