Je connais mal Ozu. J'ai vu les dvd édités par Arte mais, à l'exception de BONJOUR, je n'ai pas trop accroché à ces films. Peut-être parce que BONJOUR a été le premier Ozu que j'ai vu? Je ne sais pas, cela fait déjà quelques années. En tout cas, les films suivants que j'ai pu voir, s'ils ne m'intéressaient guère - peut-être, en fait, à cause de leur rythme trop lent - me paraissaient de toutes façons assez intéressants, ne serait-ce que formellement, car j'ai persévéré et vu les 5 dvd Arte et que je m'attèle maintenant aux Carlotta.
Ce OU SONT LES RÊVES DE JEUNESSE est déjà révélateur de l'oeuvre globale d'Ozu, portée sur la mélancolie du temps qui passe (c'est formulé à peu près dans ces termes dans un des bonus des dvd d'Arte). Ici on a deux univers: celui de l'université et celui du travail en entreprise. Chacun représente une époque de la vie: la jeunesse naive qui ne pense qu'à s'amuser, et le monde des adultes, du travail. Car notre héros est au début un étudiant paresseux, un cancre. Ses amis proches le sont également et ils forment un groupe uni et égal. Notre héros est alors propulsé patron de société remplaçant son père décédé et quittant l'université. Il voit ensuite revenir ses anciens amis, perdus de vue depuis 1 an, et qui recherchent du travail. A ce moment-là, comme l'indique l'intertitre, notre patron a encore des allures d'étudiant. Il a encore un pied dans son ancien monde (la jeunesse). Pour preuve, dans un premier temps il accueille ses amis et reproduit les processus de tricherie pour des examens d'entrée dans sa société. On est encore dans l'ambiance estudiantine où ils n'hésitent pas à cacher des antisèches.
Seulement la jeunesse et son insouciance sont terminées. Il faut maintenant gagner sa vie et cela va éloigner inconsciemment le groupe d'amis. Le seul des 4 à avoir "réussi" c'est le nouveau PDG. Les autres ne sont plus égaux avec lui (comme du temps de la fac) car ils vont se soumettre à son statut de patron pour garder leur emploi. Le personnage le plus représentatif est le cancre amoureux qui va voir son ami pdg séduire la femme qu'il convoite. A propos de ce personnage, il est peut-être aussi la représentation du pays, alors en crise et tributaire du commerce et du capitalisme (on le voit constamment courbé, retenu, muet). Je me suis posé cette question mais en fait je n'en sais rien...
J'ai été très surpris par ces scènes comiques presque potaches, en tout cas amusantes. On a aussi plein de détails comiques, pas seulement entre les jeunes amis. On peut noter par exemple cet employé de l'entreprise, visiblement très lèche-bottes, qui montre son constant accord avec le discours du sous-directeur. On remarque aussi qu'ils sont tous les deux habillés pareil (pas besoin de savoir qui a copié sur l'autre

J'ai bien aimé ce film muet. En reprenant une thématique dont on parle ici, j'ai peut-être trouvé que le récit était très occidental en fait. En tout cas ça m'a bien captivé, ce qui est déjà pas mal...
A propos du master: ce n'est pas parfait mais j'ai trouvé le tout très agréable à suivre. Ce qui surprend c'est d'abord la propreté de l'image. Peu de poussières et de tâches. Le contraste est très mou. Cela n'aurait pas été difficile d'arranger ça mais bon, tant pis. Ici les noirs sont tout le temps gris. Gris/vert d'ailleurs car il y a une légère dominante verte qui s'arrête 12mn avant la fin (ça se remarque à l'oeil). Ensuite les blancs sont aussi très mous. Ca ne brille pas beaucoup, quoi. La luminance des images est en plus assez instable.
Le détail le plus gênant est l'instabilité de l'image. Ca sautille pas mal pendant la première moitié du film. Ca peut agacer certains.
Très beau packaging par contre et très jolies jaquettes. Je suis rarement aussi séduit sur ce point avec Carlotta (ils sont surtout balèzes sur les contenus).