Illusions Perdues (Xavier Giannoli - 2021)
Publié : 24 oct. 21, 12:31
Accueil critique quasi unanime pour cette adaptation du monument littéraire de Balzac.
Surprenant, quand on a lu le livre et que l'on peut se douter des difficultés d'un tel projet: 3 romans en 1, nombreux personnages et intrigues, ambition thématique. Et tout simplement, on sait que les chefs-d'oeuvre littéraires ont rarement donné des chefs-d'oeuvre cinématographiques, car ils questionnent souvent l'essence de leur art. Dans Illusions perdues, Balzac questionne son statut d'écrivain et d'artiste dans la société, le fait d'écrire des romans, et même l'objet livre lui-même à travers le thème de l'imprimerie et sa description quasi industrielle. En bref, au-delà des défis narratifs, peut-on faire du cinéma avec une histoire dont l'essence-même est la littérature? Peut-on rendre compte de l'esprit balzacien, de son sens du bon mot et son ironie cruelle, par des moyens cinématographiques?
Ce n'est en tout cas pas Giannoli qui m'en convaincra, malheureusement.Et si j'étais méchant je me demanderais si les critiques n'ont pas été achetés comme dans le film
Certes, il ne lésine pas sur les moyens: la direction artistique est classieuse, les acteurs très bons -surtout à mon avis Vincent Lacoste. Certes, il fait l'effort d'un vrai travail d'adaptation: l'intrigue du roman ne pouvait pas tenir sur la durée d'un film, et il la dégraisse allègrement en supprimant des parties complètes et des personnages. On pourra ne pas être d'accord sur certains choix (la suppression du Cénacle notamment), mais après tout il fallait bien faire des choix et il ne pouvait pas contenter tout le monde.
Mais... pour rendre compte de l'analyse sociale balzacienne, qui peut en effet être indispensable pour saisir certains aspects de l'intrigue, il tombe dans un autre piège: la voix off!
Il en use et en abuse, pour faire tenir ce qui ne tenait pas à l'image et aux dialogues. Il a dû se dire "Kubrick l'a fait avec Barry Lyndon, pourquoi pas moi". Sauf que Kubrick l'utilisait avec parcimonie et de manière plutôt discrète. Un peu, ça va. Toutes les 5 minutes, c'est insupportable. Ca a pour effet de ne jamais faire oublier l'essence littéraire, et de nous éloigner des personnages. A aucun moment, je n'ai vibré, car j'avais l'impression qu'on me lisait un résumé du roman. Certaines scènes pourraient par simple tension dramatique être très puissantes,
Résultat, malgré le scénario qui s'efforce de faire de la saga littéraire une intrigue cinématographique, on tombe dans l'adaptation terne et inoffensive.
Bref, lisez plutôt le roman
Même si vous l'avez déjà vu, ça ne vous spoile pas grand chose (la fin diffère pas mal).
Je serais néanmoins curieux de savoir si le film a emballé ceux qui n'ont pas lu le livre
Surprenant, quand on a lu le livre et que l'on peut se douter des difficultés d'un tel projet: 3 romans en 1, nombreux personnages et intrigues, ambition thématique. Et tout simplement, on sait que les chefs-d'oeuvre littéraires ont rarement donné des chefs-d'oeuvre cinématographiques, car ils questionnent souvent l'essence de leur art. Dans Illusions perdues, Balzac questionne son statut d'écrivain et d'artiste dans la société, le fait d'écrire des romans, et même l'objet livre lui-même à travers le thème de l'imprimerie et sa description quasi industrielle. En bref, au-delà des défis narratifs, peut-on faire du cinéma avec une histoire dont l'essence-même est la littérature? Peut-on rendre compte de l'esprit balzacien, de son sens du bon mot et son ironie cruelle, par des moyens cinématographiques?
Ce n'est en tout cas pas Giannoli qui m'en convaincra, malheureusement.Et si j'étais méchant je me demanderais si les critiques n'ont pas été achetés comme dans le film

Certes, il ne lésine pas sur les moyens: la direction artistique est classieuse, les acteurs très bons -surtout à mon avis Vincent Lacoste. Certes, il fait l'effort d'un vrai travail d'adaptation: l'intrigue du roman ne pouvait pas tenir sur la durée d'un film, et il la dégraisse allègrement en supprimant des parties complètes et des personnages. On pourra ne pas être d'accord sur certains choix (la suppression du Cénacle notamment), mais après tout il fallait bien faire des choix et il ne pouvait pas contenter tout le monde.
Mais... pour rendre compte de l'analyse sociale balzacienne, qui peut en effet être indispensable pour saisir certains aspects de l'intrigue, il tombe dans un autre piège: la voix off!
Il en use et en abuse, pour faire tenir ce qui ne tenait pas à l'image et aux dialogues. Il a dû se dire "Kubrick l'a fait avec Barry Lyndon, pourquoi pas moi". Sauf que Kubrick l'utilisait avec parcimonie et de manière plutôt discrète. Un peu, ça va. Toutes les 5 minutes, c'est insupportable. Ca a pour effet de ne jamais faire oublier l'essence littéraire, et de nous éloigner des personnages. A aucun moment, je n'ai vibré, car j'avais l'impression qu'on me lisait un résumé du roman. Certaines scènes pourraient par simple tension dramatique être très puissantes,
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Résultat, malgré le scénario qui s'efforce de faire de la saga littéraire une intrigue cinématographique, on tombe dans l'adaptation terne et inoffensive.
Bref, lisez plutôt le roman

Je serais néanmoins curieux de savoir si le film a emballé ceux qui n'ont pas lu le livre
