John Wayne (1907-1979)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Jeremy Fox
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Re: John Wayne (1907-1979)

Message par Jeremy Fox »

MrDeeds, tu n'as absolument plus rien à te reprocher ; ta seconde intervention a encore suscité des avis fichtrement passionnants sur les Bérets verts que je n'étais pas loin de considérer comme un navet (vu une seule fois il y a longtemps) et que Julien Leonard (malgré qu'il mette en avant ses défauts dont une mise en scène pachydermique) m'a quasiment donné envie de revoir :o :wink:
Julien Léonard
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Re: John Wayne (1907-1979)

Message par Julien Léonard »

Jeremy Fox a écrit :MrDeeds, tu n'as absolument plus rien à te reprocher ; ta seconde intervention a encore suscité des avis fichtrement passionnants sur les Bérets verts que je n'étais pas loin de considérer comme un navet (vu une seule fois il y a longtemps) et que Julien Leonard (malgré qu'il mette en avant ses défauts dont une mise en scène pachydermique) m'a quasiment donné envie de revoir :o :wink:
Oulala... :oops: Méfiance tout de même Jeremy. J'insiste bien sur ce point : Si le film demeure important, c'est surtout en ce qui concerne son fond (unique dans l'histoire du cinéma, tant historiquement que thématiquement, je le répète) et les réactions qu'il suscite. Étudier ce film en le replaçant dans son contexte (1968, culture hippie, guerre du Vietnam tournant déjà au désastre, mai 1968 en France, identité complètement réac d'un Wayne totalement à côté de son époque...) et dans la filmographie de cet acteur-réalisateur hors-norme permet d'en tirer quelque-chose de considérable et de voir à quel point ce film a pu déclencher les foudres de la morale jeune de son époque (j'ai ici des critiques françaises particulièrement foudroyantes), tout en étant un très gros succès (plus de 20 millions de dollars au BO US, et plus d'un million d'entrées en France, malgré les alertes à la bombe dans plusieurs cinémas). En fait, si ce film fait encore parler de lui aujourd'hui, c'est donc surtout pour ces raisons là. Objectivement, en termes de qualités cinématographiques, le film est à peine correct (sans toucher au navet forcément). Mais ça reste une œuvre plurielle, offrant plusieurs angles d'attaques pour l'étudier aujourd'hui avec un recul nécessaire (j'estime qu'en 2009, c'est maintenant largement possible).

Et puis, John Wayne fait partie de ces monstres sacrés dont la filmographie aide à comprendre la personnalité. Personnellement, de Stagecoach au Dernier des géants (en 37 ans de carrière à son apogée), je pense qu'aucun film ne trahit la personnalité du Duke (mis à part peut-être une ou deux exceptions). Par ce biais, on peut souvent y apprécier ses qualités d'âme, ses valeurs (souvent étalées au travers de ses personnages) et sa droiture, autant que ses contradictions, ses choix passéistes (parfois profondément réactionnaires) et ses mauvais côtés. Tout cela participe d'une personnalité parmi les plus intéressantes de l'histoire du cinéma hollywoodien. Si j'en ai fais mon acteur préféré (en tête de liste dans mon top 20 acteurs), c'est aussi bien pour la qualité de sa filmographie et de son jeu en général, que pour ce qu'il projette. Je le trouve toujours formidable, même pour toutes les erreurs qu'il a commis dans ses films. Et en même temps, comment ne pas le pardonner, même après un film comme Les bérets verts ? Ce n'est que mon avis bien sûr.

Pour finir, je dirais qu'il a aussi su se faire pardonner par la suite, dans les années 70, en tournant dans deux films profondément humains : Les cowboys et Le dernier des géants, où il y affiche aussi bien ses forces et ses faiblesses. Ces deux pépites, sortant nettement du lot parmi les films qu'il a tourné durant cette décennie (que des bons films, je trouve, mais tout de même bien en deçà), constituent les deux parties d'un même testament cinématographique bourré de nostalgie, mais qui parvient aussi à regarder vers l'avant.

Sur ce, je sens que je vais aller me revoir Le dernier des géants moi !! :mrgreen: :)
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Jeremy Fox
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Re: John Wayne (1907-1979)

Message par Jeremy Fox »

Julien Léonard a écrit :
Oulala... :oops: Méfiance tout de même Jeremy. J'insiste bien sur ce point : Si le film demeure important, c'est surtout en ce qui concerne son fond (unique dans l'histoire du cinéma, tant historiquement que thématiquement, je le répète) et les réactions qu'il suscite.
J'avais très bien compris et ne m'attendais pas à lui trouver plus de qualité qu'à ma première vision mais ta mise en perspective m'a quand même donné envie de le revoir avec ce recul :wink:
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Phnom&Penh
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Re: John Wayne (1907-1979)

Message par Phnom&Penh »

MrDeeds a écrit :My god, que de réactions !!!!!!!

Je me sens bien seul tout à coup
C'est le danger d'attaquer des oeuvres très appréciées, mais c'est toujours un plaisir d'essayer de convaincre sur une oeuvre qu'on aime, et ça permet justement d'en parler :) .

En ce qui concerne John Wayne, il faut juste ne pas faire l'amalgame entre des opinions conservatrices, un anti-communisme très virulent et le racisme qui est un autre sujet. S'il y a une chose à lui reprocher, c'est probablement d'avoir été, avec Ward Bond, par exemple, un des professionnels du cinéma en faveur de la Liste Noire. Mais ils étaient majoritaires, d'où d'ailleurs le courage de John Ford de ne pas avoir accepté de rentrer là-dedans.
D'ailleurs, à propos de John Wayne et de son anti-communisme, Ford, qui faisait preuve de plus de mauvais esprit dans sa vie que dans ses films, laissait entendre que Wayne n'avait pas vraiment d'intérêt pour la politique, mais qu'il compensait ainsi le fait de ne pas s'être engagé pendant la seconde guerre mondiale (allant d'ailleurs jusqu'à la vexation avec la fameuse histoire de la prise de Wayne saluant en uniforme, que Ford lui fait refaire une quinzaine de fois parce qu' "il ne sait pas saluer, on voit qu'il n'a jamais été militaire"...).
O'Malley a écrit :Le problème c'est que je suis en tout point d'accord avec cette analyse sans pour autant considérer comme crédibles les retrouvailles entre Ethan et Debbie . je suis conscient que c'est totalement subjectif, une simple question de ressenti...
Serait-il temps de lui donner une nouvelle chance?
Pour la scène en question, il y a un truc qui montre bien que la réaction d'Ethan Edwards est de l'ordre de l'illumination plus que du raisonnable. The Searchers est un film construit en aller-retour et il y a beaucoup de scènes avec une signification physique. Ainsi la façon dont Edwards se présente et est accueilli dans sa famille par sa belle-soeur au début du film, et la façon dont il rentre seul à la fin.

De la même manière, au début, Ethan Edwards prend la petite Debbie pour sa grande soeur Lucy et c'est en la soulevant à bout de bras qu'il reconnaît son erreur et voit qu'il s'agit de Debbie.
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A la fin du film, Ethan Edwards poursuit Debbie qui s'enfuit, la rattrape et fait le même geste de la soulever à bout de bras, sans doute pour mieux voir sa "face d'indienne"...et c'est la répétition de ce geste qui lui fait rappelle instinctivement qu'il s'agit de sa nièce.
C'est justement le fait que cette reconnaissance soit instinctive qui indique qu'il y a un profond changement chez Edwards. Il ne réfléchit pas pour se dire que finalement oui, en lui réapprenant l'anglais, en la remettant à l'école, on oubliera l'indienne et on retrouvera Debbie. Il prend une indienne à bout de bras et cette indienne est Debbie. C'est aussi un contre-sens de penser qu'il reprend Debbie parce qu'il décide que c'est sa nièce et plus une indienne: il comprend que cette indienne est aussi sa nièce....
Cette scène est brutale et peut-être mal comprise mais elle n'a pas été faite à la va-vite. Il fallait que ce soit brutal pour que Ethan Edwards ait une illumination. Le message aurait été bien moindre s'il s'était mis à raisonner pendant la moitié du film.

Ford n'est pas un discoureur. Il fait passer les significations par l'image et il est très concis. Sur le travail de l'image, The Searchers est un de ses films les plus travaillés. Et John Wayne, comme acteur, s'intègre si bien à l'image qu'il convient parfaitement à ce genre de films.
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Jean Itard
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Re: John Wayne (1907-1979)

Message par Jean Itard »

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Les sacrifiés de John Ford

Un récit admirable sur la guerre du pacifique qui impressionne encore, plus de soixante ans après, dans les scènes d'action et qui de ce point de vue n'a pas à rougir, je trouve, de la comparaison avec quantité de films plus récents.
C'est filmé superbement. Le scénario est remarquable : on n'oublie pas de filmer ceux qui laissent leur peau. On n'oublie pas non plus que la victoire possède aussi beaucoup le goût des défaites, un goût amer... La partition, excellente, joue un rôle essentiel dans cet hommage vibrant et émouvant aux hommes en guerre.

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John wayne y est comme toujours impeccable, ce en quoi j'imagine Julien Léonard ne devrait pas me contredire. :wink: Excellent en particulier dans son rôle de bourru timide auprès des femmes, ici la charmante Donna Reed : la scène où elle lui retire son pantalon pour soigner... une infection au bras est mémorable. :lol:

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Les sacrifiés possède la force d'un récit tourné à chaud, un peu comme A l'ouest rien de nouveau, qui plus est par des gens qui savaient de quoi ils parlaient. Mais aussi la force du romantisme. Ne sont-ils pas magnifiques ces sacrifiés ? :) 8)
Julien Léonard
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Re: John Wayne (1907-1979)

Message par Julien Léonard »

Je ne te contredirais pas, c'est sûr ! Les sacrifiés fait partie de la bonne vingtaine de chef-d'œuvres absolus que Wayne a tourné dans sa carrière. C'est en tout cas son plus beau film de guerre, et l'un des plus grands films de John Ford (top 10 Ford je pense). Les photos sont bien choisies, elles illustrent bien l'esprit du film. Et plastiquement, c'est une œuvre assez superbe (comme souvent chez Ford, cela dit). :)

Il est en tout cas beaucoup plus réussis (pas photo là-dessus) que Les tigres volants, Alertes aux marines et autres Retour aux Philippines que Wayne a brassé pendant la guerre : parfois efficaces, mais souvent creux, ternes et d'un héroïsme qui frise l'indécence (on est parfois en plein récit de propagande).
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Re: John Wayne (1907-1979)

Message par Jean Itard »

Julien Léonard a écrit :Je ne te contredirais pas, c'est sûr ! Les sacrifiés fait partie de la bonne vingtaine de chef-d'œuvres absolus que Wayne a tourné dans sa carrière. C'est en tout cas son plus beau film de guerre, et l'un des plus grands films de John Ford (top 10 Ford je pense). Les photos sont bien choisies, elles illustrent bien l'esprit du film. Et plastiquement, c'est une œuvre assez superbe (comme souvent chez Ford, cela dit). :)
Nous sommes d'accord ! Et je trouve son propos assez équilibré. Ce n'est pas l'image qu'on a parfois voulu coller, à tort, à Ford.
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Jeremy Fox
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Re: John Wayne (1907-1979)

Message par Jeremy Fox »

Jean Itard a écrit :
Les sacrifiés de John Ford

Un récit admirable sur la guerre du pacifique qui impressionne encore, plus de soixante ans après, dans les scènes d'action et qui de ce point de vue n'a pas à rougir, je trouve, de la comparaison avec quantité de films plus récents.
C'est filmé superbement. Le scénario est remarquable : on n'oublie pas de filmer ceux qui laissent leur peau. On n'oublie pas non plus que la victoire possède aussi beaucoup le goût des défaites, un goût amer... La partition, excellente, joue un rôle essentiel dans cet hommage vibrant et émouvant aux hommes en guerre.
John wayne y est comme toujours impeccable, ce en quoi j'imagine Julien Léonard ne devrait pas me contredire. :wink: Excellent en particulier dans son rôle de bourru timide auprès des femmes, ici la charmante Donna Reed : la scène où elle lui retire son pantalon pour soigner... une infection au bras est mémorable. :lol:
Les sacrifiés possède la force d'un récit tourné à chaud, un peu comme A l'ouest rien de nouveau, qui plus est par des gens qui savaient de quoi ils parlaient. Mais aussi la force du romantisme. Ne sont-ils pas magnifiques ces sacrifiés ? :) 8)
Un gros + 1 ; pour moi l'un de des plus grands chef-d'oeuvre de Ford dont tu fais bien d'insister aussi sur son côté romantique vraiment très poignant.
luc
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Re: John Wayne (1907-1979)

Message par luc »

+1
à propos de ce film " les sacrifiés " où
entre autres choses , les scènes du Duke avec Donna
REED sont superbes .... j'ai toujours à l'esprit quelque chose ...
quand je le revisite .... lorsque WAYNE et Donna REED ont leur dernière
communication téléphonique interrompue .... alors je m'imagine une suite ... WAYNE revenant
quelques temps après et essaie de la retrouver !!!
Quoiqu'il en soit ... Chef d'oeuvre absolu avec des scènes d'un romantisme
exeptionnel ...
à n'en choisir qu'un ..." peut-être" serait ce celui là ....
O'Malley
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Re: John Wayne (1907-1979)

Message par O'Malley »

Phnom&Penh a écrit :A la fin du film, Ethan Edwards poursuit Debbie qui s'enfuit, la rattrape et fait le même geste de la soulever à bout de bras, sans doute pour mieux voir sa "face d'indienne"...et c'est la répétition de ce geste qui lui fait rappelle instinctivement qu'il s'agit de sa nièce.
C'est justement le fait que cette reconnaissance soit instinctive qui indique qu'il y a un profond changement chez Edwards. Il ne réfléchit pas pour se dire que finalement oui, en lui réapprenant l'anglais, en la remettant à l'école, on oubliera l'indienne et on retrouvera Debbie. Il prend une indienne à bout de bras et cette indienne est Debbie. C'est aussi un contre-sens de penser qu'il reprend Debbie parce qu'il décide que c'est sa nièce et plus une indienne: il comprend que cette indienne est aussi sa nièce....
Cette scène est brutale et peut-être mal comprise mais elle n'a pas été faite à la va-vite. Il fallait que ce soit brutal pour que Ethan Edwards ait une illumination. Le message aurait été bien moindre s'il s'était mis à raisonner pendant la moitié du film.

Ford n'est pas un discoureur. Il fait passer les significations par l'image et il est très concis. Sur le travail de l'image, The Searchers est un de ses films les plus travaillés. Et John Wayne, comme acteur, s'intègre si bien à l'image qu'il convient parfaitement à ce genre de films.
Je ne dis pas non plus que Wayne doit raisonner la moitié du film mais que la même conclusion soit amenée différemment. Ceci-dit, ton analyse est remarquable et tu m'as totalement convaincu sur l'idée de l'illumination (les deux plans qui se renvoient en miroir sont à ce titre très persuasifs). A revoir de toute urgence donc!
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Re: John Wayne (1907-1979)

Message par Phnom&Penh »

Content d'avoir pu te donner envie de le revoir!
Pour les deux plans en miroir, je me sens obligé de préciser quand même que l'idée n'est pas de moi, on en trouve l'analyse dans de nombreuses critiques du film :wink:
Et puis, un film que Scorsese dit revoir deux fois par an et que Spielberg a revu quinze fois avant de tourner Rencontre du troisième type ne peut pas être un film mineur :)
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Re: John Wayne (1907-1979)

Message par Watkinssien »

Surtout quand il est un chef-d'oeuvre ! 8)
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Re: John Wayne (1907-1979)

Message par Wagner »

Et je dirais même plus, le chef d'oeuvre des chefs d'oeuvre, au bas mot.
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Re: John Wayne (1907-1979)

Message par O'Malley »

Phnom&Penh a écrit : Et puis, un film que Scorsese dit revoir deux fois par an et que Spielberg a revu quinze fois avant de tourner Rencontre du troisième type ne peut pas être un film mineur :)
Je n'ai jamais dis le contraire! :wink:
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Re: John Wayne (1907-1979)

Message par Phnom&Penh »

J'avais bien compris, c'est ma phrase qui n'était pas claire :wink:

John Wayne et Bert Glennon dans Rio Grande (1950) de John Ford
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En voilà un dont il serait exagéré de dire que c’est un chef d’œuvre. Et pourtant, il est la preuve qu’un film mineur de Ford, quand il est en forme, reste un bon film.

Rio Grande, le troisième film de la série Cavalerie est une commande que Ford réalisa avec plaisir, d’abord parce que le sujet lui plaisait, ensuite parce qu’il cherchait alors à soutirer l’accord de la production pour réaliser l’Homme Tranquille en Irlande.
Ce film a deux très gros atouts qui lui donnent beaucoup de charme.
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Le premier, c’est John Wayne qui trouve ici un rôle accompli et détaillé et son premier partage d’écran avec Maureen O’Hara. Le moins qu’on puisse dire, c’est que la paire ainsi constituée crève l’écran et forme un évident couple de cinéma. John Wayne, lui, est dans ce qui lui réussit le mieux : capitaine de cavalerie dans un film peu bagarreur, officier dans un régiment où son propre fils est soldat, marié à une femme qui s’est séparé de lui depuis quinze ans pour des raisons sécessionnistes à découvrir dans le film…Bref, un dur qui ne cesse de ne pouvoir faire ce pourquoi il semble fait et qui en devient touchant et émouvant. Si She Wore a Yellow Ribbon est, dans son ensemble, d’une dimension sans comparaison avec Rio Grande, le personnage de John Wayne en particulier est peut-être encore plus intéressant, du fait de la belle intrigue amoureuse.
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Le second atout de Rio Grande, c’est la photographie. Ce film, au noir et blanc souvent très tranché, avec de nombreuses scènes d’aubes et de crépuscules, avait pour directeur photo le très grand Bert Glennon (1893-1967). Vieux complice de John Ford, Bert Glennon avait déjà été directeur photo sur Je n’ai pas tué Lincoln (1936), Stagecoach (1939), Young Mr Lincoln (1939)…le premier film couleur de Ford, Drums Along the Mohawk (1939) et Wagonmaster (1949). Drums along the Mohawk et Stagecoach avait été nominé aux Oscars pour la photographie.

Voici un lien ici vers la chronique de Rio Grande par Jeremy Fox, qui signale d’ailleurs le talent de Bert Glennon - re :wink:.
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John Ford et Bert Glennon (derrière la caméra), tournage de Stagecoach
Tout le monde connaît l’importance de Stagecoach dans la carrière de John Wayne et le soin avec lequel John Ford, avec Glennon à la photo, soigna la première apparition de la seconde carrière de Wayne qui allait en faire la star qu’il n’était pas parvenu à être auparavant.
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Stagecoach, John Ford
Sans minorer le talent de Wayne, avoir des atouts peut aider. Et quand on a été mis en valeur par l’homme qui, excusez du peu, a été directeur photo sur Les 10 commandements version 1923 de Cecil B. DeMille, They died with their boots on (1941) de Raoul Walsh…voici un lien vers une biographie succinte, mais de bonnes photos et une très complète filmographie de Glennon.

Bert Glennon

Et un article paru dans Film Comment en 1972 qui décrit bien le travail technique de Glennon:
Spoiler (cliquez pour afficher)
Bert Glennon was a visual stylist whose cinematography enhanced the best work of such disparate directors as John Ford and Josef von Sternberg. Glennon exemplifies the professional Hollywood craftsperson overshadowed by volatile, individualistic directors, his name rarely mentioned in film histories despite such credits as DeMille's The Ten Commandments, von Sternberg's Underworld and The Scarlet Empress, and Ford's epochal 1939 trio—Stagecoach, Young Mr. Lincoln, and Drums Along the Mohawk.

There were two Glennon styles—the glossy soft-focus of his 1920s Paramounts, and the dramatic, often minimalist, realism he employed at 20th Century-Fox in the late 1930s and at Warners ten years later. Along with Victor Milner, Glennon helped define the corporate Paramount look, with assignments for such directors of sophisticated fare as DeMille (Triumph), Lubitsch (The Patriot), Malcolm St. Clair (Are Parents People?, A Woman of the World, Good and Naughty), Rowland V. Lee (Barbed Wire), and Mauritz Stiller (Hotel Imperial, The Street of Sin—co-photographed by Milner and Harry Fischbeck).

Glennon's two great silent triumphs were The Ten Commandments and Underworld. The DeMille epic was the most spectacular production up to that time, with Glennon in charge of a crew steeped with photographic talent, including Edward S. Curtis, Archie Stout, J. Peverell Marley, and Donald Keyes. The contemporary story is well handled, but the film is most satisfying in the Biblical sequences, many shot in reverential tableaux, with sweeping camera movements on the action scenes. The most powerful moments include the Golden Calf sequence, Moses (Theodore Roberts) receiving the Commandments, and the famous parting of the Red Sea, all handled by Glennon in a documentary-like fashion. A prologue of the Israelites fleeing Egypt was cophotographed in two-strip Technicolor with Ray Rennahan.

Underworld foreshadowed many later crime films, uniting elements of that genre which would become commonplace, including Glennon's chiaroscuro photography. There are many fine photographic touches—the underworld ball, the police car chase—rendered in a crisp, economic manner. Underworld was a much more starkly lit work than was common at Paramount, but in his next film for von Sternberg, The Last Command, Glennon reverted to the softer studio style. His mobile camera makes both Underworld and The Last Command among the most visually pleasing films of the late silent era.

Glennon directed eight programmers between 1928 and 1930, making the transition to sound on such inaccessible titles as Gang War and Syncopation. If the films do exist, they would be interesting rediscoveries, since Glennon had by then shot nearly 40 features. He returned to cinematography in 1932 with von Sternberg's Blonde Venus, shooting interiors (Paul Ivano handled the exteriors). Among the scenes Glennon worked on is the "Hot Voodoo" number, with icon Marlene Dietrich emerging from a gorilla suit. Glennon shot two striking films for Gregory La Cava (The Half Naked Truth and Gabriel over the White House), and two important films for the young Katharine Hepburn, Dorothy Arzner's Christopher Strong and Lowell Sherman's Morning Glory. These were all contemporary films, slickly shot by Glennon, and helped reestablish him as a quality cinematographer.

Glennon reunited with von Sternberg on The Scarlet Empress, which cast Dietrich as Russia's Catherine the Great. Glennon achieved an extraordinary Baroque look, with dazzling camera movement complemented by von Sternberg's eccentric mise en scène and lavish art direction by Hans Dreier, Peter Ballbusch, and Richard Kollorsz. Truly one of the most photographically stunning works in American cinema, The Scarlet Empress was a Glennon masterwork, culminating his contributions to the von Sternberg canon. Typically, the director made no mention of Bert Glennon in his autobiography.

Glennon moved to Fox in 1934, and inexplicably toiled on B-movies, routine products except for George Marshall's gritty antikidnapping film Show Them No Mercy. His fortunes improved when Darryl Zanuck merged his 20th Century Pictures with the failing Fox and assigned him to shoot The Prisoner of Shark Island, the first of eight John Ford films shot by Glennon. The story of Dr. Samuel Mudd, the man who treated John Wilkes Booth's wound after the Lincoln assassination and found himself incarcerated as an unwitting accomplice, the film reveals Ford's passion for the era, nicely realized by Glennon. The Shark Island prison sequences are dark and gloomy, contrasted with the juleps-and-magnolia South symbolized by Mudd's family. Like much of Ford's best work, there is a silent film-feel to the cinematography. When Goldwyn borrowed Ford to make The Hurricane, a high-budget romantic adventure highlighted by the titular spectacle, the director brought along Glennon, who this time counterpointed South Seas exotica with prison sequences reminiscent of Prisoner of Shark Island.

Glennon's position as a master cinematographer was confirmed with the 1939 Ford films. Stagecoach deserves its reputation as one of the great westerns. Picturesque Monument Valley vistas and expert action sequences were expertly captured by Glennon, making Stage-coach one of the best looking black-and-white movies ever made. In a direct stylistic contrast to the von Sternberg films, there is little camera movement, and rare use of close-ups, the notable exception being the Indians on the bluff in a preattack sequence.

Smaller in scope, Young Mr. Lincoln impeccably recreated Indiana and Illinois of the 1830s and 1840s, a simple, Griffithian style which appealed to both Glennon and Ford. While an uncredited Arthur Miller shot the riverside locations, Glennon was responsible for the bulk of the film's classical look, with the fight in the clearing particularly well rendered. Drums along the Mohawk was a much more difficult film. Forced by Zanuck's release schedule to rush from Lincoln to Drums, the filmmakers were plagued by minimal preparation, an unpolished script, and a rugged location in Utah's Wasatch Mountains. Summer storms played havoc with matching shots, and to compound problems, the film was shot in three-strip Technicolor, Ford's first in color. Despite these rigors, Drums Along the Mohawk is exquisitely photographed, as perfect an exercise in color as Stage-coach was for black-and-white. There are many notable exteriors in this Revolutionary War drama, such as Henry Fonda and Claudette Colbert travelling west by oxcart; John Carradine's raid with the Mohawks upon the settlers; the siege of Fort Stanwix; and Henry Fonda's run through the forest, chased by Mohawk warriors.

It was ten years before Glennon worked with Ford again, but the occasion and the project was a special one—Wagonmaster. Ford told Peter Bogdanovich that Wagonmaster was one of the films that "came closest to being what I had wanted to achieve." A western masterwork written largely by Ford, the film is graced by Glennon's newsreel quality cinematography. Glennon also shot Ford's Rio Grande in stark black-and-white, the third and last of the John Wayne cavalry trilogy, and in Sergeant Rutledge he balanced dramatic exteriors of the black "Buffalo Soldiers" of the western Indian Wars with the sparse sound stage dramatics of the trial sequence.

Glennon did superlative work for another strong director, Raoul Walsh, on They Died with Their Boots On, in which he photographed a spectacular recreation of Custer's Last Stand; and Desperate Journey, a slam-bang Second World War adventure highlighted by an exhilarating car chase. Glennon had a chance to create a stylized, romantic look for Our Town, and a well-done film noir, Edgar Ulmer's Ruthless, then closed his career at Warners with some of the best 3-D photography (House of Wax, The Moonlighter, The Mad Magician).



—John A. Gallagher
A noter que celui qui avait aussi été directeur photo sur Blonde Venus (1932) et L’Impératrice Rouge (1933), deux des films de Sternberg avec Marlene Dietrich, devait savoir mettre en valeur une star.
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L'Impératrice Rouge, Josef von Sternberg
Ah, sinon, ce serait dommage de parler de Rio Grande (ou du Massacre de Fort Apache), sans évoquer:
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