"Autrefois, quand j’étais enfant, Peau d’Âne me plaisait particulièrement. J’ai essayé de faire le film dans cette optique, par mes yeux, comme ça, quand j’avais sept ou huit ans. " Jacques Demy

Quand on associe cinéma et conte de fées en France, on pense irrémédiablement à Jean Cocteau et c'est tout compte tenu de la frilosité qui s'empare généralement des artistes et des producteurs français en matière de fantaisie. Ce serait pourtant oublier un film très particulier (où l'on retrouve d'ailleurs Jean Marais, partenaire à la vie comme à l'écran de Cocteau), réalisé par un cinéaste non moins singulier dans notre paysage cinématographique : Jacques Demy. La force de Peau d'Âne réside d'abord dans la sincérité et la liberté d'esprit d'un artiste qui épouse le regard d'un enfant, mélange de naïveté émerveillée et de perversion goguenarde. Elle réside ensuite dans le rapport que le film entretient avec son époque post-soixante-huitarde, qui permet à Demy de mettre en scène une féérie musicale pop et colorée dans laquelle il se permet tous les délires avec délectation (mélangeant poésie doucereuse et humour sexuellement connoté, envolées lyriques et anachronismes qui brisent la frontière entre passé et présent, romantisme candide et cruauté enfantine). Surtout, Demy reste fidèle à ses obsessions : faire jaillir des univers factices et fantaisistes qu'il se plaît à concevoir une vérité des sentiments qui touche à l'universel.

dans les salles

« Il était une fois un Roi si grand, si aimé de ses peuples, si respecté de tous ses voisins... » A la mort de son épouse, le monarque lui fait la promesse de n’épouser qu’une femme plus belle que la future défunte. Il ne trouve que sa fille (Catherine Deneuve) pour satisfaire à cette exigence. Celle-ci, désemparée par la sollicitude nouvelle de son père, fait appel à sa Marraine, la Fée des Lilas (Delphine Seyrig). Elles manigancent un stratagème à base de demandes extravagantes : robes couleur du temps, de lune, de soleil... Il faudra, pour venir à bout du puissant homme, lui demander la peau de ce vieil âne, qui s’ennuie tant dans ses écuries : celui qui crotte des diamants dont la fortune du royaume est faite.... (lire la suite)