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Test blu-ray
Image de la jaquette

Macadam Cowboy

BLU-RAY - Région B
MGM / United Artists
Parution : 6 février 2013

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L'édition testée ici est la deuxième édition Blu-ray sortie sous la forme d'un sympathique digibook (qui contient en plus le DVD, devenu totalement obsolète à tous les niveaux). Hélas, le même master a été repris et c'est un euphémisme que de dire qu'il n'est pas de première fraîcheur. Ce qui frappe d'emblée, et c'est assez honteux, c'est le manque général de propreté de la copie présentée. Le premier plan (et d'autres par la suite) jusqu'au générique inclus s'avèrent très granuleux ; parsemés de points blancs et noirs, ils font très peur. Heureusement, cela s'arrange progressivement par la suite même si le master n'atteindra jamais une franche propreté (il faudra même se colleter pendant quelques longues minutes une rayure verticale sur la partie droite de l'image dans la dernière partie du film). On relève également une légère instabilité générale même si elle n'est en rien rédhibitoire. Et si la définition varie beaucoup d'une scène à l'autre (en raison principalement d'un tournage à l'arrache), de nombreux plans rapprochés et gros plans (certains même dotés d'un superbe piqué) très joliment définis correspondent à un véritable rendu HD. De même, les contrastes sont de grande qualité avec des noirs profonds qui ne bouchent pas trop les ombres, malgré quelques artefacts de compression sur certains plans trop sombres. L'espace colorimétrique bénéficie aussi de la haute définition et correspond tout à fait à la photographie de Midnight Cowboy telle qu'elle a été conçue en 1969, d'aspect naturaliste ou bien expérimental selon les cas. La vraie qualité de cet ancien master reste le respect dont il témoigne pour la texture argentique de l'œuvre ; on pourra reprocher énormément de choses à l'image de ce Blu-ray mais il propose au moins une vraie expérience cinématographique, dénuée de toute tentative de manipulation numérique disgracieuse. Il n'y a plus qu'à espérer qu'un jour un éditeur indépendant rende enfin justice à ce grand classique du Nouvel Hollywood avec un Blu-ray digne de ce nom.

Son

Parmi les nombreuses pistes sonores proposées, seule la version originale est dotée d'un mixage haute définition DTS-HD MA, ce qui tombe plutôt bien. Concernant l'aspect multicanal, il ne faut pas s'illusionner, la spatialisation est assez légère avec une présence discrète d'effets sonores dans les voies arrières ; seule la musique bénéficie vraiment de cet apport d'amplitude. En revanche, la scène frontale s'avère très agréable avec un bon équilibre et une bonne fluidité entre les voix et les ambiances. Les dialogues sont très clairs même si parfois un peu étouffés, mais l'irrégularité dans le rendus des voix dépend beaucoup de la nature même du tournage. Tout compte fait, la bande-son originale dans son mixage mono bien restauré aurait très bien fait l'affaire. Comme ses équivalentes espagnole, allemande et italienne, la version française a droit a un mixage 5.1 qui se révèle bien moins équilibré, fin et dynamique que la version originale, même si, chose surprenante la spatialisation se montre plus efficace et les graves plus présents. Cependant, cette VF est définitivement à proscrire en raison d'un doublage calamiteux qui n'a strictement aucun rapport avec l'interprétation toute en subtilité de Jon Voight et Dustin Hoffman. On ne jugera pas les autres doublages - qui n'ont pas d'intérêt pour nous - mais on notera que les voix sont en général, et sans surprise, bien trop détachées du spectre sonore.

Suppléments

L'édition digibook contient un livret d'une dizaine de pages rédigé par le journaliste Marc Toullec. Sur six pages, ce dernier retrace succinctement la production et la sortie de Midnight Cowboy, livrant quelques anecdotes dont la plupart sont développées dans les documents vidéos ci-dessus. Enfin, les filmographies sélectives de Dustin Hoffman et Jon Voight - jusqu'à 2013 - occupent les quatre pages restantes.

Le Blu-ray n'offre étrangement pas de menu interactif digne de ce nom, et c'est sur la lecture même du film que doivent s'opérer les choix de chapitres, de configuration et de bonus. Un authoring d'un autre âge et complètement contreproductif surtout si l'on pense aux innombrables possibilités qu'offre un disque Blu-ray...

Le principal supplément de cette édition consiste en un documentaire rétrospectif produit en 2004 par MGM Home Entertainment, qui réunit les principaux responsables de la réussite du film - exception faite malheureusement du réalisateur John Schlesinger décédé en 2003. Comme souvent, pour donner l'illusion d'un plus grand travail éditorial, ce documentaire a été artificiellement découpé en trois parties selon trois approches thématiques. D'un format classique, il entremêle des interviews, des extraits du film (qui ne font heureusement pas remplissage) et un nombre conséquent de photos de production.

Commentaire audio du producteur Jerome Hellman (VO non sous-titré)
Cette piste sonore se révèle très instructive. Même si le producteur ne s'exprime pas sur la totalité des 113 minutes que dure le film, les informations livrées et le dévouement de Jerome Hellman méritent toute notre attention. Si son discours fait parfois forcément doublon avec le documentaire, Hellman par ses propos complète ce dernier et s'appesantit sur de nombreux détails concernant le travail d'adaptation, la mise en scène de Schlesinger, le tournage en décors réels et en studio, les polémiques suscitées par le film, son succès critique et public. Mais il reste surtout intarissable sur les deux comédiens du films, leurs performances (leur travail d'improvisation notamment) et leur grande entente (professionnelle comme humaine). Gros bémol cependant concernant ce bonus : il n'est pas sous-titré et se voit donc réservé aux seuls anglophiles.

35 ans plus tard : réflexions sur un grand classique (30 min - 1.85 - DD mono 2.0 - VOST)
Ce segment - le plus long - s'intéresse à la production et à la fabrication de Midnight Cowboy avec un regard distancé ; les analyses intéressantes se mêlent aux anecdotes dont le récit véhicule les émotions ressenties par les intervenants, conscients d'avoir participé à une œuvre considérable et qui les a profondément marqués. Les personnalités interviewées sont : Michael Childers, compagnon de John Schlesinger, le producteur Jerome Hellman, la comédienne Jennifer Salt, fille du scénariste Waldo Salt, le chef opérateur Adam Holender, les comédiens Dustin Hoffman et Jon Voight, l'actrice Sylvia Miles ainsi que le compositeur John Barry.



Sont abordés comme thèmes la volonté du cinéaste de changer d'univers et de faire un film audacieux et controversé, l'embauche de Waldo Salt, ancienne victime de la chasse aux sorcières, le travail à trois sur le script, l'engagement de Dustin Hoffman qui venait juste de devenir une star grâce au Lauréat, le forcing de Jon Voight pour obtenir don rôle, le casting pour Joe Buck (avec des images du test de Voight) et le soutien apporté par Hoffman, le personnage de Buck, la performance de Hoffman et la construction du personnage de Ratso, les nombreuses répétitions avant le tournage remplies d'improvisations (qui se sont poursuivies sur le tournage), la complicité et l'émulation entre les deux acteurs, la qualité du casting, la fascination de Schlesinger pour les Etats-Unis, l'aspect social, l'esthétique du film et le travail de la photographie, la longue séquence de la party dans un décor inspiré du studio d'Andy Warhol, le rôle des flash-back, la structure non linéaire du récit. On regrettera que la bande musicale du film n'ait pas du tout été abordée... alors que John Barry figure au nombre des intervenants.



Controverses et applaudissements (10 min 09 - 1.85 - DD mono 2.0 - VOST)
L'acteur Bob Balaban vient rejoindre Hellman, Holender, Childers, Hoffman, Salt et Voight pour s'exprimer sur la nature extraordinaire du Midnight Cowboy et sa réception : l'idée pour ses créateurs de suivre leur volonté jusqu'au bout, celle de briser les tabous, la sortie en salles sous la classification X, la première projection avec un public enthousiaste, les récompenses aux Oscars (une première pour une œuvre classée X), le refus d'enlever une seule image du montage pour le changement de classification proposé par le studio, l'universalité du film et la façon dont celui-ci parle aux spectateurs avec ses antihéros et leurs rêves, leur quête d'amour et de reconnaissance, la compassion humaine, la conclusion du récit.


Un hommage à John Schlesinger (09 min 36 - 1.85 - DD mono 2.0 - VOST)
En plus des personnalités déjà citées, cette partie fait intervenir le critique de cinéma Leonard Maltin, les comédiens William Devane, Kiefer Sutherland et Richard Gere, le producteur Robert Evans ainsi que Francis Ford Coppola. En moins de dix minutes, ce qui est bien trop court, sont survolées la personnalité de John Schlesinger et quelques-unes de ses qualités de cinéaste : sa vision sans compromis, son humanisme, sa grande culture, son humour, son insatiable curiosité, son esprit passionné, son souci de la collaboration, l'enrichissement des personnages qui fait l'une de ses forces. Il aurait au moins fallu tripler la durée de ce segment pour proposer un portrait plus approfondi et captivant de Schlesinger, alors qu'on reste ici sur une litanie de propos intéressants mais trop succincts et artificiellement montés. Dommage.


Par Ronny Chester - le 20 mars 2018