Il me semble que tu as du vivre une malheureuse expérience comme par exemple se sentir obligé d'apprécier un film considéré comme une oeuvre maîtresse mais à laquelle tu n'adhérais pas réellement.
Je veux essayer de comprendre la distinction que tu fais entre ces deux types de films. Il existe en effet une distinction, mais elle est d'une autre nature pour moi et mon avis correspondrait peu ou prou à celui de David Locke.
Les premiers films sont des oeuvres plus simples
en apparence, jouant plus sur une dialogue direct avec le spectateur plutôt que sur des motifs abstraits, une narration éclatée ou un sous-texte très travaillé. Mais moi, je n'établirai pas de hiérarchie qualitative. En disant par exemple que les seconds sont supérieurs aux premiers. L'important est de considérer ce que les films se proposent d'être. Les uns et les autres deviennent des "films importants" parce qu'ils sont le fruit d'une grande inventivité, parce qu'ils ont su modeler le matériau filmique dans la direction voulue, et enfin parce qu'ils ont laissé une empreinte indélébile dans l'imaginaire du spectateur.
Maintenant c'est la sensibilité personnelle qui poussera tel ou tel à se reconnaître plus dans le premier type de films ou le second. D'ailleurs on peut s'y retrouver dans les deux, ce qui est mon cas. Par ailleurs, certains cinéastes ont oeuvré dans ces deux types de "catégorie" : Fellini par exemple. Tu peux ranger
La Strada ou
Il bidone dans la premiere catégorie et
8 et 1/2 ou
Casanova dans la seconde. Il y a des "felliniens" amateurs de ses premiers films et contempteurs des seconds et vice-versa (comme on peut aimer les deux, ce qui est toujours mon cas

).
Je comprends très bien qu'un jeune spectateur voit d'emblée plus de richesses dans la seconde catégorie de films, car ces films se livrent moins facilement et semblent porteurs de secrets qu'il est toujours plaisant de percer. Mais il ne faudrait pas passer à côté des richesses formelles et thématiques peut-être plus discrètes (tapies derrière une narration ultra classique) de la première "catégorie" de films.
Quant aux influences des critiques célèbres comme Daney et leurs répercussions historiques, je ne les nie pas. Personnellement, je suis dans le cas de Jeremy Fox : j'ai découvert leurs articles après avoir savouré les films, et si ces articles m'ont ouvert l'esprit sur certaines caractéristiques de ces films que je n'avais pas perçues, et bien c'est tant mieux. Pour finir, je te dirai qu'on a beaucoup plus déliré sur
2001 ou
La nuit du chasseur que sur
Rio Bravo ou
Moonfleet puisqu'il semble que tu as été gêné par les digressions analytiques de certains critiques.