Re: Cinéma Coréen contemporain
Publié : 2 nov. 17, 10:37
Vanishing Time : a boy who returned (Um Tae-hwa - 2016)
Surin, une fille de 14 ans, suit son beau-père qui vient s'installer dans une île après le décès de sa mère. Elle se lie d'amitié avec un orphelin, attiré comme elle par le surnaturel. Lors d'une escapade avec deux autres camarades dans une zone interdite en montagne, pour cause de travaux sous-terrains, ils découvrent une grotte au fond de laquelle se trouve une étrange pierre.
Un très joli film fantastique qui ne manque ni de poésie ni d'émotion pour un scénario original (même si j'ai cru comprendre qu'un épisode d'Au frontière du réel possédait une histoire similaire). Cependant, avec ses 130 minutes le film souffre de plusieurs longueurs et d'un manque de concision pénalisant. Le début met ainsi trop de temps à se mettre en place (heureusement rattrapé par quelques jolies trouvailles dans la complicité des deux enfants comme leur code secret) tandis que la dernière demi-heure devient trop redondante à force de répéter 2-3 fois les mêmes discussions/dilemmes.
Certains comme Cinephage ont trouvé que le film manquait également d'enjeux digne de ce noms et faisait l'impasse sur des points plus intéressants comme la vie insulaire. C'est vrai que vu sa durée disproportionnée, on pourrait avoir cette impression mais ça ne m'a pas dérangé dans la mesure où l'histoire se vit au travers du regard des enfants et que ces enjeux là sont les seuls à être important à leurs yeux.
Par contre, je ne suis absolument pas d'accord pour ceux qui trouvent que le film dégage un parfum douteux à la limite de la pédophilie. Faut vraiment avoir l'esprit mal placé et tomber dans la chasse aux sorcière car le film évite totalement toute ambiguïté, surtout pour le personnage plus « âgé ».
Le film traite au contraire de la solitude et ce à quoi on peut se raccrocher pour y faire face et ne pas sombrer dans la folie. On est uniquement dans une histoire d'amitié « suspendue» avec des degrés de maturité différents.
Le film ne manque en tout cas pas d'idées assez pertinente qui culminent forcément dans les différents flash-backs parfaitement mise en scène et qui exploitent bien son concept, dégageant un sentiment de mélancolie assez fort. Le dénouement, s'il tarde à venir, est plutôt bien vu et évite la conclusion attendue et donc redoutée. Quant à la dernière séquence, je pense qu'il ne faut pas la prendre pour argent comptant mais comme une pure projection de l'héroïne.
En parlant de l'héroïne, il faut encore une fois souligner l'incroyable qualité du jeux des enfants coréens qui sont d'une justesse et d'un naturel formidable.
On est pas passé loin de la merveille mais ça demeure déjà hautement recommandable.
V.I.P. (Park Hoon-jung – 2016)
Un policier et un membre des services secrets sont en compétition pour arrêter le fils d'un responsable nord-coréen. Le premier afin de le condamner pour avoir sauvagement violé et assassiné des douzaines de jeunes filles et le second pour le livrer à des homologues américains qui s’intéressent aux comptes cachés de son père.
Chaque année, il nous faut au moins un thriller violent et sadique. En 2017 ce fut donc ce V.I.P. qui risquent de filer des boutons aux réfractaires de ce genre typiquement coréen et on ne leur donnera pas tort : jurons à tout va, acteurs cabotinant à outrance et se la raconte à mort (le flic qui mâchouille ses cigarettes, Peter Stormare d'une nullité crasse), méchant au visage angélique pour un sourire carnassier tout en écoutant du classique, violence racoleuse à souhait et souvent gratuite.
C'était moins insupportable que Ashura l'an dernier mais c'est tout aussi peu empathique tant les personnages sont agaçants de postures. Le méchant est désespérant de clichés à ce titre et tous les personnages sont des pantins sans aucune surface.
Ca se laisse tout de même suivre car quelques passages sont plutôt pas trop mal, notamment la rivalité entre les différents services qui jouent une partie d’échec grandeur nature ainsi que quelques fulgurances dans le déroulement du scénario telle que la scène du pont qui lance le dernier acte. Mais la conclusion grossière au possible renvoie le film dans sa médiocrité tapageuse.
Un grosse faute de parcours pour Park Hoon-jung qui m'avait agréablement surpris l'an dernier avec The Tiger (New World étant également bien réputé aussi, j'ai le blu-ray qui traîne)
The fortress (Hwang Dong-hyuk – 2017)
En 1636, le royaume de Joseon, allié au Ming, est menacé par les Qing. Le roi et sa cour sont rapidement assiégés dans un palais en montagne entouré d'un mur de protection. Les conseillers et ministres ne sont pas d'accord sur les décisions tandis que la population sur la place souffre d'un hiver particulièrement rude et que les vivres sont rapidement insuffisant.
Après 4 ans nous avoir tétanisé avec l'éprouvant et déchirant Silenced, le FFCP nous donne des nouvelles de son cinéaste Hwang Dong-hyuk (qui a signé un autre film entre temps) pour cette grosse production sorti tout juste sorti en Corée et qui a l'air de bien cartonné sur place. Cela dit, ceux qui s'attendait à un blockbuster gorgés de bataille façon Roaring Curents (aka the Admiral) ont tiré la tronche. Le film mise assez peu sur l'action qui se résument à 3-4 scènes guerrières de quelques minutes (bien fichus cela dit). L'essentiel du film est plutôt centré sur la stratégie, les choix politiques et les jeux d'influences/manipulation. On peut dire qu'on est très loin des titres habituels qui misent à fond sur le nationalisme patriotique et le spectaculaire belliqueux. The fortress en prend même le contre-pied avec de nombreuses séquences qui dévoilent un pouvoir incapable de prendre de bonnes décisions, d'être cohérent, de penser au bien commun et qui préfère s'enfermer dans un cérémoniel pompeux et coupé du bon sens comme ces lettrés qui passent leur temps à demander la mise à mort de ministres en rupture avec la ligne générale de la cour.
The fortress parle ainsi d'une impasse totale dans laquelle se trouve le régent et sa suite face à une situation où tous les choix sont problématiques et risquent de conduire à leur perte même si le respect des codes et coutumes l'emportent souvent sur la logique.
Dans cette optique, les méchants ne sont jamais diabolisés mais campent sur un attentisme pour juger de la suite de leur manœuvre : laisser au roi coréen de faire le premier pas diplomatique ou l'écraser s'il tente une attaque. Mais parmi les officiers de Joseon, le premier pas est considéré comme une humiliation ou une trahison...
Un scénario assez riche et même passionnant mais qui ne passe malheureusement pas le cap de la réalisation plombé par un académisme stérile se limitant à du champ contre-champ mécanique alors qu'il aurait été plus judicieux de confronter les points de vues, les rapports de forces, d'appuyer la lourdeur des réunions, de traduire les confrontations idéologiques. Il en ressort une mise en scène répétitive au possible alors que le scénario ne l'est pas et évoque justement l’absurdité de cette incapacité à décider pour mieux se réfugier dans les beaux discours théoriques plus rassurant. Ca n'excuse pas en revanche les atermoiements qui affaiblissent le dernier acte où plusieurs scènes déclinent le même contenu.
Pour moi, les 140 minutes sont assez bien passés pour la gravité de l'ensemble, son approche résolument non commerciale, la qualité d’interprétation et son scénario qui démonte les coulisses du pouvoir. Mais plusieurs de mes copains ont souffert le martyr.
Surin, une fille de 14 ans, suit son beau-père qui vient s'installer dans une île après le décès de sa mère. Elle se lie d'amitié avec un orphelin, attiré comme elle par le surnaturel. Lors d'une escapade avec deux autres camarades dans une zone interdite en montagne, pour cause de travaux sous-terrains, ils découvrent une grotte au fond de laquelle se trouve une étrange pierre.
Un très joli film fantastique qui ne manque ni de poésie ni d'émotion pour un scénario original (même si j'ai cru comprendre qu'un épisode d'Au frontière du réel possédait une histoire similaire). Cependant, avec ses 130 minutes le film souffre de plusieurs longueurs et d'un manque de concision pénalisant. Le début met ainsi trop de temps à se mettre en place (heureusement rattrapé par quelques jolies trouvailles dans la complicité des deux enfants comme leur code secret) tandis que la dernière demi-heure devient trop redondante à force de répéter 2-3 fois les mêmes discussions/dilemmes.
Certains comme Cinephage ont trouvé que le film manquait également d'enjeux digne de ce noms et faisait l'impasse sur des points plus intéressants comme la vie insulaire. C'est vrai que vu sa durée disproportionnée, on pourrait avoir cette impression mais ça ne m'a pas dérangé dans la mesure où l'histoire se vit au travers du regard des enfants et que ces enjeux là sont les seuls à être important à leurs yeux.
Par contre, je ne suis absolument pas d'accord pour ceux qui trouvent que le film dégage un parfum douteux à la limite de la pédophilie. Faut vraiment avoir l'esprit mal placé et tomber dans la chasse aux sorcière car le film évite totalement toute ambiguïté, surtout pour le personnage plus « âgé ».
Le film traite au contraire de la solitude et ce à quoi on peut se raccrocher pour y faire face et ne pas sombrer dans la folie. On est uniquement dans une histoire d'amitié « suspendue» avec des degrés de maturité différents.
Le film ne manque en tout cas pas d'idées assez pertinente qui culminent forcément dans les différents flash-backs parfaitement mise en scène et qui exploitent bien son concept, dégageant un sentiment de mélancolie assez fort. Le dénouement, s'il tarde à venir, est plutôt bien vu et évite la conclusion attendue et donc redoutée. Quant à la dernière séquence, je pense qu'il ne faut pas la prendre pour argent comptant mais comme une pure projection de l'héroïne.
En parlant de l'héroïne, il faut encore une fois souligner l'incroyable qualité du jeux des enfants coréens qui sont d'une justesse et d'un naturel formidable.
On est pas passé loin de la merveille mais ça demeure déjà hautement recommandable.
V.I.P. (Park Hoon-jung – 2016)
Un policier et un membre des services secrets sont en compétition pour arrêter le fils d'un responsable nord-coréen. Le premier afin de le condamner pour avoir sauvagement violé et assassiné des douzaines de jeunes filles et le second pour le livrer à des homologues américains qui s’intéressent aux comptes cachés de son père.
Chaque année, il nous faut au moins un thriller violent et sadique. En 2017 ce fut donc ce V.I.P. qui risquent de filer des boutons aux réfractaires de ce genre typiquement coréen et on ne leur donnera pas tort : jurons à tout va, acteurs cabotinant à outrance et se la raconte à mort (le flic qui mâchouille ses cigarettes, Peter Stormare d'une nullité crasse), méchant au visage angélique pour un sourire carnassier tout en écoutant du classique, violence racoleuse à souhait et souvent gratuite.
C'était moins insupportable que Ashura l'an dernier mais c'est tout aussi peu empathique tant les personnages sont agaçants de postures. Le méchant est désespérant de clichés à ce titre et tous les personnages sont des pantins sans aucune surface.
Ca se laisse tout de même suivre car quelques passages sont plutôt pas trop mal, notamment la rivalité entre les différents services qui jouent une partie d’échec grandeur nature ainsi que quelques fulgurances dans le déroulement du scénario telle que la scène du pont qui lance le dernier acte. Mais la conclusion grossière au possible renvoie le film dans sa médiocrité tapageuse.
Un grosse faute de parcours pour Park Hoon-jung qui m'avait agréablement surpris l'an dernier avec The Tiger (New World étant également bien réputé aussi, j'ai le blu-ray qui traîne)
The fortress (Hwang Dong-hyuk – 2017)
En 1636, le royaume de Joseon, allié au Ming, est menacé par les Qing. Le roi et sa cour sont rapidement assiégés dans un palais en montagne entouré d'un mur de protection. Les conseillers et ministres ne sont pas d'accord sur les décisions tandis que la population sur la place souffre d'un hiver particulièrement rude et que les vivres sont rapidement insuffisant.
Après 4 ans nous avoir tétanisé avec l'éprouvant et déchirant Silenced, le FFCP nous donne des nouvelles de son cinéaste Hwang Dong-hyuk (qui a signé un autre film entre temps) pour cette grosse production sorti tout juste sorti en Corée et qui a l'air de bien cartonné sur place. Cela dit, ceux qui s'attendait à un blockbuster gorgés de bataille façon Roaring Curents (aka the Admiral) ont tiré la tronche. Le film mise assez peu sur l'action qui se résument à 3-4 scènes guerrières de quelques minutes (bien fichus cela dit). L'essentiel du film est plutôt centré sur la stratégie, les choix politiques et les jeux d'influences/manipulation. On peut dire qu'on est très loin des titres habituels qui misent à fond sur le nationalisme patriotique et le spectaculaire belliqueux. The fortress en prend même le contre-pied avec de nombreuses séquences qui dévoilent un pouvoir incapable de prendre de bonnes décisions, d'être cohérent, de penser au bien commun et qui préfère s'enfermer dans un cérémoniel pompeux et coupé du bon sens comme ces lettrés qui passent leur temps à demander la mise à mort de ministres en rupture avec la ligne générale de la cour.
The fortress parle ainsi d'une impasse totale dans laquelle se trouve le régent et sa suite face à une situation où tous les choix sont problématiques et risquent de conduire à leur perte même si le respect des codes et coutumes l'emportent souvent sur la logique.
Dans cette optique, les méchants ne sont jamais diabolisés mais campent sur un attentisme pour juger de la suite de leur manœuvre : laisser au roi coréen de faire le premier pas diplomatique ou l'écraser s'il tente une attaque. Mais parmi les officiers de Joseon, le premier pas est considéré comme une humiliation ou une trahison...
Un scénario assez riche et même passionnant mais qui ne passe malheureusement pas le cap de la réalisation plombé par un académisme stérile se limitant à du champ contre-champ mécanique alors qu'il aurait été plus judicieux de confronter les points de vues, les rapports de forces, d'appuyer la lourdeur des réunions, de traduire les confrontations idéologiques. Il en ressort une mise en scène répétitive au possible alors que le scénario ne l'est pas et évoque justement l’absurdité de cette incapacité à décider pour mieux se réfugier dans les beaux discours théoriques plus rassurant. Ca n'excuse pas en revanche les atermoiements qui affaiblissent le dernier acte où plusieurs scènes déclinent le même contenu.
Pour moi, les 140 minutes sont assez bien passés pour la gravité de l'ensemble, son approche résolument non commerciale, la qualité d’interprétation et son scénario qui démonte les coulisses du pouvoir. Mais plusieurs de mes copains ont souffert le martyr.