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Critique de film
Le film

Les Desperados

(The Desperadoes)

L'histoire

1863. La principale richesse de l’Utah est son cheptel de chevaux sauvages, dont l’armée de l’Union a grandement besoin alors que la Guerre de Sécession fait encore rage. Grâce à ce commerce, Red Valley est une petite ville prospère, ce qui n’empêche pas son banquier d’être corrompu. Non content d’avoir de nombreux client, ce dernier organise lui-même le hold-up de sa banque et se fait ensuite passer pour un bon samaritain en acceptant de rembourser de sa poche 50 % des pertes. Les habitants de la ville ne comprennent cependant pas que Steve Upton (Randolph Scott), leur honnête shérif, n’arrive pas à appréhender les bandits. Upton fait pourtant tout son possible mais le gang, composé outre le banquier de plusieurs autres "respectables" citoyens, est tellement bien organisé qu’il piétine dans son enquête. L’arrivée de Cheyenne Rogers (Glenn Ford), un étranger à la ville, va précipiter les choses. Ancienne connaissance du shérif avec qui il a pas mal bourlingué, Rogers est depuis recherché pour meurtre. Même s’il souhaite rentrer dans le droit chemin, certains vont profiter de la venue de cet étranger pour lui faire porter le chapeau des violents cambriolages qui ont eu lieu...

Analyse et critique

Un western sympathique, sacrément mouvementé et bon enfant signé Charles Vidor ; à cette occasion, pour la première fois, la Columbia nous dévoilait sa statue au flambeau habillée d’un glorieux Technicolor. Alors que les autres Majors avaient déjà testé le procédé depuis quelques années, le studio de Harry Cohn s’y lançait à son tour et le résultat dépassait toutes les espérances. Dès l’image du générique sur laquelle vient s’imprimer le titre, on se dit que rien que pour la splendeur des couleurs et la flamboyance de la photographie, aussi bien en intérieur qu’en extérieur, The Desperadoes mérite d’être visionné. Natalie Kalmus et George Meehan, ainsi que les décorateurs et les costumiers, nous en mettent littéralement plein la vue. Tout cela ne fait évidemment pas très réaliste mais peu importe ; l’usine à rêves méritait alors plus que jamais son appellation, son Ouest coloré et pittoresque nous convenait à merveille. A l’instar des comédies musicales chatoyantes de la Fox et de la MGM, les desperados de Vidor ont dû faire oublier pendant quelques heures aux civils et aux soldats les évènements tragiques qui se déroulaient dans le monde. Un western à gros budget peu connu et qui mérite pourtant à mon avis de l’être !

Rien de bien méchant ni de bien nouveau sous le soleil du western concernant l’intrigue : on revenait aux bonnes vieilles recettes routinières débouchant logiquement sur un film conventionnel mais qui respectait parfaitement son cahier des charges, celui d’un divertissement haut de gamme qui pouvait difficilement ne pas plaire à quelconques aficionados du genre. Ces derniers se retrouvaient en terrain connu, tous les éléments se révélant bien mis en place et bien gérés par le professionnalisme de Charles Vidor, des techniciens et des équipes du studio. Un harmonieux patchwork d’humour, d’action et de romance qui ne révolutionne rien mais qui s'avère bougrement plaisant.

La drôlerie provient des acteurs Guinn "Big Boy" Williams, qui faisait déjà le clown dans les films de Michael Curtiz avec Errol Flynn, du truculent Edgar Buchanan et sa voix éteinte très particulière, sans oublier le personnage du barman qui a peur pour ses miroirs à chaque éclat de violence, interprété ici par Irving Bacon. L’action est procurée, à l’aide de beaux mouvements de caméra et d’un montage efficace, par une trépidante course poursuite dans les paysages montagneux grandioses de l’Utah, une phénoménale séquence de Stampede de chevaux sauvages filmée en partie d’hélicoptère, une impressionnante bagarre dans un saloon qui vaut bien toutes celles vues jusqu’à présent. Quant aux parties romantiques assez réussies, elles le doivent avant tout à deux personnages féminins assez bien croqués et interprétés avec talent, que ce soit par une habituée du genre, Claire Trevor et ses robes chatoyantes, ou la méconnue Evelyn Keyes, l’épouse du réalisateur. Pour leur tenir compagnie : un Randolph Scott qui force la sympathie et un Glenn Ford qui prend de plus en plus d’assurance.

Autrement, Robert Carson signe un scénario bien plus passionnant que celui qu’il avait écrit pour le Western Union de Fritz Lang ; tiré d’une bonne histoire de Max Brand (Destry Rides Again), il est remarquablement bien ficelé, file à cent à l’heure et ne nous laisse aucun moment de répit, le tout sans jamais se prendre vraiment au sérieux. Le ton est donc plutôt léger, les dialogues s’avèrent assez piquants et les scènes d'action se déroulent souvent dans une relative bonne humeur. Une excellente surprise que ce deuxième western du futur cinéaste de Cover Girl, Gilda ou Les Pièges de la passion (Love me or Leave me). Sans prétention autre que de nous offrir du bon spectacle ; mission pleinement accomplie et on en redemande !

En savoir plus

La fiche IMDb du film

Par Erick Maurel - le 28 août 2010