Henry King (1886-1982)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

Modérateurs : cinephage, Karras, Rockatansky

bogart
Réalisateur
Messages : 6527
Inscription : 25 févr. 04, 10:14

Re: quelques chefs-d'oeuvre d'Henry King : bilan et lacunes

Message par bogart »

francis moury a écrit :Quelques chefs-d'oeuvre, parfois des adaptations réussies - autant qu'elles peuvent l'être - de classiques de la littérature du XXe siècle, mais parfois aussi issus de scénarios originaux ou de faits historiques :
- L'INCENDIE DE CHICAGO (1938)
- LE CHANT DE BERNADETTE (1943)
- CAPITAINE DE CASTILLE (1947)
- LES NEIGES DU KILIMANDJARO (1952)
- UNTAMED [Tant que soufflera la tempête] (1954)
- LOVE IS A MANY SPLENDORED THING [La colline de l'adieu] (1955)
d'après le roman d'Han Suyin traduit en français sous le titre "Multiple splendeur"
- LE SOLEIL SE LEVE AUSSI (1957)
- BRAVADOS (1958) pas exclusivement mais AUSSI pour Joan Collins (toujours géniale) et Gregory Peck

D'après tout ce que j'ai pu lire dessus on peut aussi y ranger son dernier - et psychanalytique - film :
- TENDRE EST LA NUIT (1961) mais avec cette réserve évidente qu'il me tarde de le découvrir, qu'il est rare, trop rare : édition DVD correcte ? À vérifier...

Parmi les oeuvres honnêtes ou assez bonnes ou bonnes :
- TOL'ABLE DAVID (1921)
- STANLEY ET LIVINGSTONE (1938)
- DAVID ET BETHSABÉE (1951)

Parmi les nullités :
LE CYGNE NOIR (1942)
Le bilan est plus qu'honorable !
Et ce ne sont que quelques films représentant à peine la moitié de sa filmographie. Un cinéaste méconnu aujourd'hui, mal édité, à re-découvrir que les historiens de la génération précédentes avaient plus visionné que nous. Une des grandes lacunes actuelles des programmations en somme...


Nullité :evil: Je trouve que le mot est fort car ce film loin d'être un chef-d'oeuvre reste un bon film d'aventure.
L'étranger...
Introduit au Festival de Cannes
Messages : 8458
Inscription : 13 avr. 03, 08:31
Localisation : Dans le dos de Margo et Roy !

Re: quelques chefs-d'oeuvre d'Henry King : bilan et lacunes

Message par L'étranger... »

bogart a écrit :
francis moury a écrit : Parmi les nullités :
LE CYGNE NOIR (1942)
...


Nullité :evil: Je trouve que le mot est fort car ce film loin d'être un chef-d'oeuvre reste un bon film d'aventure.
Ben moi, je le trouve même TRES bon ce film de pirates!


ps: Bogart, j'adore ton nouvel avatar! :wink:
ImageImage
bogart
Réalisateur
Messages : 6527
Inscription : 25 févr. 04, 10:14

Re: quelques chefs-d'oeuvre d'Henry King : bilan et lacunes

Message par bogart »

L'étranger... a écrit :
bogart a écrit :


Nullité :evil: Je trouve que le mot est fort car ce film loin d'être un chef-d'oeuvre reste un bon film d'aventure.
Ben moi, je le trouve même TRES bon ce film de pirates!


ps: Bogart, j'adore ton nouvel avatar! :wink:

Merci L'étranger.
Avatar de l’utilisateur
Beule
Réalisateur de seconde équipe
Messages : 5742
Inscription : 12 avr. 03, 22:11

Re: quelques chefs-d'oeuvre d'Henry King : bilan et lacunes

Message par Beule »

francis moury a écrit :
Parmi les nullités :
LE CYGNE NOIR (1942)


Hé hé :D , j'allais m'énerver une fois de plus, mais, après tout, tu as le droit de porter une telle appréciation. J'avoue qu'émanant de quelqu'un qui semble tenir en très haute estime les incursions dans le cinéma d'aventures médiévales ou de cape et d'épée d'un certain André Hunnebelle, elle me laisse toutefois fort perplexe.

J'attends néanmoins que tu étayes quelque peu ce jugement pour le moins lapidaire, que je trouve d'autant plus disproportionné que je constate que tu n'hésites pas à placer Untamed, qui s'il vaut pour quelques éclairages historiques trop rares sur la guerre des Boer ne tire aucun parti du background historique de la terrible crise irlandaise, et surtout, s'égare dans la pire convention romanesque à la Autant en emporte le vent, parmi ses chefs-d'oeuvre. Sans compter qu'en dehors de quelques très beau panoramiques préludant aux scènes de batailles, la mise en scène s'enlise dans un statisme illustratif proche de celle du calamiteux Capitaine King(le plus médiocres des quelques rares films du cinéaste que j'ai pu voir à ce jour avec le sirupeux Cette terre qui est mienne, et aussi le plus complaisant d'un point de vue historique) ou du somme toute assez désastreux Le soleil se lève aussi, insignifiante adaptation, dramatiquement édulcorée jusqu'à l'en déposséder de sa substance, du roman d'Hemingway réduite aux atours du simple dépliant touristique. A ce sujet, malgré sa trop grande linéarité, ses erreurs de casting (Jennifer Jones bien trop âgée pour le rôle, Jason Robards trop ostentatoirement solide pour exprimer la part de fébrilité et de féminité refoulée de son personnage) Tendre est la nuit reste au moins une tentative estimable de transcription de la félure existentielle exhalée par le chef d'oeuvre de Scott Fitzgerald.
Image
Avatar de l’utilisateur
Jeremy Fox
Shérif adjoint
Messages : 99655
Inscription : 12 avr. 03, 22:22
Localisation : Contrebandier à Moonfleet

Message par Jeremy Fox »

Je ne suis pas un fanatique du Cygne noir mais malgré tout, il tient la dragée très haute face aux films ternes de Hunebelle ou Borderie. Niveau mise en scène, la comparaison n'est pas à l'avantage des réalisateurs français.
Lord Henry
A mes délires
Messages : 9466
Inscription : 3 janv. 04, 01:49
Localisation : 17 Paseo Verde

Message par Lord Henry »

Ne doutons pas que s'il faut étayer, Francis étayera.
Image
Kurtz

Message par Kurtz »

Le cygne noir n'est pas une nullité.

c'est un bon film d'aventures. [/b]
takezo
Réalisateur
Messages : 6140
Inscription : 16 mai 03, 15:23
Localisation : East Coast

Message par takezo »

La cible humaine - Henry King

[GROS SPOILER DE LA MORT QUI TUE]
Un film magnifique. Au delà du postulat de base intéressant qui traite du revers de la renommé, j'aime particulièrement la simplicité du traitement, chaque plan allant droit au but, sans pour cela sacrifier la peinture des caractères. Le trait est très légerement grossi sur certains personnages, la gardienne des bonnes moeurs, le barman, la bien-aimé, mais King ne tombe jamais dans la caricature facile. Ils tiennent tous un rôle majeur dans l'issue forcement fatale de l'histoire. Il y a un homme qui appuie sur la gachette à la fin, mais c'est tout le corps social qui arme le chien et désigne la cible.
The gospel was told, some souls it swallowed whole
Mentally they fold, and they eventually sold
Their life and times, deadly like the virus design
But too, minute to dilute, the scientist mind.
Wu.
Avatar de l’utilisateur
Jeremy Fox
Shérif adjoint
Messages : 99655
Inscription : 12 avr. 03, 22:22
Localisation : Contrebandier à Moonfleet

Message par Jeremy Fox »

takezo a écrit :La cible humaine - Henry King

[GROS SPOILER DE LA MORT QUI TUE]
Un film magnifique. Au delà du postulat de base intéressant qui traite du revers de la renommé, j'aime particulièrement la simplicité du traitement, chaque plan allant droit au but, sans pour cela sacrifier la peinture des caractères. Le trait est très légerement grossi sur certains personnages, la gardienne des bonnes moeurs, le barman, la bien-aimé, mais King ne tombe jamais dans la caricature facile. Ils tiennent tous un rôle majeur dans l'issue forcement fatale de l'histoire. Il y a un homme qui appuie sur la gachette à la fin, mais c'est tout le corps social qui arme le chien et désigne la cible.
Je trouve en plus que ce film nous présente le personnage de shérif le plus attachant du genre.
Au delà du postulat de base intéressant qui traite du revers de la renommé, j'aime particulièrement la simplicité du traitement,
Et le tout sans aucune note de musique : chapeau bas monsieur King !
Avatar de l’utilisateur
Jeremy Fox
Shérif adjoint
Messages : 99655
Inscription : 12 avr. 03, 22:22
Localisation : Contrebandier à Moonfleet

Message par Jeremy Fox »

Le pacte (Lloyds of London) de Henry King 1936

Très beau film bénéficiant surtout d'un remarquable scénario de Walter Ferris, habile mélange d'Histoire (avec un grand H) et de petites histoires, le tout parfaitement agencé. La manière de décrire les sociétés d'assurance de l'époque (fin du 18ème) n'est jamais laborieuse mais au contraire tout à fait passionnante. Quant à la justesse de la description de l'amitié entre Jonathan Blake et de l'amiral Horatio Nelson et de l'amour qui unit Tyrone Power et Madeleine Carroll, elle porte la marque de la sensibilité habituelle de Henry King. Tyrone Power prouve aussi qu'il n'était pas un acteur fade comme on le lui a trop souvent reproché.
Avatar de l’utilisateur
Jeremy Fox
Shérif adjoint
Messages : 99655
Inscription : 12 avr. 03, 22:22
Localisation : Contrebandier à Moonfleet

Message par Jeremy Fox »

Je complète le cycle Henry King du cinéma de minuit en déterrant les VHS de Geoffrey Firmin parmi lesquelles 5 ou 6 raretés du cinéaste que je n'avais pas encore pris le temps de regarder.


Remember the Day : Henry King 1941

Une vieille institutrice vient attendre le discours d'investiture du futur président des USA. Flash back sur la vie de ces deux personnes qu'apparemment tout sépare et qui pourtant se sont cotoyées quelques 20 ans auparavant, la vielle dame ayant été l'institutrice du futur président.

Très jolie tranche d'Americana traitée avec une très grande discrétion et avec la sensibilité toute particulière d'Henry King. 'L'histoire' de l'amitié (amour) d'un jeune élève d'une dizaine d'années pour son institutrice (Claudette Colbert), celle de l'amour de cette dernière pour un de ses collègues, ce qui risque de provoquer le scandale à cette époque (début du siècle) un peu guindée, celle enfin de la vie de tous les jours d'une petite ville américaine comme il y en existe des milliers. Peu de progression dramatique mais une attention toute particulière à ce quotidien décrit une grande justesse. Pas de cris, de larmes, de pleurs, juste la vie de tous les jours.

John Payne et Claudette Colbert sont excellents et le film touchant par sa simplicité.
Avatar de l’utilisateur
Jeremy Fox
Shérif adjoint
Messages : 99655
Inscription : 12 avr. 03, 22:22
Localisation : Contrebandier à Moonfleet

Message par Jeremy Fox »

Ce topic mérite d'être déterré pour cause de cycle au cinéma de minuit.

En raison de mon cycle maison agrémenté d'une dizaine de titres supplémentaires, voici quelques rapides avis.

Le pacte (Lloyds of London) 1936

Très beau film bénéficiant surtout d'un remarquable scénario de Walter Ferris, habile mélange d'Histoire (avec un grand H) et de petites histoires, le tout parfaitement agencé. La manière de décrire les sociétés d'assurance de l'époque (fin du 18ème) n'est jamais laborieuse mais au contraire tout à fait passionnante. Quant à la justesse de la description de l'amitié entre Jonathan Blake et de l'amiral Horatio Nelson et de l'amour qui unit Tyrone Power et Madeleine Carroll, elle porte la marque de la sensibilité habituelle de Henry King. Tyrone Power prouve aussi qu'il n'était pas un acteur fade comme on le lui a trop souvent reproché.

L'Heure suprême (Seventh Heaven) 1937

Curieux de savoir ce que Frank Borzage a fait de cette histoire car j'ai trouvé le scénario du film de King atterant de ridicule. L'histoire d'amour de l'égouttier Chico (James Stewart) et de la prostituée Diane (Simone Simon) n'est pas crédible une seconde par la faute d'une Simone Simon absolument pas convaincante et d'un réalisateur qui n'arrive même pas à sauver les meubles tellment sa mise en scène est incohérente mélangeant expressionisme, platitude... Un excessivement ennuyeux mauvais film.

L'Incendie de Chicago (In Old Chicago) : 1938

Et encore une fois, le cinéaste évite (presque) tous les écueils d'un film surtout réputé pour sa longue séquence finale de l'incendie. Car ce n'est pas l'unique raison de s'y intéresser et l'unique raison qui a apparement motivé son auteur. Reconstitution fastueuse et assez réaliste (les rues boueuses du début), description alerte, vigoureuse, colorée (même si le film est en noir et blanc) d'une grande ville en plein essor au milieu du 19e siècle, voici ce qu'est ce film dans sa première partie, la plus importante. Tyrone Power interprète le rôle d'un flambeur ambitieux et qui n'hésite pas à employer les coups bas pour arriver à ses fins. Alice Faye est une chanteuse de cabaret qui ne se laisse pas démonter, au caractère bien trempé. Et tous ceux qui les entourent sont rapidement mais bien croqués, Don Ameche, Alice Brady et Brian Donlevy en tête. Les séquences familiales portent la marque inimitable du réalisateur. Enfin, une Chigago d'une vitalité étonnante qui va s'embraser pour mieux pouvoir, grâce aux réformateurs, être reconstruite sur des bases et des 'valeurs' plus solides. King reprendra le trio d'acteur principaux pour son autre belle reconstitution, celle d'Alexander's Ragtime Band l'année suivante avec à nouveau un solide scénario de Lamar Trotti.

La Folle parade (Alexander's Ragtime Band) 1938

L'histoire d'un groupe de musicien de musique populaire au début du siècle, à l'orée de la Première Guerre Mondiale et après. Utilisant une trentaine de standards de Irving Berlin, Henry King rend un vibrant hommage à l'époque et à sa musique à travers 3 portraits très justes d'un chef d'orchestre (Tyrone Power qui n'est jamais si bon que chez King), un pianiste (touchant Don Ameche) et une chanteuse (Alice Faye qui supplante ses partenaires par son immense talent méconnu : un personnage féminin très riche et complet superbement écrit et admirablement joué). Autre chanteuse de talent : Ethel Merman dans un registre totalement différent. On ne s'ennuie pas une seconde même si le film ne compte pas parmi les réussites majeurs du cinéaste.

Stanley et Livingstone 1939

Petite déception peut-être en raison de l'ampleur et du souffle de l'aventure que l'on attend face à ce type de sujets mais que l'on ne ressent pas ici. Belle histoire ceci dit, l'aspect humain passant comme souvent chez King avant l'aspect épopée qui n'en est pas franchement une puisque le voyage de Stanley ne sera qu'une longue marche d'une année sans que rien n'arrive vraiment à son groupe (sauf une 'attaque' par les indigènes superbement filmée). Belles images tournées par Otto Brower de la troupe évoluant en plan d'ensemble dans les immensités africaines, scénario passionnant qu'Henry King n'arrive pourtant pas à rendre aussi émouvant qu'on l'aurait souhaité, la rencontre entre Stanley et Livingstone n'arrivant jamais non plus à réellement décoller. A revoir peut-être en ne s'attendant pas à un film d'aventure. Par contre, ravi de trouver mélangé des acteurs tels que Charles Coburn, Walter Brennan à la troupe de seconds rôles habituelle à King (Nancy Kelly, Henry Hull) que l'on verra la même année dans son superbe Jesse James.

Le Brigand bien aimé (Jesse James) 1939

L'un des premiers chefs d'oeuvre du western donc que ce film serein, classique et émouvant, une espèce de chronique d'une page d'histoire de l'Amérique. Henry Fonda, Tyrone Power, Randolph Scott et la superbe Nancy Kelly dans un film d'une sobriété et d'une retenue qui sont les deux qualificatifs qui illustrent le mieux le Henry King de ses meilleurs films.
Dans un beau technicolor, le réalisateur nous montre ici surtout son don de conteur : pas besoins d'actions, de chevauchées, de duels à outrances mais une belle histoire à laquelle il croit très fort et nous aussi par la même occasion.

Souvenirs (Remember the Day) 1941

Une vieille institutrice vient attendre le discours d'investiture du futur président des USA. Flash back sur la vie de ces deux personnes qu'apparemment tout sépare et qui pourtant se sont cotoyées quelques 20 ans auparavant, la vielle dame ayant été l'institutrice du futur président. Très jolie tranche d'Americana traitée avec une très grande discrétion et avec la sensibilité toute particulière d'Henry King. 'L'histoire' de l'amitié (amour) d'un jeune élève d'une dizaine d'années pour son institutrice (Claudette Colbert), celle de l'amour de cette dernière pour un de ses collègues, ce qui risque de provoquer le scandale à cette époque (début du siècle) un peu guindée, celle enfin de la vie de tous les jours d'une petite ville américaine comme il y en existe des milliers. Peu de progression dramatique mais une attention toute particulière à ce quotidien décrit une grande justesse. Pas de cris, de larmes, de pleurs, juste la vie de tous les jours. John Payne et Claudette Colbert sont excellents et le film touchant par sa simplicité.

A Yank in the RAF 1941

L'histoire de trois officiers tournant autour de la même femme, une danseuse de cabaret, au début de la Seconde Guerre Mondiale. Mélange de film sentimental et de film de guerre passionnant ni d'un côté ni de l'autre. On a du mal à comprendre comment ces trois soldats peuvent se disputer un personnage féminin aussi fade mais en revanche, intéressante description des 3 personnages masculins, celui de Tyrone Power étant même menteur, arrogant, prétentieux et goujat comme ce n'est pas permis. On aurait aimé que le scénario soit à l'image de ce personnage, allant à l'encontre des conventions, mais ce n'est malheureusement que rarement le cas. On a du mal à retrouver le ton et le style du cinéaste.

Le Chant de Bernadette (The Song of Bernadette) 1943

Ce film est 'miraculeux' : comment faire une biographie de Bernadette Soubirous sans tomber dans les bondieuseries, la mièvrerie... Etonnant film d'un lyrisme rare surtout dans sa première partie, dû pour beaucoup à la fabuleuse partition de Alfred Newman qui lorgne sur le Daphnis et Chloé de Debussy, et en même temps d'une grande sobriété dans le traitement de l'histoire. La mise en scène extraordinaire de Henry King nous donne de nombreuses images inoubliables et le scénario est d'une rare intelligence qui nous donne différents points de vue sur l'histoire, le personnage de Vincent Price à cet égard étant magnifiquement écrit. J'avoue avoir surtout étonné par Jennifer Jones absolument extraordinaire dans ce rôle : elle rayonne carrément sur tout le film et son visage est inoubliable. Ces transes nous offrent des gros plans absolument miraculeux. Un chef d'oeuvre. Redécouvrons urgemment Henry King, son humanité et sa simplicité.

Margie

Tout comme Remember the day en 1941, une autre tranche d'Americana se déroulant dans les milieux étudiants, ici, un lycée d'une petite ville américaine typique. Tout comme dans ce dernier, une délicatesse de ton que l'on retrouve dans une très belle mise en scène, une très belle utilisation de couleurs pastels et des décors naturels (ici Reno magnifiquement photographiée). L'histoire raconte les premiers émois d'une jeune lycéenne forte en thème attirée par son prof de français. Mais Henry King a beau avoir du talent, il n'arrive pas à sauver un scénario sans intérêt et, osons le dire, assez idiot. Quant à Jeanne Crain, j'ai beau aimer cette actrice mais elle n'était visiblement pas faite pour le rôle : bien trop âgée pour être crédible. Au vu de la première séquence, Margie avait tout pour être charmant, il l'est même parfois, mais au final, il ne reste pas grand chose.

Capitaine de Castille 1947

Merveilleux film d'aventure d'une sobriété et d'une belle économie de moyens et d'effets qui sont la marque d'Henry King aidé encore une fois ici par un magnifique scénario de Lamar Trotti qui créé avec le personnage joué par Tyrone Power l'un des héros de films d'aventures les plus riches à l'égal d'un Jeremy Fox ou d'un André Moreau. Mais attention, qui dit film d'aventure, ne dit pas nécessairement panache ou truculence ; il n'y en a point ici ou si peu mais au contraire une retenue de tous les instants et une sécheresse apparente derrière laquelle l'émotion n'en ressort que plus fortement (voire la sublime et longue séquence ponctuée par les rythmes angoissants des tambours mexicains qui commence par une conversation sur la religion entre Vargas le conquérant et un indien, ancien esclave en Espagne qu'il a sauvé, et et qui se termine par l'une des plus douces et belles scènes d'amour que j'ai pu voir, Tyrone Power s'endormant de fatigue dans les bras de Jean Peters, celle-ci continuant de lui caresser la tête tout en épanchant son immense amour dans les oreilles du meilleur ami de son amant joué par Lee J Cobb. Scène magique, poignante et simple d'une sensibilité et d'une émotion qui porte le film vers de formidables hauteurs). Plastiquement splendide, des acteurs parfaits (une Jean Peters inoubliable, Alan Mowbray et Lee J Cobb étonnants, César Romero impérial et Tyrone Power confirmant tout le bien que j'en pense sous la direction de King) et une partition qui, si elle n'est peut-être pas la meilleure d'Alfred Newman, comporte cependant le plus beau thème qu'il ait jamais écrit, celui dédié au personnage de Catana Perez. Superbe !

Deep Waters 1948

Chronique sensible, juste et extrêmement attachante d'un petit village côtier du Maine où la pêche aux langoustes est la principale source de revenus de ses habitants. Dans le même temps, King nous conte l'histoire d'un pêcheur (Dana Andrews a rarement été aussi juste) qui se prend d'amitié pour un jeune orphelin (Dean Stockwell confirme qu'il était l'un des enfants-acteurs les plus doués d'Hollywood) ; jeune orphelin 'coaché' par une assistante sociale (Jean Peters) amoureuse du pêcheur mais qui refuse de l'épouser pour ne pas subir les angoisses qui sont le lot quotidien de toutes les autres femmes de marins. Tout ceci sans dramatisme exagéré, sous la forme d'une chronique tendre et foncièrement émouvante remplie de notations bien senties sur la vie quotidienne de ce petit peuple. Tous les seconds rôles sont parfaitement croqués sans utilisation du pittoresque. En bonus, une scène de tempête sur une mer démontée très impressionnante pour l'époque. Magnifique

Echec à Borgia (Prince of Foxes) 1949

Si Henry King réalise effectivement un beau film d'aventure luxueux et en décors naturels sur une période de l'histoire peu abordée, si Orson Welles est réellement épatant en Borgia, si Tyrone Power continue à me plaire sous la direction de King et si les dialogues sont bien troussés, le scénario ne m'a pas autant touché et passionné que celui de Capitaine de Castille, loin s'en faut ; n'est pas Lamar Trotti qui veut et les personnages me semblent bien moins fouillés et riches que dans les scripts de ce dernier pour le réalisateur. Il n'atteint à aucun moment les hauteurs du précédent, adapté pourtant d'un roman du même auteur, et ne tire jamais le film plus loin qu'un honnête film de cape et d'épée : ce qui n'est déjà pas si mal ! Un peu déçu aussi par la partition d'Alfred Newman, qui de superbe pour Capitaine, se révèle plutôt pesante ici.

Un homme de fer (Twelve O'Clock High) 1949

http://www.dvdclassik.com/Critiques/dvd_hommefer.htm


La Cible humaine (The Gunfighter) 1950

C’est l’histoire d’un tireur d’élite, Jimmie Ringo, voulant se ranger mais n’y arrivant pas, trouvant toujours sur son chemin un jeune prétentieux voulant obtenir la gloire d’avoir réussi à être plus rapide que lui. Gregory Peck dans le rôle de ce ‘héros’ las de cette vie passée à fuir les duels, arrive dans la ville où il a laissé une épouse et un fils qu’il n’a pas vu depuis 8 ans, ceux-ci ne pouvant plus supporter cette vie d’angoisse et de violence. Le film se passe quasiment en temps réel, sans aucune musique, et nous avons un Gregory Peck absolument parfait, égal à lui-même et un personnage de shérif parmi les plus beaux de l’histoire du cinéma, shérif, ex-truand de la bande à Jimmie mais maintenant vieilli, honnête et foncièrement humain (sublime Millard Mitchell). J’avoue que les dix dernières minutes du film m’ont, comme la première fois, fait venir les larmes aux yeux. Et ça, sans la moindre musique, sans la moindre volonté de forcer le côté dramatique, par la seule force de l’interprétation de Gregory Peck et de la mise en scène de Henry King. Leur duo avait déjà donné le formidable Un homme de fer mais là, ils font encore plus fort.

La Colline de l'adieu (Love is a many-splendored thing) 1955

Magnifique mélo de Henry King. Un film simple, lent, sans aucune montée dramatique ou coup de théâtre mais qui est une histoire d'amour tendre, sensible, pudique et attachante. William Holden et Jennifer Jones forment un couple touchant et la superbe musique de Alfred Newman aide beaucoup à faire passer l'émotion.

Bravados (1958)

Après une première demi-heure tendue, mystérieuse et assez prenante, le film devient plutôt ennuyeux dès que la course-poursuite s'engage. Le portrait des 4 bandits est assez terne, le rythme se fait languissant et l'on finit par trouver le temps long surtout que le scénario n'apporte plus grand chose d'original. Je trouve que Henry King, poète élégiaque d'une grande sensibilité se sent peu concerné par son histoire qui manque singulièrement d'ampleur et d'émotion. Le final est même assez gênant comme l'explique Melmoth et achève de rendre ce film beaucoup trop lourd et finalement plutôt indigeste dans l'ensemble. Pourtant King n'a pas son pareil en tant que paysagiste et les lieux sont magnifiquement photographiés et filmés.
Private Joker
Accessoiriste
Messages : 1743
Inscription : 10 sept. 05, 00:35

Message par Private Joker »

Jeremy Fox a écrit :Ce topic mérite d'être déterré pour cause de cycle au cinéma de minuit.

Découverte ces jours derniers de deux films qui vont être rapidement complétés pas une quinzaine d'autres dans le courant du mois. Je me fais mon cycle maison.
Veinard... :mrgreen:

Je n'ai vu que trois films de ce cinéaste : Lloyds of London, Le Chant de Bernadette, que j'avais également énormément apprécié, et In Old Chicago.
Avatar de l’utilisateur
Jeremy Fox
Shérif adjoint
Messages : 99655
Inscription : 12 avr. 03, 22:22
Localisation : Contrebandier à Moonfleet

Message par Jeremy Fox »

Image

1942. Le groupe 918, stationné sur la base aérienne d’Archbury en Angleterre, subit d’énormes pertes en hommes et en matériel. En effet, l’état-major lui demande de prendre des risques inconsidérés, mais nécessaires pour affaiblir rapidement l’ennemi, en pratiquant le bombardement précis en plein jour. Le moral est au plus bas parmi les aviateurs et, pour ne pas que la contagion s’étende à d’autres groupes, le général Pritchard (Millard Mitchell) décide de remplacer le commandant Davenport (Gay Merrill), trop proche de ces hommes, par un général d’une extrême fermeté, Frank Savage (Gregory Peck), qui supprime d’emblée toutes les permissions et qui rétablit une forte discipline. Cette nouvelle affectation ne réjouit pas les soldats qui demandent alors tous leurs mutations au même moment. Le nouveau commandant persuade alors le major Stovall (Dean Jagger) de faire ‘traîner’ ces transferts le temps qu’il reprenne en main le groupe. Sa méthode se révèle finalement efficace, les pertes diminuent et la confiance revient mais ‘l’effort maximum’ qu’il demande à ces hommes, il va être le premier à en faire les frais…

Image

Henry King vient de finir en Italie le tournage de Echec à Borgia (1949) avec Orson Welles dans le rôle titre. De retour dans son pays natal, le réalisateur se voit offrir par Darryl F. Zanuck un roman intitulé ‘Twelve o’clock high’ ainsi que la quatrième mouture (déjà) du scénario de son adaptation. Les romanciers et scénaristes sont les mêmes hommes, deux anciens aviateurs d’une escadrille de bombardiers ayant servis sous les ordres d’un certain général Frank Armstrong. Ce militaire fut responsable des premiers bombardements de jour en Allemagne et inspirera le personnage interprété par Gregory Peck. L’acteur refuse dans un premier temps de jouer dans Un homme de fer, trouvant que son rôle ressemble trop à celui que Clark Gable tenait dans Tragique décision de Sam Wood, mais finit par accepter en avouant à Henry King qu’il n’a aucune expérience militaire. Le réalisateur le rassure en lui disant qu’il sera entouré de gens compétents, aptes à bien le conseiller. Zanuck, enthousiasmé par la énième version du scénario, décide de produire personnellement ce film qui est complètement différent de ce que le producteur fera en 1963 avec son célèbre Le jour le plus long.

Image

En effet, une mise au point est nécessaire afin que les amateurs de scènes de bataille ne soient pas désappointés par ce pourtant très beau film. Un homme de fer est une œuvre originale et assez unique puisque l’appellation ‘film de guerre’ dans son cas précis, pourrait prêter à confusion et induire en erreur les amateurs du genre. Dans ce qui se révèle être plutôt un drame psychologique, nous trouvons une seule scène de combat aérien n’excédant pas 12 minutes et n’intervenant qu’au bout d’une heure quarante de film. Point non plus ici de séquences montrant les soldats dans leur campement ou sur le terrain, plaisantant, discutant ou faisant quoique ce soit d’autres ; nous ne verrons à aucuns moments vivre ces aviateurs puisque le point de vue unique voulu par le réalisateur est celui de l’état-major, et en l’occurrence, le major Harvey Stovall qui se remémore ce qu’il a vécut sept ans auparavant.

Image

Car le film de Henry King se présente en fait sous la forme d’un long flash back. Il est amené par une scène absolument poignante : le major Stovall, joué par Dean Jagger (qui reçoit à cette occasion l’oscar du meilleur second rôle), trouve chez un antiquaire un pot en céramique. Cet objet, qui servait aux officiers à prévenir les aviateurs d’un briefing immédiat, sera un peu ce que fut la madeleine pour Proust, à savoir, ce qui déclenchera l’envie du major à la retraite de se rendre sur le terrain d’aviation d’Archburry, désormais à l’abandon, pour y revivre les évènements qui s’y sont déroulés et dont il va maintenant se souvenir. Henry King n’utilisera, une fois entamé le flash back, absolument aucune musique (excepté les chants des soldats que l’on entend au loin), mais dans cette scène initiale, Alfred Newman nous aura fait entendre un thème profondément nostalgique et émouvant. Grâce à ce morceau, et dès cette première scène extrêmement mélancolique, nous nous doutons que nous allons assister à une œuvre qui ne ressemblera à aucune autre du genre, profondément humaine, typique de ce cinéaste un peu injustement oublié de nos jours malgré une filmographie conséquente et non dépourvue de joyaux.

Image

Retour donc pour le major Stovall jusqu’à cette année 1942 : les évènements sont narrés du seul point de vue des ‘hauts gradés’, ces militaires qui suivent les combats de très loin. Mais attention cependant, contrairement à Kubrick dans Les sentiers de la gloire, Henry King ne juge pas, ne critique pas, ne dénonce rien, n’est pas ironique une seule seconde : il aime tous ces personnages, que ce soient les généraux ou les simples soldats. Des scènes de combats, nous en entendrons parler et nous assisterons au départ et à l’arrivée des bombardiers mais, à l’exception d’une unique séquence aérienne, ce sera tout pour l’action proprement dite. Tout est filmé avec rigueur, sobriété et intelligence par un réalisateur qui ne cède jamais à la facilité car, en plus de ne quasiment pas filmer de morceaux de bravoure, il n’intègre pas non plus à son intrigue le traditionnel personnage féminin qui aurait parasité cette histoire d’hommes. Avant de rendre compte du véritable sujet du film, revenons rapidement sur cette unique séquence de bataille aérienne. Henry King et son monteur réalisent ici des prouesses puisque les scènes d’archives sont parfaitement intégrées aux plans de studio et ces 12 minutes de combat sont d’une remarquable fluidité et d’une belle efficacité.

Image

Plus qu’un film ‘guerrier’, il s’agit donc plutôt d’une réflexion sur la notion de commandement qui oppose deux conceptions antagonistes de ce que l’on appellerait de nos jours ‘le management’. Le colonel Davenport se voulait le soutien, le confident et le partenaire de ses hommes, quitte à déséquilibrer le groupe par un sentimentalisme qui n’a pas lieu d’être lorsqu’il s’agit de fournir ‘un effort maximum’ : il n’hésitait pas à prendre la défense de ses hommes en leur reconnaissant le droit à l’erreur. Au contraire, le général se définit comme un chef autoritaire, froid et distant, un guide non paternaliste demandant à ses hommes le respect, l’obéissance et le dépassement de soi, tout au moins dans les périodes difficiles. "Vous allez regretter d’être né…Arrêtez de faire des projets. Oubliez vos espoirs de rentrer chez vous. Considérez-vous comme déjà morts. Une fois que vous aurez accepté cette idée, ce sera moins dur". Il n’aura au départ de cesse d’humilier et de rabaisser ces hommes, punissant même un membre de l’équipage ayant préféré privilégier la vie d’un ami plutôt que l’intégrité du groupe. Trouvant certains hommes trop faibles, il fera inscrire sur leurs avions ‘La colonie des lépreux’. Dans le courant du film, ces deux conceptions de l’autorité s’interpénètrent et se chevauchent puisque le général, au contact de ses hommes et les accompagnant même lors des différentes missions, ne peut que finir par s’identifier à eux, sans pour autant comme son prédécesseur, s’en faire des camarades.

Image

A force d’efforts harassants et de stress, il atteint la limite de ce qu’il peut donner et, épuisé physiquement et psychologiquement par trop d’émotion contenue, anéanti et écrasé par le poids de ces responsabilités et des efforts fournis, il n’arrive même plus à grimper dans son avion, craque et tombe dans un état de prostration. Cet état quasi ‘comatique’ au cours duquel il se croit en mission auprès de ses hommes, ne cessera que quand il entendra le bruit de moteur des avions rentrant de mission. Pendant toute la durée de celle-ci, il aura été absent pour son entourage, parti psychiquement dans un combat imaginaire aux commandes d’un bombardier. Ce film sur les limites que l’on demande à l’être humain dans une période troublée possède quelques scènes inoubliables par la force de l’émotion qui s’en dégage : l’attente des avions par le personnel de secours jouant au base-ball sur le terrain jusqu’à entendre le vrombissement des moteurs ou bien celle encore plus poignante qui voit Gregory Peck allant rendre visite à un blessé à l’hôpital, ce dernier ému aux larmes de voir cet ‘homme de fer’ finalement humain.

Image

Au finish, nous nous trouvons devant un film très bien écrit et dialogué, austère mais constamment émouvant, à la mise en scène classique mais intense, belle leçon d’humilité et d’humanité, jamais belliciste. Ce film unique, montrant comment un officier supérieur peut lui aussi être miné par le quotidien routinier de la guerre, sera aussi le premier d’une série de six autres que Henry King tournera avec Gregory Peck. Le suivant de 1950 sera non moins que l’un des chefs d’œuvre absolu du western, La cible humaine (The gunfighter), dans lequel on retrouvera cet autre acteur génial mais peu connu : Millard Mitchell qui joue dans Un homme de fer le supérieur hiérarchique de Gregory Peck. Ceux qui voudraient visionner un film de guerre complémentaire et plus remuant, montrant cette fois ce qu’il se passe à l’intérieur d’un bombardier, peuvent se rabattre sur l’un des chefs d’œuvres de Howard Hawks de 1943 : Air Force.
Ballin Mundson
O Captain! my Captain!
Messages : 7107
Inscription : 27 janv. 05, 20:55
Localisation : à l'abordage

Re: quelques chefs-d'oeuvre d'Henry King : bilan et lacunes

Message par Ballin Mundson »

L'étranger... a écrit :
bogart a écrit :
Nullité :evil: Je trouve que le mot est fort car ce film loin d'être un chef-d'oeuvre reste un bon film d'aventure.
Ben moi, je le trouve même TRES bon ce film de pirates!
Oh j'avais pas vu ça
Ben là je suis d'accord avec l'Etranger. Moi aussi j'aime beaucoup ce film au mauvais esprit réjouissant.
mais bon, c'est pas une surprise vu mon avatar
Image
Répondre