3.23- Shadows of the Past
Réalisation : Don McDougall
Scénario : Frank Chase
Guest Star : Jack Warden
Première diffusion 24/02/1965 aux USA - Jamais diffusé en France
DVD : VOSTF
Note : 7/10
Le pitch : John Conway (Jack Warden), l’épicier de Medicine Bow, attend Rita qu’il a rencontrée alors qu’ils étaient tous deux hospitalisés à San Francisco ; il l’a fait venir par le train, le couple ayant décidé de se marier. Très timide, il demande à son ami Ryker de se joindre à eux pour leur premier diner afin de l’aider à briser la glace, la femme paraissant étrangement distante à son égard. D’autre part le shérif adjoint reçoit une lettre inquiétante provenant de deux hommes qu’il a autrefois fait emprisonner et qui viennent de purger leur peine ; ils lui en veulent toujours pour la mort de leur frère et semblent vouloir se venger…
Mon avis : Nous l’avions déjà fait remarquer à quelques reprises mais Frank Chase au scénario, c'est déjà à coup presque certain au moins la qualité d'écriture assurée ; et effectivement ça se confirme de nouveau au travers cet épisode, son récit en partie mélodramatique fonctionnant parfaitement bien grâce surtout -outre à un Don McDougall à la réalisation qu’il est toujours aussi difficile de prendre en défaut- au talent de l'auteur qui signera en tout 10 épisodes pour la série mais qui aura également été comédien dans de nombreux et excellents classiques du western comme Les Affameurs (Bend of the River) d’Anthony Mann, Le Traître du Texas (Horizons West) de Budd Boetticher, La Brigade héroïque (Saskatchewan) de Raoul Walsh, Coups de fouet en retour (Backlash) de John Sturges ou L’homme qui n’a pas d’étoiles (Man without a Star) de King Vidor. L’intrigue de Shadows of the Past mêle deux histoires qui au travers les ombres du passé sont toutes deux parfaitement raccords avec le titre de l’épisode mais qui ne se recouperont qu’en toute fin de parcours d’une manière certes un peu convenue et mécanique, le fait de ne pas savoir qu’elles n’avaient pas vraiment de rapports entre elles ayant néanmoins permis à l’instauration d’un petit suspense ; en effet le spectateur pense ainsi tout du long que le comportement mystérieux de la femme étrangement froide à l'encontre de son futur époux pourrait être lié à une machination ourdie par les deux malfaiteurs dont elle serait alors complice. Il n'en est absolument rien mais je vous en ai probablement déjà trop dit...
Essayons cependant d'éclaircir un peu les choses pour ceux à qui la description ci-dessus a certainement pu paraitre totalement obscure sans avoir vu l'épisode. Concernant ces deux histoires, nous trouvons donc d’une part une romance entre deux personnages d’âge mur parmi lesquels la femme, étrangement distante pour une futur épouse, semble détenir un secret venue du passé qui la freine dans son désir de convoler en juste noces, de l’autre le retour de deux bandits venus terroriser et se venger de celui qui les avait fait emprisonner quelques années plus tôt après qu’il ait accidentellement tué leur frère. Frank Chase reprend toutes les conventions liées à ce genre de trames dramatiques, il n’y a effectivement que peu de points communs entre les deux pistes scénaristiques -d’où leur recoupement un peu machinal-, mais une fois encore l'extrême compétence du scénariste fait que l'ensemble est parfaitement bien géré et que l'ennui ne nous gagne jamais. On se rend d’ailleurs compte dès le prologue de la réussite probable de l’épisode car rien n’est plus casse-cou qu’une séquence d’ébriété qui mal maitrisée sombre souvent dans le mauvais goût ou la pénibilité. Ici, c’est Belden qui, comme chaque fin de mois, vient dépenser l’intégralité de sa paye en boisson et qui, sacrément éméché, met sens dessus dessous le saloon dans lequel il se plaint que personne d’autre que lui ne s’amuse. L.Q. Jones en fait certes un peu trop mais reste néanmoins dans les clous, ce qui fait que la séquence très bien écrite et sans trop de lourdeurs reste amusante jusqu’au bout, Ryker avec son flegme légendaire venant mettre fin aux gentilles exactions du cow-boy... en lui donnant rendez-vous à la fin du mois prochain.
Pour venir mettre le holà, l'adjoint du shérif a dû abandonner en cours de route une partie d’échecs qu’il disputait avec John, un ami qui n’est autre que l’épicier de Medicine Bow, les deux hommes allant être les principaux protagonistes de l’épisode, le commerçant étant interprété par Jack Warden -l’un des 12 jurés de 12 hommes en colère de Sidney Lumet- qui était déjà la Guest Star du fabuleux troisième épisode de la série réalisé par Ted Post, Throw a Long Rope, dans lequel il campait un fermier sur le point d'être lynché. Ici il incarne un homme timide qui fait venir pour l’épouser une femme qu’il avait autrefois rencontré alors qu’ils étaient tous deux hospitalisés, la maladie de la femme n’étant alors et toujours pas connue de John et allant s’avérer être l’alcoolisme, ce qui représente une sorte d’écho beaucoup plus sombre à la première séquence d'ivresse joyeuse. Rita a autrefois subi un traumatisme -que je ne vous raconterais pas, les spoilers étant déjà bien trop nombreux au sein de ce texte- et qui l’a fait sombrer dans la boisson ; il s’agit là du premier Shadow of the Past du titre. La seconde est donc liée à la sortie de geôle de deux dangereux bandits, emprisonnés grâce à Ryker qui lors de l’arrestation avait dû abattre leur troisième frère. Ils envoient alors une lettre menaçante au shérif adjoint de Medicine Bow en le prévenant qu’ils ne vont pas laisser cet assassinat impuni ; d’où un suspense assez tendu qui se met en place, Ryker ne pouvant plus arpenter une rue sans regarder partout autour de lui, jamais rassuré, s'attendant d'une minute à l'autre à être visé.
Certes un peu bavard, avare en action et en extérieurs, un épisode urbain dont la qualité de l’écriture, de la réalisation et de l’interprétation en font une jolie réussite qui offre une troisième fois à Clu Gulager dans le rôle de Ryker une superbe occasion de mettre en avant ses immenses qualités de comédiens, sans parler des deux fois où il fût Guest Star, campant non seulement avec grande crédibilité un sourd-muet mais également, arrivé à cette date, toujours le Bad Guy le plus mémorable de la série. John Milford et James Beck, les deux inquiétants bandits de l’épisode ne sont pas mal non plus ; dommage qu’ils n’aient pas droit à plus de temps de présence. Quoiqu’il en soit, un bel épisode sur l’amitié et une touchante histoire d’amour parfois intrigante du fait des réactions et une attitude assez mystérieuse du personnage féminin très bien interprété par Marilyn Erskine, l’une des participantes au génial Westward the Women (Convoi de femmes) de William Wellman.
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