Ferrari (Michael Mann - 2023)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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Kiké
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Re: Ferrari (Michael Mann - 2023)

Message par Kiké »

J'avoue que, n'ayant vu le Solitaire qu'une seule fois il y a un petit temps, je ne me souviens pas de ce qu'il racontait sur la police (ou en quoi il serait marxiste). Je me base donc seulement sur Heat. Mais il est vrai que Bégaudeau en faisait une généralité sur tout le cinéma de Mann, en évoquant seulement Public Ennemies (qui, sauf erreur, est rarement l'un des films préférés des fans du cinéaste), ce qui est sans doute un peu court comme argumentaire.
En restant donc sur Heat, que j'ai bien en tête, le podcast pointait que le film pouvait presque se lire comme un récit de super-héros, centré sur deux personnages qui se cherchent et se reconnaissent comme étant tous les deux des êtres hors du commun, tous les deux solitaires divorcés, tous les deux habitant la nuit, hantés par la mort, le tragique... Et aussi qu'ils se reconnaissent comme "forts" au-delà de leur fonction policier/criminel. C'est de là qu'il y aurait mythologie, ça me parait tenir la route. Et encore une fois, moi j'aime bien cet aspect du film.
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mannhunter
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Re: Ferrari (Michael Mann - 2023)

Message par mannhunter »

EliWallou a écrit : 22 mars 24, 00:13
Kiké a écrit : 21 mars 24, 20:58 j'avais trouvé intéressant sa critique de la représentation de la police (plutôt du côté du mythe que du réel)
Pour moi un argument spécieux parce que Mann a fait Le solitaire 15 ans plus tot.
James Caan lui-même disait que le scénario de "Heat" était déjà quasiment terminé, quand Mann en 1980 était venu le chercher pour jouer dans son premier film de cinéma. Mann parlait même de son scénario de "Heat" en 1983, à la sortie américaine de "La forteresse noire":

https://www.americancinemapapers.com/fi ... E_KEEP.htm

Do you want to produce films?

Yes, because there are more pictures I would like to see made than I can make or want to make. A case in point is a screenplay I wrote called Heat, which I love. As a writer, I really want to see this picture made. But as a director I don't want to touch it.
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tchi-tcha
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Re: Ferrari (Michael Mann - 2023)

Message par tchi-tcha »

Et Mann rappelle régulièrement que Heat s'inspire très fortement d'une histoire vraie telle qu'elle lui a été racontée par le policier l'ayant vécue (et avec qui Mann avait longuement échangé).

Donc plutôt que d'y lire une certaine conception de la police par Michael Mann, on peut surtout y voir un exemple de plus du goût du réalisateur pour le travail de documentation et pour un certain "réalisme" à l'écran. C'est pour ça que dans ses meilleurs films, on a la sensation que chaque personnage secondaire sexiste, peu importe le temps de présence qu'à le comédien qui l'incarne à l'écran.
(histoire de rebondir sur la super polémique Mann misogyne de l'autre page...)
Dernière modification par tchi-tcha le 22 mars 24, 20:32, modifié 1 fois.
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Re: Ferrari (Michael Mann - 2023)

Message par Watkinssien »

tchi-tcha a écrit : 22 mars 24, 17:40 u]existe[/u], peu importe le temps de présence qu'à le comédien qui l'incarne à l'écran.
(histoire de rebondir sur la super polémique Mann misogyne de l'autre page...)
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EliWallou
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Re: Ferrari (Michael Mann - 2023)

Message par EliWallou »

mannhunter a écrit : 22 mars 24, 14:40
EliWallou a écrit : 22 mars 24, 00:13 Pour moi un argument spécieux parce que Mann a fait Le solitaire 15 ans plus tot.
James Caan lui-même disait que le scénario de "Heat" était déjà quasiment terminé, quand Mann en 1980 était venu le chercher pour jouer dans son premier film de cinéma.
En fait les 15 ans ne changent rien à mon propos. J'avais vu L.A. Takedown en plus, mais je pensais que c'était plus proche de 1995.
Mon propos étant que reprocher à Mann de ne pas avoir mis dans Heat la corruption de la police et des juges ou un discours politique explicite
Michael Mann dans Le solitaire a écrit :"—I can see my money is still in your pocket, which is from the yield of my labor. What gratitude? You're making big profits from my work, my risk, my sweat…
— Why don't you join a labor union?
— I'm wearing it. [son arme]"
comme il l'a fait dans Le solitaire, ça m'indique qu'il passe à côté de films, en y cherchant d'abord ce qu'il voudrait y trouver selon une grille assez rigide, comme si tout film devait, à lui seul, expliciter la vision du monde de son réal, quitte à se répéter. Je pense que Heat se concentre sur deux hommes, qui ne sont pas là pour symboliser des institutions, tout simplement.

Kiké a écrit : 22 mars 24, 03:27 Mais il est vrai que Bégaudeau en faisait une généralité sur tout le cinéma de Mann, en évoquant seulement Public Ennemies (qui, sauf erreur, est rarement l'un des films préférés des fans du cinéaste), ce qui est sans doute un peu court comme argumentaire.
Kiké a écrit : 22 mars 24, 03:27le podcast pointait que le film pouvait presque se lire comme un récit de super-héros, centré sur deux personnages qui se cherchent et se reconnaissent comme étant tous les deux des êtres hors du commun, tous les deux solitaires divorcés, tous les deux habitant la nuit, hantés par la mort, le tragique... Et aussi qu'ils se reconnaissent comme "forts" au-delà de leur fonction policier/criminel. C'est de là qu'il y aurait mythologie, ça me parait tenir la route.
Voilà. Pour moi tout est dans ce presque [… mais pas vraiment]. Il fait des raccourcis trop faciles.
Il faudrait par exemple comparer les propos du podcast avec les écrits de Thoret, pour voir comment ce dernier articule le lien avec les 70s.
J'ai l'impression que Bégaudeau fait là aussi un gros raccourci, ou un homme de paille, en déplaçant "l'articulation 70s" sur la question de la masculinité, comme si le cinéma des 70s traitait uniformément cette question et pouvait se réduire ainsi (French Connection ?!).
Tout ça pour s'attaquer à une idée de Thoret en plus. Parce que même si Thoret se trompe, qu'est-ce que ça change pour Mann qu'il ne soit pas "issu des 70s" ?

Reste que, chez Mann, la masculinité n'est pas "celle 80s des Schwarzenegger ou Stallone".
Comment sont récompensés McCauley et Hanna dans Heat ? Leur masculinité leur a rapporté quoi ? C'est une question qui se pose pour tous ses protagonistes masculins.
Ca mérite d'être examiné peu plus sérieusement qu'il le fait.

Sur le mythologique mouais…
Les flics et les criminels sont en effet, d'une certaine manière, hors du commun. Le fait qu'on ait là affaire à 2 pros (basés sur des personnes réelles) particulièrement doués et obsessionels, ça n'en fait pas des "super-héros" non plus.
Il y a une dimension romanesque, et certaines facilité de scenario, on est dans un film hollywoodiens. Mais voilà…
Pour moi on n'est là typiquement dans ses exagérations et interprétations chichiteuses, sans aucune "charité" envers les films.

C'est d'ailleurs ce qui a tendance à m'agacer alors que j'apprécie beaucoup de ses critiques.
Avec les cinéastes qu'il apprécie, il fait preuve d'autrement plus de charité, voire d'indulgence, trouvant parfois des manières de tourner des défauts en qualité, mais qui lui ouvre aussi des portes d'interprétations intéressantes.
Sur Heat il cherche plutôt à fermer toutes les portes possibles.

Après il a tout à fait le droit de ne pas aimer le film, d'être insensible à Mann, ou de défendre une chapelle quant à l'idée qu'il se fait du cinéma.
Mais là, je ressens trop le plaisir de casser le film-jouet des "mecs", de nous faire la leçon, de lancer des piques à Thoret, quitte à employer une bonne dose de mauvaise foi.
Dernière modification par EliWallou le 22 mars 24, 20:50, modifié 2 fois.
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Roilo Pintu
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Re: Ferrari (Michael Mann - 2023)

Message par Roilo Pintu »

Je ne sais pas si le post du 16 Mars de JBT est le seul moment où il pointe Begaudeau. Mais si c'est le cas, c'est du service minimum que je valide.
Car oui on peut dire qu'il (FB) se fout de sa gueule ouvertement. Thoret est ramené au rang de midinettes ("exécuteur testamentaire, spécialiste mondiale et interplanétaire de Mann"), au regard des écrits de Thoret, ça me parait bien mince pour le lettré Begaudeau, sauf à vouloir tomber dans la gratuité et la moquerie de salon.
Je ne vois rien dans ce podcast de pertinent, encore moins cette comparaison sur les super héros. EliWallou y répond à propos juste au dessus.
Thoret peut bien lui placer une encoche, elle reste d'un niveau plus élevé.
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tchi-tcha
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Re: Ferrari (Michael Mann - 2023)

Message par tchi-tcha »

Watkinssien a écrit : 22 mars 24, 17:59
tchi-tcha a écrit : 22 mars 24, 17:40 u]existe[/u], peu importe le temps de présence qu'à le comédien qui l'incarne à l'écran.
Michael Womann est misandre, par contre.
(corrigé :oops:)
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Re: Ferrari (Michael Mann - 2023)

Message par Kiké »

Merci pour les précisions sur Le Solitaire!
EliWallou a écrit : 22 mars 24, 18:50
Il faudrait par exemple comparer les propos du podcast avec les écrits de Thoret, pour voir comment ce dernier articule le lien avec les 70s.
J'ai l'impression que Bégaudeau fait là aussi un gros raccourci, ou un homme de paille, en déplaçant "l'articulation 70s" sur la question de la masculinité, comme si le cinéma des 70s traitait uniformément cette question et pouvait se réduire ainsi (French Connection ?!).
Tout ça pour s'attaquer à une idée de Thoret en plus. Parce que même si Thoret se trompe, qu'est-ce que ça change pour Mann qu'il ne soit pas "issu des 70s" ?
Oui je suis d'accord avec ça aussi, je ne comprends pas cette attaque sur la "vraie" décennie de Mann. Il y avait aussi un racourci sur Pacino, qui aurait été génial dans les années 70 parce que Un après-midi de chien déconstruit la masculinité mais nul dans Heat parce qu'il redevient un vrai bonhomme. Est-ce que du coup Le Parrain 1 et 2 ne sont pas des vrais films des 70's?
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Roilo Pintu
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Re: Ferrari (Michael Mann - 2023)

Message par Roilo Pintu »

Retour sur le film. Ferrari ou la réponse personnelle et intime au spectaculaire Le Mans 66. Portrait moins démonstratif et plus familial du constructeur sur une unité de temps, l'année 1957, une période courte mais charnière dans la vie de Ferrari, l'entreprise est à un tournant industriel, il doit lutter pour maintenir son entreprise; mais également réfléchir à son propre héritage quand il vit encore en plein deuil de son enfant. Le sport, le drame familial et économique s'entremêlent pour former un château de cartes qui menace de s'effondrer à tout moment. Une fois ces enjeux présentés, l'intime et le professionnel peuvent rentrer en collision.

De manière classique et certainement peu surprenante, Mann nous livre l'instantané d'un homme pris en étau entre plusieurs problématiques, Enzo court évidement après le contrôle de l'ensemble - car c'est un bonhomme! (smiley François Begaudeau!) - en s'appuyant sur son épouse (formidable Penelope Cruz), sa maitresse (que je trouve beaucoup plus faible). Adam Driver, bien qu'étant plus jeune de 20 ans qu'Enzo en 1957, est d'une grande justesse et réussit l'impossible en faisant d'Enzo Ferrari cette forteresse impassible qui domine tout le monde.

Les scènes de course sont rares et servent de toile de fonds; le montage glisse sans effort des scènes de conflits domestiques aux courses et à leurs préparations. Ferrari est un film moins spectaculaire, mais pas forcément moins stimulant. Ce que l'amateur de vitesse perd, il le gagne sur un récit efficace sur la transmission, le deuil, le souvenir (superbe scène centrale de l'opéra)… il est d'ailleurs sanctionné par une impressionnante scène d'accident qui vous contorsionne sur le siège. C'est la deuxième fois cette année après Le Cercle des neiges de Bayona.

Même si je ne suis pas aussi emporté que j'aurai pu l'imaginer (peut-être faut-il laisser un peu de temps), en ayant le sentiment d'un film sans doute un peu plus modeste, je trouve au final que Mann et son scénariste font un bon travail pour couvrir le drame familial et les ambitions de l'entreprise de Ferrari.
NB :j'adore entre autre la musique chez Mann, ici je trouve le score de Daniel Pemberton très faible
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Flol
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Re: Ferrari (Michael Mann - 2023)

Message par Flol »

Roilo Pintu a écrit : 22 mars 24, 23:26 NB :j'adore entre autre la musique chez Mann, ici je trouve le score de Daniel Pemberton très faible
Je n'ai quasiment rien retenu de sa partition pendant le film (le meilleur passage musical n'est même pas de lui), par contre son morceau pour le générique de fin est pas trop mal.

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Roilo Pintu
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Re: Ferrari (Michael Mann - 2023)

Message par Roilo Pintu »

Idem! Une fois découvert le film, je suis retourner sur l'écoute du score, mais rien n'y fera.
Cet Epilogue est le plus ré-écoutable à mon niveau, ainsi que le morceau Enzo Ferrari.
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