
En 1964, le commandant Barker (Burt Lancaster) dirige une équipe de conseillers militaires américains détachés dans une province du Sud-Viêtnam. Son supérieur, le général Harnitz, lui demande de faire réoccuper un village à l'abandon nommé Muc Wa, où les Français s'étaient déjà battus pendant la précédente guerre d'Indochine. Embarrassé par cette mission et par le manque de troupes disponibles, le commandant Barker n'a d'autre possibilité que d'affecter des moyens dérisoires à la garnison de Muc Wa.
Avant l'odyssée humaniste ambiguë de Michael Cimino (Voyage au bout de l'enfer), les visions hallucinées de Francis Ford Coppola (Apocalypse Now), la catharsis d'Oliver Stone (Platoon) et la mécanique implacable de Kubrick (Full Metal Jacket), Le Merdier .(détail amusant c'est le titre français du roman de Gustav Hasford dont est adapté le Kubrick mais c'est le Incident at Muc Wa de Daniel Ford qui est ici adapté) fut le tout premier film américain à aborder objectivement le conflit du Vietnam. Certes il y eu bien le douteux Les Bérets Vert de John Wayne et des films comme MASH ou De l'or pour les braves mais le film de Ted Post en apparence moins ambitieux que les chefs d'œuvres précités est sans doute est sans doute la plus lucide des illustrations de la Guerre du Vietnam.
Tout le film tend à démontrer la nature impure de cette guerre, que ce soit ses soldats (la présentation des nouvelles recrues au début où on trouve un va t en guerre anticommuniste, un toxicomane et un vétéran usé et psychotique), ses missions (l'enjeu du film reposant sur la conquête d'un bastion sans intérêt) et ses enjeux nébuleux quel que soit le camp dans lequel on se trouve. Tout cela est symbolisé par l'officier vétéran incarné par Burt Lancaster, vestiges de conflits plus noble et désormais désabusé par la folie ambiante. Lancaster délivre une grande prestation avec cet homme usé qui n'a plus que ses souvenirs (la scène où il narre la raison qui a freiné sa promotion au sein de l'armée est un grand moment comique) pour et comme seul but de limiter les dégâts. L'aspect modeste du film renforce d'autant plus les signes avant-coureurs de la déroute américaine à venir notamment leur profond mépris envers les français défait sur ces mêmes lieux, ce qui est bien sûr une hérésie en ce qui les concerne.
La grande force du film est cependant de tuer toute idée de gloire guerrière et d'héroïsme. Le jeune soldat volontaire joué par Craig Wasson est ainsi une figure noble et héroïque qui va perdre toute ses illusions, sur le partage avec l'étranger comme de l'exaltation du champ de bataille. Comme lui dira Lancaster, il arrive bien trop tard pour les combats justes auxquels sa droiture le destinait. Le titre original qui est un extrait de l'inscription du monument élevé par les Grecs à Léonidas et ses 300 héros de la Bataille des Thermopyles revêt alors une terrible ironie se révèle alors dans toute son ironie. Le lieu de l'affrontement aura abrité précédemment la déroute de 300 français et leurs tombes disposées là s'orne d'une aura bien plus légendaire que la boucherie inutile qui conclut le film. Point d’actions désespérées, de sauvetage et de fraternité dans l'adversité, juste un massacre que Ted Post escamote d'ailleurs d'un fondu au noir. Ted Post qu'on associe plus volontiers à Eastwood (réalisateur sur la série Rawhide et le dirigeant dans Pendez les haut et court ou Magnum Force un des meilleurs Inspecteur Harry) délivre une mise en scène sobre et efficace tandis que le casting recèle quelques jeunots qui connaîtront leur quart d'heure de gloire comme Marc Singer (futur héros de V) excellent en jeune officier aux dents longues. 5/6