Fritz Lang : rétrospective personnelle

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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moonfleet
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Re: Fritz Lang : rétrospective personnelle

Message par moonfleet »

Watkinssien a écrit :Tu n'aimes pas Metropolis, M, J'ai le droit de vivre, La rue rouge, L'ange des maudits ou encore Beyond a Reasonable Doubt ?

Ou est-ce que tu ne les a pas vus ? Si c'est cela, je te les conseille fortement ! :wink:

Ah oui, j'avais oublié M et les Mabuse, sinon je n'ai pas accroché du tout àMetropolis, La Rue Rouge m'a rappelé La Femme au Portrait (casting idem) et je préfère E.G Robinson en peintre du Dimanche 8) ... et sinon je n'ai pas vu les autres cités. J'avoue aussi que la présence de Glenn Ford dans certains films est loin d'être pour moi un argument motivant :?

Moon.
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Watkinssien
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Re: Fritz Lang : rétrospective personnelle

Message par Watkinssien »

En tous les cas, dans les films que j'ai cités, il n'y a pas Glenn Ford ! :wink:
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Mother, I miss you :(
M le maudit
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Re: Fritz Lang : rétrospective personnelle

Message par M le maudit »

Coucou.

[img]http://auteurs_production.s3.amazonaws.com/stills/27740/man-hunt.jpg[/img]

Man Hunt

Après plusieurs décennies d'obscurité totale, ce sixième film américain de Fritz Lang est enfin disponible sur le marché. Mettant en vedette, pour la première fois dans un film de Lang, la superbe Joan Bennett, "Man Hunt" est d'abord et avant tout une oeuvre de propagande anti-nazi, destinée majoritairement à réveiller la conscience collective américaine et à leur faire saisir le danger de la menace grandissante.

Rappelons-le, le film est sorti en 1941, au début de la Seconde Guerre, et débute par une tentative d'assassinat sur la personne même de Hitler! Et tout au long du film, Lang met dans la bouche de ses personnages des tirades anti-nazi extrêmement explicites, ridiculisant leur idéologie sans en banaliser le danger et s'attaquant directement au Fürher en le tournant en dérision. Lang a non seulement côtoyé les Nazis, mais il a été marié à l'une d'entre eux, ce qui le rend extrêmement sensible à ce sujet.

Plus de soixante ans après sa sortie, ce film surprend encore par son audace. Lang verse beaucoup dans le cliché et les archétypes (le vilain Allemand porte un gros monocle...), mais étant donné ses visées politiques premières, cela a finalement très peu d'importance. L'homme au monocle est d'ailleurs un personnage assez efficace et crédible. On croit peut-être un peu moins, toutefois, à l'acteur Canadien qui incarne un protagoniste british, et ce sans accent...

Toutes considérations anecdotiques mises de côté, "Man Hunt" s'en tire quand même assez bien, mais il m'est forcé d'admettre que le scénario est un peu mou. Pas assez de scènes de poursuite, trop de scènes ambiguës entre Pidgeon et Bennett, cette dernière ayant droit à une quantité de gros plans avantageux qui trahit le manque d'objectivité de Lang à son égard et augure leur future relation professionnelle... et personnelle. Mais en un sens elle le mérite, puisque c'est une excellente actrice et que sa performance est convaincante.

Au niveau du style et des motifs, c'est langien jusqu'à la moelle. Des rues sombres qui forment autant de pièges, où personne n'est digne de confiance, l'homme seul contre la foule hostile, bref, on nage dans un univers qui n'est pas sans rappeler celui du film noir qu'il développera plus avant quelques années plus tard dans ses classiques américains. Est-ce que "Man Hunt" est un chef-d'oeuvre? Non, certes pas. Mais ça demeure tout de même un film digne d'intérêt, une pièce étonnamment prophétique qui comporte son lot de qualités et un grande morceau du casse-tête de la pensée de Lang, donc un incontournable dans sa filmographie.
Grimmy
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Re: Fritz Lang : rétrospective personnelle

Message par Grimmy »

M le maudit a écrit :Coucou.
Ah te revoilà toi !! :uhuh: On a failli continuer sans toi... :wink:
M le maudit
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Re: Fritz Lang : rétrospective personnelle

Message par M le maudit »

Je sais pas si je vais durer plus longtemps cette fois... Espérons! Je vous invite à compléter les trous dans la filmographie car beaucoup de ses films sont difficiles à trouver au Canada et je n'aime pas beaucoup regarder un film en mauvaise qualité sur mon ordinateur. J'ai "You and Me" et "While the City Sleeps" qui m'attendent mais j'ignore quand je trouverai le courage.

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Hangmen Also Die!

En 1942, Fritz Lang et le grand dramaturge allemand Bertolt Brecht, importé à Hollywood par le réalisateur, travaillent ensemble à l'écriture d'un film qui montrerait aux Américains la triste situation de l'Europe. Ce thriller à saveur historique voit le jour un an plus tard, en plein coeur de la Seconde Guerre. Inspiré du meurtre du numéro deux d'Adolf Hitler, Reinhard Heydrich dit "le Bourreau de Prague" (dont la mort suscita de véhémentes représailles de la part des Nazis et mena à l'assassinat de plus de 1600 civiles), ce film au poids considérable ré-écrit l'Histoire et fait de ce meurtre l'oeuvre d'un seul homme, membre de la résistance tchèque.

Fritz Lang se lance ici dans une entreprise de haut calibre, à une époque où le public n'était sans doute pas prêt à se faire mettre au visage toutes les horreurs de la guerre. Visiblement conscient de cet état des choses, il opte pour des scènes de violence plutôt suggérée qu'explicite: une ombre menaçante, une coupure de journal, une détonation hors-champ. Seul le mouchard de la Gestapo a droit à une exécution un peu plus graphique et d'une beauté esthétique exemplaire dans le plus pur style de Fritz Lang. Le film dans sa totalité est d'ailleurs éminemment langien; plusieurs plans sont de petits bijoux de composition, et l'omniprésence des ombres et autres jeux de reflets et de lumière trahit les influences expressionnistes du cinéaste.

Bien qu'il soit classé par plusieurs sous la bannière du film noir, Hangmen Also Die! se veut davantage un drame historique à la sauce espionnage. Certains éléments du noir à l'américaine se mélangent à la sauce, mais l'ambiance générale de l'oeuvre s'éloigne des archétypes du genre. Une dichotomie palpable entre le style de Lang et celui de Brecht traverse le film. Il n'est donc pas surprenant de retrouver, éparses dans le rythme déboulant du thriller langien, quelques tirades patriotiques un peu ampoulées. Mais tout comme dans Man Hunt, Lang continue de frapper fort sur la menace nazie, exposant leurs méthodes barbares tout en les dépeignant comme des mégalomanes stupidement narcissiques et empêtrés dans les débordements de leur ego. Définitivement un film à voir malgré ses menus défauts.
M le maudit
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Re: Fritz Lang : rétrospective personnelle

Message par M le maudit »

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Ministry of Fear

Fritz Lang est dans une période forte quand il réalise "Ministry of Fear", un projet auquel il rêvait depuis quelques temps, et dont le contrôle lui a finalement échappé quand Paramout a acheté les droits du roman d'origine avant lui pour lui offrir de l'adapter au grand écran... en lui imposant le scénario d'un autre.

Lang entame donc le projet avec un goût amer dans la bouche et finira par rabaisser le film à de nombreuses reprises en entrevue. Pourtant, le résultat est un petit film compétent, avec quelques trouvailles de réalisation qui valent le détour. Le réalisateur flirte encore avec la thématique de la menace nazie, alors que le protagoniste démasque par hasard un réseau d'espions allemands en Angleterre. Rien de bien marquant, mais tout de même un petit côté hitchcockesque (un personnage seul qui enchaîne les péripéties plus ou moins rocambolesques) toujours bienvenu.

Il est cependant facile de voir que les décisions finales de montage ont échappé à la main de Lang. Le tout semble parfois fragmenté, comme si certaines scènes manquaient à l'appel. Et la finale incroyablement précipitée est d'un vomitif hollywoodien consommé. Ce qui n'empêche pas le film de valoir le détour, pour les scènes où la griffe de Lang est bien visible et toujours aussi inspirée.
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Re: Fritz Lang : rétrospective personnelle

Message par someone1600 »

Man Hunt, il faut vraiment que j'achete le dvd de ce film. :?
M le maudit
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Re: Fritz Lang : rétrospective personnelle

Message par M le maudit »

Une si belle pochette en plus!

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Et pour un maigre 10 dollars.
M le maudit
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Re: Fritz Lang : rétrospective personnelle

Message par M le maudit »

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The Woman in the Window

L'un des plus importants films américains de Lang, ce "noir" mettant en vedette Edward G. Robinson et la ravissante Joan Bennett capture parfaitement l'essence d'un genre qui couvrira la majeure partie de la seconde moitié de la période américaine du réalisateur. Un homme d'âge mûr, marié et menant une vie rangée et satisfaisante, succombe à la tentation et accepte de suivre une jeune femme dans son appartement. Or, cela s'avère être une bien mauvaise idée lorsque l'amant tempétueux de celle-ci fait irruption et tente de l'étrangler. N'ayant d'autre choix, il le poignarde et le tue, devenant ainsi la cible d'un maître-chanteur véreux duquel il n'arrive plus à se départir...

De la part d'une légende comme Fritz Lang, nul n'est surpris de se trouver face à une réalisation de grande qualité. Le film est magnifiquement bien tourné et contient même quelques travelings fort esthétiques que l'oeil attentif ne manquera pas d'apprécier. Mais ce qui fait la qualité de l'oeuvre, c'est surtout le grand talent du trio de protagonistes, qui livrent des performances tout simplement parfaites. Dan Duryea incarne impeccablement le malfrat arrogant et sans vergogne, alors que Joan Bennett, dans toute son éclatante féminité, arrive à insuffler à son personnage les subtilités nécessaires pour que le spectateur se soucie de son sort.

On peut voir "The Woman in the Window" comme le "grand frère" du film suivant de Lang, "Scarlet Street". On y retrouve la même distribution, le même style, la même ambiance générale. La différence, c'est que là où "The Woman in the Window" échoue, "Scarlet Street" triomphe. Le premier film écope malheureusement d'une finale un brin douteuse. Certains aimeront, d'autres détesteront, mais elle ne laisse personne indifférent. Il semble toutefois que Lang ait eu le désir de rattraper cet impair dans son film suivant qui est un monument de l'anti-happy ending. On peut quand même apprécier les qualités de ce premier film, qui est tout de même excellent malgré la fin qui peut laisser un goût amer.
M le maudit
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Re: Fritz Lang : rétrospective personnelle

Message par M le maudit »

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Scarlet Street

"Scarlet Street" est le premier film réalisé par Fritz Lang sous la bannière de la Diana Productions, compagnie qu'il a fondée avec Joan Bennett, actrice principale du film, et son mari Walter Wanger. Il bénéficie donc d'une liberté artistique dont il fait bon usage, surtout après des années de contraintes étouffantes. La thématique est éminemment langienne (on pourrait presque parler d'autobiographie...), donc très pessimiste:

Chris Cross, un caissier de banque en fin de carrière, se porte un soir au secours d'une dame brutalisée en pleine rue. Au fil d'une discussion subséquente, celle-ci le prend à tort pour une peintre richissime et entreprend, pour palier les soucis financiers de son petit ami abusif, de le séduire afin de lui extirper de l'argent. Cette amorce de récit, adaptation d'un roman de La Fouchardière et remake de "La Chienne" de Renoir, inspire un film d'une grande puissance, sans contredit l'une des meilleures oeuvres américaines de Lang.

Les performances sont très justes, convaincantes et communicatives. Il s'agit d'une étude avant la lettre de la relation destructrice entre un proxénète et sa putain, bien que le statut de Kitty ne soit pas explicité, époque et censure obligeant. Edward G. Robinson est au meilleur de sa forme dans un rôle qui lui va comme un gant. Il joue les ratés émasculés à merveille. De l'autre côté, Dan Duryea perfectionne son rôle de limace amorale, et Joan Bennett livre probablement la performance de sa carrière, faisant de Kitty l'avatar parfait de la femme fatale.

Visuellement, "Scarlet Street" est l'épitome du film noir hollywoodien, parfait dans le fond comme dans la forme. L'enchevêtrement de circonstances malheureuses pour cet homme sans histoire est prodigieusement démoralisant. Fritz Lang fait encore la démonstration de son talent légendaire pour l'orchestration d'ambiances mémorables qui s'inscrivent dans l'esprit du spectateur longtemps après la fin du film. La finale diamétralement opposée au happy ending traditionnel est tout simplement brillante de réalisme pessimiste. Un film qui gagne à être vu et revu.
M le maudit
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Re: Fritz Lang : rétrospective personnelle

Message par M le maudit »

M le maudit a écrit :Je sais pas si je vais durer plus longtemps cette fois... Espérons! Je vous invite à compléter les trous dans la filmographie car beaucoup de ses films sont difficiles à trouver au Canada et je n'aime pas beaucoup regarder un film en mauvaise qualité sur mon ordinateur. J'ai "You and Me" et "While the City Sleeps" qui m'attendent mais j'ignore quand je trouverai le courage.
Si ça intéresse quelqu'un, "Le secret derrière la porte", "L'invraisemblable vérité" et "La Cinquième victime" seront couverts malgré leur non-disponibilité au Canada. Je les ai téléchargés, regardés et j'ai même déjà rédigé les textes qui seront postés en temps et lieu. Je ne couvrirai cependant pas les westerns, qui sont pour la plupart non-disponibles et qui, je l'avoue, m'intéressent franchement moins. Même chose pour le diptyque indien que je pense laisser aller. Le reste sera cependant couvert. Je tenterai de télécharger prochainement "Casier judiciaire".
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Jeremy Fox
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Re: Fritz Lang : rétrospective personnelle

Message par Jeremy Fox »

M le maudit a écrit : Je ne couvrirai cependant pas les westerns, qui sont pour la plupart non-disponibles et qui, je l'avoue, m'intéressent franchement moins. Même chose pour le diptyque indien que je pense laisser aller. Le reste sera cependant couvert.
Les 3 westerns et le dyptique indien existent en DVD et c'est dommage que tu ne tentes pas le coup car ils sont loin d'être négligeables pour certains.
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Cathy
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Re: Fritz Lang : rétrospective personnelle

Message par Cathy »

Je rejoins entièrement Jeremy Fox sur l'intérêt des films de Lang (westerns et dyptique indien) qui sont de très bons films d'aventures. C'est vrai que Fritz Lang résone souvent comme auteur de films noirs, espionnage, mais hormis les Pionniers de la Western union que je n'ai pas vu, Le retour de Frank James et l'Ange des maudits sont d'admirables westerns, et le tombeau hindou et le tigre du Bengale sont de superbes films d'aventures, en plus tournés en décors naturels en Inde ce qui magnifie l'histoire peut-être secondaire, mais bon. C'est dommage de ne pas les intégrer dans ta rétrospective même s'ils sont difficiles à trouver au Canada pour certains !
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Jeremy Fox
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Re: Fritz Lang : rétrospective personnelle

Message par Jeremy Fox »

On ne sait jamais ; peut-être ma chronqiue du dyptique indien pourrait éventuellement te donner envie de le découvrir :oops:
M le maudit
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Re: Fritz Lang : rétrospective personnelle

Message par M le maudit »

"Le retour de Frank James" existe en Z1 et le diptyque indien aussi, donc je les couvrirai peut-être.

Mais les deux autres westerns ne sont dispos qu'en Z2 et je préfère ne pas dépenser aveuglément, d'autant que la qualité des transferts est semble-t-il assez moyenne.
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