Je voulais quand même te répondre sur ce point passionnant.Ender a écrit : ↑19 oct. 23, 15:23 Quant au regret que le film ne tire pas plus vers le western, et la forme vers la grandeur opératique : ce film-là, Scorsese l'a déjà fait, il s'appelait alors Michael Cimino.
La Porte du paradis est sans doute le film le plus parent de ces Killers. Mêmes effluves de nettoyage ethnique, de génocide, même affleurement d'une nausée d'Amérique. Cimino l'a traitée par la grande forme, le crime suprémaciste comme la véritable épopée américaine. A côté, on peut trouver Scorsese plus prudent, moi je le trouve plutôt très méticuleux. C'est un de ces films dont l'intérêt repose dans le sujet, le caractère hallucinant des événements relatés, et je suis content que Scorsese n'ait pas senti la nécessité de les redoubler d'une emphase de la forme : tentation paysagiste, subversion d'un genre ou autres. Cette ambition, Cimino l'a courageusement menée à son terme, de sorte que quarante ans plus tard chez Scorsese, on puisse s'en tenir à essayer de regarder des faits en face. A la limite, je regrette que Scorsese n'ait pas poussé encore plus loin la tendance didactique de son film. Plus de contexte, plus de dossier.
J'ai évidemment pensé à La Porte du Paradis (et Scorsese aussi à coup sûr) lors d'une scène de danse où Blancs et Rouges semblent s'amuser dans la plus parfaite concorde, scène qui peut renvoyer à la séquence des patins à roulette dans le Cimino.
On peut aussi imaginer que si David Mansfield et TBone Burnett n'avaient pas été de la partie chez Cimino, ça aurait tout aussi bien pu être Robbie Robertson tant il y a là communion de sensibilité musicologique.
Mais là où le Scorsese a un peu menacé de me décevoir (je ne vais pas recommencer : on en est loin même si je ne suis pas encore sûr de mon acheminement vers l'extase), c'est justement dans le fait que Killers, à la limite, n'est pas assez parent avec le Cimino, même dans un esprit de contrepied qui constituerait l'apport en surprise de ce dernier Scorsese. Apport qui m'a paru faire défaut dans la dernière ligne droite du film, avant son très beau final.