Glauber Rocha (1939-1981)
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Glauber Rocha (1939-1981)
Retrospective des films du cinéaste brésilien Glauber Rocha
au musée du Jeu de Paume à Paris du 6 Novembre au 18 Décembre 2012
Informations sur le site du musée :
http://www.jeudepaume.org/index.php?pag ... 789&lieu=1
Un article publié sur lemonde.fr :
http://america-latina.blog.lemonde.fr/2 ... ber-rocha/
Quelques exemples de ses films Cinema Novo:
Diable Noir Dieu Blond (1964) et Le Lion à 7 têtes (1971) ( ce dernier avec Jean-Pierre Léaud)
Antonio das Mortes (1969)
au musée du Jeu de Paume à Paris du 6 Novembre au 18 Décembre 2012
Informations sur le site du musée :
http://www.jeudepaume.org/index.php?pag ... 789&lieu=1
Un article publié sur lemonde.fr :
http://america-latina.blog.lemonde.fr/2 ... ber-rocha/
Quelques exemples de ses films Cinema Novo:
Diable Noir Dieu Blond (1964) et Le Lion à 7 têtes (1971) ( ce dernier avec Jean-Pierre Léaud)
Antonio das Mortes (1969)
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Re: Glauber Rocha (1939-1981)
Découvert en salle l'an dernier. Chef d'Oeuvre.
« Quand des hommes, même s’ils s’ignorent, doivent se retrouver un jour, tout peut arriver à chacun d’entre eux, et ils peuvent suivre des chemins divergents, au jour dit, inexorablement, ils seront réunis dans le cercle rouge. »
- Thaddeus
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Re: Glauber Rocha (1939-1981)
Le dieu noir et le diable blond
Dans le Sertão, la brousse aride du Nord-Est brésilien, un couple de paysans croise la route d’archanges en lutte contre une société féodale, barbares prophètes au mysticisme sanguinaire détournant la colère du peuple par les pratiques magiques et le délire verbal, hors-la-loi sauvages allant jusqu’à décapiter les pauvres pour ne pas les laisser mourir de faim. Recourant à une insistante imagerie héritée du moyen âge portugais, qui épouse les inflexions et les détours de la chanson de geste, Glauber Rocha critique et démystifie cette révolte et les légendes dorées qu’elle a engendrées. C’est du moins ce que l’on pense saisir de cette très étrange épopée buñuelienne, dont la théâtralité hystérique, la lenteur éprouvante, la radicale irréalité d’expression instaurent une distance qui rend vite totalement extérieur. 3/6
Terre en transe
L’ElDorado, république faussement fictive d’Amérique du Sud où les idéologies sont passées au pétrin des intérêts capitalistes, où les serviteurs de l’engagement populaire s’avèrent être les pions d’un système qui s’autogénère en engloutissant tous ses ennemis. Avec la lucidité acerbe et la vigueur romanesque d’un polémiste acharné, Rocha analyse les mécanismes de l’appareil médiatico-politique, les compromis du populisme et du réformisme, les manœuvres et les alliances occultes, la tentation messianique de la lutte armée. Le réalisme conventionnel implose dans un récit tout en ruptures, pensées intérieures et enchâssements temporels, quelque part entre Buñuel et Kalatozov, qui s’accorde à la soif d’absolu d’un homme miné par l’impasse de son combat. Une œuvre prodigieusement dense et complexe. 5/6
Top 10 Année 1967
Antonio das Mortes
Le réalisateur semble vouloir fusionner cinéma, théâtre et musique "tropicalistes" à travers cette évocation baroque d’un tueurs de cangaceiros chargé par un grand propriétaire de liquider une communauté de pieux paysans vivant sur ses terres. La maîtrise des moyens et des ruptures assure l’unité d’une œuvre totalisante, dont la dimension épique est entretenue par un style extrêmement bariolé à la Paradjanov. Sorte de parabole sanglante et mystique sur la corruption contemporaine du Brésil, où le combat du protagoniste dessine une prise de conscience tardive, la concrétisation d’un rêve de justice sociale longtemps bafoué, et où le paysage rural du Nordeste permet tous les épanchements plastiques et chorégraphiques, le film ne laisse pas de surprendre – pour ne pas dire dérouter. 4/6
L’âge de la terre
Embarqué dans un discours poétique où roulent les métaphores et où cascadent les imprécations furieuses, le spectateur plus ou moins paumé tente de se raccrocher à quelques maigres repères. Il peut se laisser enivrer par cette hystérie formelle, ce désordre saturé, ce confusionnisme idéologique, ce méli-mélo religieux, ce sérieux rigolard et ce carnavalesque ulcéré cherchant à exalter un messianisme réincarné dans un singulier syncrétisme populaire. Mais il peut aussi (c’est mon cas) se faire proprement assommer par une parole devenue bavardage, par une transe mystique qui n’est plus qu’un hoquet nauséeux, par la défense d’un nationalisme mégalo, par un folklore emplumé sinon empaillé, par un laisser-aller, un débraillé et un n’importe quoi tonitruants qui se croient valeurs révolutionnaires. 2/6
Mon top :
1. Terre en transe (1967)
2. Antonio das Mortes (1969)
3. Le dieu noir et le diable blond (1964)
4. L’âge de la terre (1980)
Enfant extravagant de cette mosaïque de la civilisation moderne qu’est l’Amérique latine, Glauber Rocha manifeste à travers ces quelques films des dons de polémiste virulent, affirme une véhémence tous azimuts, un souffle politico-poétique où se conjuguent en un étrange patchwork les influences du cinéma soviétique, de la littérature de colportage, du documentaire social, du théâtre symboliste et du western.
Dans le Sertão, la brousse aride du Nord-Est brésilien, un couple de paysans croise la route d’archanges en lutte contre une société féodale, barbares prophètes au mysticisme sanguinaire détournant la colère du peuple par les pratiques magiques et le délire verbal, hors-la-loi sauvages allant jusqu’à décapiter les pauvres pour ne pas les laisser mourir de faim. Recourant à une insistante imagerie héritée du moyen âge portugais, qui épouse les inflexions et les détours de la chanson de geste, Glauber Rocha critique et démystifie cette révolte et les légendes dorées qu’elle a engendrées. C’est du moins ce que l’on pense saisir de cette très étrange épopée buñuelienne, dont la théâtralité hystérique, la lenteur éprouvante, la radicale irréalité d’expression instaurent une distance qui rend vite totalement extérieur. 3/6
Terre en transe
L’ElDorado, république faussement fictive d’Amérique du Sud où les idéologies sont passées au pétrin des intérêts capitalistes, où les serviteurs de l’engagement populaire s’avèrent être les pions d’un système qui s’autogénère en engloutissant tous ses ennemis. Avec la lucidité acerbe et la vigueur romanesque d’un polémiste acharné, Rocha analyse les mécanismes de l’appareil médiatico-politique, les compromis du populisme et du réformisme, les manœuvres et les alliances occultes, la tentation messianique de la lutte armée. Le réalisme conventionnel implose dans un récit tout en ruptures, pensées intérieures et enchâssements temporels, quelque part entre Buñuel et Kalatozov, qui s’accorde à la soif d’absolu d’un homme miné par l’impasse de son combat. Une œuvre prodigieusement dense et complexe. 5/6
Top 10 Année 1967
Antonio das Mortes
Le réalisateur semble vouloir fusionner cinéma, théâtre et musique "tropicalistes" à travers cette évocation baroque d’un tueurs de cangaceiros chargé par un grand propriétaire de liquider une communauté de pieux paysans vivant sur ses terres. La maîtrise des moyens et des ruptures assure l’unité d’une œuvre totalisante, dont la dimension épique est entretenue par un style extrêmement bariolé à la Paradjanov. Sorte de parabole sanglante et mystique sur la corruption contemporaine du Brésil, où le combat du protagoniste dessine une prise de conscience tardive, la concrétisation d’un rêve de justice sociale longtemps bafoué, et où le paysage rural du Nordeste permet tous les épanchements plastiques et chorégraphiques, le film ne laisse pas de surprendre – pour ne pas dire dérouter. 4/6
L’âge de la terre
Embarqué dans un discours poétique où roulent les métaphores et où cascadent les imprécations furieuses, le spectateur plus ou moins paumé tente de se raccrocher à quelques maigres repères. Il peut se laisser enivrer par cette hystérie formelle, ce désordre saturé, ce confusionnisme idéologique, ce méli-mélo religieux, ce sérieux rigolard et ce carnavalesque ulcéré cherchant à exalter un messianisme réincarné dans un singulier syncrétisme populaire. Mais il peut aussi (c’est mon cas) se faire proprement assommer par une parole devenue bavardage, par une transe mystique qui n’est plus qu’un hoquet nauséeux, par la défense d’un nationalisme mégalo, par un folklore emplumé sinon empaillé, par un laisser-aller, un débraillé et un n’importe quoi tonitruants qui se croient valeurs révolutionnaires. 2/6
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1. Terre en transe (1967)
2. Antonio das Mortes (1969)
3. Le dieu noir et le diable blond (1964)
4. L’âge de la terre (1980)
Enfant extravagant de cette mosaïque de la civilisation moderne qu’est l’Amérique latine, Glauber Rocha manifeste à travers ces quelques films des dons de polémiste virulent, affirme une véhémence tous azimuts, un souffle politico-poétique où se conjuguent en un étrange patchwork les influences du cinéma soviétique, de la littérature de colportage, du documentaire social, du théâtre symboliste et du western.
- Alexandre Angel
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Re: Glauber Rocha (1939-1981)
Qu'est ce que tu entends par là, Thaddeus?
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.
m. Envoyé Spécial à Cannes pour l'Echo Républicain
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- Thaddeus
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Re: Glauber Rocha (1939-1981)
Tout simplement que le cinéma de Rocha me semble infusé par cette forme de "littérature orale", dérivée des récits des bardes et baladins d'autrefois, en opérant des choix de distanciation d'une action souvent narrée, racontée, relatée via des chansons ou des poèmes. Antonio Das Mortes est sans doute le film le plus caractéristique de ce procédé : le personnage-titre, seul lien entre le réel historique et le drame mythomaniaque de chacun, assure la liaison dialectique de l'argument. Le peuple, halluciné, chantant sans cesse et investissant les places de village par une perpétuelle macumba, est à la fois le choeur, l'objet et le prétexte de ce mystère de parvis, dont l'aspect médiéval est renforcé par des nombreuses allusions à la chevalerie. Que sa forme archaïque de romancero soit souvent aussi politique que le plus ouvert des pamphlets ne fait qu'accentuer cet aspect à mes yeux.
- Alibabass
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Re: Glauber Rocha (1939-1981)
Bonjour,
J'aime beaucoup Honor de cavalleria d'Albert Serra, et Le dieu noir et le diable blond me tente d'un coup de tête à l'acheter genre en Blu-Ray. Geste légitime à faire ou pas ^^ ? Merci
J'aime beaucoup Honor de cavalleria d'Albert Serra, et Le dieu noir et le diable blond me tente d'un coup de tête à l'acheter genre en Blu-Ray. Geste légitime à faire ou pas ^^ ? Merci
- Alexandre Angel
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Re: Glauber Rocha (1939-1981)
D'accord merci!Thaddeus a écrit : ↑19 févr. 24, 21:46 Tout simplement que le cinéma de Rocha me semble infusé par cette forme de "littérature orale", dérivée des récits des bardes et baladins d'autrefois, en opérant des choix de distanciation d'une action souvent narrée, racontée, relatée via des chansons ou des poèmes. Antonio Das Mortes est sans doute le film le plus caractéristique de ce procédé : le personnage-titre, seul lien entre le réel historique et le drame mythomaniaque de chacun, assure la liaison dialectique de l'argument. Le peuple, halluciné, chantant sans cesse et investissant les places de village par une perpétuelle macumba, est à la fois le choeur, l'objet et le prétexte de ce mystère de parvis, dont l'aspect médiéval est renforcé par des nombreuses allusions à la chevalerie. Que sa forme archaïque de romancero soit souvent aussi politique que le plus ouvert des pamphlets ne fait qu'accentuer cet aspect à mes yeux.
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.
m. Envoyé Spécial à Cannes pour l'Echo Républicain
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