J'aime bien Bégaudeau, sa manière très prosaïques de partir de ce qui est vraiment montré dans les scènes (il n'est pas le seul mais beaucoup ont tendance à surinterpréter et à ne pas partir de la base je trouve).cinéfile a écrit : ↑11 mai 22, 07:45 Après Nolan et Kubrick, Bégaudeau se "paye" Heat et Michael Mann :
https://podtail.com/fr/podcast/la-gene-occasionnee/
Il défend sa vision du cinéma, son goût d'une manière assez cohérente et avec une rhétorique habile.
Qu'on adhère ou pas, je trouve bien d'entendre d'autres points de vue qui remettent en question certaines grandes figures.
Ne serait-ce que pour interroger ses propres goûts, ses angles morts.
Leur critique de First Cow était intéressante, et éclaire très bien pourquoi Heat ne va pas passer, tellement c'est opposé dans la forme.
Mais j'ai eu l'impression qu'il passe essentiellement à côté du travail et du discours de Mann, en raison d'une sensibilité qui rejette épidermiquement le côté "cinoche" stylistique, pas naturaliste. Mais surtout parce qu'il prend pour argent comptant, sans nuance, les figures de Mann. On sent l'envie de se payer un "monument" (alors que c'est loin d'être le meilleur ou le plus intéressant film de Mann) et dézinguer Thoret au passage.
Par exemple ce qu'il dit sur le professionnalisme et Mann qui tiendrait un discours néolibéral est un contresens.
Le cinéma de Mann est celui d'un monde contemporain englouti par le néolibéralisme.
Mann ne dit pas "regardez comme c'est super d'être obsédé par son travail". Ces extrêmes professionnels ont quelque chose de pathétique.
Mais là où un certain cinéma dogmatique va dire "regardez comme c'est trop nul ces gens obsédés du travail", Mann ne se ment pas à lui-même, aussi absurde qu'ils soient ces pros dégagent quelque chose.
Comme le dit très bien Thoret, chez Mann le matérialisme du capitalisme est séduisant. Une belle maison au design contemporain et épuré c'est beau, même si c'est vide, impersonnel et que ça ne rend pas heureux.
Si ce n'était pas le cas, le discours contestataire des années 60-70 l'aurait emporté.
Sur le scenario et le réalisme, il y a des choses justes, mais sur la manque de professionnalisme quant à Waingro c'est lui qui manque de réalisme je trouve.
Waingro débarque dans l'équipe pour remplacer quelqu'un au pied levé non ?
C'est comme ça que je le comprends quand Tom Sizemore lui demande son nom.
Dans le réel, est-ce qu'une équipe professionnelle abandonne un énorme coup préparé pendant des mois parce qu'une personne manque à l'appel ? Ou prend-elle le risque calculé d'intégrer quelqu'un de recommandé (probablement par Voight) par son "CV", son incarcération à Folsom comme Trejo. Je pense qu'en vrai c'est comme ça que ça marche. Le genre de compromis du réel auquel personne n'échappe.