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Re: Top des meilleurs réalisateurs du XXIème siècle
Publié : 15 juin 22, 17:07
par Lohmann
Supfiction a écrit : ↑15 juin 22, 17:00
Lohmann a écrit : ↑15 juin 22, 16:56
L'ami de Tchi-tcha dans la vidéo partagée par Flol conclue sa vision sur le futur du cinéma en estimant qu'il n'y a peut-être jamais eu autant de réalisateurs d'importances que de nos jours, et je suis pas loin d'être d'accord avec lui. Après il faut oser sortir des circuits classiques.
Fais toi plaisir.
J'ai pas encore fini mes tops par décennies (me manque justement les deux de ce siècle)

Re: Top des meilleurs réalisateurs du XXIème siècle
Publié : 5 juil. 22, 17:04
par Lohmann
Sans ordre et au doigt mouillé (avec lacunes et passe-droit)
Hong Sang-Soo
Ryusuke Hamaguchi
Nadav Lapid
Ruben Ostlund
Miguel Gomes
Bruno Dumont
Abdellatif Kechiche
Frederick Wiseman
Paul Thomas Anderson
M. Night Shyamalan
Re: Top des meilleurs réalisateurs du XXIème siècle
Publié : 6 juil. 22, 15:24
par Supfiction
Lohmann a écrit : ↑5 juil. 22, 17:04
Nadav Lapid
Comment expliques tu les choix surprenants de mouvements de caméra dans cette scène du Genou d’ahed ? (
Ça me rappelle ma façon de filmer quand je me suis payé mon premier caméscope sony hi8 en 1991).

Re: Top des meilleurs réalisateurs du XXIème siècle
Publié : 6 juil. 22, 15:41
par Lohmann
Supfiction a écrit : ↑6 juil. 22, 15:24
Lohmann a écrit : ↑5 juil. 22, 17:04
Nadav Lapid
Comment expliques tu les choix surprenants de mouvements de caméra dans cette scène du Genou d’ahed ? (
Ça me rappelle ma façon de filmer quand je me suis payé mon premier caméscope sony hi8 en 1991).
Excellente question, qui me permet donc de dégainer ma prose.
- Spoiler (cliquez pour afficher)
- Pas sûr que ceux qui étaient restés sur le bord de la route pour son précédent film réussissent à raccrocher les wagons pour ce nouvel opus de Nadav Lapid. Non pas que la prestation de l'acteur principal soit aussi clivante (Avshalom Pollak est beaucoup plus sobre que Tom Mercier), mais parce que la mise en scène n'a rien perdu de sa radicalité. Entre mouvements de caméras verticaux ou circulaires abruptes et montage aux coutures exacerbées à la limite de l'abstraction, elle cultive un sentiment de continuelle rupture, qui colle à la psyché de son personnage principal (nouvel alter ego du réalisateur), qui tel un papillon de nuit face à une ampoule allumée se débat dans la désert de l'Arabah sous une lumière aveuglante. Elle en déconcertera (voir plus) nécessairement certains, et pourtant loin d'être gratuite sa nature profonde est peut-être à chercher du côté de la séquence d'ouverture de Journal d'un photographe de mariage (première scène qui correspond au premier film que le réalisateur a tourné, où ne sachant se servir de sa caméra il inverse lancement et arrêt de l'enregistrement), celle qui nous montre à voir un film totalement raté où l'on ne distingue que plafond et corps tronqués mais que son réalisateur considère comme son meilleur car le plus foncièrement véridique. C'est donc dans les interstices, à la jointure des plans (ce qui explique les changement brutaux des angles de prises de vues) et en malmenant son sujet que Lapid espère en saisir les fondements.
Dans Synonymes la France (terre d'accueil) et Israël (terre natale) étaient renvoyés dos-à-dos, l'un pour son racisme systémique et ses accès de virilisme, l'autre pour l'hypocrisie de son discours intégrateur. Dans Le Genou d'Ahed, de retour dans le pays de ses parents (sa mère, atteinte du cancer, est en train de mourir), Y. ne pourra échapper à la confrontation, que ce soit avec son passé ou le présent d'une administration nationaliste et castratrice. Rapport plus ambigu qu'il n'y parait, où les forces d'attraction et de répulsion semblent de même force (voir la scène dont est tiré le photogramme ci-dessus, l'une des plus belles du film, qui fait surgir d'une mise en scène éclatée une profonde sensualité). Parce que, et c'est la toute la beauté du film de Lapid, dont la sincérité apparaît indiscutable, il reconnaît que le monstre étatique à nécessairement infusé dans chaque citoyen, lui le premier. L'anecdote survenue lors de son service militaire qu'il compte à Yahalom est de ce point de vue éclairante, tant on est incapable de définir s'il y a joué le rôle de victime, de témoin ou de bourreau. Elle dresse également un pont avec un autre réalisateur israélien, qui dans Pour un seul de mes deux yeux vient dans les vestiges de Massada questionner les touristes juifs. Du suicide collectif des zélotes face à l'armée romaine à celui d'une petite unité sur le plateau du Golan face à l'armée syrienne, l'histoire ne fait que se répéter. Mais de Mograbi il partage aussi une même rage, celle de ne pas vouloir accepter le tournant autoritaire de la politique israélienne, qui humilie chaque jour un peu plus ses voisins palestiniens (Le Genou d'Ahed est d'ailleurs l'histoire d'un film qui ne se fera probablement pas, sur l'histoire d'une palestienne qui avait giflé un soldat, assignée à résidence, sentence trop clémente pour un député de la Knesset qui recommandait qu'on lui tire une balle dans le genou). Rage qui explosera suite à la projection du film de Y., dans une séquence qui pourrait rappeler celle quasi similaire dans The Square.
Film profondément mal-aimable, excessif, outrancier, mais tout autant débordant de vitalité et profondément nécessaire. Espérons que Nadav Lapid ne s'assagisse pas de sitôt.