The Fabelmans (Steven Spielberg - 2022)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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Alexandre Angel
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Re: The Fabelmans (Steven Spielberg - 2022)

Message par Alexandre Angel »

tchi-tcha a écrit : 1 mars 23, 04:13 (la fraîcheur formelle, on va dire que là encore c'est à cause de ton divorce, parce que c'est quand même la marque de fabrique de Spielberg depuis cinquante ans)
C'est sur cette phrase que je me permettrais d'insister parce que pour ce qui l'entoure, en lien avec ce que tu me quotes, on dit peu ou prou les mêmes choses.

Ce que j'appelle "fraîcheur" n'est pas la marque de fabrique de son cinéma. Je pense que tu confonds "perfection artisanale" avec "fraîcheur". La "fraîcheur", dans ce cas pour moi, c'est cette perfection doublée d'un délié sobre, précis dans ces effets. Une netteté de trait dont seule l'expérience, et là je suis obligé de brandir le demi-siècle de pratique du réalisateur au sein des studios, permet le surgissement. J'ai aimé The Fabelmans parce qu'il fait montre d'une aisance, d'un naturel, d'un concentré d' absence d'épate que je ne trouve pas si éclatants dans la filmographie antérieure.
Flol, quelque part plus haut, a dit un truc qui m'a interpellé : il a enfin trouvé rien à redire à la photo de Kaminski. J'abonde dans ce sens : l'image du film m'a parue là encore d'une netteté, d'une douceur en termes de colorimétrie extrêmement séduisantes, riches, jamais dégoulinantes. L'œil est à la fois stimulé et reposé. La séduction ne se contente pas de la surface de l'écran, elle s'immisce plus en profondeur, scintille, presque cristalline. C'est le regard d'un cinéaste qui se pose, et le point de vue est celui du temps qui passe, de la vieillesse naissante. C'est assez émouvant à voir.
Et, pour en revenir aux caïds, je persiste et signe. Pour un peu toutes ces raisons, les clichés vus mille fois des mecs qui cherchent les crosses en tapant sur les armoires métalliques des vestiaires me paraissent rafraîchis par la manière apaisée et en même temps pleine d'assurance de Spielberg.
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tenia
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Re: The Fabelmans (Steven Spielberg - 2022)

Message par tenia »

tchi-tcha a écrit : 1 mars 23, 04:13Un arrière-fond à la rigueur, mais ils ne racontent pas la même chose. Si G.T.O fait du James Gray un anti-Fabelmans, c'est parce qu'ils n'abordent pas le genre autobiographique sous le même angle, radicalement.
Ce qui est précisément ce que je dis : même genre, même pitch, mêmes thématiques traversés, grosse différence de traitement.
Ce n'est quand même pas comme si on était en train de comparer avec Bohemian Rhapsody (un biopic lui aussi), on parle de 2 réal' qui tardivement couchent eux-mêmes leur enfance/adolescence chaotique au sein d'une famille dysfonctionnelle.
Le traitement n'est pas le même. Oui. C'est ce que je répète depuis le début, et qui me fait dire que je trouve le Spielberg ultra-sirupeux, et que ceux qui trouvent son traitement assez neutre doivent avoir pris le Gray pour du Haneke en comparaison.
Oui, la famille n'explose pas chez Gray, mais on ne parle pas non plus, loin de là, d'une famille unie, bien au contraire : père colérique, mère effacée (et malade), grand-père qui se renie face à la société.

Ca ne veut pas dire qu'ils sont les remakes l'un de l'autre pour autant, hein (d'ailleurs, l'un se passe en 1980 et pas l'autre ! :shock: ).

Mais je vais arrêter là sur ce sujet, ce Spielberg est clairement pas la colline sur laquelle je mourrai.
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tchi-tcha
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Re: The Fabelmans (Steven Spielberg - 2022)

Message par tchi-tcha »

Alexandre Angel a écrit : 1 mars 23, 07:47 Je pense que tu confonds "perfection artisanale" avec "fraîcheur"
Non, je ne confonds rien. C'est impossible pour une raison simple : je ne me trompe jamais (c'est mon côté halfordien).

Chez Spielberg, ça fait longtemps que la "perfection artisanale" est passée au stade industriel. Depuis au moins... depuis... euh...
- Depuis "Duel" ? :idea:
- Oui, voilà, depuis "Duel." Merci AtCloseRange.

Je pense tout bêtement qu'après avoir si soigneusement mis en scène ta réconciliation (au point d'éveiller les soupçons de G.T.O), tu es en pleine seconde lune de miel avec tonton Steven. Tu redécouvres des choses qui n'ont pas attendu cinquante ans de métier pour apparaître dans son cinéma.

Alexandre Angel a écrit : 25 janv. 23, 15:05 ...comme je l'ai souvent mentionné, je n'aime pas, dans l'ensemble, le cinéma de Spielberg (mais, tout ça n'est pas sans ambiguïtés car il ne s'agit pas de détestation ou d'allergie, loin de là). Et c'est de justesse que les choses se sont un peu décantées depuis une bonne quinzaine d'années.
Voilà, tu es en pleine seconde lune de miel. Et j'ajoute ça sincèrement sans arrière pensée : je t'envie, petit veinard :P
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Alexandre Angel
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Re: The Fabelmans (Steven Spielberg - 2022)

Message par Alexandre Angel »

tchi-tcha a écrit : 1 mars 23, 13:03 Chez Spielberg, ça fait longtemps que la "perfection artisanale" est passée au stade industriel.
Oui, voilà, d'où cette fraîcheur bienvenue :D
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Re: The Fabelmans (Steven Spielberg - 2022)

Message par mintaka »

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Alexandre Angel
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Re: The Fabelmans (Steven Spielberg - 2022)

Message par Alexandre Angel »

Tout écouté, merci!
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Re: The Fabelmans (Steven Spielberg - 2022)

Message par Mosin-Nagant »

Je pense le revoir une seconde fois, tellement j'ai aimé.
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Re: The Fabelmans (Steven Spielberg - 2022)

Message par Watkinssien »

Alexandre Angel a écrit : 4 mars 23, 18:10 Tout écouté, merci!
Bravo à toi, j'ai tenu 1 minute 30 à peu près... :mrgreen:
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Boubakar
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Re: The Fabelmans (Steven Spielberg - 2022)

Message par Boubakar »

Mosin-Nagant a écrit : 4 mars 23, 21:38 Je pense le revoir une seconde fois, tellement j'ai aimé.
Du coup, j'ai commandé le bluray US pour le revoir bientôt :)
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Alexandre Angel
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Re: The Fabelmans (Steven Spielberg - 2022)

Message par Alexandre Angel »

Watkinssien a écrit : 5 mars 23, 01:04
Alexandre Angel a écrit : 4 mars 23, 18:10 Tout écouté, merci!
Bravo à toi, j'ai tenu 1 minute 30 à peu près... :mrgreen:
C'est dommage parce qu'il y a matière à répondre point par point et les pistes lancées sont intéressantes: tout ce qui a trait à la supposée ou avérée autocélébration spielbergienne, l'autisme du réalisateur, sa non-fréquentation d'autres filmographies, son désintérêt pour la contextualisation.. Les pistes sont exploitables et propices à la contradiction, à la discussion..
Mais dès le départ, quelque chose est biaisé puisqu'il est immédiatement posé que The Fabelmans est un mauvais film ("Ce n'est pas la première fois qu'il y a unanimité critique autour d'un film mais c'est la première fois qu'il y a unanimité critique autour d'un mauvais film").
D'emblée, prends ça dans les dents. Assignation express à résidence .
Je m'étonne tout de même qu'à aucun moment, les intervenants ne dépassent le stade du procès d'intention ("Spielberg nous dit que.." "Spielberg nous dit que..""Spielberg veut montrer que..") pour un tant soit peu parler cinéma. Je n'ai entendu aucune remarque, aucune considération sur la forme (à part la mention des sempiternels éclairages venant de l'extérieur).
On est complètement dans cette tendance contemporaine à la classification verticale formatée sur une grille de lecture qui semble déjà prédigérée, pré-pensée. Comme la conséquence d'un désenchantement au sens littéral du terme .
Après, je pense en effet qu'il y a quelque chose, non pas de louche, mais de légèrement psychanalytique (collectivement parlant) dans cette unanimité pour un film que je ne prends absolument pas, personnellement, pour un chef d'œuvre mais qui m' a néanmoins beaucoup plu.
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Re: The Fabelmans (Steven Spielberg - 2022)

Message par Mosin-Nagant »

Boubakar a écrit : 5 mars 23, 08:58Du coup, j'ai commandé le bluray US pour le revoir bientôt :)
Je reçois ça mercredi. :wink:
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Re: The Fabelmans (Steven Spielberg - 2022)

Message par Boubakar »

Mosin-Nagant a écrit : 5 mars 23, 12:14
Boubakar a écrit : 5 mars 23, 08:58Du coup, j'ai commandé le bluray US pour le revoir bientôt :)
Je reçois ça mercredi. :wink:
Pareil (via Metaluna) : je ne peux plus le voir en salles qu'il n'y a que des séances en Vf, mais je me languis de le revoir.
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Re: The Fabelmans (Steven Spielberg - 2022)

Message par MJ »

Alexandre Angel a écrit : 5 mars 23, 11:19 Après, je pense en effet qu'il y a quelque chose, non pas de louche, mais de légèrement psychanalytique (collectivement parlant) dans cette unanimité pour un film que je ne prends absolument pas, personnellement, pour un chef d'œuvre mais qui m' a néanmoins beaucoup plu.
Bégaudeau fait aussi en partie de la critique de la critique : je trouve également cette unanimité assez stupéfiante pour un film que je considérerais même pas médiocre mais simplement faible globalement (et effectivement porté sur l'auto-hagiographie rétrospective). Ca doit en grande partie valoir au fait que Spielberg (avec le fait de s'ériger en future Statue du Commandeur d'un art de masses) en se glorifiant lui-même, glorifie un médium et son relai (la salle) qui ne se portent pas bien en ce moment... à tout le moins à l'endroit des chiffres (ce qui a toujours préoccupé un tel entertainer). Paradoxalement, c'est l'aspect publicitaire (de biographie autorisée) de la démonstration qui finit par attraper par les sentiments. Ca me fait l'effet inverse et je comprends que ce soit a-fortiori le cas pour quelqu'un de déjà pas très stimulé par ce réalisateur au départ.
(Procès d'intention : j'ai de la peine à ne pas penser que quand les Cahiers se lancent dans une défense acharnée du film, il n'y a pas un oeil qui est gardé vers les chiffres de vente du magazine.)
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Re: The Fabelmans (Steven Spielberg - 2022)

Message par Alexandre Angel »

MJ a écrit : 5 mars 23, 15:31 Paradoxalement, c'est l'aspect publicitaire (de biographie autorisée) de la démonstration qui finit par attraper par les sentiments. Ca me fait l'effet inverse et je comprends que ce soit a-fortiori le cas pour quelqu'un de déjà pas très stimulé par ce réalisateur au départ.
Oui mais les arguments des intervenants sont faibles, ce qui, je trouve, démontre une certaine mauvaise foi, une volonté d'apparaître comme en opposition (c'est humain) par rapport au courant général. Ils occultent réellement le travail formel du film pour ne se concentrer que sur le présupposé que Spielberg veuille absolument donner une clé de compréhension à son œuvre. Je ne dis pas que c'est infondé mais en quoi ça en fait un mauvais film? Pour me résumer, j'ai le sentiment qu'ils disent "Spielberg veut ceci ou cela donc c'est mauvais". Je veux bien mais ils ne me le démontrent pas.
Et puis il y a des contradictions : un intervenant dit que son Spielberg préféré est La Liste de Schindler et fustige in fine l'absence d'intérêt du réalisateur pour tout contexte historico-sociétal (tu me diras , c'est peut-être pas le même). Mais bon, ils ne forment qu'une seule voix. A un autre moment, on entend que finalement son préféré, c'est peut-être Les Aventuriers de l'Arche perdue, pour son côté "train électrique" assumé.
A juste titre, un d'eux loue la séquence (en effet intéressante) où on oblige Mitzi à se couper les ongles. Il pourrait très bien dire un truc du genre "Voilà la seule chose que je sauverais mais qui s'avère insuffisante à relever le niveau". Non, même pas, il n'exploite pas l'illustration qu'il propose dans le sens d'une démonstration que le film serait mauvais, par effet repoussoir, en tout cas guère plus que ça ne l'avait été fait dans l'émission jusqu'alors.
Quant à la scène avec John Ford, où est le problème que les deux cinémas soit antinomiques, que les propos de Ford sur l'horizon soit relativement abscons ? C'est le charme de l'anecdote qui compte et le plaisir qu'à Spielberg de la restituer.
Pour encore me résumer, ces intervenants m'incitent, pour reprendre ta formulation, à faire de la critique de la critique plutôt que réévaluer le plaisir que j'ai pris à voir le film.

Quant à ta remarque sur Les Cahiers du Cinéma, ils revisitent régulièrement Spielberg depuis une douzaine d'années. Ils avaient mis Batman, de Tim Burton en couv à l'automne 1989. Positif n'aurait jamais fait une chose pareille. Là, Positif met également The Fabelmans à l'honneur (c'est l'unanimité qu'on vous dit :mrgreen: ) donc sur l'aspect "racolage", rien ne me choque particulièrement.
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Re: The Fabelmans (Steven Spielberg - 2022)

Message par MJ »

Alexandre Angel a écrit : 5 mars 23, 16:40 Quant à ta remarque sur Les Cahiers du Cinéma, ils revisitent régulièrement Spielberg depuis une douzaine d'années.
La dernière couv' à son sujet devait sauf erreur être celle en 2012 et c'était dans un numéro qui faisait de la critique de fond ("les bons et moins bons côtés" pour aller vite), pas du dithyrambe. Mais je pousse au HS, là.

EDIT : Il y en a eu une pour The Post aussi (la presse papier célèbrant la presse papier, une dynamique voisine).
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