Greer Garson (1904-1996)

[Cathy]

Pride and Prejudice - Robert Z Leonard, 1940



Dans la lignée d'Autant en emporte le vent, Pride and Prejudice est l'adaptation du roman de Jane Austen, écrivain romantique anglais qui dépeint les affres de jeunes filles de bonne famille mais sans le sou. On sent qu'il y a une volonté de faire un autre Autant en emporte le vent, mais même si Greer Carson fait tout ce qu'elle peut pour camper la jeune Elizabeth Bennett, on a du mal à croire en son personnage, de jeune fille rebelle. Maureen O Sullivan qui campe la soeur ainée Jane eut été sans doute un meilleur choix, mais elle n'était pas la vedette. Evidemment le roman repose sur le personnage de Monsieur Darcy noble orgueilleux mais qui curieusement est le modèle romantique de beaucoup de jeunes filles actuellement, notamment Bridget Jones a remis au goût de jour ce personnage,. Pourtant j'avoue avoir eu du mal que ce soit dans cette version ou la nouvelle adaptation de 2006 à être totalement séduite par ce personnage. Bref pour en revenir au film de 1940, la reconstitution d'une époque 1830 estr soignée mais quand on voit les autres films basés sur les romans anglais on s'aperçoit qu'il s'agit plus de 1810, notamment les costumes "Empire" et non "Restauration-Louis Philippe". Le film n'en demeure pas moins une adaptation fidèle du roman, agréable à regarder, quand on a l'esprit romantique. Laurence Olivier prete sa silhouette au héros, Edna May Olivier est une Lady Catherine de Burgh impeccable, comme tous les autres acteurs. Si on aime ce style d'histoire romanesque, de jeunes filles de bonne famille mais sans le sou, amoureuse d'officier, de noble, on passera un très bon moment. Je dois avouer avoir juste un tout petit peu de mal au déoart car j'avais vu juste avant la version avec Kyra Kneightley qui me semble bien plus crédible en Lizzie Bennett, fraiche, jolie et loin des sophistications hollywoodiennes de Greer Carson. Mais il est évident que ces deux films témoignent de deux époques différents du cinéma et qu'ils sont chacun de belles illustrations de Jane Austen

[francesco]

Je crois que la mauvaise réputation en France de Greer Garson provient en fait de son « écrin » MGM. La photo immédiatement reconnaissable, la splendeur visuelle des décors et des costumes bien connue, le « prestige » des adaptations littéraires et les grands mélos à oscars, autant de choses qui sont complètement à l’opposé d’une certaine cinéphilie estampillée disons « Cahiers du cinéma ».

Or faire de Greer Garson une mauvaise actrice uniquement capable de poser à la grande dame me semble relever de l’aveuglement pur et simple. C’est une interprète remarquable avec l’une des techniques les plus rodées de l’histoire du cinéma, qui lui a permis en réalité de jouer à peu près n’importe quoi avec la même aisance, le même professionnalisme. Et encore au-delà de cela dans un certain nombre de rôle elle a su influer une chaleur remarquable. C’est ce qui, à mon avis, explique sa grande popularité : elle était belle, elle était charmante, elle était humaine.

Après des débuts au théâtre en Angleterre elle a été ramenée à Hollywood à la fin des années 30 (en même temps qu’Hedy Lamarr) par Louis B Mayer manifestement conquis par son côté « anglais ». Ce fut une période difficile puisqu’on lui a longtemps cherché le « bon » rôle. Après avoir raté, entre beaucoup d’autres, celui de Lady Edwina dans La Mousson, elle finit par accepter, réticente par ce qu’il s’agit d’un rôle secondaire de jouer l’épouse de « Mr Chips ». Elle et les producteurs ont fait le bon choix. Avec ce personnage éminemment sympathique commence une histoire d’amour passionnée entre elle, le public et la critique. Impossible de décrire le jeu de Garson tant elle semble naturellement être à sa place dans le personnage. Cette adéquation lui permet de remporter une nomination aux oscars dans la catégorie leading actress alors que son temps de présence à l’écran est pourtant limité.

Ayant fait ses preuves en lady, habillée en costume d’époque, c’est tout naturellement qu’elle joue dans l’adaptation d’Orgueil et Préjugé de 1940. Elle y est absolument éblouissante de bout en bout : réussissant une composition anthologique, en parfaite adéquation avec le personnage du roman : pleine d’humour et jamais mièvre. L’année suivante on lui fait prendre un virage qui va influencer toute sa carrière : on lui offre un rôle biographique, celui d’une mère courage admirable et noble, et c’est Walter Pidgeon qui devient son partenaire. Le film, Les Oubliés, est tourné dans un somptueux technicolor qui permet d’admirer la carnation et la luxuriante rousseur de la dame qui se coule très naturellement dans ce registre. Elle est à nouveau nommée aux oscars.
C’est en 1942 qu’elle obtient finalement le prix pour sa célèbre Mrs Miniver, la même année qu’un autre de ses grands triomphes : Prisonniers du passé. Les deux films fonctionnent d’ailleurs de la même manière au niveau de l’interprétation de l’actrice : une entrée en matière vive et teinté d’humour (dans Prisonnier du passé elle a même une scène de danse comique très drôle) et un approfondissement progressif vers la maturité. Greer Garson sait donc être légère et grave à la fois. Je l’aime beaucoup dans Mrs Miniver (où elle a une espèce d’assise solide qui lui permet d’être crédible dans un personnage légèrement plus âgée qu’elle ne l’était dans la réalité) je crois cependant que je la préfère encore dans Prisonnier du passé parce qu’elle y est aussi juste, mais qu’elle fait en plus varier à l’infini ses sentiments et partant, ses expressions.

Après ce film Garson continue d’être une favorite des spectateurs et également des votants de l’académie qui la nomme encore 3 fois en 3 ans. Elle ne tourne qu’un film par an et son image est particulièrement soignée. Elle doit renoncer à intervenir dans Ziegfield Folies qui la pastiche gentiment dans le sketch qu’elle devait jouer (c’est Judy Garland qui la remplacera) par « respect » pour son public qui continue adorer de la voir évoluer élégamment en costume d’époque et souffrir avec courage et abnégation. Pourtant elle aurait sans doute pu assurer des contre-emplois intéressants qui auraient pu être basé sur un contraste entre son image et le personnage. (Elle a d’ailleurs jouer pour la télévision dans une adaptation de La Vipère, mais n’a pas fait au théâtre Lady Macbeth comme l’avait rêvé un critique). Pour Madame Curie (1943), Mrs Parkington (1944) et La Vallée du jugement (1945) on ne prend donc aucun risque, et ses interprétations sont d’ailleurs sans faute. Dans Mrs Parkington elle est, en particulier, délicieuse grimée en vieille dame.


Tout le monde l’ignore à l’époque mais sa carrière est presque terminée. Curieusement son immense popularité a été exactement contemporaine de la seconde guerre mondiale. Les films qu’elle tourne ensuite pour la MGM ne rencontre pas particulièrement succès et la suite de Mrs Miniver est boudée par la critique et par le public. (Je regrette de ne pas l’avoir vu : selon l’unique biographe de Greer Garson c’est tout à faire regardable). Elle tourne pourtant au moins un film intéressant Mrs Forsyte en 1949 où à nouveau le technicolor la met particulièrement en valeur.

Finalement après sa participation symbolique, d’ailleurs juste et convaincante, à Jules César en 1953 elle devra attendre Sunrise at Compobello pour renouer avec le succès : ce que j’ai vu de sa composition, lourdement maquillée, en Eleonor Roosevelt donne vraiment envie de voir le film dans son intégralité.
Ses derniers rôles sont liés à des spectacles familiaux pour Disney ou la télévision. Il est juste de dire qu’elle se tire très bien, avec l’habituel humour qui l’a toujours sauvé même au milieu de ses rôles les plus tragiques, de son rôle de Mère Supérieure dans Dominique (1966). En fin de compte elle était revenue à la MGM dans un rôle maternelle et maternant : la boucle était bouclée !

[Music Man]

Ma mère l'adorait et a vu tous ses films MGM avec Walter Pidgeon ou Ronald Colman dans les années 40, diffusés dans le cinéma d'un tout petit village (en version doublée), ce qui montre à quel point cette artiste était populaire en France.

[francesco]

Je voulais dire en fait "par la critique française" (et plus précisément par la critique française depuis les années 70) !

[Music Man]

Je tacherais de poster des photos et de répondre un peu plus longuement de chez moi.

[joe-ernst]

L'incarnation de la lady, élégante, mais sans morgue ni froideur, et elle avait du talent. Ses films sont un peu oubliés de nos jours, et elle aussi hélas, alors merci de rappeler son souvenir !

[Ann Harding]

C'est vrai que Greer Garson a été malmenée par la critique française. (Coursodon et Tavernier parle d'une actrice compassée). Mais, le problème qu'elle a est qu'elle représente l'esthétique MGM comme jamais. Elle est l'incarnation de la mère parfaite telle que la rêvait Louis B. Mayer (ce vieil hypocrite! ). Ce n'est certainment pas de sa faute et c'est bien dommage qu'elle n'ai pas tourné plus en Grande-Bretagne où elle aurait certainement des rôles plus intéressants avec Michael Powell, par example!

Je l'ai beaucoup aimé dans Pride and Prejudice où elle se sort brillamment de ce rôle difficile face à Laurence Olivier et avec un metteur-en-scène hyper faiblard, Robert Z. Leonard. Comme vous le savez déjà, je n'aime guère son film avec Mervyn LeRoy, Random Harvest (1942). Après un début en fanfare où elle apparaît dans un très joli mini-kilt (avec un excellent accent écossais) le film devient une sorte de 'radio-filmée' faisant d'elle une créature hyper-maternante... Greer était d'ailleurs d'origine Irlandaise. En l'écoutant dans Random Harvest, je remarque de tant en temps quelques inflections irlandaises dans sa voix. Pas beaucoup, mais de temps en temps... J'ai regardé ce film sous toutes ses coutures une bonne douzaine de fois, mais, le charme n'agit pas. Je suis saturée par les enjolivures MGM avec son petit cottage anglais tout droit sorti de l'atelier Cedric Gibbons où il ne manque pas un feston aux rideaux, ni une fleur sur les pommiers....Il faut dire que dans le roman original de James Hilton (auteur de Lost Horizon), on parle de l'Angleterre de l'immédiate après-guerre. En 1918, la vie est sinistre. On suit une troupe d'acteurs qui vivent dans des petits hôtels miteux et qui survivent tant bien que mal. Qu'en reste-t-il sur l'écran? Rien. Juste une histoire à l'eau de rose noyée dans le sirop de la musique de Herbert Stothart..

Sinon, je crois que la dame avit de l'humour et de l'esprit. Il suffit de lire les mémoires d'Errol Flynn pour s'en rendre compte. Elle s'est bien vengé de ses farces durant le tournage de That Forsythe Woman.

[Randolph Carter]

Elle fut une Mrs Miniver admirable et l'épouse émouvante de Goodbye,Mr. Chips.En fait,elle incarne à la perfection le côté suranné d'un cinéma qui n'existe plus et que personnellement j'adore.Et je n'ai rien contre l ''esthétique MGM,bien au contraire .

[Lord Henry]

Vous aimez Greer Garson? La voici sous un jour un peu moins compassé qu'a l'accoutumée:

[Music Man]

Ah, Greer Garson, la mère courage des films MGM. Beaucoup de critiques partagent l’opinion que Louis B Mayer a gâché le talent de cette actrice qui avait acquis une solide réputation sur les scènes londoniennes, en la stéréotypant dans d’immuables rôles de grande dames faisant face vaillamment et la tête haute aux pires situations, et en reprenant la couronne de Norma Shearer, (injustement décriée elle aussi, et qui mériterait bien un topic.. ;Francesco,Ann … vous m’entendez ?).. ;avant d’être supplantée par Deborah Kerr et Eleanor Parker.(en tous les cas, elle n'en voulait pas au patron de la MGM, car elle l’a défendu jusqu’à sa mort contre toutes les attaques dont il fut l’objet)
Si j’ai apprécié les quelques films que j’ai vu avec elle sur TCM, beaucoup d’actrices me touchent davantage, mais c’est peut être en effet, parce qu’on ne lui confiait pas une palette plus intéressante de rôles ; . Il parait qu’elle prenait ceux-citrès au sérieux et que le discours qu’elle fit lors de la remise de son oscar fut le plus long de toute l’histoire de cette cérémonie. (est-ce la raison pour laquelle elle a fini par renoncer à s’auto-parodier dans Ziegfeld follies).
Je l’ai vue dans les années 70-80 dans un remake télé des 4 filles du Dr March, où elle ne paraissait pas son âge.
J’aime beaucoup les superbes photos des années 40 qui la représentent en créature sexy et distante, inspirée par Garbo. Elle y révèle des facettes qu’on ne retrouve pas forcément dans ses films.
Au fait, qui a lu la bio qui lui a été consacrée. Je l'avais vue librairie rue du Colisée à Paris et je m'étais taté pour l'acheter...

[francesco]

A rose for Mrs Miniver. Moi ! (bien sûr).
Elle est extrêmement intéressante, parce que basé sur un bon équilibre entre vie privée et vie professionnelle, avec une analyse critique intéressante de chacune de ses interprétations. Je te la prêterai si tu veux.

Sinon pour Shearer j'ai ça en projet (il me reste elle et Dorothy McGuire et j'aurais fait le tour des actrices que j'aime et dont on ne parle pas jamais !)

[Nestor Almendros]

Parmi les nombreux topics ouverts par Francesco cette semaine, topics consacrés à certaines actrices du cinéma Hollywoodien de la grande époque, c'est enfin avec Greer Garson que je peux dire quelques mots. Non que je ne connaisse pas les autres, c'est juste que je suis davantage porté sur les réalisateurs que sur les acteurs, et qu'à part quelques grands noms (Bette Davis ou Joan Crawford, rien de bien original) je sèche un peu.

Sauf avec Greer Garson, donc, que j'ai découvert avec MRS MINIVER, bon souvenir mais lointain maintenant (une sortie du dvd en z2 Fr ne serait pas du luxe, d'ailleurs). Je n'ai pas vu la suite, au passage.
Vous m'apprenez, par contre, qu'elle joue dans GOODBYE MR CHIPS, énorme souvenir d'un Cinéma de Minuit où j'avais essuyé quelques larmes à l'époque. J'ai revu le film il y a 2-3 ans avec un très grand plaisir.
C'est avec MRS MINIVER que j'ai donc mis un nom sur ce visage, et c'est avec un (aussi) grand plaisir que je l'ai revue récemment dans PRISONNIERS DU PASSE (RANDOM HARVEST) et ORGUEIL ET PREJUGES, même si les deux films ne m'ont pas laissé la même impression.

Je parlais du premier ici
http://www.dvdclassik.com/forum/viewtop ... 9#p1661509

Le second m'a laissé si froid que je n'ai pas dû être suffisamment inspiré pour poster un petit avis. Même Greer Garson n'a pas réussi à compenser les défauts, visiblement.

Je n'ai, pour l'instant, rien vu d'autre avec elle. A suivre...

[francesco]

Parmi les nombreux topics ouverts par Francesco cette semaine, topics consacrés à certaines actrices du cinéma Hollywoodien de la grande époque, c'est enfin avec Greer Garson que je peux dire quelques mots. Non que je ne connaisse pas les autres, c'est juste que je suis davantage porté sur les réalisateurs que sur les acteurs, et qu'à part quelques grands noms (Bette Davis ou Joan Crawford, rien de bien original) je sèche un peu.

C'est intéressant ce que tu dis là : non pas que l'un exclue l'autre (je veux dire on peut entrer par le cinéma des deux manières en même temps) mais c'est sûr qu'en privilégiant un aspect ou un autre on montre quand même bien si on fonctionne avant tout dans un rapport visuel (réalisateur) ou bien par identification/désir/projection (acteur). Encore une fois les deux visions peuvent cohabiter, bien entendu.
Rien à voir, mais c'est amusant de ne pas avoir tilté sur le fait que la femme de Mr Chips (film effectivement très sympathique que j'ai d'ailleurs fini par racheter quand il est sorti en DVD, tant à cause des acteurs, de la composition mémorable de Robert Donat, de l'ambiance MGM à l'anglaise et du scénario que je trouve très attachant) c'était effectivement Mrs Garson. Tu l'as revu donc avant Orgueil et Préjugé ou Prisonnier du passé, j'imagine.

[Nestor Almendros]

Tu l'as revu donc avant Orgueil et Préjugé ou Prisonnier du passé, j'imagine.

Oui, bien avant. J'ai revu GODDBYE MR CHIPS autour de 2005 et j'ai découvert les deux autres entre décembre 2007 et mars-avril 2008 (je n'ai plus la date exacte). Ce qui est amusant avec MR CHIPS c'est que je me souviens parfaitement du personnage qu'elle interprète (si on a aimé le film on ne peut que s'en rappeler, je pense) mais pas d'elle...

[villag]

Pour quand MRS MINIVER en z2 ?....on a bien 50 versions differentes de MATRIX ; une de ce film me conviendrait tout à fait !!!