Page 8 sur 10

Re: Maurice Pialat (1925-2003)

Publié : 8 janv. 16, 09:47
par Alexandre Angel
Jeremy Fox a écrit :Et surtout, essaie de te procurer son sublime feuilleton, La maison des bois
Je suis fan !! Par contre, je trouve complètement inutile le dernier épisode : la fin de l'avant-dernier était une fin idéale. Je crois que Pialat, en bonus, face à des spectateurs lors d'un débat animé par Serge Toubiana, s'en explique (il devait aller au bout d'un cahier des charges ORTF).

Re: Maurice Pialat (1925-2003)

Publié : 7 juil. 16, 08:12
par Jeremy Fox
Police - 1985

Le modèle des futurs films policiers réalistes français tels les superbes L627 de Tavernier, Polisse de Maiwenn ou Le Petit lieutenant de Xavier Beauvois, des films qui s'attachent bien plus au quotidien des policiers qu'aux enquêtes. De ce point de vue le film de Pialat est passionnant, les deux premiers tiers superbes, et l'on aurait bien suivi pendant encore 4 heures les déambulations de ces hommes et ces femmes au poste de police, dans les bistrots ou boites de nuit. Depardieu est magistral, le ton est juste et les seconds rôles tous parfaits, la présence de Sandrine Bonnaire étant même lumineuse.

J'étais prêt à le faire entrer dans mon top 100 français sans cette dernière demi heure moins réussie à cause de cette histoire d'amour entre Sophie Marceau et Gerard Depardieu pas crédible une seule seconde (la première scène de baisers langoureux dans la voiture est même parfois gênante). Je n'ai rien contre Sophie Marceau mais je pense qu'en l'occurrence il s'agit d'une grossière erreur de casting (pas encore assez mature pour un tel rôle) qui empêche le film d'être aussi puissant que la plupart des autres de Pialat.

Ceci étant dit, ce film expressément pas très aimable (très bon scénario de Catherine Breillat) est néanmoins superbe et porté par un Depardieu dans un de ses meilleurs rôles (tout comme à chaque fois qu'il a tourné pour Pialat).

Re: Maurice Pialat (1925-2003)

Publié : 7 juil. 16, 14:04
par Amarcord
Jeremy Fox a écrit :
Spoiler (cliquez pour afficher)
Police - 1985

Le modèle des futurs films policiers réalistes français tels les superbes L627 de Tavernier, Polisse de Maiwenn ou Le Petit lieutenant de Xavier Beauvois, des films qui s'attachent bien plus au quotidien des policiers qu'aux enquêtes. De ce point de vue le film de Pialat est passionnant, les deux premiers tiers superbes, et l'on aurait bien suivi pendant encore 4 heures les déambulations de ces hommes et ces femmes au poste de police, dans les bistrots ou boites de nuit. Depardieu est magistral, le ton est juste et les seconds rôles tous parfaits, la présence de Sandrine Bonnaire étant même lumineuse.

J'étais prêt à le faire entrer dans mon top 100 français sans cette dernière demi heure moins réussie à cause de cette histoire d'amour entre Sophie Marceau et Gerard Depardieu pas crédible une seule seconde (la première scène de baisers langoureux dans la voiture est même parfois gênante). Je n'ai rien contre Sophie Marceau mais je pense qu'en l'occurrence il s'agit d'une grossière erreur de casting (pas encore assez mature pour un tel rôle) qui empêche le film d'être aussi puissant que la plupart des autres de Pialat.

Ceci étant dit, ce film expressément pas très aimable (très bon scénario de Catherine Breillat) est néanmoins superbe et porté par un Depardieu dans un de ses meilleurs rôles (tout comme à chaque fois qu'il a tourné pour Pialat).
Tout à fait d'accord avec toi, sur le "problème" Sophie Marceau... Je ne peux que redire ce que je disais quelques pages plus loin (et que je pense encore), dans un échange :
Jeremy Fox a écrit :
AtCloseRange a écrit : On peut sans doute dire que Police est le premier film policier français à essayer d'être aussi réaliste et qu'il a ouvert la voie et inspiré ses successeurs (L 627, Le Petit Lieutenant, et Polisse) mais globalement, il me semble moins réussi.
Tout à fait. Et tu as d'ailleurs cité ses trois meilleurs successeurs à mon avis. Curieux de le revoir moi aussi du coup, même s'il m'avait un peu déçu à sa sortie.
Sophie Marceau (qui garde le souvenir que l'on sait de ce tournage) me paraît être une grosse erreur de casting ici (elle détonne vraiment - et dans le mauvais sens du terme - dans l'univers de Pialat)... D'ailleurs, elle est essentiellement là pour faire chier Sandrine Bonnaire, que Pialat voulait "punir", suite à l'une de leurs premières brouilles... c'est le côté "Voici/Closer" de l'incorrigible Pialat ! (Imaginons un instant Bonnaire en lieu et place de Marceau... La face du film en eût été changée !)

Re: Maurice Pialat (1925-2003)

Publié : 7 juil. 16, 14:07
par Jeremy Fox
Amarcord a écrit :Imaginons un instant Bonnaire en lieu et place de Marceau... La face du film en eût été changée !)
J'avais d'ailleurs eu l'intention de le rajouter à mon avis dans un premier temps.

Re: Maurice Pialat (1925-2003)

Publié : 22 juil. 16, 08:28
par Jeremy Fox
Le Garçu : 1995

Pas d'intrigue, une suite de séquences sans nécessairement de tensions dramatiques, du cinéma brut de réalisme sachant capter comme rarement la simplicité du quotidien, sa poésie ou sa trivialité... Le genre de cinéma que j'aime tout particulièrement surtout quand il est porté par un acteur de la trempe de Depardieu ici une fois de plus génial et filmé par l'un des cinéastes français les plus doués pour nous donner cette sensation d'ultra réalisme. Le petit Pialat est d'un naturel confondant et Geraldine Pailhas parfaite partenaire de Depardieu. Une chronique touchante.

Re: Maurice Pialat (1925-2003)

Publié : 22 juil. 16, 15:14
par Amarcord
Jeremy Fox a écrit :Le Garçu : 1995

Pas d'intrigue, une suite de séquences sans nécessairement de tensions dramatiques, du cinéma brut de réalisme sachant capter comme rarement la simplicité du quotidien, sa poésie ou sa trivialité... Le genre de cinéma que j'aime tout particulièrement surtout quand il est porté par un acteur de la trempe de Depardieu ici une fois de plus génial et filmé par l'un des cinéastes français les plus doués pour nous donner cette sensation d'ultra réalisme. Le petit Pialat est d'un naturel confondant (...) Une chronique touchante.
J'adore ce film. Qu'il soit, en plus, le dernier de Pialat (endossant fatalement, du coup, le statut de "film testamentaire") lui donne une saveur spéciale. Comme toujours, chez Pialat, c'est digne, pudique, sincère, vrai... Pourtant, ça aurait pu être particulièrement casse-gueule : combien de cinéastes, devenant papa sur le tard, auraient pondu un film indigeste... Pialat (pourtant "gaga" de son petit Antoine), lui, restera classe jusqu'à la fin.
Jeremy Fox a écrit :...et Geraldine Pailhas parfaite partenaire de Depardieu.
C'est d'autant plus douloureux et pathétique de voir ce couple se perdre dans le naufrage télévisuel Marseille...

Re: Maurice Pialat (1925-2003)

Publié : 24 juil. 16, 07:51
par Jeremy Fox
Passe ton bac d'abord : 1979

Chronique sur un groupe d'adolescents lycéens dans la ville de Lens. Evidemment l'anti La Boum ou les Sous doués, le film de Pialat n'est absolument pas une comédie mais le témoignage du quotidien morne de jeunes adultes qui s'ennuient et qui n'ont à priori pas d'avenir excepté de petits boulots peu gratifiants et une vie terne. C'est du pur Pialat, ça fait parfois très mal mais c'est d'un puissant réalisme, le cinéaste sachant capter comme personne certains moments d'une étonnante authenticité comme les mariages déprimants, les conversations aux cafés... Manque peut-être un comédien de la trempe de Depardieu ou Bonnaire mais l'ensemble est néanmoins excellent. Et puis il y a la trop rare Sabine Haudepin.

Re: Maurice Pialat (1925-2003)

Publié : 25 juil. 16, 12:04
par Grimmy
Oui super film qui a bien vieilli. Le tournage a été bien bordélique je crois... Pialat ayant donné un rôle à sa maitresse, bonjour l'ambiance ! Et puis, un des jeunes est mort peu de temps après, brulé dans sa tente en faisant du camping...Brr...

Re: Maurice Pialat (1925-2003)

Publié : 25 juil. 16, 15:59
par Thaddeus
Un film qui se contente d'investir des "moments" de la vie - rapports amoureux, amicaux, parentaux - d'une dizaine de jeunes gens avant et après cette muraille sociale et culturelle qu'est le bac, qui met à nu des qualités si rarement développées par les cinéastes français (hormis Rohmer ou Rozier) : les sentiments, les gestes, une tenue toujours arrimée à un corpus social (la famille, les copains et les copines) et enclavés dans l'espace éducatif du moment (les problèmes de l'emploi, de l'avenir, de l'école). Ces qualités expriment ici la violence et l'amour avec lesquels, par-delà les oppositions de classes et d'âges, les êtres se déchirent, s'aiment, s'excluent. Elles forment le point de départ de ce qu'un réalisateur peut, en l'épousant le plus près possible, reproduire de la réalité. Chaque adolescent rit ici avec le fermeté d'une inquiétude persistante dont chacun est conscient et dont tous semblent surmonter les impondérables. Cet acharnement à vivre, travesti en sourires, joies et franches rigolades, devient un masque de plus en plus lourd à porter, que Pialat ne manque jamais d'arracher par l'intermédiaire d'une caméra sans complaisance. Ce masque existentiel, dernier rempart derrière lequel ces jeunes gens prennent le temps de vivre, nous dit que les êtres, au-delà des contingences sociales, existent malgré la pesanteur des menaces qui pèsent lourdement sur eux. La nature du regard de Pialat est la même ici que dans ses autres films. C'est un mélange de pudeur et de cruauté qui prend presque systématiquement à contrepied, qui apparaît brusquement dénonciateur d'un certain type de bêtise, de conformisme, au moment où l'on allait s'identifier, ou au contraire qui serre la gorge de pitié alors que l'on était prêt à s'indigner. Il y a chez l'auteur cette complicité, cette sympathie lucide qui lui permet de regarder un peuple tel qu'il est, sans le magnifier, sans non plus prendre avec lui une distance commode et méprisante. Près de quarante ans plus tard, le témoignage qu'apporte son film sur son temps démontre que le leurre de la représentation et l'hypocrisie de la séduction lui sont totalement étrangers. Passe ton bac d'abord fait parfois mal, mais il parle vrai.

Re: Maurice Pialat (1925-2003)

Publié : 8 août 16, 01:14
par bronski
Revu Van Gogh- et quelle beauté, quelle sensualité, mais aussi quelle rigueur. Magnifique. Très grand film.

Re: Maurice Pialat (1925-2003)

Publié : 8 août 16, 15:09
par Michel2
bronski a écrit :Revu Van Gogh- et quelle beauté, quelle sensualité, mais aussi quelle rigueur. Magnifique. Très grand film.
Avec en prime un hommage aussi inattendu qu'émouvant à John Ford : la marche des danseurs à la fin de la longue scène dans la guinguette est un clin d'oeil au bal de la cavalerie dans Fort Apache - l'orchestre y joue d'ailleurs la même mélodie.

Re: Maurice Pialat (1925-2003)

Publié : 8 août 16, 15:31
par Kevin95
Michel2 a écrit :
bronski a écrit :Revu Van Gogh- et quelle beauté, quelle sensualité, mais aussi quelle rigueur. Magnifique. Très grand film.
Avec en prime un hommage aussi inattendu qu'émouvant à John Ford : la marche des danseurs à la fin de la longue scène dans la guinguette est un clin d'oeil au bal de la cavalerie dans Fort Apache - l'orchestre y joue d'ailleurs la même mélodie.
Je n'avais d’ailleurs jamais fait le rapprochement avant la vision du doc Maurice Pialat, l'amour existe. Les deux extraits mis côte à côte et on remarque avec émotion combien le réalisateur a reproduis fidèlement la mise en scène du film de Ford. La grande classe.

Re: Maurice Pialat (1925-2003)

Publié : 8 août 16, 19:36
par Alexandre Angel
Kevin95 a écrit :
Michel2 a écrit : Avec en prime un hommage aussi inattendu qu'émouvant à John Ford : la marche des danseurs à la fin de la longue scène dans la guinguette est un clin d'oeil au bal de la cavalerie dans Fort Apache - l'orchestre y joue d'ailleurs la même mélodie.
Je n'avais d’ailleurs jamais fait le rapprochement avant la vision du doc Maurice Pialat, l'amour existe. Les deux extraits mis côte à côte et on remarque avec émotion combien le réalisateur a reproduis fidèlement la mise en scène du film de Ford. La grande classe.
Merci de m'avoir mis ça en tête! Je n'avais jamais non plus fait le rapprochement (ou alors inconsciemment). Merveilleux!

Re: Maurice Pialat (1925-2003)

Publié : 8 août 16, 19:43
par Thaddeus
Alexandre Angel a écrit :Merci de m'avoir mis ça en tête! Je n'avais jamais non plus fait le rapprochement (ou alors inconsciemment). Merveilleux!
Pourtant cela paraît tellement évident. J'ignorais moi aussi cette anecdote, mais je me rappelle qu'à la découverte du film de John Ford (après avoir vu Van Gogh), je me suis dit que la scène du quadrille était identique à celle du Pialat. Sans avoir pensé un seul instant que le Français avait consciemment imité l'Américain, je trouvais la coïncidence assez énorme. En tout cas, deux séquences absolument superbes.

Re: Maurice Pialat (1925-2003)

Publié : 7 août 19, 08:00
par Mama Grande!
Bonjour à tous

Dans le cadre d'une rétrospective Gaumont, le cinéma pas loin de chez moi passe deux Pialat le même jour: Nous ne vieillirons pas ensemble et Loulou

De PIalat je n'ai vu pour le moment qu'A nos amours!, une expérience aussi marquante que douloureuse, et que je tiens en tres haute estime.
Néanmoins, comme c'était une expérience douloureuse, je pense qu'enchainer deux Pialat à la suite est une mauvaise idée.

Donc question simple, lequel me conseillez-vous entre les deux? :P

Merci pour vos conseils :wink: